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Matth.

XII. 18.

27.

9. 18.

XVIII. 2.

foient à la liberté de chacun d'examiner ces explications & de les recevoir, ou de les rejetter. C'eft fans fondement que les Juifs ont accufé les Caraïtes de Sadduceïfme, puis qu'il paroît par leurs Livres, qu'ils croyent l'immortalité de l'ame, & la réfurrection. Il y a encore beaucoup de Caraïtes répandus dans l'Europe, dans l'Afie & dans l'Afrique.

Des Sad- La plus ancienne Secte des Juifs eft celle des Sadducéens, ainfi ducéens. appellez d'un Docteur nommé Sadoc, qui a vêcu plus de deux fiècles avant JESUS-CHRIST. Le fond de leur Doctrine est af(a) Act. fez connu par l'Ecriture Sainte (a), qui témoigne qu'ils nioient XXIII.8. la Refurrection, & qu'ils ne reconnoiffoient ni Anges ni Efprits. XXII. 23. Les Juifs prétendent que Sadoc tomba dans ces erreurs, par l'abus Marc qu'il fit de la Doctrine de fon Maître Antigonus, qui enseignoit Luc XX. qu'il falloit pratiquer la Vertu fans la vûe d'aucune recompenfe. JoJor. feph (b) dit auffi qu'ils nioient l'immortalité de l'ame, mais il leur Ant. XIII. donne d'autres opinions que l'Ecriture ne leur attribue point, comme de ne reconnoître aucune forte de deftinée, & de faire dépendre tout le bonheur & le malheur des Hommes de leur Volonté & de leur bonne ou mauvaise conduite. Ce qui a fait croire mal à propos, qu'ils nioient la Providence, puifque faifant profeffion. de fuivre la Loi, ils ne pouvoient tomber dans cette impieté, quand même ils n'auroient reconnu que les cinq Livres de Moïfe, comme quelques-uns le croyent fans beaucoup de fondement. Jofeph nous apprend bien, qu'ils rejettoient toutes les Traditions, & qu'ils ne s'attachoient qu'à ce qui eft écrit, mais il ne dit point qu'ils rejettaffent les Prophetes & les autres Livres Canoniques de Ecriture. Ce qui a donné lieu à cette opinion, c'eft que J. C. (c) Matt: allegue (c) un paffage de l'Exode pour prouver la résurrection aux XXII. 32. Sadducéens, au lieu d'en alleguer des autres Livres, où il y a des

traces plus fenfibles de cette vérité. Mais cela ne prouve rien, parce que JESUS-CHRIST peut avoir eu des raifons particulieres de choisir ce paffage plûtôt qu'un autre. On pourroit feulement juger delà que bien que les Sadducéens rejettaffent les traditions des Pharifiens, ils recevoient pourtant les fens mystiques de l'Ecriture, puifque fans cela ils n'auroient pas entendu le raifonnement de JESUS-CHRIST, auquel on ne peut gueres fe difpenfer de donner un fens myftique. Peut-être auffi que n'étant pas accoûtumez à ces fortes de raifonnemens, ils eurent la bouche (d) Matt. fermée. (d) Quoi qu'il en foit, on peut juger par ce paffage quelXXII. 34. le étoit la haine des Pharifiens pour les Sadducéens, puis qu'ils.

Jof. Ant.

