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douleur de Marie-Antoinette fut profonde et dura plusieurs jours; rien ne pouvait la consoler de la perte de tant d'innocentes victimes; elle en parlait, en pleurant, à ses dames, lorsqu'une d'elles, cherchant sans doute à la distraire, lui dit qu'un grand nombre de filoux avaient été trouvés parmi les cadavres, que leurs poches étaient remplies de montres et d'autres bijoux. « Ils ont » été au moins bien punis, ajouta la per>> sonne qui racoñtait ces détails. Oh ! » non, non Madame, reprit la dau>>phine, ils sont morts à côté d'honnêtes » gens. >>

?

En passant par Reims, à son arrivée de Strasbourg : « Voilà, dit-elle, la ville de » France que je désire revoir le plus tard » possible. >>

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La dauphine avait apporté de Vienne une grande quantité de diamans blancs; le roi y ajouta le don des diamans et des perles de la feue dauphine, et lui remit aussi un collier de perles d'un seul rang dont la plus petite avait la grosseur d'une aveline, et qui, apporté en France par Anne d'Autriche,

avait été substitué, par cette princesse aux reines et dauphines de France (1).

Les trois princesses, filles de Louis XV, se réunirent pour lui offrir de magnifiques présens. Madame Adélaïde donna en même temps à la jeune princesse une clé des corridors particuliers du château, par lesquels, sans aucune suite, et sans être aperçue, elle pourrait parvenir jusqu'à l'appartement de ses tantes, et les voir en particulier. La dauphine leur dit avec infiniment de grâce, en prenant cette clé, que pour lui faire apprécier toutes les choses superbes qu'elles voulaient bien lui donner, il n'eût pas fallu, en même temps, lui en offrir une d'un prix inestimable, puisqu'elle devrait à cette clé une intimité et des conseils si précieux pour son âge. Elle s'en servit en effet bien souvent; mais madame Victoire seule l'autori

(1) Je cite particulièrement ce collier, parce que la reine crut devoir, malgré cette substitution, le remettre aux commissaires de l'Assemblée nationale, quand ils vinrent dépouiller le roi et la reine des diamans de la couronne.

(Note de madame Campan. )

sait, tant qu'elle fut dauphine, à rester familièrement chez elle; madame Adélaïde ne pouvait vaincre ses préventions contre les princesses autrichiennes, et était ennuyée de la gaieté un peu pétulante de la dauphine; madame Victoire s'en affligeait, et sentait que leur société et leurs avis eussent été bien utiles à une jeune personne destinée àne rencontrer que des complaisans ou des flatteurs. Elle chercha même à lui faire trouver de l'agrément dans la société de madame la marquise de Durfort, sa dame d'honneur et sa favorite. On donna plusieurs fêtes agréables chez cette dame la comtesse de Noailles et l'abbé de Vermond s'opposèrent bientôt à ces réunions.

L'événement arrivé à la chasse, près du village d'Achères, dans la forêt de Fontainebleau, donna à la jeune princesse l'occasion de développer son respect pour la vieillesse et sa sensibilité pour l'infortune. Un paysan très-âgé est blessé par le cerf; la dauphine s'élance hors de sa calèche, y fait placer le paysan avec la femme et ses enfans, fait reconduire sa famille jusqu'à sa

chaumière, et la comble de tous les soins et de tous les secours nécessaires. Son cœur était toujours prêt à éprouver les émotions de la compassion; et dans ces circonstances, l'idée de son rang n'arrêtait jamais les effets de sa sensibilité. Plusieurs personnes de son service entraient un soir dans sa chambre, croyant n'y trouver que l'officier de garde (1); elles aperçoivent la jeune princesse assise à côté de cet homme déjà avancé en âge; elle avait placé auprès de lui une jatte pleine d'eau, étanchait le sang qui sortait d'une blessure qu'il avait à la main, après avoir déchiré son mouchoir pour lui faire des compresses, et remplissait enfin auprès de lui toutes les fonctions d'une pieuse fille de la charité. Le vieillard, attendri jusqu'aux larmes, laissait par respect agir son auguste maîtresse. Il s'était blessé en voulant avancer un meuble un peu lourd que la princesse lui avait demandé.

(1) On appelait officiers de l'intérieur les valets de chambre et les huissiers.

(Note de madame Campan. )

Au mois de juillet 1770, un événement fâcheux, arrivé dans une famille que la dauphine honorait de ses bontés, contribua à montrer encore, non-seulement sa sensibilité, mais la justesse de ses idées. Une de ses femmes avait un fils officier dans les gendarmes de la garde; ce jeune homme se crut offensé par un commis de la guerre ; un cartel en forme fut imprudemment envoyé : il tua son adversaire dans la forêt de Compiègne: la famille du jeune homme tué, munie du cartel, demanda justice. Le roi, affligé de plusieurs duels qui venaient d'avoir lieu, avait malheureusement prononcé qu'il n'accorderait point de grâce au premier événement de ce genre dont on pourrait donner la preuve; le coupable fut arrêté. Sa mère, dans le désordre de la plus grande douleur, courut se jeter aux pieds de la dauphine, du dauphin et des jeunes princes; ils obtinrent du roi, après une heure de prière, la grâce tant désirée. Le lendemain, en félicitant madame la dauphine, une grande dame, qui s'était sûrement laissé prévenir contre la mère du gendarme, eut la méchan

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