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qu'on était parvenu à leur inspirer contre leurs alliés, ayant laissé pénétrer des renforts, les assiégés furent bientôt plus nombreux que les assiégeans : et, d'une autre part, la flotte, dans une rade découverte, éprouvait quelquefois des coups de vent, plus ou moins pernicieux à son gréement.

D'Estaing, dans cette situation critique, ne voit d'espoir de succès que dans la chance d'un assaut le jour est indiqué; lui-même conduit une colonne. Toutefois, si l'attaque est vigoureuse, la défense du gouverneur Prévost n'est pas moins opiniâtre. Près de planter leurs drapeaux sur les remparts, les Français et les Américains sont repoussés. Les pertes qu'ils éprouvent, jointes à une blessure, que reçoit d'Estaing, provoquent la levée du siége et le départ de la flotte.

Byron avait partagé son armée en trois escadres; l'amiral français, à son imitation, fit trois divisions de la sienne : la première aux ordres du comte de Grasse, se rendit à Saint-Domingue; la seconde eut pour chef La Motte-Piquet (*),

(*) Connu du Couchant à l'Aurore,
Guerrier, cher même à tes rivaux,
La France sait ce que tu vaux,
Et l'Angleterre mieux encore.

Mercure de France.

et pour destination, la Martinique; la troisième, commandée par Vaudreuil, alla croiser dans la baie de Chesapeak. Quant à d'Estaing, il revint en France, avec le seul vaisseau qu'il montait, le Languedoc.

Ce qu'il y eut de très-particulier dans l'infructueuse expédition de la Géorgie, c'est que, trois cents lieues de là, elle opérait l'évacuation de Rhode-Island, que les forces combinées des alliés n'avaient pu obtenir, l'année précédente. Clinton l'avait ordonnée sur l'avis de l'approché des Français, en sorte que les Américains s'en emparèrent, sans coup férir; et le pavillon britannique, qu'ils y laissèrent flotter quelque temps encore, leur valut de riches prises, qui entrèrent sans défiance dans le port.

Cependant l'Angleterre voyait diminuer de jour en jour les immenses profits dont s'enrichissaient ordinairement ses corsaires. Sous prétexte que les neutres transportaient chez ses ennemis des munitions prohibées, ou qu'ils se rendaient dans des ports qu'elle déclarait bloqués, sans qu'ils le fussent effectivement, elle s'arrogeait le droit de visiter leurs bâtimens, et, le plus souvent, de les confisquer.

Fatiguées de ces vexations, les puissances du Nord crurent les circonstances favorables pour

s'en affranchir, et, sous le nom de neutralité armée, elles formèrent une ligue pacifique, destinée à protéger leur commerce. Elles armèrent, en effet, sans dessein hostile, mais avec celui de repousser, par la force, les perquisitions insolentes que se permettaient, à leur égard, les moindres bâtimens de guerre. Elles déclarèrent ne reconnaître pour munitions prohibées, que les objets, moyens immédiats d'attaque ou de défense, tels que les poudres, les boulets, les canons, etc.; mais nullement les madriers, planches, poutres, cordages, fers et goudrons, matières ordinaires de leurs opérations mercantiles. La signification qu'elles firent de cet acte aux puissances belligérantes, fut accueillie la par France et par l'Espagne, comme s'accordant faitement avec les plans de leur politique.

par

Dans le temps que, chargé de remplacer d'Estaing aux Antilles, Guichen mettait à la voile, avec quinze vaisseaux, pour se rendre à sa station, Rodney (*), destiné à être son rival de gloire, dans les mêmes parages, l'avait prévenu, de quelques jours, et avait quitté l'Angleterre,

(*) Cet officier était retenu en France par ses dettes, lorsque la guerre s'alluma entre les deux couronnes. Dînant, un jour, chez le maréchal de Biron, il s'éleva, avec assez de jactance, sur la conduite également malhabile de

suivi de vingt-un vaisseaux de ligne, et d'un convoi qu'il devait, chemin faisant, conduire à Gibraltar.

La commission de l'amiral anglais, était difficile à remplir: vingt-quatre vaisseaux, espagnols et français, aux ordres de don Gaston, devaient sortir incessamment de Brest et se rendre à Cadix, à sa poursuite; la nombreuse escadre de don Louis de Cordova, et celle de l'amiral Barcello, à qui l'on avait confié le blocus de Gibraltar, croisaient, à l'entrée du détroit, sur les caps Spartel et Trafalgar; et enfin, don Juan de Langara, avec neuf vaisseaux de ligne, avait sa station en avant de Cadix, vers le cap Sainte-Marie.

C'était à travers ces nombreux ennemis que Rodney, embarrassé encore par son convoi, de

ses compatriotes et des Français, et prétendit que, s'il avait été libre, il aurait voulu détruire successivement les forces des deux alliés.

Biron se fit un point d'honneur de punir cette espèce d'insulte à sa patrie, par un acte de générosité, dont il était loin de soupçonner toute l'influence. Il paya les dettes de Rodney, et, en le lui annonçant : « Partez, monsieur, lui ditil, essayez de remplir vos promesses; les Français ne veulent pas se prévaloir des obstacles qui vous empêchaient de les accomplir; c'est par leur bravoure qu'ils mettent leurs ennemis hors de combat. » ANQUETIL.

vait essayer de pénétrer à Gibraltar. Un premier coup de vent dispersa, à trente lieues de Brest, la flotte de don Gaston; un autre désempara la croisière du détroit, et la força de rentrer à Cadix, pour réparer ses avaries. Le seul Langara fut épargné, mais, pour tomber entre les mains des Anglais.

Faute d'avoir envoyé à la découverte de l'ennemi, il ne put l'éviter, et l'attendit, dès lors, en bataille. Son courage ne put le soustraire au sort inévitable qu'appelait son infériorité. Un de ses vaisseaux brûla, quatre autres furent pris; tous, cependant, ne furent pas perdus. L'un d'eux, trop faible d'équipage pour manœuvrer par un gros temps, s'étant vu sur le point d'échouer ou de périr, les Anglais voulurent forcer les Espagnols, qu'ils tenaient à fond de cale, de les aider à sauver le bâtiment amariné; mais tous répondirent « qu'ils étaient prêts à périr avec les vainqueurs, et qu'ils ne leur donneraient aucune assistance, qu'ils n'eussent la liberté de conduire le vaisseau dans un port d'Espagne.» La nécessité força les Anglais d'y consentir, et les Espagnols les ramenèrent prisonniers à Cadix.

Libre de repasser le détroit sans obstacle, Rodney se rendit aux Antilles. Il y était à peine arrivé,

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