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toujours garder quelque chose pour le len-
demain.
(Balthasar GRACIAN.)

La simple admiration est un sentiment tranquille et désintéressé. (L'abbé PRÉVOST.) ADRESSE. On peut dominer par la force, ait Vauvenargues, mais jamais par la seule

adresse.

ADVERSITÉ. Cette situation est la véritable pierre de touche de l'homme. C'est alors qu'on s'assure de sa véritable valeur morale. Si l'expérience l'a éclairé sur toutes les choses, s'il est sage, sincèrement religieux, l'adversité lui amène des privations, mais aucun trouble dans l'âme. Il sait que tous les biens de ce monde sont périssables, et il attend avec patience et dignité cette vie d'en haut où tout est éternel. Si, au contraire, la sagesse et la religion lui font défaut, l'infortune le livre aussitôt à la faiblesse, et le conduit souvent aux fautes les plus condamnables (1).

(N.)

Présente la main à celui qui tombe. Relève celui qui a fait une chute. Secours l'infortuné qui ne peut trouver d'appui. Souviens-toi que l'infortune est commune à tous les hommes, et que la félicité n'a rien de s'able. (PHOCYLIDE.)

Il n'y a pas moins de grandeur à supporter de grands maux, qu'à faire de grandes choses. (TITE-LIVE.)

L'adversité est l'épreuve de la vertu. Le spectacle le plus digne de Dieu, est celui de l'homme juste et courageux aux prises avec la fortune. (SÉNÈQUE.)

Un grand et principal expédient pour se bien comporter dans l'adversité, c'est d'être homme de bien. (CHARRON.)

Une félicité constante, ou des malheurs continuels, sont une preuve trop équivoque de la grandeur d'âme : on s'accoutume à ce qui dure toujours; et souvent ce qui paraît une marque de vertu, n'est qu'un pur effet d'habitude. Mais lorsqu'on a passé successivement par tous les degrés du bonheur et de l'adversité, lorsqu'on a senti les extrémités du bien et du mal, de la douleur et de la joie, on a fait ses preuves, pour ainsi dire; et ce mélange distingue véritablement les caractères héroiques, parce qu'il faut autant de force pour soutenir le plaisir avec modération, que pour résister invinciblement à la peine. (L'abbé PREVOST.)

C'est au malheur de juger du malheur; le cœur grossier de la prospérité ne peut comprendre les sentiments délicats de l'infortune. (CHATEAUBRIAND.)

Le dénûment, la gêne, l'incertitude lient les mains dans les choses mêmes que l'argent ne fait pas. (DE SENANCOURT.) La pensée du malheur est un hôte importun que l'on éconduit le plus vite que l'on peut. (Baron D'HAUSSEZ.)

Ah! je sais ce que c'est que briser à l'écueil,

Et qu'être ballotté de naufrage en naufrage,

Dc la crèche au cercueil.

(Mlle Juliette DE SAUVIGNIE.)

Est-il une expression dont l'indifférence

soit moins avare et qui donne plus envie de
se décourager que ces mots : Du courage!
(Emile DE GIRARDIN.)

AFFAIRES. Gardez-vous bien d'entreprendre aucune affaire qui pourrait nuire aux autres. Soyez sur vos gardes pour celles mêmes que vous pourrez traiter, et diriezles avec ménagement; c'est ainsi que vous aurez bien rarement à vous repentir, ou d'avoir entrepris une affaire avec témérité, ou de l'avoir mal conduite. (CONFUCIUS.)

Les affaires dérobent le temps de pourvoir à sa santé et au repos du cœur : on ne peut ni étudier, ni se connaître, ni jouir de soi-même. (BACON.)

1. C'est une grande science de savoir se soustraire aux affaires.

2. Vivre dans l'embarras des affaires, c'est vivre à la bâte. (Balthasar GRACIAN.)

1. Ne fondez rien sur les jeux de bourse : c'est le terrain le plus dangereux des affaires; vous avez à lutter contre la mauvaise foi, vos passions, les événements politiques, les reports si courts et si onéreux, les petits bénéfices et les grosses pertes.

