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de Jésus-Chrift n'étoit pas avec les morceaux de pain qu'ils devoient recevoir, ou il les aura quittés au moment où ils auront changé de réfolution: encore une fois ne font-ce pas là de vaines imaginations?

Mais que pourroit-on dire de ces autres paroles de Calvin? il reconnoît qu'en la primitive églife on portoit comme aujourd'hui l'euchariftie aux malades; mais il blâme cet ufage & le regarde comme inutile, attendu que, comme je l'ai déja dit, on ne peut recevoir felon lui, ni l'euchariftie, ni aucun effet facramentel que dans l'action même de la célébration de la cene. Mais comment fe tire-t-il de l'argument que fournit contre lui le poids d'une fi grande autorité? Le voici : ceux qui portent l'euchariftie aux malades, -ont dit-il, pour eux l'exemple de la primitive églife, j'en conviens; (il devoit dire de l'églife de tous les fiecles) mais dans un objet fi important, où il y auroit un fi grand danger à fe tromper, rien n'eft plus fûr que de fuivre la vérité même (a). Mais quel droit avoit-il donc de prétendre la connoître cette vérité mieux que la primitive églife, & que l'églife de tous les fiecles?

Il eft donc conftant, même par fon aveu, que la primitive églife confervoit l'euchariftie, la portoit aux malades, ainfi qu'elle

(a) Inftitut. liv. 4, ch. 17. §. 39.

l'a toujours fait, & cet ufage établit invinciblement la permanence de Jésus-Christ en ce facrement, fur laquelle il ne me semble pas néceffaire de m'étendre davantage. LE PROTESTANT.

Mais, Monfieur, dès que Jésus-Christ est véritablement préfent dans l'euchariftie, & qu'il continue d'y être, nos miniftres ne doivent-ils pas reconnoître que les fideles doivent l'y adorer?

LE DOCTEUR.

Ceux qui nient la présence réelle difent expreffément, que fi Jésus-Chrift étoit préfent dans ce facrement, il faudroit l'y adorer. Voici les propres termes des principaux d'entr'eux.

Si Jésus-Chrift eft dans la cene, dit Zuingle leur chef, ne fera-ce pas un péché de ne pas l'y adorer (a)?

Si je croyois, difoit Beze, fon plus fameux difciple, Jésus-Chrift réellement & corporellement dans le pain, je croirois fon adoration néceffaire (b).

Daillé, le plus célebre miniftre, s'exprimoit ainfi Si l'euchariftie eft le corps de Jésus-Chrift, il est évident qu'on peut & qu'on doit l'adorer (c).

(a) In exagefi, euchar. contra Lutherum. (b) Sermone de coena Domini.

Cependant Luther en admettant la préfence réelle, ne veut pas qu'on adore Jéfus-Chrift dans l'euchariftie pour deux raifons; mais elles font très-foibles & fondées d'ailleurs fur fes propres erreurs.

La premiere, parce que, dit-il, le pain reftant dans l'euchariftie, il feroit à craindre que l'adoration rendue ne tombât fur ce pain comme fi quand on révere un prince, un roi, on étoit cenfé révérer ses habits.

La feconde, parce que Jéfus-Chrift n'étant pas toujours dans l'eucharistie, on fe mettroit dans le danger de l'y adorer, quand il n'y feroit pas.

Mais cette préfence tranfitoire de JéfusChrist dans l'euchariftie, imaginée par Luther, eft, comme je vous l'ai déja montré, une pure chimere, ainfi il ne reste plus fur ce point de difficulté réelle.

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LE PROTESTANT.

Je n'y en trouve pas non plus; mais c'eft fur le retranchement de la coupe dans l'administration de l'euchariftie, que j'ai entendu nos miniftres s'élever fur-tout contre l'églife romaine: voudriez-vous bien à préfent m'inftruire fur ce point?

LE

DOCTEUR.

On devoit bien s'attendre que Luther,

Calvin & leurs difciples s'étant féparés de l'églife catholique chercheroient des prétextes pour la blâmer; mais celui-ci principalement ne leur a point réuffi.

Il me fuffira pour le renverfer entiérement de vous rappeller ici les faits & les principes, c'est-à-dire, la maniere dont l'église a adminiftré l'eucharistie dans tous les tems, & les juftes raifons qu'elle a eues de fe fixer à fa pratique actuelle.

I. Il eft conftant & reconnu que depuis les premiers fiecles l'église a toujours autorifé, fuivant la diverfité des circonstances, l'administration de l'euchariftie fous les deux efpeces du pain & du vin réunies ou fous l'une des deux féparément.

On fait en effet, que pendant long-tems elle accompagnoit le batême de la réception de l'eucharistie, & qu'elle l'adminiftroit aux enfans qui ne pouvoient pas encore manger, fous la feule efpece du vin. Elle continuoit enfuite à la leur donner de même, & l'événement merveilleux que nous rapporte S. Cyprien, comme témoin oculaire, de l'enfant à qui fon diacre ne pouvoit faire avaler le fang du Sauveur, parce qu'il avoit participé au facrifice des Païens, en eft la preuve fans réplique (a).

(a) Cypr, de lapfis poft medium.

Dans une multitude d'autres circonftances, on l'adminiftroit fous la feule espece du pain. S. Denis d'Alexandrie attefte que le vieillard Serapion, fimplement malade, la reçut ainfi, ce qui étoit de fon tems fort en ufage (4).

On confioit de même l'euchariftie aux chrétiens, dans le tems des perfécutions, fous la feule efpece du pain, & le fait est reconnu. Il en étoit de même dans un grand nombre de cas; S. Ambroife témoignoit dans l'oraifon funebre de fon frere S. Satire, que fuivant l'ufage de fon tems, on lui avoit accordé de porter avec lui l'euchariftie, dans un voyage périlleux, & que le vaiffeau où il étoit, étant prêt à faire naufrage, il fe jeta lui-même dans la mer ayant attaché à fon cou le linge qui enveloppoit ce précieux dépôt, & avoit ainfi fauvé fa vie.

S. Léon, dans un décret rapporté par Gratien, ordonne de donner aux fideles les deux efpeces aux meffes folemnelles pour découvrir les Manichéens, qui s'abftenoient de celle du vin; ce qui démontre que l'ufage de communier fous les deux efpeces n'étoit pas général.

S. Jérôme rapporte qu'il y avoit à Rome des vierges qui craignant le goût &

(b) Eufeb. Hift. ecclef. liv. 6. ch. 44.

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