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» fait tige dans l'Eglise. Ce n'étoit pas là ce qu'ils » y avoient appris, ni ce qu'ils avoient tiré de la

» racine ».

Jurieu avoit produit dans ses lettres pastorales, comme un témoignage des variations de l'ancienne Eglise, la doctrine sur la grâce, qu'il prétendoit n'avoir été bien connue et bien expliquée que depuis saint Augustin. Mais c'étoit précisément sur cet article que saint Augustin, qu'il appeloit à son appui, lui répondoit : « Que la

foi chrétienne et l'Eglise catholique n'ont ja» mais varié. Lorsque Pélage et Célestius paru» rent, leurs profanes nouveautés, dit saint Au» gustin, firent horreur par toute la terre à toutes » les oreilles chrétiennes en orient, comme en » occident ». A peine purent-ils séduire cinq ou six évêques, qui furent bientôt chassés de leurs siéges par l'unanime consentement de tous leurs collègues, et avec l'applaudissement de tous les peuples et de toute l'Eglise catholique.

Après avoir repoussé les accusations téméraires de Jurieu contre l'invariabilité de la doctrine des premiers siècles de l'Eglise, Bossuet fait voir que le systême de Jurieu tend à livrer le christianisme tout entier à l'invasion des sociniens; et telle est la force des raisonnemens de Bossuet, qu'il finit par en arracher l'aveu à Jurieu lui-même.

XIII.
Du 2.e aver-

protestans.

Il arrivoit quelquefois à Jurieu ce qui arrive presque toujours à ceux qui écrivent beaucoup, lissementaux surtout dans le genre polémique. Occupés à se défendre ou à attaquer, ils ne sont frappés que du danger de succomber à l'objection du moment; et ils oublient les faits et les principes qu'ils ont avoués ou établis dans leurs écrits antérieurs. Bossuet avoit fait observer dans une addition au livre XIV de l'Histoire des variations, que Jurieu convenoit lui-même que les premiers réformaLuther et Mélanchton, avoient établi comme fondement de toute leur doctrine ces étonnans axiomes: « Que Dieu fait les hommes » damnables nécessairement par sa volonté; en >> sorte qu'il semble prendre plaisir au supplice » des malheureux, et est plus digne de haine que » d'amour. Que l'adultère de David et la trahison » de Judas ne sont pas moins l'oeuvre de Dieu, » que la conversion de saint Paul». C'étoit véritablement faire Dieu auteur du péché, comme le disoit Bossuet.

teurs, tels que

Jurieu se récria avec chaleur contre l'inculpation de Bossuet, et déclara qu'il n'étoit jamais convenu « que Luther et Mélanchton eussent pro»fessé une telle doctrine ». Il s'abandonna même à un tel excès d'emportement, qu'il osa traduire

Bossuet « au tribunal de Dieu comme un insigne » calomniateur ».

Il avoit entièrement oublié, que lui-même il avoit consigné cet aveu dans les mêmes termes, dans un écrit adressé quelques années auparavant au ministre luthérien Scultet.

Jurieu avoit eu alors la fantaisie de proposer un traité de paix et une tolérance mutuelle entre les luthériens et les calvinistes. Les luthériens y résistoient fortement à cause de la dureté de la doctrine de Calvin. Jurieu ne désavouoit pas que Calvin n'eût professé des principes insoutenables; mais il prétendoit que ses disciples y avoient renoncé depuis cent ans. D'ailleurs, ajoutoit-il, la doctrine de Luther et de Mélanchton n'étoit pas moins injurieuse à la sainteté et à la justice de Dieu; et il citoit à ce sujet les paroles de Luther et de Mélanchton, telles que Bossuet vient de les rapporter; et Bossuet n'avoit fait que rappeler à Jurieu ce qu'il avoit déclaré lui-même dans un écrit public imprimé et signé de lui. Jurieu ne répondit rien, parce qu'il n'y avoit rien à répondre.

Mais on trouve dans le second avertissement aux protestans une objection de Jurieu assez spécieuse pour faire impression sur les personnes

peu familiarisées avec ces matières, et qui parut à Bossuet mériter une attention particulière. C'est ici qu'il faut admirer la profonde sagesse et la scrupuleuse exactitude de Bossuet dans les questions les plus difficiles et les plus délicates de la théologie.

On sait que l'Eglise a abandonné à la liberté des écoles la discussion des opinions particulières de quelques théologiens sur le concours de la grâce et de la liberté dans les actes humains. Parmi ces opinions, celle des thomistes est célèbre dans l'école; et personne n'ignoroit dans le public que Bossuet penchoit pour cette opinion. Ce n'est pas qu'il la jugeât exempte de difficulté, ni susceptible d'une démonstration très-claire et très-satisfaisante. Il la croyoit seulement plus propre que toute autre à résoudre quelques objections et quelques difficultés dans une matière qui en offre un si grand nombre d'insolubles.

Jurieu ne manqua pas de demander à Bossuet comment il prétendoit concilier la liberté de l'homme avec la grâce efficace et la prémotion physique des thomistes.

Il faut entendre la réponse de Bossuet. Il eût été à désirer pour le repos de l'Eglise, que les auteurs de tant de systêmes n'eussent pas eu la prétention d'expliquer ce que Bossuet jugeoit inexplicable.

« M. Jurieu voudroit que je lui apprisse com» ment s'accorde le libre arbitre, ou le pouvoir' » de faire, ou ne pas faire avec la grâce efficace » et les décrets éternels. Foible théologien qui » fait semblant de ne pas savoir combien de vé» rités il nous faut croire, quoique nous ne sa» chions pas toujours le moyen de les concilier » ensemble. Que diroit-il à un socinien qui lui » demanderoit d'expliquer comment s'accorde » l'unité de Dieu avec la Trinité? Entrera-t-il » avec lui dans cet accord, et s'engagera-t-il à » lui expliquer le secret incompréhensible de » l'être divin? Ne croiroit-il pas l'avoir vaincu, » en lui montrant que ces deux choses sont éga» lement révélées; et par conséquent, malgré

>>

qu'il en ait, et malgré la petitesse de l'esprit » humain qui ne peut les concilier parfaitement, » qu'il faut bien que l'infinité immense de l'être » de Dieu les concilie et les unisse.

» Mais sans nous arrêter à ce mystère, qu'est-ce » en tout et partout que notre foi, qu'un recueil » de vérités saintes qui surpassent notre intelli» gence, et que nous aurions non pas crues, mais » entendues parfaitement, si nous pouvions les » concilier ensemble par une méthode manifeste?.. » Mais cela n'est pas ainsi, et quand cela sera, » ce ne sera plus cette vie, mais la future. Ce ne

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