2. Quand vous faites une affaire, analy-. sez-la et examinez-la avec attention. Ne faites pas comme les actionnaires, qui souscrivent des actions sans connaître les statuts de la société; faites au contraire comme le marchand de chevaux, qui tourne et retourne autour du cheval qu'il veut acheter, jusqu'à ce qu'il sache parfaitement le marché qu'il va conclure.

3. Ne perdez pas de vue en affaires que le succès dépend souvent de l'occasion; ne la laissez pas s'envoler, saisissez-la par les cheveux, retenez-la, elle ne reviendra pas. Il y a un grand principe: c'est de liquider de suite une affaire; de réaliser peu, promptement et argent comptant.

4. En affaires il ne faut pas faire du sentiment chacun pour soi, et Dieu pour tous, comme disent les Anglais. (DE MÉRICLET.)

AFFECTATION. 1. Se singulariser ne sert qu'à se faire passer pour un original ridicule. 2. La politesse même offense quand elle se fait trop remarquer.

3. Les sages se piquent plus d'être grands que de le paraître. (Balthasar GRACIAN.)

AFFECTION. Prescrire l'affection, c'est commander l'hypocrisie : l'attachement doit naître de lui-même.

AFFLICTION. C'est s'ailliger plus qu'il ne faut, que de s'affliger avant qu'il en soit besoin. (SÉNÈQUE.) Quelque prétexte que nous donnions à nos afflictions, ce n'est souvent que l'intérêt et la vanité qui les causent.

(LA ROCHEFOUCAULD.) 1. Rien n'est plus violent que d'être afflige sans oser communiquer ses peines.

2. On n'est guère capable de dissimulation dans une grande douleur.

(L'abbé PRÉVOST.) Si la tristesse attendrit l'âme, une profonde affliction l'endurcit. (J.-J. ROUSSEAU.) Quand nous nous affligeons de nos fautes

(1) Tous les paragraphes signés (N.) sont de l'auteur du présent Dictionnaire.

sans nous en corriger, c'est une marque que cette tristesse ne procède pas de la grâce, mais bien de l'orgueil et de l'amour propre. (Maximes chrétiennes.)

AFRIQUE (Prov.). Les anciens avaient ce proverbe qui se reproduit de nos jours par un motif d'intérêt national : « Qu'y a-t-il de nouveau en Afrique?» Quid novi fert Africa? et on le trouve dans Aristote en ces termes: Ότι άεί φέρει τι λιβύη καινον. Pline donne à ce proverbe l'origine suivante: « La rareté des eaux en Afrique, attire les bêtes féroces vers les bords d'un petit nombre de rivières; et, comme la violence ou le plaisir accouple alors les animaux de différentes espèces, il en provient des monstres. De là le proverbe grec, que l'Afrique apporte toujours quelque chose de nouveau. »

AGATHON (Dicton). On disait chez les anciens, en parlant d'un discours plus fleuri que substantiel: C'est une chanson d'Agathon. Celui-ci était un joueur de flûte d'un grand talent, mais très-décrié par ses mœurs licen

cieuses.

AGE. Nous arrivons tout nouveaux aux divers âges de la vie, et nous y manquons souvent d'expérience, malgré le nombre des années. (LA ROCHEFOUCAULD.)

L'âge d'or n'a jamais existé. Dans les eaux, dans les airs et sur la terre, on s'est fait une guerre éternelie : il y a toujours eu des forts et des faibles, des oppresseurs et des victimes. L'antipathie du loup et du mouton, du chien courant et du lièvre, du renard et des poules, de l'oiseau de proie et de l'alouette; la condition de vie des uns est la mort des autres; le loup, avec des dents crochues, ne peut pas brouter l'herbe des champs, la nature l'a créé carnivore, il faut qu'il obéisse à son instinct. Quant aux hommes, je ne suppose pas non plus que les lois qui gouvernaient le monde aient changé. (DE MÉRICLET.)

AGE (Prov.). Les Latins disaient, au sujet de la différence d'âge Juvenum lanceœ et senum consilia. Nous répétous aujourd'hui: Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait.

AGRICULTURE. La stérilité des terres, dit Montesquieu, rend les hommes industrieux, sobres, endurcis au travail, courageux, propres à la guerre; il faut bien qu'ils se procurent ce que le terrain leur refuse. La fertilité d'un pays donne, avec l'aisance, la mollesse et un certain amour pour la conservation de la vie.

