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couler les larmes de la marine reconnaissante!

Cependant les travaux du port se poussent avec activité : argent, promesses, gratifications, promesses surtout, les représentans n'épargnent rien pour avancer l'armement.

Jamais, de mémoire d'homme, autant de zèle, autant d'ardeur, n'ont été déployés que dans cette circonstance,

COMBAT NAVAL DU 13 PRAIRIAL AN II,
jer JUIN 1794.

Le coup de partance (*) a retenti dans la rade; Brest l'a répété des batteries du château, de sa batterie basse, et de la batterie républicaine (lisez royale, armée de vingt-quatre pièces en bronze du calibre de quarante-huit. Les forts ont répondu au signal, et les marins en retard se hâtent de regagner leurs bords respectifs. Mille canots couvrent une étendue de trois lieues. Tous brûlent du désir de prouver à l'Angleterre que la France, toujours invincible, saisit avec empressement l'occasion de se mesurer avec elle.

Peuples rivaux, peuples faits pour vous estimer, mettez, ah' mettez un terme à vos sanglans

(*) Le

coup de partance est un coup de canon tiré à bord d'un vaisseau pour annoncer son départ.

débats! l'humanité vous l'ordonne, l'historien a

le droit de vous le dire.

On était dans la belle saison; aucun nuage n'obscurcissait l'atmosphère, et un léger vent frais enflait les voiles des vaisseaux.

Quel admirable coup-d'oeil que celui d'une flotte nombreuse traversant le Goulet (*), et se formant, sur trois lignes, au milieu de la mer!

Nous avions dépassé les batteries de gauche et de droite (**) dont les boulets, se croisant, compromettront toujours la sûreté des escadres, même les plus formidables, qui voudront entrer à Brest, quand Prieur de la Marne, averti par la chute du jour qu'il doit se retirer, demande son canot, et prononce ces paroles : « Mes amis, f..... le tour aux Anglais!» « En doutes-tu? s'écrièrent les marins présens, nous sommes Français. »> « Vive la République ! » ajouta Prieur. « Vivent la France et la gloire nationale! » répondit un

(*) Canal étroit et court par lequel la grande mer communique, soit avec un port soit avec une rade. Le goulet de Brest est très-dangereux à cause des courans, et fait sentir tout le prix d'un pilote côtier, homme pour lequel, en général, on n'a pas assez d'égards.

(**) Le fort Mingan et les Trois-Bâtons.

jeune homme que nous connaissons mieux que

personne.

Déjà le phare Saint-Mathieu a offert à la moitié (*) de l'armée un spectacle nouveau pour elle. Des fanaux allumés à tous les bords indiquent la marche à suivre et l'ordre des mouvemens.

On voguait sur trois lignes, et dans l'ordre le plus parfait. Chaque jour de nouvelles prises (**) ajoutaient à l'espoir de l'armée, lorsque le 9 prairial an 11, de onze heures à midi, les gabiers du haut des hunes font retentir ces mots : « Navires sous le vent à nous. »

Les haubans, les vergues, le pont, la dunette, l'avant surtout, sont à l'instant couverts de ma

(*) La moitié des garnisons, en effet, voyaient la mer pour la première fois; mais cette portion de l'escadre, appartenant ou à la levée des trois cent mille hommes, ou à la première réquisition, avait déjà combattu sur terre, au nord, à l'ouest et au sud.

(**) Dans un seul jour on amarina dix-sept navires portugais chargés d'oranges pour Londres. L'un de ces navires, le Saint-Ignace, défilant sous la poupe de la Montagne, toucha de son beaupré la seconde galerie, précisément à l'endroit où se trouvait Jean-Bon-Saint-André, qui se fâcha vivement contre l'étourdi dont la maladresse l'avait presque renversé,

Le jeune Bouvet de Cressé, qui se trouvait à côté de lui,

rins. Des cris de joie se font entendre, et l'impatience de combattre se manifeste sur toutes les figures. Ce ne fut qu'avec peine, que le capitaine de vaisseau Vignot, le capitaine de pavillon Basire, et le major-général Delmotte arrivèrent jusqu'à la poulaine.

Les lunettes sont braquées, et ce qui ne paraissait d'abord qu'un point dans l'horizon, est reconnu pour une flotte ennemie.

Le signal du branle-bas-général-partout est donné; l'armée se forme sur une seule ligne, et les entre-ponts des vaisseaux ne présentent plus que de longues galeries, où l'on ne trouve pas même un clou.

Sans changer l'ordre de route on marche à l'ennemi, qui semble manoeuvrer pour gagner le vent, et éviter un engagement, qui cependant eut lieu, sur le soir, entre l'arrière-garde française et l'avant-garde anglaise.

et qui riait à gorge déployée de sa colère, lui dit d'un grand sang-froid:

ECCE TRICORNIGERI VENIUNT, NIGRA AGMINA, PATRES. faisant allusion à la proue de ce navire, qui représentait le saint fondateur des Jésuites, Loyola, en long manteau noir. A cette époque, la rade, le port de Brest et la rivière de Landerneau étaient encombrés de prises anglaises, dont les pavillons renversés étaient à la traîne.

Victoires et Conquêtes des Français.

Le vaisseau amiral, la Montagne, occupait le centre de l'armée, et la distance des eaux ou l'on se battait était telle que dans cette affaire, qui dura plus d'une heure, le feu seul des canons et les boulets rouges furent aperçus. Aucune détonation ne se faisait entendre,

Deux vaisseaux anglais avaient pris le Révolutionnaire en poupe, et deux autres foudroyaient son bâbord. Quoiqu'accablé par des forces aussi supérieures, et démâté, le Révolutionnaire fut remorqué à Rochefort. On ne le revit plus. S'il eût serré le vent, il eût eu comme les autres, l'inappréciable honneur de combattre les 10 et 13 prairial.

Il était nuit : la flotte française avait hissé des fanaux à tous les mâts d'artimon. Honteux de cette manœuvre, les Anglais finirent par s'éclairer, au grand plaisir des nôtres.

L'aurore parut: nous étions toujours maîtres du vent. Les deux armées défilèrent deux fois l'une sur l'autre, aux cris distincts et multipliés de hurra! et de vive la république! mais presque hors de portée. On s'essayait. Les boulets, en tombant à la mer, en faisaient jaillir l'onde, et montraient aux spectateurs la nature si souvent et si bien imitée par Vernet, qu'un honorable membre de sa famille, dont le crayon est

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