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Et dans la douce alégresse
Dont tu sais nous abreuver,
Nous puiserons la sagesse

Qu'il chercha sans la trouver.

J. B. ROUSSEAU.

REMARQUE. Les véritables quatrains n'ont aucune liaison pour le sens, et la morale en est ordinairement la matière.-EXEMPLES: Ne demandez à Dieu ni gloire ni richesse,

Ni ces biens dont l'éciat rend le peuple étonné:
Mais pour bien commander, demandez la sagesse ;
Avec un don si saint tout vous sera donné.

Ecoutez et lisez la céleste parole,

Que dans les livres saints Dieu nous donne pour loi.
I politique humaine au prix d'elle est frivole,
Et forme plus souvent un tyran qu'un bon roi.

II. Stances de six vers.

Elles sont composées d'un quatrain et de deux vers d'une même rime, qui se mettent au commencement ou à la fin. D'ailleurs les vers d'un quatrain se mêlent de la même manière que ci-dessus.

Si les deux vers d'une même rime sont au commencement, alors à la fin du troisième on met ordinairement un repos, et le sens ne doit pas s'étendre jusqu'au quatrième. Ce repos donne beaucoup de grâce et d'harmonie à cette sorte de stances.

On peut voir, par les exemples suivans, que ce repos peut être plus ou moius marqué, et qu'il n'est pas rigoureusement exigé dans les sixains.

Ce n'est donc point assez que ce peuple perfide,

De la sainte cité profanateur stupide,

Ait dans tout l'Orient porté ses étendards;
Et paisible tyran de la Grèce abattue,
Partage à notre vue

La plus belle moitié du trône des Césars.

Des veilles, des travaux un faible cœur s'étonne.
Apprenons toutefois, que le fils de Latone

Dont nous suivons la Cour,

Ne nous vend qu'à ce prix ces traits de vive flamme,
Et ces ailes de feu qui ravissent une ame

Au céleste séjour.

La place de ce repos varie, et est tantôt après le second, tantôt après le quatrième vers, dans les sixains où les deux vers d'une même rime sont à la fin de la strophe, comme dans les stances suivantes:

Seigneur, dans ton temple adorable
Quel mortel est digne d'entrer?
Qui pourra, grand Dieu, pénétrer
Ce sanctuaire impénétrable,

Où tes Saints inclinés, d'un œil respectueux
Contemplent de ton front l'éclat majestueux?

Ce sera celui qui du vice
Evite le sentier impur,

Qui marche d'un pas ferme et sûr,
Dans le chemin de la justice;
Attentif et fidèle à distiguer sa voix,
Intrépide et sévère à pratiquer ses lois.

Celui devant qui le superbe,
Enflé d'une vaine splendeur,
Paraît plus bas dans sa grandeur
Que l'insecte caché sous l'herbe;
Qui bravant du méchant le faste couronné,
Honore la vertu du juste infortuné.

III. Stances de huit vers.

Ces stances ne sont ordinairement que deux

quatrains joints ensemble. Le sens doit finir après le premier; et les vers de tous les deux s'entrelacent, comme nous l'avous déjà dit. Exemple:

Tel en un sacré vallon,

Sur le bord d'une onde pure,
Croit à l'abri de l'Aquilon

Un jeune lys, l'amour de la nature.

Loin du monde élevé, de tous les dons des Cieux

Il est orné dès sa naissance;

Et du méchant l'abord contagieux

N'altère point son innocence.

RACINE, chœurs d'Athalie.

Si quelque jour étant ivre
La mort arrêtait mes pas,
Je ne voudrais pas revivre
Après un si doux trépas:
Je m'en irais dans d'Averne
Faire enivrer Alecton,

Et bâtir une taverne

Dans le manoir de Pluton. MAÎTRE ADAM.

Ces stances peuvent aussi commencer par deux vers sur une même rime, et les six autres sont sur des rimes croisées. Quelquefois aussi ces stances n'ont qu'un sixain sur deux ou trois rimes, après quoi viennent deux vers de même rime.

Ces mélanges de rime peuvent aisément se concevoir; sans qu'il soit nécessaire d'en citer des exemples; d'ailleurs ils ne sont pas

communs.

IV. Stances de dix vers.

Les stances de dix vers ne sont autre chose qu'un quatrain et un sixain, dont les vers s'entremêlent selon les règles ordinaires. Elles tirent leur harmonie d'un premier repos placé à la fin du quatrain, et d'un second après le septième vers. Exemple:

C'est un arrêt du Ciel, il faut que l'homme meure
Tel est son partage et son sort:

Rien n'est plus certain que la mort,

Et rien plus incertain que cette dernière heure.
Heureuse incertitude, utile obscurité,
Par où ta divine bonté

A veiller, à prier, sans cesse nous convie!
Que ne pouvons-nous point avec un tel secours,
Qui nous fait regarder tous les jours de la vie
Comme le dernier de nos jours.

Les Cieux instruisent la terre
A révérer leur auteur;

Tout ce que leur globe enserre,
Célèbre un Dieu créateur.
Quel plus sublime cantique
Que ce concert magnifique
De tous les célestes corps!
Quelle grandeur infinie!
Quelle divine harmonie
Résulte de leurs accords!

RÈGLES POUR LES STANCES DE NOMBRE IMPAIR.

