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préfence réelle, il ne refte dans l'euchariftie qu'un morceau de pain & une pure cérémonie qui ne peut exciter dans l'ame les mêmes affections que la foi excite dans celle d'un catholique qui fait difcerner le corps de Jésus-Chrift d'avec les apparences du pain.

Il ne s'en eft pas tenu là: il a ôté au fervice divin toute fa majefté, toute sa fplendeur; il a détruit, entre les ministres, toute efpece de fubordination. C'eft ce que lui reproche le docteur Swift, dans fon ingénieux conte du tonneau.

Ce docteur compare la doctrine pure de Jéfus-Chrift à un habit fimple, mais précieux, qu'un pere avoit laiffé à fes enfans. Il prétend [ d'après ces principes anglicans ] que l'églife romaine ayant furajouté à cet habit quelques ornemens fuperflus, l'églife d'Angleterre a tâché fagement de les découdre, & qu'elle l'a fait avec foin fans altérer la fubftance de l'habit; mais il dépeint Calvin comme un forcené, qui dans fa fureur a tout déchiré, tout arraché, & mis enfin l'habit en lambeaux.

Auffi quel changement dans les mœurs a produit la prétendue réforme dont Luther & Calvin ont été les auteurs!

Ecoutons ce qu'en dit Luther lui-même: « Nous voyons, difoit-il, que par la » malice

» malice du diable les hommes font main» tenant plus avares, plus impitoyables, » plus abandonnés aux vices, plus info» lens, & beaucoup pires qu'ils n'étoient » fous la papauté (a). »

Calvin difoit : « Dans le petit nombre » de ceux qui fe font féparés de l'idolâtrie » du pape, la plupart font remplis d'ido» lâtrie & d'artifices; ils font paroître à » l'extérieur un grand zele; mais fi vous » les fondez un peu plus avant, vous les > trouverez remplis de fourberie (b). »

Voilà, Monfieur, la fainteté qu'a opérée la prétendue réforme de Luther & de Calvin. A de tels apôtres il ne faut pas demander des miracles. Mais que dis-je ? ils en ont fait dans le goût de ceux qu'au rapport de Tertullien, firent certains hérétiques de fon temps : « Si les prédicateurs » envoyés par Jéfus-Chrift, dit ce pere, » reffufcitoient les morts, ceux-ci tuent » les vivans (c). » C'eft en effet ce que fit Calvin. L'auteur de fa vie rapporte que voulant accréditer fa doctrine par un prétendu miracle, il engagea un nommé Brulle à contrefaire le mort, & à fe lever du cercueil auffi-tôt qu'il le lui ordonne

(a) Luther. dom. I. adventûs fol. 5. éd. 1548. (b) Calvin in Daniel, cap. II. v. 34.

(c) Illi enim de mortuis fufcitabant, ifti de vivis mortuos, faciunt. Tertul, de Præfcript,

roit, afin que par cette réfurrection feinte il parût avoir le don des miracles. Mais Calvin ayant ordonné à cet homme de fe lever, il ne fe leva point & fe trouva véritablement mort (a).

Cochleus rapporte dans fa vie de Luther, qu'il voulut en 1545 exorcifer une fille énergumene, dans l'églife de Wirtemberg, en présence d'un grand nombre de fpectateurs; mais que cette fille méprifant fon pouvoir, lui fauta à la gorge, le mit en fuite, & que, dans fon effroi, il paroiffoit prêt à perdre l'efprit.

Mais fi les fondateurs de la prétendue réforme n'ont pas eu le don des miracles, peut-être ont-ils eu celui des prophéties. Vous allez en juger par le trait fuivant. Luther avoit prophétifé plufieurs fois qu'il anéantiroit le regne du pape, & dans la certitude où il croyoit être de l'événement, il avoit pris cette infolente devife: Vivus ero peftis, moriens ero mors tua, papa. O pape, pendant ma vie je ferai ton » fléau, & en mourant je ferai ta mort. » Il prétendoit avoir trouvé, par certains calculs, l'époque de la ruine prochaine du pape & du monde entier, que le miniftre Jurieu fixa enfuite à l'année 1714; cependant le monde & le pape fubfiftent encore en 1780.

(a) Bollec, vie de Calvin, ch. 7.

LE PROTESTANT.

Mais ne pourroit-on pas dire que les fuccès, les progrès de Luther & de fes difciples femblent merveilleux & tiennent lieu de miracles?

LE DOCTEUR.

Eh non fans doute, Monfieur, on ne peut pas dire que les progrès de l'arianifme qui a eu plus d'étendue que le luthéranifme, ni que les progrès des différentes fectes hérétiques, ou du mahométifme, foient miraculeux. Il n'est point surprenant qu'en abrogeant une grande partie de ce qu'il y a de gênant & de pénible dans la religion, en flattant les paffions, ouvrant la porte des monasteres, ménageant les intérêts des princes, profitant de leur divifion, & joignant dans les occafions la force ouverte à l'artifice, Luther & Calvin aient fait des profélytes.

Quand Luther permit en 1539 à Philippe Landgrave de Heffe d'époufer une feconde femme, & par conféquent d'en avoir deux à la fois puifque la premiere étoit vivante, il est évident que par-là il engageoit furement dans fon parti ce prince qui étoit comme l'ame de la ligue Smalkade, & qui pour obtenir de Luther cette difpenfe, lui avoit promis tous les biens des monafteres de fes états.

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C'est ce que S. Paul avoit prévu quand il avertiffoit fon cher Timothée, que les hérétiques feroient de grands ravages dans l'églife, mais que leurs fuccès ne devoient point ébranler fa foi. « Les hommes méchans & les impofteurs, lui dit-il, fe»ront de grands progrès dans le mal, » étant eux-mêmes dans l'erreur, & y je> tant les autres : Quant à vous, demeu> rez ferme dans les chofes que vous avez » apprifes, fachant de qui vous les te» nez (a). »

LE PROTESTAN T.

Je fuis fatisfait, Monfieur, de ce que vous m'avez dit fur les quatre caracteres de l'églife, fon unité, fa fainteté, fa catholicité & fon apoftolicité. Vous m'avez appris fur la doctrine & la vie des premiers auteurs de la réforme, beaucoup de chofes dont je n'avois jamais entendu par er; mais indépendamment de ces faits particuliers, je vois bien que les quatre marques diftinctives de l'églife de JéfusChrist, conviennent à l'églife romaine, & qu'on ne peut les appliquer aux fociétés proteftantes.

Je me rappelle que vous m'avez annoncé qu'outre ces caracteres diftinctifs de l'églife, il y a quelques autres propriétés

(a) 2. Tim. 3. 13,

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