AIGUILLETTE (Prov.). Une ordonnance de saint Louis, ayant enjoint aux filles de mauvaise vie de porter une aiguillette sur l'épaule, afin de ne pas être confondues avec celles qui étaient honnêtes, on prit alors l'habitude de dire: Courir l'aiguillette, pour désigner la conduite d'une femme débauchée.

AILE (Prov.). Pour exprimer qu'il est sage d'obtenir même la plus petite chose d'une personne qui nous doit, on dit qu'il faut en tirer pied ou aile.

ALGARADE (Dicton). Lorsqu'un (veut

désigner une scène bruyante et inattendue, on emploie cette locution: Faire une algarade. On croit qu'elle vient des irruptions subites auxquelles se livraient autrefois les corsaires algériens sur certaines côtes.

ALLOBROGE (Dicton). On dit en termes de mépris, d'un homme exerçant une profession servile: C'est un allobroge, et cette expression était aussi en usage chez les anciens, puisqu'on lit dans Juvénal qu'un rhéteur du nom de Rufus, Gaulois établi à Rome, traitait Cicéron de la sorte:

Rufus qui toties Ciceronem allobroga dixit. Les Allobroges, comme on sait, étaient un des Alpes qui forme aujourd'hui la Savoie peuple établi dans la partie des Gaules et et le Dauphiné.

ALOUETTE (Prov.). On a l'habitude de répondre aux personnes qui font de nombreuses objections, sans que celles-ci repociel tombait, il y aurait bien des alouettes de sent toujours sur une saine logique : Si le prises. C'est le proverbe latin :

Si cœlum caderet, multæ caperentur alaudæ.

AMABILITÉ. Si l'on est réellement aimable chez soi, on peut, avec un peu moins de succès quant au local, réussir beaucoup chez les autres. (Le prince DE Ligne.)

Désirer plaire, mais en douter, doune seulement au naturel quelques graces de plus. (MTM DE SOUZA )

AMANDIER (Prov.). Pour exprimer la prudence qu'on doit apporter dans ses actes, un proverbe dit: Plutôt mûrier qu'amandier. Cette locution vient de ce que l'amandier étant, de tous les arbres fruitiers, celui qui fleurit le premier, se trouve alors le plus exposé à la gelée ; tandis que le murier, fleurissant au contraire très-tard, n'a pas à redouter le même danger.

AMBITION. De toutes les passions que l'esprit du mal a déchaînées sur la terre, l'ambition est l'une des plus fatales à la paix, à la félicité, nous dirons même à l'honneur de l'homme. L'ambitieux n'est jamais satisfait, et les désirs dont il est incessamment tourmenté, sont pour lui comme le tonneau des Danaïdes. Il sacrifie d'ailleurs à ce besoin insatiable, l'amour de famille, l'amitié, toutes les vertus que l'on vénère dans la société; et, pour arriver à son but, il est même rare que l'ambitieux recule devant un crime. Nous n'entendons parler ici, au surplus, que de l'ambition avide des emplois, des dignités et de la richesse. Quant à celle qui n'a pour objet que de se distinguer par le talent et la conduite, loin d'être un sujet de blâme, elle mérite au contraire les plus grands éloges, puisque c'est marcher alors dans la voie que Dieu nous indique pour nous rendre dignes de lui et de la place qu'il nous réserve au ciel.

(N.)

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sa liberté! On ne monte point sans peine aux grandes dignités; on parvient par le travail à de plus grands travaux, mais trop souvent aussi aux plus grands chagrins, et à la honte par la voie même des honneurs. (Mme DACIER.)

Les plus grands arbres sont exposés aux coups de vent, et les ambitieux aux revers de fortune. (Guillaume PENN.) L'ambitieux est trop habile pour ne point agir en homme de bien, lorsque son intéret l'exige. (x.)

L'ambition est aisée à reconnaître pour un ouvrage de l'imagination: elle en a le caractère; elle est pleine de projets chimériques; elle va au-delà des souhaits dès qu'ils sont accomplis; elle a un terme qu'elle n'atteint jamais. (FONTENELLE.)

Qui que nous soyons, défions - nous de l'ambition, mais n'y renonçons jamais. (GUIZOT.)

