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au Roi, malgré les soins de Madame la Princesse, et l'active fidélité de Marsin, de Lenet et des autres Amis ou Serviteurs de M. le Prince. Marsin obtint cependant qu'il lui fût permis de mener dans les Païs-Bas le Duc d'Enghien et sa Mère; cette Princesse, dont les démarches, si utiles à son Epoux, avaient toujours été dictées par la tendresse la plus apparente et la fermeté la plus soutenue, avait perdu sa santé à force de fatigues et de chagrins; et quand elle sortit de Bordeaux, son crédit y était entièrement éclipsé par celui de la Duchesse de Longueville, dont les grâces, l'esprit et les conseils furent toujours aussi funestes à son illustre Frère, que la douce simplicité, le bon sens et les démarches prudentes de Madame la Princesse, lui avaient été utiles jusqu'alors. Il fut infiniment sensible au plaisir de revoir son Fils, mais elle fut bientôt troublée par la nouvelle qu'il reçut du Mariage du Prince de Conti avec une des Nièces du Cardinal Mazarin; le sang de Bourbon en gémit, la tendresse fraternelle en fut outragée, et l'Europe s'en indigna.

LA Duchesse de Longueville vint se fixer à Moulins, où les conseils et les exemples de la Duchesse de Montmorency, sa Tante, la

détachérent entièrement du Monde. Elle devint dévote, et le fut jusqu'à la fin de sa vie (1). Il ne restait plus à la Cour que la personne de M. le Prince à soumettre; mais il connaissait trop Mazarin pour se livrer à ses promesses; il prit la résolution d'attendre les événemens dans les Païs-Bas,

SON implacable Ennemi, voïant que ce Prince esquivait toujours les piéges qu'il lui tendait, et qu'il cachait sous les offres les plus brillantes, se détermine, pour mettre le comble à sa haine, comme à sa vengeance, à lui porter le coup le plus horrible. Je ne parle point de deux hommes qui furent arrêtés, jugés et exécutés dans les Païs - Bas, et que la voix publique accusa Mazarin d'avoir envoïés, pour attenter à la vie du Prince, parce qu'il ne résulta de l'instruction aucune preuve contre ce Ministre ; mais je veux parler de ce fameux Arrêt du Parlement, qui, à la

(1) Cette Princesse, dans la suite, obtint un jour de son Frère d'aller entendre prêcher le Père Bourdaloue; le Prédicateur se fit attendre; la Duchesse s'endormit. Dès qu'il parut, M. le Prince dit à la Duchesse, en la réveillant : Alerte, ma Sœur, alerte, voilà l'Ennemi! (Note de l'Auteur. )

suite du Procès de M. le Prince, instruit dans toutes les formes, et même en présence du Roi, déclare ce grand-homme déchu du sang et du nom de Bourbon, qu'il avait tant honoré, le priva de ses biens, de ses honneurs, et de la vie dans la forme qui plairait au Roi; et déclara sa Postérité déchue du droit de succéder à la Couronne. (Disposition monstrueuse dont un Étranger seul avait pu concevoir le projet, sans en connaître l'absurdité.) Tous les Amis de M. le Prince furent également enveloppés dans sa proscription.

MAZARIN ne négligeait aucun moïen dele soumettre et de l'accabler; il fit faire le siége de Stenai, qui se rendit pendant celui d'Arras, auquel M. le Prince décida les Espagnols, et dont ses talens eussent assuré le succès, si les obstacles éternels qu'il éprouvait de la part de Fuensaldagne, n'avaient pas fait échouer cette entreprise comme tant d'autres. Toutes les forces de la Cour étaient commandées par Turenne; Hocquincourt et la Ferté étaient en mouvement pour faire lever ce siége. M. le Prince informé de leur marche, et qui sentait, en homme de guerre, le désavantage prodigieux d'attendre l'Ennemi dans des lignes avait proposé d'aller au-devant lui, et de lui

livrer Bataille dans les plaines de Picardie; mais Fuensaldagne s'y était opposé. Ce dernier sentit trop tard l'importance de l'avis de M. le Prince. Les trois Maréchaux avaient combiné leur marche de manière à fondre tous ensemble sur les Assiégeans, la nuit du 24 au 25 Août. La fortune qui semble ne s'être jamais déclarée qu'à regret contre M. le Prince, avait retardé la marche du Maréchal d'Hocquincourt, au point que les deux autres Maréchaux, après l'avoir attendu long-temps, se déterminèrent à commencer l'attaque sans lui, de peur de perdre l'avantage de la surprise. Le quartier de Solis et de Fuensaldagne furent emportés sur-le-champ. Hocquincourt arrivant enfin, chasse les Lorrains du leur. Condé, loin de songer encore à la retraite, répare le désordre, repousse vigoureusement les Français, et la Victoire était à lui, si les Espagnols s'étaient ralliés et l'avaient secouru; mais leur fuite honteuse le forçe à se retirer. Il opéra tranquillement sa retraite à travers une vaste plaine et sut en imposer à ses Ennemis par sa contenance et ses manoeuvres. Il arriva le soir à Cambrai, entouré des Prisonniers qu'il avait faits, et des drapeaux dont il s'était emparés ! Que de Vainqueurs ont été

1655.

bien moins grands dans leurs succès, que ce Prince dans ses défaites !

TURENNE, après avoir pris le Quesnoy, porte le ravage dans le Hainaut. Condé rassemble des Troupes, vole au secours de cette Province, et le force à se retirer en Picardie. Le Maréchal de la Ferté s'empare de Clermont en Argonne.

La Reine Christine, Princesse plus fameuse par sa singularité que par ses vertus, après avoir abdiqué le trône de Suède, arrive à Bruxelles; malgré l'admiration qu'elle affectait pour le Prince, à l'instigation de l'Ambassadeur d'Espagne, elle fit difficulté de lui rendre les mêmes honneurs qu'elle ne refusoit pas à l'Archiduc. M. le Prince déclara qu'il ne la verrait point; cependant, cédant à la curiosité, il se mêla dans la foule pour voir cette femme extraordinaire; elle le reconnut, et courut à lui; M. le Prince s'enfuit et lui crie: Tout ou rien, Madame, tout ou rien. Il la vit cependant par la suite, mais après s'être bien assuré qu'il en recevrait les honneurs et les égards qu'elle lui devait.

TURENNE attaque Landrecies. Condé proposa des moïens certains de sauver cette place

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