II. Ch.12.

tiennent confeil contre JESUS-CHRIST, parce qu'il avoit fermé la bouche à ces derniers, comme s'ils leur avoient envié la connoissance d'une vérité qu'ils croyoient eux-mêmes. Il pouvoit y avoir encore une autre raison de cette déliberation, c'eft que, comme nous l'apprend Jofeph, les Sadducéens étant fort accreditez Jean VII. chez les Grands, les Pharifiens craignoient l'union des Grands 49. vec le Peuple, qui admiroit la Doctrine de JESUS-CHRIST. de la G. S'il en faut croire le même Hiftorien les mœurs des Sadducéens des J. L.' étoient févères jufqu'à la férocité. Mais comme il étoit lui-même Pharifien, on peut bien fe défier un peu de fon fuffrage fur le fujet des Sadducéens, & conjecturer feulement de cette rufticité qu'il leur impute, que peut-être leur Morale étoit moins relâchée que celle des Pharifiens, dont l'aufterité se réduisoit presque toute à l'exterieur. En effet il est bien remarquable que jamais J ESUS-CHRIST ne fait là-deffus aucun reproche aux Sadducéens, qu'il taxe feulement d'erreur faute d'entendre l'Ecriture, au lieu qu'en toute occafion, il traite les Pharifiens avec la derniere rigueur. On peut rendre diverfes raifons de cette differente conduite du Seigneur à l'égard de ces deux Sectes. 1. Il y a cette difference entre l'erreur & le vice, que l'erreur n'eft que dans l'entendement, fouvent elle eft involontaire, au lieu que le vice eft dans la volonté, il a fa fource dans la malignité du cœur. 2. Entre les vices, il n'y en a point de plus pernicieux & de plus difficiles. à déraciner, que ceux dont les Pharifiens étoient entâchez. L'Orgueil eft le fleau de toute Religion & de toute pieté, l'Hypocrifie eft une des plus dangereufes efpeces d'Atheisme. 3. Les Sadducéens s'attachoient exactement à la Loi, au lieu que les Pharifiens la corrompoient par leurs Traditions. Deforte que le Pharisaïsme étoit une impieté couverte du voile de la Religion. Ileft vrai que c'étoit une grande avance pour les Pharifiens que de croire la réfurrection & l'immortalité de l'ame, mais leurs Traditions & leurs vices étoient des obftacles plus infurmontables à embraffer le Chriftianifme, que les erreurs des Sadducéens. Et il faut qu'elles ne fuffent pas regardées comme des erreurs capitales parmi les Juifs, puifque les Sadducéens étoient admis à toutes les Charges & dans tous les Tribunaux, & qu'ils faifoient comme les autres le Service dans le Temple. Le Souverain Sacrificateur Caïphe étoit Act. V. Sadducéen, auffi-bien que cet Ananus, qui au rapport de Joseph 17. fit mourir St. Jaques. Il eft conftant qu'au tems de notre Seigneur JESUS-CHRIST les Sadducéens faifoient un Corps confi

13

dera

Marc III.

6.

(a) Matt. derable, & une figure fort avantageuse (a). Mais l'erreur des XX. II. Sadducéens étoit juftement regardée, comme capitale parmi les Chrétiens depuis le plein établissement de l'Evangile, & fur tout depuis la réfurrection de JESUS-CHRIST, & c'est pourquoi (b) II. Saint Paul (b) cenfure fi vivement Hymenée & Philete, qui nioient la résurrection, & s'étend fort au long à la prouver comme un ar(c) I. Cor. ticle fondamental de la Religion (c).

Tim. II.

17.

XV.

(d) Marc On croit avec affez de vrai-femblance que les Herodiens dont XII.13. il eft parlé dans l'Evangile (d) étoient à peu près les mêmes que les (e) Marc Sadducéens. Il femble en effet que St. Marc (e) appelle le le(f) Matt. vain d'Herode, ce que J. C. avoit appellé (f) le levain des Sadducéens; XVI.6. parce que la plupart de ces derniers étoient dans le parti d'Hero

VIII. 15.

ci-deffus

de. Il y en a néanmoins qui croyent que c'étoit une Secte qui faifoit profeffion de croire qu'Herode étoit le Meffie. Ce qui est fort incertain & peu vrai-femblable. Il feroit peut-être plus fûr (8) Voy de dire en général, (g) que les Herodiens étoient des gens dans le P. LXXX. parti d'Herode, qui, comme la plupart des Grands, étoit fans doute Sadducéen, & par conféquent dans des interêts opposez à ceux des Pharifiens. . Ces derniers ne laiffoient pourtant pas de s'affocier les Herodiens, quand il s'agiffoit de tendre des pieges à (h) Ant. JESUS-CHRIST. Jofeph fait mention (h) de Juifs amis & parc. 28. tifans d'Herode.

