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flammes et des eaux. Les Français eurent dans cette action quarante morts, et cent blessés.

Louis xvi éleva le chevalier du Couédic au grade de capitaine de vaisseau; mais il ne put jouir long-temps de la haute réputation que lui avaient acquise sa valeur et son humanité. Mort des suites de ses blessures, il fut vivement regretté, et son nom fut prononcé avec distinction dans toute l'Europe, mais nulle part plus qu'en Angleterre.

Peu de jours auparavant, les côtes de la GrandeBretagne avaient été témoins d'un combat non moins sanglant, et non moins honorable pour les deux partis. Paul Jones, Écossais de naissance, mais attaché au service des États-Unis, avait établi sa croisière, d'abord dans les mers d'Irlande, puis dans celles d'Écosse, et il y attendait l'occasion de faire quelque prise, ou, selon son usage, de descendre sur quelque point de la côte, pour en piller les habitans.

Son escadrille était composée du Bonhomme Richard, de quarante canons, et de l'Alliance, de trente-six, bâtimens américains; en outre, de la frégate française, la Pallas, à la solde du congrès, et de deux autres vaisseaux de moindre rang. Il rencontra une flotte marchande anglaise, qui revenait de la Baltique, sous l'escorte du capitaine Pearson, commandant la frégate le Sé

rapis, de quarante-quatre canons, et la Comtesse de Scarborough, de vingt.

L'Anglais n'a pas plus tôt aperçu l'Américain. qu'il force de voiles, pour le combattre, tandis que les bâtimens marchands cherchent à gagner la côte. Paul Jones se forme en ordre de bataille. Les deux ennemis se portent l'un sur l'autre avec résolution, à la chute du jour, et le combat s'engage avec une valeur égale. Le Sérapis avait l'avantage de l'échantillon et des manoeuvres; Paul Jones, pour le lui ôter, prend le parti de combattre plus serré, et s'avance au point que les deux frégates s'engagent vergue à vergue. Les sabords même sont si rapprochés, que, de part et d'autre, la volée des canons se touche. On continue, dans cette position difficile, à se battre depuis huit heures du soir jusqu'à dix, avec une intrépidité qui tient de la fureur.

Cependant l'artillerie des Américains commençait à faiblir. Le Bonhomme Richard ayant reçu plusieurs boulets de gros calibre, à fleur d'eau, il ne lui était plus possible de faire usage de ses batteries basses; et, dans la batterie haute, deux ou trois pièces avaient crevé, en tuant les canonniers qui les servaient. Il ne lui en restait plus que trois en état de tirer, et il les employait contre la mâture de la frégate ennemie.

Voyant le pen d'efficacité des boulets enchaînés ou ramés, Paul Jones a recours à un autre moyen de combattre, et lance, sur le bord anglais, de nombreuses grenades et des feux d'artifice; mais déjà le bâtiment qu'il monte fait eau de toutes parts, et menace de couler. Quelques officiers, s'apercevant de cet état de détresse, lui demandent s'il pense à se rendre. « Non! » leur répond-il, d'une voix terrible, et il ne s'occupe plus qu'à faire jeter de nouveaux feux. Plusieurs parties du Sérapis sont embrasées, et les Anglais, à peine, peuvent éteindre les flammes. Une gargousse enfin ayant pris feu, l'explosion se communique, en un instant, à toutes les autres, et produit une terrible détonnation. Tout ce qui se trouve auprès de l'artimon tombe, frappé de mort, et les canons de l'arrière du navire sont démontés. Pearson, cependant, ne se laisse point abattre par cet accident, et ordonne l'abordage : Paul Jones se dispose à le repousser. Les Anglais, en se lançant sur son bord, trouvent les Américains prêts à les recevoir, la pique basse, et s'empressent de repasser sur leur bâtiment.

Le feu, dans l'intervalle, s'était communiqué du Sérapis au Bonhomme Richard, et tous deux étaient la proie des flammes. Aucun péril ne pouvait ébranler ces hommes intrépides. L'obs

curité était profonde; les combattans ne s'apercevaient plus qu'à la lueur de l'incendie, et à travers des tourbillons de fumée, tandis que la mer était éclairée au loin.

Dans cet instant, survint l'autre frégate américaine, l'Alliance. Ne distinguant, au milieu de cette confusion, ni amis, ni ennemis, elle lâcha toute sa bordée au Bonhomme Richard, et lui tua une partie des défenseurs qui lui restaient. Dès que son erreur fut dissipée, elle se porta, avec un surcroît de furie, contre le Sérapis. Alors, le valeureux Anglais, voyant une partie des siens morts ou blessés, son artillerie démontée, son navire démâté, et brûlant de toutes parts, amena son pavillon.

On travailla, en commun, à éteindre les flammes et l'on y réussit enfin. On fut moins heureux dans les efforts que l'on fit pour boucher les nombreuses voies d'eau du Bonhomme Richard, qui coula le lendemain de l'action.

De trois cent soixante-quinze hommes, qui composaient son équipage, trois cents furent tués ou blessés. Les Anglais n'eurent que quarante-neuf morts, et leurs blessés ne s'élevèrent au-dessus de soixante-huit.

pas

Les fastes de la marine offrent peu d'exemples d'un engagement aussi effroyable, par l'acharne

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ment des deux partis. Pendant ce temps, la Pallas avait attaqué la Comtesse de Scarborough, et s'en était emparée, non sans une vive résistance. Paul Jones, après une victoire aussi disputée et aussi déplorable, erra, durant quelques jours, au gré des vents, dans la mer du Nord, avec ses bâtimens délabrés, et parvint enfin à relâcher au Texel.

Cependant Guichen, qui, après l'ouragan désastreux dont nous avons parlé plus haut, n'avait plus à redouter la présence de Rodney, expédia pour Cadix la flotte marchande de Saint-Domingue. C'était le premier convoi qui, depuis le commencement de la guerre, fût arrivé en Europe sans échec. En général, le soin d'escorter les navires du commerce avait été trop négligé par le gouvernement, et un préjugé, malheureusement trop répandu parmi les officiers de la marine royale, le leur faisait trouver au-dessous de leur dignité. Cette prévention donna un nouveau mérite au zèle que marquèrent, à cet égard, quelques marins distingués, dans le nombre desquels on doit accorder le premier rang au brave La Motte-Piquet, dont la réputation s'est particulièrement établie sur le dévoûment, le courage et l'habileté qu'il mit à protéger divers convois (*).

(*) La Motte-Piquet était à la Martinique, avec six vais

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