Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

fans d'après les choses essentielles qui avaient été négligées dans la sienne. MarieThérèse, imposante par ses grandes qualités, inspirait aux archiduchesses plus de crainte et de respect que d'amour; c'est au moins ce que j'ai remarqué dans les sentimens de la reine pour son auguste mère; aussi désirait-elle ne jamais établir entre elle et ses enfans cette distance qui avait existé dans la famille impériale. Elle en citait un effet funeste et qui lui avait fait une impression si forte que le temps n'avait l'effacer. Lorsque l'empereur Joseph II perdit sa femme, elle lui fut enlevée en peu de jours par une petite vérole de la plus mauvaise qualité. Son cercueil venait d'être déposé dans le caveau de la famille impériale. L'archiduchesse Josèphe, accordée au roi de Naples, au moment de quitter Vienne, reçut de l'impératrice l'ordre de ne point partir sans avoir été faire une prière dans le caveau de ses pères; la jeune archiduchesse, persuadée qu'elle gagnerait la maladie dont sa belle-sœur venait d'être la victime, regarda cet ordre comme son arrêt de mort.

pu

Elle aimait tendrement la jeune archiduchesse Marie-Antoinette : elle la prit sur ses genoux, l'embrassa en pleurant, et lui dit qu'elle ne la quitterait pas pour se rendre à Naples, mais bien pour ne la plus revoir; qu'elle allait descendre au caveau de ses pères, mais qu'elle y retournerait bientôt pour y rester. Son pressentiment fut réalisé; une petite vérole confluente l'emporta en peu de jours. Sa soeur cadette monta à sa place sur le trône de Naples.

L'impératrice était trop occupée de grands intérêts politiques, pour pouvoir se livrer aux soins de la maternité. Le célèbre Wanswietten, son médecin, venait visiter tous les matins la jeune famille impériale, se rendait ensuite près de Marie-Thérèse et lui donnait les détails les plus circonstanciés sur la santé des archiducs et des archiduchesses qu'elle ne voyait quelquefois qu'après un intervalle de huit ou dix jours. Aussitôt qu'on avait connaissance de l'arrivée d'un étranger de marque à Vienne, l'impératrice s'environnait de sa famille, l'admettait à sa table, et donnait à croire, par ce

rapprochement calculé, qu'elle-même présidait à l'éducation de ses enfans.

Les grandes maîtresses, n'ayant aucune inspection à craindre de la part de MarieThérèse, cherchèrent à se faire aimer de leurs élèves en suivant la route si blâmable et si commune d'une indulgence funeste aux progrès et au bonheur futur de l'enfance. Marie-Antoinette fit congédier sa grande maîtresse en avouant à l'impératrice que toutes ses pages d'écriture et toutes ses lettres étaient habituellement tracées au crayon; la comtesse de Brandès fut nommée pour remplacer cette gouvernante, et s'acquitta de ses devoirs avec beaucoup d'exactitude et de talent. La reine regardait comme un malheur pour elle d'avoir été trop tard confiée à ses soins, et resta toujours en relation d'amitié avec cette dame. L'éducation de Marie-Antoinette fut donc très-négligée (1). Les papiers publics re

(1) A l'exception de la langue italienne, tout ce qui tient aux belles-lettres, et surtout à l'histoire de son pays même, lui était à peu près inconnu. On s'en aper

tentissaient cependant de la supériorité des talens de la jeune famille de Marie-Thérèse. On y rendait souvent compte des réponses que les jeunes princesses faisaient en latin aux harangues qui leur étaient adressées ; elles les prononçaient, il est vrai, mais sans les comprendre elles ne savaient pas un mot de cette langue.

:

On parlait un jour à la reine d'un dessin fait par elle et donné par l'impératrice à M. Gérard, premier commis des affaires étrangères, lorsqu'il avait été à Vienne pour rédiger les articles de son contrat de mariage. Je rougirais, répondit-elle, si l'on me présentait cette preuve de la charlatanerie de mon éducation; je ne crois pas avoir une seule fois posé le crayon sur ce dessin. Cependant elle savait parfaitement ce qui lui avait été enseigné. Sa facilité à apprendre était inconcevable, et si tous ses

cut bientôt à la cour de France, et de-là vient l'opinion assez généralement répandue qu'elle manquait d'esprit. On verra dans la suite de ces Mémoires si cette opinion était bien ou mal fondée.

(Note de madame Campan.)

maîtres eussent été aussi instruits et aussi fidèles à leurs devoirs que l'abbé Métastase, qui lui avait enseigné l'italien, elle aurait atteint le même degré de supériorité dans les autres parties de son éducation. La reine parlait cette langue avec grâce et facilité, et traduisait les poëtes les plus difficiles. Elle n'écrivait pas le français correctement, mais elle le parlait avec la plus grande aisance, et mettait même de l'affectation à dire qu'elle ne savait plus l'allemand. En effet, elle voulut essayer, en 1787, d'apprendre sa langue maternelle, et en prit des leçons avec assiduité pendant six semaines; elle fut obligée d'y renoncer, éprouvant toutes les difficultés qu'aurait à vaincre une Française qui se livrerait trop tård à cette étude. Elle abandonna de même l'anglais que je lui avais enseigné pendant quelque temps, et dans lequel elle avait fait des progrès rapides. La musique était le talent qui plaisait le plus à la reine. Elle ne jouait bien d'aucun instrument, mais elle était parvenue à déchiffrer à livre ouvert, comme le meilleur professeur. Elle avait

« ZurückWeiter »