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des plus hautes marées. Une ouverture de quelques toises avait été laissée au milieu de la digue, pour diminuer la violence des courans, et on l'avait embarrassée par des vaisseaux qui y avaient été coulés bas. Comptant, pour renverser cet ouvrage, sur les simples efforts des vents et de la mer, les Rochellois ne s'opposèrent point à sa construction, mais les vents et la mer le respectèrent, et une nouvelle flotte anglaise, commandée par Denbigh, beau-frère de Buckingham, inhabile à surmonter cet obstacle, se vit forcée à une honteuse retraite.

Ambitieux de venger cet affront et le sien propre, à l'île de Rhé, Buckingham prépare un nouvel armement, et, à l'aide de navires maçonnés intérieurement et remplis de pierres et de poudre, qu'on devait pousser contre la digue ou y attacher, il se flatte de la détruire; mais, au moment où il allait monter le vaisseau-amiral, il fut assassiné, d'un coup de couteau, par un homme qu'il avait offensé.

Comme tout était prêt, la flotte n'en mit pas moins à la voile, et partit pour sa destination. Demandé par Richelieu, Louis revint de nouveau animer ses troupes, et il eut encore le plaisir de voir les Anglais reprendre le large, après quelques tentatives inutiles et de vaines démons

trations. Les négociations mêmes qu'ils entamérent, abattirent le courage des Rochellois, qui, depuis long-temps réduits par la famine aux dernières extrémités, eurent enfin recours à la clémence du roi. Ce prince, malgré son caractère sévère, les traita assez favorablement; ils conservèrent la liberté de leur culte; mais leurs fortifications furent démolies, le cardinal ne voulant pas que cette ville, « le repaire de l'hérésie, » comme on la nommait, pût jamais servir de défense à la rebellion.

Vainqueur des Anglais et de ses propres sujets, Louis XIII revint à Paris, avec Richelieu, qui partageait justement l'honneur d'un triomphe arraché autant à la bravoure des ennemis, qu'à l'envie des courtisans. La mémoire de cet événement fut consacrée par une inscription (**),

(*) Les généraux français eux-mêmes n'auraient pas été fâchés d'échouer dans cette expédition, parce qu'ils sentaient l'empire que le succès allait donner au cardinal de Richelieu. Bassompierre, l'un d'entre eux, disait : « Vous verrez que nous serons assez fous pour prendre la Rochelle. »

(**)

Fusis terrâ marique Anglis,

ANQUETIL.

Victà subditorum rebellantium pervicacia,

Vero veri Dei cultu restituto,

Oceano compedibus vincto,
Rupellâ in deditionem acceptâ,

que la France, mieux conduite, aurait pu renouveler, si au lieu de s'occuper de conquêtes lointaines, elle avait, dans des temps de gloire et de prospérité, travaillé efficacement à établir une marine propre à imposer à la fière Albion, qu'elle a tant de fois combattue et vaincue.

RUSSES.

La découverte du Nouveau-Monde n'offre point d'événemens plus étranges que ceux dont la Grèce, l'Asie et l'Europe furent le théâtre aux diverses époques que nous allons parcourir.

Des marchands anglais avaient remonté la Dwina, qui a son embouchure dans la mer Glaciale, et, conduits à Moscou, le czar les avait reçus avec autant de distinction que s'ils eussent été des ambassadeurs, lorsque Sélim 1, empereur des Turcs, voyant avec jalousie l'accroissement de la puissance russe, résolut d'arracher Astrakan de leurs mains, et de l'attaquer par terre et par mer.

Dubium majori clementiâ, an fortitudinis exemplo,
Regibus ac principibus frustrà conjurantibus,

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Illustrissimo, pio, justo, triumphatori,

Hoc monimentum sacravit

Principi decus, hostibus terror, posteris exemplum.

Les forces destinées à cette expédition consistaient én cinq mille cavaliers turcs et trente mille janissaires. Trois cents galères firent voile de Constantinople vers Azof. Elles avaient à bord cinq mille janissaires, trois mille pionniers, un grand nombre de Tartares, et quantité d'outils propres à remuer la terre. Les galères devaient remonter le Don depuis Azof, et dès qu'elles seraient parvenues à l'endroit où ce fleuve se rapproche le plus du Wolga, les travailleurs avaient ordre de creuser un canal de communication entre les deux fleuves, pour faciliter aux Turcs un passage de la mer Noire dans la mer Caspienne.

Ce plan d'expédition était sagement concerté : Sélim, maître d'Azof, avait un grand intérêt à s'emparer d'Astrakan, et à faire creuser ce canal. L'entrée de la mer Caspienne lui procurait celle de la Perse, par le nord de ce royaume. L'armée de terre, après une marche très-pénible, arriva enfin à Azof: Guéréi, kan des Tartares de la Crimée, s'y rendit avec ses trois fils, à la tête de ses troupes.

Après un repos de dix jours, l'armée réunie se mit en marche. Elle traversa les Steppes du Kouban, du Kouman, et arriva devant Astrakan, dont elle fit la circonvallation. La flotte, qui était

entrée dans le Don, aborda à l'endroit même où devait commencer le canal entre les deux fleuves. Déjà les pionniers avaient mis la main à l'œuvre, lorsque leurs travaux furent interrompus par le général Pierre Séméonovitz Sérébrianoï, qui venait de Moscou, à la tête de forces considérables, pour secourir Astrakan. Il tomba sur les Turcs et les défit. Un petit nombre de fuyards portèrent à Azof la nouvelle de cet événement malheureux.

Astrakan était assiégé par les troupes de terre. Sa garnison, qui comptait plus sur son courage que sur le nombre, préféra de faire une sortie vigoureuse pendant la nuit, au tourment de flotter entre la crainte et l'espérance. La sortie réussit à souhait : les assiégés tuèrent plusieurs milliers d'ennemis, et la garnison rentra dans la place, n'ayant perdu que très-peu de monde.

Instruite du sort de sa flotte, et consternée de l'échec qu'elle venait de recevoir, l'armée turque tomba dans le découragement. L'hiver approchait, les vivres tiraient à leur fin, et la crainte d'une famine fit renoncer aux projets de conquête. Les Tartares, dispersés dans le pays d'Astrakan, étaient plus portés pour les Ottomans que pour les Russes, et tâchaient de ranimer leur courage abattu. Ils s'étaient offerts de

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