J.L. XII.

Des Pharifiens.

1.1.

Les Pharifiens font ainfi appellez d'un mot Hébreu, qui fignifie féparez, parce qu'ils faifoient profeffion d'une dévotion & d'une fainteté particuliere, mais toute pleine d'affectation & d'obfervances fingulieres. Il femble que St. Paul, qui avoit été de cette Secte, faffe allusion à cette fainteté, dont fe piquoient les Pha(i) Rom. rifiens, quand il dit (i), qu'il a été séparé pour l'Evangile, parce que féparé fignifie fanctifié. Il n'eft pas aifé de découvrir l'origine de cette Secte. Comme les Pharifiens font grands Traditionnaires, il y a beaucoup d'apparence qu'elle fe forma quand les Traditions commencerent à l'emporter fur la Loi, c'est-à-dire, (k)Antiq. plus d'un fiècle avant JESUS-CHRIST. Joseph (k) qui en parL. XIII. le fouvent dans fon Hiftoire, n'en fait aucune mention avant ces Aa. tems-là. L'Ecriture Sainte (1) leur rend ce témoignage, qu'ils XXIII. 8. croyoient la Résurrection, les Anges & les Efprits. Il femble qu'on puiffe conclurre de ce que dit Jofeph (m) qu'ils avoient moins (m)Jof.de puifé leur Doctrine là-deffus dans l'Ecriture Sainte, que dans la G. des la Philofophie de Pythagore ou de Platon, puis qu'ils croyoient la Metempfychofe, c'est-à-dire, le paffage des ames en d'autres

c. 9.

J. L. II.

C. 12.

corps,

Ant.XIII.

9.& de la

Marc VII.

3, 4, 5.

Luc XI.8.

corps, au moins à l'égard des juftes, ce qui eft une maniere de réfurrection. (a) Ils attribuoient la plupart des évenemens au Def- (a) Jof. tin, par où ils entendoient le Decret de Dieu, laiffant néanmoins à l'homme la liberté de faire le bien ou le mal. Comme ils croyoient G. des J. le mérite des œuvres, ils en avoient inventé quantité de furéroga. II. Iz. toires, auxquelles ils attachoient plus de merite qu'à l'obfervation de la Loi elle-même. On ne peut gueres douter que St. Paul ne les ait eu en vuë, au moins en partie, dans fon Epître aux Romains, comme on l'a remarqué dans la Préface de cette Epître. Joseph ne parle qu'en termes généraux de leurs traditions & de leurs obfervances particulieres. Suivant l'idée que nous en a donné JESUS-CHRIST (b), on peut les réduire à ces chefs. 1. Dans (b) Matt. leurs frequentes & fcrupuleufes ablutions. Il n'y a rien que de XV. z. fort ordinaire & de fort raifonnable à fe laver les mains avant le repas. Mais les Pharifiens en faifoient un devoir réligieux, & en regardoient la négligence comme un crime capital. 2. Dans leurs longues prieres (c) qu'ils affectoient de faire dans des lieux pu- (c) Matr. blics, pour en impofer au Peuple. 3. En ce qu'ils fe croyoient VI.1. fouillez par le commerce ou l'attouchement de ce qu'ils appelloient les pécheurs (d), comme les peagers & autres gens d'une (d) Matt. vie déreglée. C'est un des devoirs de la pieté de témoigner une fainte horreur pour le vice, & la prudence Chrétienne veut auffi, qu'on évite autant qu'il fe peut le commerce des méchans. Mais ce que J. C. blâmoit en eux c'étoit leurs mépris fuperbes & cruels pour le commun des hommes (e), qu'ils regardoient avec une ef- (e) Jean pece d'horreur, & la haute opinion qu'ils avoient de leur propre voz la Voyez fainteté. Le Prophete Efaïe (f) avoit donné par avance le ca- Note fur ractère de ces gens-là. 4. Dans leurs jeûnes fréquens. On ne dif- cet enconvient pas que le jeûne ne foit une aide à la pieté, & une mar- (f) Ef. que d'humiliation agréable à Dieu, quand elle part d'un cœur en effet humilié. Mais le Pharifien en perdoit tout le fruit par fon oftentation, & il changeoit l'idée du jeûne en prenant pour la vertu même, ce qui n'eft qu'un fecours pour la pratique de la vertu. C'est comme fi un enfant tiroit vanité de ce qu'il a befoin qu'on le porte, ou, un vieillard de ce qu'il ne fauroit marcher fans appui. 5. Dans leur affectation à payer la dixme des moindres chofes, & au-delà de ce qu'exigeoit la Loi. JESUS-CHRIST (g) ne (g) Matt. les blâme pas de ce qu'ils payoient la dixme, la Loi l'ordonnoit, XXIIL mais de ce qu'il fembloit qu'ils prétendiffent compenfer par cette exactitude l'omiffion & la violation des devoirs les plus effen

