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entendre raisonner fi jufte. J'en bénis Dieu de tout mon cœur.

Discutons à préfent les articles fur lefquels les prétendus réformés ont paru abandonner la doctrine de leurs premiers fondateurs. Je vous en ai cité trois, la liberté de l'homme, la juftification, & le mérite des bonnes œuvres. Commençons par la liberté de l'homme.

On a peine à comprendre comment Luther, Calvin & leurs premiers difciples ont ofé avancer, contre la conviction la plus conftante du fens intime, qu'il n'y a en nous aucune liberté. Cependant Luther l'enfeigna ouvertement, & dans fon livre De fervo arbitrio, il entreprit de le prouver comme un des fondemens de fa doctrine. Il eft impoffible, difo t-il, qu'aucun autre que Dieu foit libre: fa prefcience & fa providence font que toutes chofes arrivent par une immuable, éternelle & inévitable volonté de Dieu, qui foudroie & met en pieces le libre arbitre. (a)

Il ajoute dans le même livre que le libre arbitre eft un vain titre fans réalité, & que Dieu fait en nous le mal comme le ·bien. (b)

Il prétend cependant que Dieu punit

1) Luth. op. tom. 2, pag. 426.

juftement le mal que nous faifons ou plutôt qu'il fait en nous: La grande perfection de la foi, dit-il, eft de croire que Dieu eft jufte, quoiqu'il nous rende néceffairement damnables par fa volonté, enforte qu'il femble fe plaire au fupplice des malheureux.

Dieu nous plait, dit-il encore, quand il couronne des indignes, il ne doit pas nous déplaire quand il condamne des innocens.

En finiffant cet ouvrage contre le libre arbitre, il affure que tout ce qu'il a avancé, il la dit, non en examinant, mais en déterminant, n'entendant le foumettre au jugement de perfonne.

Če ton de hauteur réuffiffoit à Luther. Sa doctrine fur ce point devint celle de tout fon parti. Mélanathon difoit après lui: La prefcience de Dieu rend le libre arbitre abfolument impoffible; Dieu n'eft pas moins caufe de la trahifon de Judas que de la converfion de S. Paul. (a)

Mais Calvin fur-tout s'attacha à foutenir ce point de la doctrine de Luther. Voici le titre qu'il met à la tête du fecond livre de fes inftitutions : L'homme à préfent dépouillé du libre arbitre, & captif fous une miférable fervitude. Pour le prouver il emploie quatre grands chapitres où il foutient, comme Luther, que le péché,

(4) Comment. in Epift. ad Rom.

quoique commis néceffairement, eft justement imputé à l'homme.

, que ce

Vous comprenez, Monfieur prétendu défaut de liberté dans l'hommea un rapport effentiel avec fa juftification & le mérite de fes bonnes œuvres. Auffi les patriarches de la réforme renverferentils toutes les notions qu'on avoit toujours eues dans l'églife fur ces deux derniers articles.

Mais avant de les examiner, je vous le demande, faviez-vous que les fonda-. teurs des fociétés proteftantes avoient enfeigné que nous n'avions aucune liberté è

LE PROTESTANT.

Non, Monfieur, perfonne ne me l'avoit dit. J'avois bien entendu prêcher dans nos églifes que fans la grace de Dieu nous ne pouvions rien pour le falut éternel; mais en même tems nos prédicateurs nous exhortoient à correfpondre à la grace; ce qui fuppofe que nous fommes libres.

LE DOCTEUR.

Il faut bien qu'on prêche ainfi, puif qu'on fe propofe d'exciter les hommes à la pratique du bien & à la fuite du mal. Si un prédicateur difoit à fon auditoire: Mes freres, depuis le péché originel

» actions fe font néceffairement; c'est Dieu » qui fait en lui le mal & le bien. Quand » vous commettez un péché, c'est que » vous ne pouviez l'éviter. Cependant » en le commettant, vous méritez que » Dieu vous condamne aux flammes éter»nelles ». Si, dis-je, un prédicateur parloit de la forte, tout auditeur de bon fens feroit tenté de lui répondre «: S'il ne me » refte aucune liberté, il eft inutile que » je vienne à vos inftructions: mais quoi » que vous en difiez, je fens que je fuis » libre, & fi j'offense Dieu, les remords » de ma confcience m'avertiffent affez » que je pouvois résister à la tentation ».

Dans tous les pays & dans tous les tems on a décerné des récompenfes pour ceux qui feroient le bien, & des fupplices pour les criminels. Tout le genre humain a donc toujours cru que l'homme eft libre. Otez la liberté, on ne peut plus ni blâmer, ni louer, ni punir, ni récompenfer perfonne. Dieu, dites-vous, fait en nous le mal & le bien; mais s'il fait le mal, comment eft-il infiniment faint, infiniment parfait ? Vous prononcez un blafphême. Comment d'ailleurs pourroit-il, fans injuftice, me condamner à des feux éternels, pour avoir omis ce que je ne pouvois faire, ou pour avoir fait ce dont je ne pouvois m'abstenir? Tout maître prêt à frapper fon ef

clave qui n'a pas exécuté fes ordres, eft défarmé par cette réponse, fi elle eft véritable: Il ne m'a pas été poffible de le faire.

Cet article de la doctrine des fondateurs de la prétendue réforme eft non feulement faux, mais fcandaleux, destructif de tout bon ordre, puifqu'il tend manifeftement à difculper tous les coupables & à juftifier toutes fortes de crimes. Il n'y a aucun homme au monde qui ne croie éviter le blâme d'une action, & qui ne foit réellement regardé comme excufable dès qu'il peut dire avec vérité: Je n'ai pu faire autrement.

Cette erreur de Luther & de Calvin' eft tellement oppofée à la foi & à la raifon, que quoiqu'ils fe foient efforcés de l'établir comme un des points capitaux, cependant on ne l'enseigne plus dans les fectes qu'ils ont fondées: on y enfeigne même le contraire. Voyez le catéchisme des calvinistes imprimé à Geneve en 1770, lifez la page 55; on y fait cette demande : Dieu eft-il l'auteur du mal que les hommes font? On répond, Non, & ce feroit une impiété de le croire.

Mais cette impiété a été enfeignée par Luther & Calvin; cependant on vous les donne pour des envoyés de Dieu.

LE PROTESTAN T.

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