Ces stances doivent nécessairement avoir trois vers sur une même rime. L'ordonnance des vers y est d'ailleurs arbitraire, excepté qu'on que le quatrain ne peut mettre que deux rimes semblables de suite, et par lequel commencent les stances de sept ou de neuf vers, doit être terminé par un repos.

Stances de cinq vers.

O rives du Jourdain! ô champs aimés des Cieux
Sacrés monts, fertiles vallées,

Par cent miracles signalées,
Du doux pays de nos ayeux
Serons-nous toujours exilées?

Pardonne, Dieu puissant, pardonne à ma faiblesse:
A l'aspect des méchans, confus, épouvanté,

Le trouble m'a saisi, mes pas ont hésité;
Mon zèle m'a trahi, Seigneur, je le confesse,
En voyant leur prospérité.

Stances de sept vers.

Si la loi du Seigneur vous touche:

Si le mensonge vous fait peur,

Si la justice en votre cœur

Règne aussi bien qu'en votre bouche;

Parlez, fils des hommes, pourquoi

Faut-il qu'une haîne farouche

Préside aux jugemens que vous lancez sur moi?

Stances de neuf vers.

Quel rempart, quelle autre barrière
Pourra défendre l'innocent
Contre la fraude meurtrière
De l'impie adroit et puissant?
Sa langue aux feintes préparée
Ressemble à la flèche acérée
Qui part et frappe en un moment.
C'est un feu léger dans l'entrée,
Qui suit un long embrasement.

De quelques ouvrages composés de stances.

Les principaux de ces ouvrages après l'ode, sont le sonnet et le rondeau: après avoir traité de la première, nons nous occuperons de ces deux derniers qui sont de petites pièces de poésie encore assez cn usage, et qui ont des règles particulières.

De l'Ode.

L'ode est un petit poëme qui offre bien des écueils: "On y veut de l'inspiration," dit D'Alembert, " et l'inspiration de commande est bien faible; on y veut de l'élévation, et l'enflure est à côté du sublime; on y veut de l'enthousiasme, et en même temps de la raison; c'est-à-dire, non pas tout-à-fait, mais à peu près les deux contraires." "La raison et l'esprit," dit-il ailleurs, "sont pour les odes un léger ornement: ce poëme exige le talent de la grande poésie, l'art de mettre les vérités en images, une oreille sensible et sévère; enfin cet heureux choix de mots, si essentiel à la versification, et surtout à celle de l'ode, dont l'orgueil rejette toujours ce qui est aussi commun dans les expressions que dans les idées." Ecoutons Boileau (Art Poétique, chant second:)

Il faut que le cœur seul parle dans l'élégie.
L'ode avec plus d'éclat, et non moins d'énergie,
Elevant jusqu'au ciel son vol ambitieux,

Entretient dans ses vers commerce avec les dieux:
Aux athlètes, dans Pise, elle ouvre la barrière;

Chante un vainqueur poudreux au bout de la carrière;

Mène Achille tremblant aux bords du Simoïs,

Ou fait fléchir l'Escaut sous le joug de Louïs.

Tantôt comme une abeille ardente à son ouvrage,
Elle s'en va de fleurs dépouiller le rivage:
Elle peint les festins, les danses, et les ris;
Vante un baiser cueilli sur les lèvres d'Iris,
Qui mollement résiste, et par un doux caprice,
Quelquefois le refuse afin qu'on le ravisse.
Son style impétueux souvent marche au hasard:
Chez elle, un beau désordre est un effet de l'art.

Les odes suivantes, qu'on peut regarder comme des modèles, sont très-propres à faire sentir les beautés dont ce poëme est susceptible.

VOL. 11.

Ode à la Fortune.

Fortune, dont la main couronne
Les forfaits les plus inouis,
Du faux éclat qui t'environne
Serons-nous toujours éblouis?
Jusques à quand, trompeuse idole,
D'un culte honteux et frivole
Honorerons-nous tes autels?
Verra-t-on toujours tes caprices
Consacrés par les sacrifices
Et par l'hommage des mortels?

Le peuple, dans ton moindre onvrage
Adorant la prospérité,

Te nomme grandeur de courage,
Valeur, prudence, fermeté :
Du titre de vertu suprême
Il dépouille la vertu même
Pour le vice que tu chéris;
Et toujours ses fausses maximes
Erigent en héros sublimes
Tes plus coupables favoris.

Mais de quelque superbe titre
Dont ces héros soient revêtus,
Prenons la raison pour arbitre
Et cherchons en eux leurs vertus
Je n'y trouve qu'extravagance,
Faiblesse, injustice, arrogance,
Trahisons, fureurs, cruautés:
Etrange vertu qui se forme
Souvent de l'assemblage énorme
Des vices les plus détestés!

Apprends que la seule sagesse
Peut faire les héros parfaits;
Qu'elle voit toute la bassesse
De ceux que ta faveur a faits;
Qu'elle n'adopte point la gloire
Qui naft d'une injuste victoire
Que le sort remporte pour eux;
Et que, devant ses yeux stoïques,
Leurs vertus les plus héroïques
Ne sont que des crimes heureux.

Quoi! Rome et l'Italie en cendre
Me feront honorer Sylla?
J'admirerai dans Alexandre
Ce que j'abhorre en Attila?
J'appellerai vertu guerrière
Une vaillance meurtrière

*K

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