H..Luc

VII. 39.

VII.39.

droit.

LXV. 5

tiels. 6. Dans une obfervation fi fcrupuleufe du Sabbat qu'ils Matt XII. n'auroient pas voulu qu'on fe garantît de la faim ce jour-là en Luc froiffant des épics de ble, ou qu'on foulageât un malade.

VI.7.

XXIII. 5.

*

7. En

ce qu'ils portoient des Phylacteres plus larges & de plus longues Matth. franges que les autres. Ces Phylacteres étoient des bandes de parchemin, où étoient écrits une trentaine de passages tirez de Ï'Exode & du Deuteronome, & que les Juifs portoient au bras gauche & à la tête en fouvenance de la Loi. Il y a des Savans qui croyent qu'ils étoient d'inftitution divine, fondez fur Exod. XIII. 9. Deut, VI. 8. Ces paffages peuvent néanmoins s'entendre figurément, comme les entendent les Caraïtes, qui ne portent point de Phylacteres. Quoi qu'il en foit, au tems de notre Seigneur JESUS-CHRIST, tous les Juifs en portoient, fur tout dans les Šynagogues, les Sadducéens qui ne s'attachoient qu'à la Loi, auflìbien que les Pharifiens, mais les derniers les portoient plus larges pour donner une plus haute idée de leur fainteté. Ces dehors de Religion & de pieté leur avoient tellement gagné la confiance & l'affection du Peuple, qu'ils en étoient abfolument les Maîtres, quoi que, comme on l'a déja dit, ils le regardaffent avec un fouverain mépris.

Jof. Ant.

Ces difpofitions du Peuple en faveur des Pharifiens obliXIII.23. gerent les Grands à les ménager. Ainfi aimez du Peuple & redoutez des Grands, ils avoient un pouvoir d'autant plus dangereux, qu'ils avoient le cœur très-mauvais. On peut juger de leur caractère par les Anathemes frequens, que JESUS-CHRIST a lancez contre-eux, & par les portraits qu'il les portraits qu'il en fait. Il les reprefente comme des monftres d'orgueuil, des hypocrites qui fous le voile de la fainteté cachoient les ames les plus noires, & des impies qui anéantiffoient la Loi de Dieu par leurs Traditions. 11 y a pourtant lieu de croire, que des jugemens fi rigoureux ne portoient que fur le plus grand nombre, & que tous les Pharifiens n'étoient pas d'un caractère fi odieux. A la timidité près on reJean III. marque dans Nicodeme les fentimens & les démarches d'un homme de bien. On peut faire le même jugement de Gamaliel. Si Saul fut perfécuteur ce fut par un zèle aveugle, mais fans compAct.X.XII. ter le témoignage qu'il fe rend à lui-même, on doit juger par la grace extraordinaire que Dieu lui fit, qu'il n'étoit pas entâché des autres défauts de fa Secte. Ce qu'il en dit lui-même qu'elle étoit la plus exacte de toutes ne peut fe prendre qu'en bonne part.

3.

La

Phylactere eft un mot Grec qui fignific mémorial ou préfervatif. C'est une espece d'amulete

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