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Dieu veut bien la remettre au pécheur; mais la juftice n'exige-t-elle pas qu'il lui impofe en échange une peine temporelle, plus ou moins forte fuivant le nombre & la malice de fes péchés ?

Quoi, l'homme aura abufé de tous les dons de Dieu pour l'outrager, & pourra continuer à l'infulter conftamment fur la terre, en tenant jufqu'à fa mort le langage de l'impie dont parle l'écriture : J'ai péché, & que m'en eft- il arrivé (a) ? Des

malheureux endurcis dans leurs crimes

les auront multipliés au delà du nombre des cheveux de leur tête, & la justice de Dieu n'exigera d'eux rien de plus fur la terre pour les expier, que de celui qui n'en aura commis qu'un feul, c'eft-à-dire, rien ni de l'un ni de l'autre ?

2o. Ce qui regarde le péché de notre origine, demande une attention particuliere. Il y a deux facremens inftitués pour la rémiffion des péchés: le baptême, qui remet le péché originel, ainfi que ceux qu'on auroit commis avant de le recevoir, & la pénitence, qui remet ceux qu'on a commis après avoir été baptifé.

L'églife n'impofe aucune fatisfaction particuliere à celui qui reçoit le baptême, pour deux raifons. La premiere s'applique

(a) Ecclif. 5, 4.

au péché originel lui-même : comme fuivant les décrets éternels, l'homme en reçoit, même quand le baptême le remet, une pu nition fur la terre, par la mort & les maux, de cette vie, une autre fatisfaction temporelle ne lui eft pas prefcrite.

La feconde s'applique aux péchés actuels commis avant le baptême, lorsqu'il eft adminiftré à des adultes. Dieu veut bien,. pour faire éclater fur eux fa miféricorde leur remettre entiérement, cette premiere fois, toutes les fautes de leur précédente vie d'ignorance & de tenebres.

Mais après le baptême, les péchés de ces enfans de Dieu, ainfi régénérés, qui profanent enfuite en eux ce facré caractere, renfermant tant d'ingratitude & d'indignité, ils méritent fans doute une plus. forte punition.

3o. Ici même Dieu agit auffi par bonté. Ces peines temporelles qu'il faut fubir pour le péché, font un frein qui retient l'homme foible & l'empêche d'y retomber, par l'épreuve de ce qu'il en coûte pour offenfer Dieu, fuivant cette parole du prophete: Reconnois, ó pécheur ! combien il est amer pour toi d'avoir abandonné le Seigneur ton Dieu (a).

(a) Jer. 2, 19.

C'eft ainfi que le pécheur eft enfuite armé contre la tentation, préfervé de la rechûte, animé à la persévérance.

4°. Après tout, Dieu exerce à cet egard un fouverain empire; il met au pardon qu'il daigne accorder, les conditions qu'il veut: on voit combien elles font juftes; mais fa volonté eft la regle des chofes, il nous fuffit qu'il ait révélé qu'elle eft telle.

5°. La conformité que le chrétien est obligé d'avoir avec Jésus-Chrift forme encore ici une preuve bien décisive : Quoi ! il a fallu, dit l'écriture, que l'innocent fouffrit pour les coupables, & qu'il fouffrit jusqu'à la mort de la croix, il l'a fallu pour qu'il entrát ainfi dans fa gloire (a). Des ingrats, des perfides qui après le baptême, ont à fon égard violé leurs fermens, n'auront aucune part à fes douleurs? & que deviendra donc la maxime de S. Paul que je vous ai déja citée, nous fommes les cohéritiers de Jésus-Chrift, pourvu que nous fouffrions avec lui (b).

6°. Et n'eft-ce pas là d'ailleurs ce qu'exige l'économie générale du falut?

L'homme n'est point un automate: il a reçu de Dieu la liberté, il eft capable de

(a) Luc. 24, 26. (b) Rom. 8, 17.

bien & de mal: en conféquence fi Dieu lui propofe un bien immense, un bonheur éternel, il exige de lui, pour y parvenir, les plus grands efforts, & cette volonté se manifefte à tous égards.

Il eft riche & libéral; les bienfaits ne lui coûtent rien: cependant il veut que l'homme les demande, & que pour les obtenir, il le prie fans ceffe.

Jésus-Chrift a bien voulu devenir fon médiateur, & le chef de tous les chrétiens, il veut cependant qu'ils joignent à fa médiation les prieres qu'ils lui adreffent tous les uns pour les autres.

C'eft ainfi qu'il a fatisfait pour eux, & que néanmoins il veut qu'ils expient, par des peines particulieres, les péchés qu'ils commettent après le baptême, uniffant leur fatisfaction à la fienne, dont elle tire tout fon mérite.

Quoi de plus fimple, de plus jufte, de plus conféquent?

LE PROTESTAN T.

Tant de preuves réunies me frappent beaucoup : c'est même là le jugement que porteroient tous les hommes de bon fens fur les injures qui leur feroient faites à eux-mêmes.

Un pere pardonnera entiérement une premiere fois à fon fils: s'il retombe dans

des fautes grieves, il lui montrera enfuite plus de févérité; autrement on dira qu'il eft trop bon, qu'il manque de prudence: mais en Dieu rien ne manque; la juftice & la bonté marchent toujours ensemble & d'un pas égal, ainfi que fes autres attributs.

Mais je vois bien que ce premier point va vous conduire au fecond; s'il y a une mefure de pénitence fixée par la juftice de Dieu à tous les pécheurs, ainfi qu'on ne peut s'empêcher de le reconnoître, il faudra bien que celui qui ne l'aura pas remplie dans ce monde, la rempliffe dans l'autre, & n'eft-ce pas là ce purgatoire contre lequel nos miniftres s'élevent avec tant de feu ?

LE DOCTEUR.

Oui, Monfieur, l'un dépend néceffairement de l'autre : vous avez dit là en deux mots tout ce que l'églife enfeigne de la fubftance du purgatoire, Dieu n'ayant pas fpécialement révélé la nature, la durée & les autres circonstances de cette pénitence, réglée après la mort fur les droits rigoureux de fa juftice.

Mais indépendamment de cette néceffité d'achever de remplir après la mort la jufte mesure de pénitence qui ne l'auroit pas été pendant cette vie (ce qui n'auroit

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