1. L'ambition et la cupidité ont les mêmes vices et se rendent coupables des mêmes crimes.

2. L'ambitieux n'a ni patrie, ni famille, ni cœur, ni âme. (A. DE CHESNEL.) Le renard n'est pas de la race des lions. La lampe n'a pas la clarté du soleil ni de la lune. Le lac ne peut se comparer à la mer. Les collines ne peuvent se comparer aux montagnes. (Proverbe thibétain.)

AME. Il ne faut pas de cause pour agiter notre âme, une resverie sans cause et sans subject la régente et l'agite. (MONTAIGNE.)

1. La santé de l'âme n'est pas plus assurée que celle du corps; et quoique l'on paraisse éloigné des passions, on n'est pas moins en danger de s'y laisser emporter, que de tomber malade quand on se porte bien.

2. Il y a des rechutes dans les maladies de l'âme, comme dans celle du corps. Ce que nous prenons pour notre guérison n'est, le plus souvent, qu'un relâche ou un changement de mal.

(LA ROCHEFOUCAULD.) Ce qui est capable de se replier sur soimême par la force de la réflexion, n'est rien qui ressemble à la matière.

(L'abbé PRÉVOST.)

L'âme est immortelle. Eh! comment se refuser à un dogme si consolant et si doux? Peut-on croire à un premier être, juste et bienfaisant, sans croire qu'il récompensera l'hommie vertueux qui tâche de lui ressembler? Cette espérance n'est-elle pas le sontien de l'homme dans son malheur, son appui dans sa faiblesse, son encouragement dans les vertus? Ah! sans doute, il faut qu'il y ait un monde tout différent où les inégalités cruelles de celui-ci soient répa rées, où l'homme juste soit remis à sa place, où les oppressions cessent, où les persécutions n'aient plus de pouvoir, où l'homme enfin soit l'égal de l'homme, sans ne pouvoir plus être ni tourmenté, ni avili; il faut que celui qui a souffert ou qui est mort pour la vertu, puisse dire à Dieu : Etre juste et bon, je ne me revens pas d'avoir

été vertueux.

THOMAS.)

Les deux grands objets vers lesquels notre âme se porte invinciblement, sont la vérité et le bonheur. Notre tâche ici-bas consiste à les bien démêler, parmi les apparences ef les illusions dont nous sommes environnés. On sait quelle est la conduite du gros des hommes à cet égard. Ils se payent de tout ce qui s'annonce à eux sur le pied du vrai et du bon; ils adoptent l'un, ils s'efforcent de jouir de l'autre. Ils se croient arrivés au but pour lequel ils ont été formés, lorsque leur esprit est rempli d'un certain nombre de notions confuses, et que leur corps est successivement affecté par des sensations agréables. Personne n'ignore quelle est l'issue de cet état : il suffit de renvoyer à l'expérience. La vérité et le bonheur sont deux choses unies d'un lien indissoluble : l'ouvrage de notre perfection est un tout composé posé de ces deux parties assujetties, dont l'une ne saurait exister sans l'autre. La vérité est même le principe du bonheur : c'est la première idée de notre perfection par laquelle la seconde est déterminée. C'est la réflexion, en effet, qui fait tout le prix du bonheur, ou plutôt qui en fait l'essence même. Plus donc cette réflexion devient distincte et épurée, plus notre félicité s'accroft. Les gens du monde ont raison de dire qu'il ne faut pas creuser, approfondir, s'appesantir en quelque sorte sur les plaisirs de la vie, que tous les raffinements ne servent qu'à les gâter et à les faire évanouir. Rien de plus vrai; mais ils prononcent en cela leur propre condamnation, ils font un aveu authentique que leur bonheur n'est qu'une ombre vide en réalité, et qu'ils ne font qu'effleurer la surface des objets dans lesquels ils placent leur félicité. Au contraire, les biens réels et les plaisirs solides ne demandent que la pierre de touche de l'examen et la réflexion. A leur égard, chaque pas vers la vérité est nécessairement vers le bonheur. (FORMEY.)

