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trente-quatrième de son ministère de prêtre, il est contraint par l'âge et la maladie de mettre un terme à ses veilles, et il n'est guères probable que, dans une carrière ainsi occupée, la cessation du travail précède de bien long-temps celle de la vie. On doit donc, si je ne me trompe, placer la mort d'Orderic Vital en 1141, ou au plus tard en 1142. Les auteurs de l'Histoire littéraire de la France ont fixé à l'an 1143 l'époque où se termine son ouvrage ; ils sont évidemment dans l'erreur à la fin de son dernier livre, Orderic parle d'Etienne, roi d'Angleterre, comme actuellement en captivité; or ce prince, fait prisonnier à la bataille de Lincoln, le 2 février 1141, fut échangé au mois de novembre de la même année. Il rapporte la mort de Jean, évêque de Lisieux, comme si récente qu'il n'était pas encore remplacé, et l'évêque était mort le 21 mai 1141. Enfin il compte douze ans depuis l'élection du pape Innocent II, qui avait eu lieu au mois de février 1130. Tout s'accorde donc à indiquer l'année 1141 comme l'époque à laquelle Orderic fut forcé d'interrompre des travaux auxquels il avait dévoué sa

vie.

Son ouvrage, consacré surtout à la gloire de la Normandie, ne comprenait d'abord que les sept

derniers livres, où l'histoire des Normands tient en effet la principale place. Il y ajouta plus tard quatre livres, qui sont aujourd'hui les 3°, 4°, 5° et 6o, soit pour donner, sur certains événemens, de plus amples détails, soit pour associer à la gloire de la Normandie celle de l'abbaye d'Ouche dont ces livres nouveaux expliquent minutieusement la fondation et les progrès. Pour sa propre gloire enfin, et dans l'espoir de léguer à la postérité une histoire universelle et complète depuis Jésus-Christ jusqu'à son temps, il écrivit les li– vres 1 et 2, long extrait des Evangiles, des Actes des Apôtres, des légendes relatives à l'établisse-ment du christianisme en Asie et en Afrique aussi bien qu'en Europe, et qui se terminent par une petite chronique, ou plutôt une nomenclature des Empereurs et des Papes. Alors seulement Orderic crut son œuvre accomplie, et lui donna le nom d'Historia ecclesiastica, titre qui prouve simplement, comme nous l'avons déjà remarqué, à quel point l'Église était alors le centre de la société.

A coup sûr, ce mode de composition n'a pas peu contribué au désordre qui règne dans l'ouvrage du moine de Saint-Evroul: uniquement appliqué à rassembler de toutes parts des faits, des traditions, des aventures, des actes, des lettres, il a

:

vu son livre changer plusieurs fois de forme, de but, et ne s'est guères inquiété que d'y faire entrer, n'importe à quelle place, tout ce qu'il parvenait à savoir. Aussi, en plus d'un endroit, les matériaux semblent-ils jetés pêle-mêle et selon le hasard qui les a fait tomber sous la main de l'auteur tantôt il coupe en plusieurs portions, séparées par de longs intervalles, le récit du même événement, tantôt il répète plusieurs fois le même récit; le lecteur est souvent surpris du bizarre rapprochement des temps, des lieux, des sujets les plus divers; aucun art, aucune méthode ne se laisse entrevoir dans ce nombre immense de faits, et quand on considère l'ouvrage d'une seule vue et dans son ensemble, il est impossible de ne pas être surtout frappé de cette prodigieuse confusion. Mais elle couvre une véritable richesse; aucun livre ne contient sur l'histoire des 11° et 12° siècles, sur l'état politique, civil et religieux de la société en Occident, sur les moeurs féodales, monastiques et populaires, tant et de si précieux renseignemens. Dans son honnête et naïve bonhomie, Orderic ne prétend rien prouver, rien cacher; il raconte et juge, et blâme ou approuve, sans autre intention que de manifester ce qu'il sait et ce qu'il pense, simple, crédule, dépourvu

de sagacité et de critique, mais indépendant et sincère, mérites rares parmi les moines chronide son époque, à qui d'ailleurs ceux qu'il pas manquent aussi bien qu'à lui.

queurs

n'a

L'histoire d'Orderic n'avait jamais été traduite : la version que nous publions est l'ouvrage de M. Louis Du Bois, de Lizieux, savant aussi laborieux que modeste, qui s'est voué à l'étude de tout ce qui peut intéresser la Normandie sa patrie, et déjà connu par d'utiles travaux sur les antiquités et la statistique de cette belle province. L'une des principales difficultés que présente la lecture d'Orderic Vital réside dans le grand nombre de petits faits, d'allusions et de noms géographiques qui appartiennent à la Normandie : il importait donc que la traduction fût faite sur les lieux mêmes, au milieu des souvenirs, et par un homme capable d'expliquer, dans des notes courtes mais multipliées, les obscurités pour ainsi dire locales du texte. M. Du Bois a bien voulu se charger de ce minutieux travail : c'est à lui qu'il convient d'en rendre compte, et nous terminerons cette notice par l'insertion textuelle des renseignemens qu'il a rédigés sur les manuscrits de l'historien de Saint-Evroul, sur les travaux dont ils avaient été l'objet, et sur les recherches auxquelles il s'est lui-même livré.

<< Dans les plus anciens manuscrits d'Orderic Vital, son ouvrage a pour titre : Orderici Vitalis, Angli, monachi Uticensis, Historia ecclesiastica. C'est ainsi qu'il est intitulé dans un manuscrit provenant de l'abbaye même de Saint-Evroul, que nous croyons pouvoir regarder comme autographe, et dont nous parlerons tout à l'heure avec plus de détails. C'est d'après des manuscrits plus que Duchesne, qui n'eut pas connaissance de cet autographe, a imprimé dans son édition : Orderici Vitalis, Angligenæ, cœnobii Uticensis monachi, Historiæ ecclesiasticæ libri XIII.

récens

<«< Le manuscrit autographe de l'abbaye de SaintEvroul a servi primitivement d'original pour les diverses copies qui se répandirent de cette importante histoire.

« Au commencement du 16° siècle, un moine de Saint-Evroul (probablement Vallin) fit une copie d'après ce manuscrit, alors composé de quatre volumes et tout-à-fait complet. La copie composait aussi quatre volumes d'une écriture peu serrée à la vérité, mais peu lisible. Suivant Charles Du Jardin, prieur de l'abbaye en 1717, les deux premiers tomes de cette copie se trouvaient à l'abbaye de Saint-Ouen à Rouen, et les deux autres à celle de Glanfeuil-sur-Loire. J'ai

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