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triompher, par la puissance des insinuations journalières, de l'ancien attachement du roi pour le duc de Choiseul. Il est vrai qu'on choisit madame Du Barry dans une classe bien vile. Son origine, son éducation, ses habitudes, tout portait en elle un caractère vulgaire et honteux; mais on la fit épouser à un homme qui datait de quatorze cent, et on crut sauver le scandale. Ce fut le vainqueur de Mahon qui conduisit une aussi sale intrigue (1). Cette maîtresse avait été très-habilement choisie pour égayer les dernières années d'un homme importuné

(1) Il semblait qu'on eût à cette époque perdu presque tout sentiment de dignité. « Peu de seigneurs de la cour de France, dit un écrivain du temps, se préservèrent de la corruption générale; M. le maréchal de Brissac était un de ces derniers. On le plaisantait sur la rigidité de ses principes d'honneur et de probité; on trouvait étrange qu'il se fâchât parce qu'on le croyait, comme tant d'autres, exposé aux disgrâces de l'hymen. Louis XV qui était présent, et qui riait de sa colère, lui dit : « Allons, M. de Brissac, ne vous fâchez point, » c'est un petit malheur; ayez bon courage. Sire, - répondit M. de Brissac, j'ai toutes les espèces de cou» rage, excepté celui de la honte. »

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(Note de l'édit.)

des grandeurs, ennuyé des plaisirs, rassasié de volupté. L'esprit, les talens, les grâces de la marquise de Pompadour, sa beauté régulière, et jusqu'à son amour pour le roi, n'auraient plus eu d'empire sur cet être

usé.

Il lui fallait une Roxelane d'une gaieté familière, sans respect pour la dignité du souverain. Madame Du Barry porta l'oubli des convenances jusqu'à vouloir un jour assister au conseil-d'État : le roi eut la faiblesse d'y consentir; elle y resta ridiculement perchée sur le bras de son fauteuil, et y fit toutes les petites singeries enfantines qui doivent plaire aux vienx sultans (1).

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Une autre fois elle saisit dans les mains du roi tout un paquet de lettres encore cachetées parmi lesquelles elle en avait reconnu une du comte de Broglie; elle dit au

(1) Pour éviter d'inutiles répétitions, nous renvoyons le lecteur aux Mémoires du général Dumouriez, qui contiennent, tome Ier, p. 142, de curieux détails sur madame Du Barry. (Note de l'édit.)

roi qu'elle savait que ce vilain Broglie lui disait du mal d'elle, et qu'au moins elle s'assurerait que cette fois il ne lirait rien d'écrit sur son compte. Le roi voulut se saisir du paquet, elle résista, lui fit faire. deux ou trois fois le tour de la table qui était au milieu de la salle du conseil, puis en passant devant la cheminée elle y jeta les lettres qui furent consumées. Le roi devint. furieux; il saisit son audacieuse maîtresse par le bras et la mit à la porte sans lui parler. Madame Du Barry se crut disgraciée; elle rentra chez elle et resta seule pendant deux heures livrée à la plus grande inquiétude. Le roi vint la trouver; la comtesse, en larmes, se précipita à ses pieds, et il lui pardonna.

La maréchale de Beauvau, la duchesse de Choiseul et la duchesse de Grammont avaient renoncé à l'honneur de la société intime du roi, plutôt que de s'y trouver avec madame Du Barry. Mais, quelques années après la mort de Louis XV, la maréchale étant seule au Val avec mademoiselle de Dillon, vit la calèche de la comtesse s'abri

ter dans la forêt de Saint-Germain pendant un violent orage. Elle lui fit offrir d'entrer, et ce fut la comtesse qui raconta ces détails que je tiens de la maréchale de Beauvau (1).

Le comte Du Barry, surnommé le roué, et mademoiselle Du Barry conseillaient ou plutôt sifflaient madame Du Barry, d'après les plans du parti du maréchal de Richelieu

(1) Chamfort raconte, avec des circonstances différentes, la visite de madame Du Barry au Val.

<< Madame Du Barry, dit-il, étant à Vincennes, eut la curiosité de voir le Val, maison de M. de Beauvau. Elle fit demander à celui-ci si cela ne déplairait pas à madame de Beauvau. Madame de Beauvau crut plaisant de s'y trouver et d'en faire les honneurs. On parla de ce qui s'était passé sous Louis XV. Madame Du Barry se plaignit de différentes choses qui semblaient faire voir qu'on haïssait sa personne. Point du tout, dit madame de Beauvau, nous n'en voulions qu'à votre place. Après cet aveu naïf, on demanda à madame Du Barry si Louis XV ne disait pas beaucoup de mal d'elle (madame de Beauvau) et de madame de Grammont: « Oh! beaucoup. Eh bien! quel mal de moi, par exemple? De vous, Madame ? que vous étiez hautaine, intrigante; que vous meniez votre mari par le nez. » M. de Beauvau était présent: on se hâta de changer de conversation. »

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(Note de l'édit.)

et du duc d'Aiguillon. Quelquefois même ils la faisaient agir dans un sens utile à de grands mouvemens politiques. Sous prétexte que le page qui accompagna Charles Ier dans la fuite de ce monarque, était un Du Barry ou Barrymore, on fit acheter, à Londres, à la comtesse Du Barry, le beau portrait que nous avons à présent dans le Muséum. Elle fit placer le tableau dans son salon, et quand elle voyait le roi incertain sur la mesure violente qu'il avait à prendre pour casser son parlement, et former celui qu'on appela le parlement Maupeou, elle lui disait de regarder le portrait d'un roi qui avait fléchi devant son parlement.

Les ambitieux qui travaillaient à renverser le duc de Choiseul se fortifièrent par leur réunion chez la favorite, et vinrent à bout de leur projet. Les dévots, qui ne pardonnaient pas à ce ministre la destruction des jésuites, et qui avaient toujours été opposés au traité d'alliance avec l'Autriche, influençaient l'esprit de Mesdames. Le duc de La Vauguyon, gouverneur du jeune dauphin, lui inspirait les mêmes préventions.

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