1. Tout raisonnement qui tend à dégrader l'âme, en attaquant les preuves que la raison nous fournit pour son immatérialité, nuit par contre-coup à la religion, parce qu'il obscurcit en ce point la liaison des vérités naturelles avec les révélées, qu'il favorise le préjugé où est l'incrédule que l'âme meurt avec le corps, et qu'il fournit contre la foi matière à de nouveaux doutes. 2. Se soucier peu de ce que la vraie philosophie nous apprend sur la distinction du corps d'avec l'âme, et de la prééminence naturelle de l'âme sur le corps; dire, comme font nos esprits forts, qu'il ne nous importe guère de quelle nature soit l'âme, pourvu que Dieu nous ait révélé qu'elle ne doit pas mourir; c'est comme si l'on disait que peu nous importe que la lumière naturelle nous convainque de la justice des devoirs qui nous sont prescrits dans l'Evangile ; que c'est une pure question de philosophie, où la religion n'a nul intérêt, et qu'il nous suffit, pour obéir à tous ces devoirs, qu'une autorité divine nous les impose. (X.)

Il est autant impossible à l'âme de se sou

tenir dans la grâce sans la prière, qu'il l'est au corps de subsister sans nourriture.

(Maximes chrétiennes.)

AMENDE (Prov.). On dit de ceux qui ont à débourser de l'argent, quoiqu'ils aient été lésés d'une manière quelconque : Les battus payent l'amende. Ce dicton vient de l'épreuve du serment, qui avait lieu, au moyen âge, dans ce qu'on appelait le jugement de Dieu. Lorsque les uns attestaient ce que les autres niaient, cn choisissait un champion de chaque côté, pour se battre avec le bouclier et le bâton : le vaincu, réputé parjure, avait la main coupée, et les autres témoins de son parti payaient l'amende, pour racheter leur main, condamnation provenant d'une loi rendue par Louis

le Débonnaire.

AMITIÉ. Le fils de Marie a dit aux hommes: Aimez-vous les uns les autres. (Joan. XIII, 34.) Ce touchant et admirable commandement de l'amour du prochain en général, n'exclut pas toutefois, on doit bien le penser, certaines prédilections dans les rapports qui sont les plus immédiats, les plus intimes; et de même que les époux ont un penchant plus prononcé pour tel ou tel de leurs enfants, de même chacun peut éprouver une sympathie plus grande pour telle ou telle personne qui l'approche, que pour telle ou telle autre. Il serait sans doute à souhaiter que ce dernier genre d'affection fût toujours excité par les vertus de ceux qui en sont l'objet; mais ce cas est, au contraire, l'exception. On serait disposé à croire aussi, au premier aperçu, que l'amitié est cimentée par une parité de sentiments, d'opinions et d'habitudes; mais il n'en est rien non plus. L'amitié se produit, entre égaux, par suite de flatteries ou d'intérêts réciproques. Du grand au petit, elle repose sur le zèle et la servilité du dernier. Au point de vue où la morale considère cette sorte de lien, celui-ci devrait être indissoluble, même au sein des calamités les plus affreuses qui pourraient atteindre l'un des contractants; mais on sait combien il est loin d'en être ainsi. On est l'ami de l'homme puissant, de l'homme riche, de celui qui rend au moins autant qu'il a reçu; mais on cesse de l'être, on en repousse le titre, dès qu'on se trouve en présence de l'adversité qui, pesant sur l'un des conjoints, rend dès lors les positions inégales. Hier, on se montrait empressé, plein de protestations de bienveillance ou de dévouement; aujourd'hui, la mémoire fait défaut, et l'on fuit cette figure à laquelle on souriait naguère, comme on évite la rencontre d'un reptile. Ces vérités sont tristes, mais elles sont incontestables. L'amitié n'est donc qu'un corps sans âme, un mot sans application, un mythe servant simplement d'ornement aux poëtes et aux légendes. On a beaucoup écrit, en effet, sur l'amitié : nous allons voir quelques-unes des inspirations qu'elle a fait naître. (N.)

Ne dites point à votre ami: Allez et reve

nez, je vous donnerai demain, lorsque vous pouvez lui donner à l'heure même. (SALOMON.)

Choisis pour ton ami l'homme que tu connais le plus vertueux, ne résiste point à la douceur de ses conseils et suis ses utiles exemples. (PYTHAGORE.)

