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de tous les principes de la philosophie moderne, et cependant tenant plus qu'aucun ecclésiastique à la hiérarchie du clergé, vain, bavard, fin et brusque à la fois, fort laid et affectant l'homme singulier; traitant les gens les plus élevés comme ses égaux, quelquefois même comme ses inférieurs, l'abbé de Vermond recevait des ministres et des évêques dans son bain; mais disait en même temps que le cardinal Dubois avait été un sot; qu'il fallait qu'un homme de sa sorte, parvenu au crédit, fit des cardinaux et refusat de l'être.

Enivré de la réception que la cour de Vienne lui avait faite, n'ayant rien vu de grand avant cette époque, l'abbé de Vermond n'admirait et n'estimait que les usages de la famille impériale; il ne cessait de tourner en dérision l'étiquette de la maison de Bourbon; la jeune dauphine était sans cesse excitée par ses sarcasmes à s'en dé

coucheur qui le fut de la reine, l'abbé de Vermond, quand il était chez Sa Majesté, n'appelait jamais son frère que M. l'accoucheur, en lui adressant la parole.

(Note de madame Campan.)

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gager, et ce fut lui qui, le premier, lui fit supprimer une infinité d'usages dont il net jugeait ni la sagesse ni le but politique. Tel est le portrait exact de cet homme que l'étoile funeste de Marie-Antoinette lui avait réservé pour guider ses premiers pas sur un théâtre aussi éminent et aussi dangereux que celui de la cour de. Versailles.

On trouvera peut-être que je peins sévèrement le caractère de l'abbé de Vermond; mais comment pourrais-je voir sous des couleurs favorables un homme qui, après s'être arrogé le rôle important de confident et de conseiller unique de la reine, la dirigea avec si peu de prudence, et nous donna la douleur de voir cette princesse mêler à des qualités qui faisaient le charme de tout ce qui l'environnait, des torts qui nuisaient à sa gloire et à son bonheur? Quand volontairement un homme s'empare de devoirs aussi importans, le succès complet peu seul légitimer son ambition.

Tandis que M. de Choiseul, satisfait du sujet que M. de Brienne lui avait présenté,

l'envoyait à Vienne avec tous les éloges faits pour inspirer une confiance illimitée, le marquis de Durfort faisait partir un valet de chambre coiffeur et quelques módes françaises, et l'on crut avoir pris des précautions suffisantes pour former une princesse destinée au trône de France.

Tout le monde sait que le mariage de monseigneur le dauphin avec l'archiduchesse avait été arrêté à l'époque de la puissance du duc de Choiseul. La procuration pour la cérémonie du mariage fut donnée au marquis de Durfort qui devait remplacer dans l'ambassade de Vienne le baron de Breteuil; mais six mois après le mariage du dauphin, le duc de Choiseul fut disgracié, et mesdames de Marsan et de Guéménée, qui se trouvèrent plus puissantes par la disgrâce du duc, firent donner cette ambassade au prince Louis de Rohan, depuis cardinal et grand-aumonier.

La Gazette de France suffit donc pour répondre aux libellistes ignorans qui ont osé dire que la jeune archiduchesse avait connu le cardinal de Rohan avant l'époque

de son mariage. On ne pouvait faire un choix plus mauvais en lui-même et plus désagréable à Marie-Thérèse, qu'en lui envoyant, comme ambassadeur, un homme aussi léger et aussi immoral que l'était le prince Louis de Rohan. Il n'avait que de faibles teintures en tous genres, et ignorait tout ce qui peut servir à la diplomatie. Sa réputation l'avait précédé à Vienne, et sa mission s'entama sous les auspices les plus défavorables. Manquant d'argent, et la maison de Rohan ne pouvant lui faire de grandes avances, il obtint de sa cour un brevet qui l'autorisait à emprunter sur ses bénéfices la somme de 600,000 liv., s'endetta de plus d'un million, et crut éblouir la ville et la cour de Vienne par le luxe le plus indécent et en même temps le plus mal entendu. Il s'était attaché huit ou dix gentilshommes portant d'assez beaux noms, douze pages également bien nés, une foule d'officiers et de valets, une musique de chambre, etc. Mais ce vain éclat ne fut pas durée ; l'embarras et la détresse ne tardèrent pas à se faire remarquer; ses gens

de

n'étant plus payés, abusèrent, pour faire de l'argent, du privilége des franchises, et firent la contrebande (1) avec tant d'impudeur que Marie-Thérèse, pour la faire cesser et ménager la cour de France, fut obligée de supprimer les franchises de tout le corps diplomatique, ce qui rendit la personne et la conduite du prince Louis odieuses dans toutes les cours étrangères. Il obtenait rarement des audiences particulières de l'impératrice, qui ne l'estimait pas et s'exprimait sans ménagement sur sa conduite comme évêque et comme ambassadeur (2).

(1) J'ai souvent entendu raconter à la reine qu'il s'était vendu, en un an, dans le secrétariat du prince de Rohan, à Vienne, plus de bas de soie qu'à Lyon et â Paris. (Note de madame Campan.) (2) Ce prélat, vain, léger, dissipateur, avait près de lui, pour conseil et pour secrétaire d'ambassade, un homme capable, adroit, rusé, instruit, laborieux : c'était un jésuite. L'abbé Georgel jouissait de toute la confiance du prince de Rohan, et la méritait par son dévouement et son habileté. Une circonstance singulière, romanesque, et qu'il a racontée lui-même dans des Mémoires un peu longs, mais souvent curieux, lui découvrit les secrets de la cour de Vienne. On trouvera dans les Éclaircissemens le récit de cette anecdote :

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