Avec ses amis, il faut agir comme s'ils devaient être un jour nos ennemis. (BIAS.), 1. Crains de t'exposer, pour une faute légère, à perdre ton ami. Garde-toi d'écouter le calomniateur qui l'accuse.

2. Dieu seul est exempt de faire des fautes. Sans l'indulgence, l'amitié ne peut plus exister. (THÉOGNIS.)

1. Avant de vous lier avec quelqu'un, sachez comment il s'est conduit dans ses

premières amitiés. Il est à croire qu'il n'en usera pas auirement avec vous qu'il n'en usait avec les autres.

2. Vous connaîtrez vos amis à l'intérêt qu'ils prendront à vos disgrâces, et au zèle qu'ils montreront dans vos détresses. C'est dans le creuset qu'on éprouve l'or; c'est dans l'adversité que l'on reconnaît l'ami véritable. (ISOCRATE.)

Un ami est une même âme dans deux corps. (ARISTOTE.)

1. Avertissez avec douceur votre ami qui s'égare; remettez-le dans la bonne route dont il s'est écarté; mais si vos soins sont inutiles, si lui-même s'obstine à sa perte, ne vous rendez pas ridicule par une vaine importunité.

2. On trouve de grandes richesses dans l'ami droit et sincère, dans l'ami fidèle, et dans celui qui écoute volontiers; mais rien n'est plus dangereux que l'ami qui trompe par un extérieur composé, l'ami lâche et flatteur, et l'ami babillard. (CONFUCIUS.)

Combien d'avances qu'on ne peut faire par soi-même, et dont un ami nous épargne la peine ou l'humiliation. (BACON.)

i. Il y a peu d'amis de la personne, mais beaucoup de la fortune.

2. On juge l'homme par les amis qu'il a. 3. Vivre sans amis, c'est mourir sans témoins.

4. Il est plus difficile de conserver ses amis que de les faire. (Balthasar GRACIAN.)

1. C'est une preuve de peu d'amitié de ne s'aperçevoir pas du refroidissement de celle de nos amis.

2. Il est plus honteux de se.défier de ses amis que d'en être trompé.

3. Il ne faut pas regarder quel bien noas fait un ami, mais seulement le désir qu'il a de nous en faire

4. Ce,qui fait que la plupart des femmes sont peu touchées de l'amitié, c'est qu'elle est fade quand on a senti l'amour.

(LA ROCHEFOUCAULD.)

1. Nous devons ménager l'amitié de tous les hommes, et ne nous confier presque à aucun. Il y en a peu qui aient le pouvoir et la volonté de nous servir; mais tous peuvent nous rendre de mauvais services et nous perdre.

2. Le défaut de respect et d'estime rènd

l'amitié inconstante, et détruit la plus forte et la plus solide.

3. L'amitié n'est pour l'ordinaire qu'un échange de bons offices, un ménagement réciproque d'intérêts, et une espèce de commerce qui ne dure que selon le besoin, et dont on doit user avec beaucoup de précaution. (DE VERNAGE.)

Il n'y a rien qui contribue davantage à la douceur de la vie que l'amitié; il n'y a rien qui trouble si fort le repos que les amis, si nous n'avons pas assez de discernement pour les bien choisir. (SAINT-EVREMONT.)

C'est l'insuffisance de notre être qui fait naître l'amitié, et c'est l'insuffisance de l'amitié même qui la fait périr. (VAUVENARGUES.)

Les contrastes forment plus de liaisons intimes que les rapports d'humeur.

(M DE GRAFFIGNY.) A quels dieux immole-t-on ce qu'il y a de plus rare et de plus doux sur la terre, l'amitié? à la vanité, à l'intérêt.

(DE MALESHERBES.) ⚫ Celui qui te conseille d'ôter ta confiance à tes amis veut te tromper sans témoins. (JUAN MANUEL.)

On ne cherche de nouveaux amis que lorsqu'on est trop bien connu des anciens. (M DE PUIZIEUX.)

me

Les vieilles connaissances valent mieux que les nouveaux amis. (M DU DEFFANT.) J'eus des adorateurs et n'eus pas un ami.

(VOLTAIRE.)

Lorsque mon ami rit, c est à lui de m'apprendre le sujet de sa joie. Pleure-t-il, c'est à moi de découvrir les causes de son chagrin. (DESMAHIS.)

J'appelle amis ceux qui aiment à me voir, qui, disposés à me pardonner mes faiblesses, à les dissimuler aux yeux d'autrui, me traitent absent avec ménagement, présent avec franchise. (MARMONTEL.)

J'ai mes amis qui m'aiment, mes amis qui ne se soucient pas de moi, et mes amis qui me détestent. (CHAMFORT.)

Les faux amis s'attachent aux riches, comme le feu aux matières combustibles, jusqu'à ce qu'ils les aient consumés.

(SANIAL DUBAY.)

Salomon a raison: Les blessures faites par un ami, valent mieux que les caresses d'un flatteur. Cependant, il vaudrait mieux que l'ami ne blessât point.

(Joseph DE MAIstre.)

Un frère est un ami donné par la nature.
(LEGOUVÉ.)
J'étais, comme Sosie, ami de tout le monde,
Quand personne n'était le mien.

(DE LABOUISSE ROCHEFORT.) Les torts d'un ami peuvent entrer dans notre pensée, mais non pas dans nos sentiments. (DE SENANCOURT.) Il y a des temps dans la vie, où il faut se sevrer même de ses amitiés pour ne pas porter malheur à ses amis.

(DE LAMARTINE.) 1. Si la fortune élève votre ami, attendez

qu'il vienne à vous; si l'adversité l'abaisse, courez à lui.

2. Un ami est celui qui nous conseille avec courage dans la prospérité, et qui nous aide en silence dans l'infortune.

3. C'est aux deux extrémités de la vie, qu'on est le plus sensible à l'amitié.

(A. DE CHESNEL.) AMITIE (Prov.). Les proverbes qu'a dictés ce sentiment sont assez nombreux: voici quelques-uns:

1. La mort n'a point d'amis et le malade n'en a qu'un demi.

2. Nul n'est si riche qu'il n'ait métier d'amis.

3. Il n'est nuls petits amis.

4. Pauvres gens n'ont guère d'amis

5. Bien de sa place part qui son ami y laisse.

6. Amitié d'enfant, c'est de l'eau dans un panier.

7. Amitié de gendre, soleil d'hiver.
8. Qui prête à l'ami, perd au double.

AMOUR. Ce sentiment que Dieu semble avoir placé dans l'homme et la femme, pour la plus grande félicité de l'union conjugale, serait en effet la plus douce des jouissances, s'il était possible de l'astreindre aux règles de la raison, aux conditions que la morale impose. Mais quoique l'amour ait une destination plus noble dans l'homme que chez les animaux, son effervescence les confond malheureusement trop souvent dans les mêmes excès; et si le premier, lorsqu'il est épris, ne manifeste pas la férocité du tigre, son délire est du moins analogue à celui que produit la fièvre chaude. L'amour est donc plutôt une maladie qu'une tendresse normale et profitable; et de même que, dans toutes les perturbations du physique, cette maladie réagit sur l'esprit d'une façon plus ou moins dangereuse. Par exemple, le paroxisme une fois passé, tous ceux qui s'y sont trouvés en proie, arrivent aux mêmes conclusions; reconnaissent unanimement l'état d'aliénation dans lequel ils étaient plongés; seulement, ici encore, l'expérience acquise ne répare en rien les maux qui l'ont précédée; et sa lumière n'est pas même destinée à épargner de nouvelles folies aux victimes qui lui succéderont. C'est presque comme un cataclysme de la nature qu'il faut subir ben gré mal gré. Et cependant, nous le répétons, la déception se présente constamment la même, c'est-à-dire qu'on s'est tellement exagéré, par l'imagination, les dons et les qualites de l'objet aimé, que lorsqu'on possède enfin celui-ci, on ne rencontre jamais en lui la dixième partie des perfections qu'on avait rêvées. On voit que le bonheur des unions entre les deux sexes réclamerait du calme et du raisonnement; mais, nous l'avons dit, la nature n'y vient guère en aide; et s'il fallait arracher brusquement à l'amour ses illusions, ses prestiges, ses couronnes au parfum enivrant, ce serait, de l'avis presque général de ceux qui taillent des plumes pour les tremper dans l'encre, vouer ce sentiment, ou plutôt cettu

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