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der, et Lacondamine gagna encore ce procès. C'était toujours lui qu'on chargeait de défendre la compagnie. Il en était digne par sa délicatesse sur l'honneur, par sa persévérance à réussir dans tout ce qu'il entreprenait, et par sa patience active que nul obstacle ne rebutait.

Les deux pyramides furent posées : elles ont été abattues depuis le départ des académiciens. Des raisons d'une politique inepte firent ainsi renverser ce monument utile, et le plus étonnant peut-être qu'on eût érigé à l'avantage de la science.

Lacondamine soutint encore cinq ou six autres procès qui ne sont remarquables que parce qu'il les gagna tous, quoiqu'il fût étranger, et qu'il plaidât contre des gens du pays, dont ses propres juges étaient les compatriotes et les amis.

Quand tous ces procès furent terminés; quand tous les travaux furent finis et toutes les dépenses acquittées (Godin avait un ordre positif du roi de ne laisser aucune dette en Amérique), les académiciens revinrent par différens chemins.

Le jour même où Lacondamine devait partir de Quito, ses papiers lui furent volés. C'était lui ravir le résultat et le fruit de dix années de travaux et de peines. Qu'on juge de son désespoir, de ses démarches pour les recouvrer, de

ses plaintes auprès des magistrats et de l'évêque!

Un monitoire lancé contre les voleurs, les effraya plus que les perquisitions du juge. Les papiers furent jetés, on ne sait par qui, dans la cour de la maison qu'habitait Lacondamine. Il les recouvra tous, excepté deux petits livrets peu importans, où l'on imaginait trouver quelque indication sur les mines d'or que les gens du pays croyaient que les Européens avaient été chercher sur les montagnes.

les ma

Bouguer prit, pour son retour, la même route qu'il avait tenue en allant au Pérou. Godin accepta la place de premier cosmographe du roi d'Espagne à Lima, et ne revint en France qu'après le tremblement de terre qui renversa cette ville en 1746. De Jussieu, prêt à sortir de Quito, fut retenu de force par le peuple et par gistrats qui le supplièrent de ne point les quitter tant que la petite vérole désolerait leur ville: il y avait déjà guéri beaucoup de personnes. Quand ce fléau fut apaisé, il partit pour Lima, et revint avec Godin, en traversant le Tucuman et le Paraguai, pour s'embarquer à Buenos-Ayres.

Quant à Lacondamine, il suivit son projet de descendre la rivière des Amazones, chemin trèspeu connu, dès-lors très - effrayant. Quelques moines, Jésuites espagnols, et quelques carmes

portugais avaient des cabanes, qu'ils appelaient couvens, sur les bords de ce fleuve. Lacondamine le descendit, le crayon à la main, à côté d'une boussole, observant et dessinant ses rives et ses détours.

Le roi de Portugal lui avait envoyé des passeports dès qu'il fut sur les terres de ce monarque, on le défraya partout. Les ordres étaient précis : il eut beau faire, il fallut consentir à être fêté dans tous les lieux où il se présentait, et à ne donner en échange que les témoignages de reconnaissance qu'inspire une telle générosité.

Le patron du vaisseau hollandais sur lequel il repassa en Europe n'eut pas tant d'égards pour lui que le chef de la maison de Bragance, car il lui manqua de parole, et refusa de le mettre à terre à Calais, ainsi que le portaient leurs conventions. Lacondamine passa sous les murs de cette ville, et fut contraint de suivre en Hollande le navire qu'il montait. Il pensa même périr, par suite d'une tempête qui mit le bâtiment en danger de se briser sur la côte, et il vit le patron prêt à quitter son bord, pour se jeter dans une chaloupe où, vraisemblablement, il ne l'aurait pas reçu.

Débarqué à Amsterdam, Lacondamine fut obligé d'y attendre des passe-ports des puissan

ces belligérantes. La guerre, alors, embrasait l'Europe, et les Pays-Bas étaient dévastés par les Anglais, les Hollandais et les Autrichiens réunis contre l'armée française qui en triomphait à Fontenay et à Lawfelt.

VOYAGE AU CAP DE BONNE-ESPÉRANCE.

Godin et de Jussieu n'avaient point encore quitté l'Amérique, lorsque l'académie envoya au cap de Bonne-Espérance Lacaille, chargé d'y mesurer, de tous les degrés du méridien, le plus austral dans notre continent, et d'y observer la parallaxe de la Lune.

Une voie d'eau obligea Lacaille à relâcher à Rio-Janéiro, sur les côtes du Brésil. Il y trouva Godin, qui arrivait de Buenos-Ayres, et qui n'attendait que le moment favorable pour revenir en Europe, où il repassa, l'année suivante, sur une flotte portugaise qui le conduisit à Lisbonne.

Lacaille n'éprouva point au Cap toutes les difficultés que ses confrères avaient éprouvées sous le Pôle et sous l'Équateur. Le ciel le plus serein n'opposait que rarement de légers obstacles à ses observations. La chaleur, quelquefois excessive, était moins nuisible que les glaces de la Tornéa

ou des Cordillières. Les montagnes étaient infiniment moins élevées, et les Hollandais, au lieu de lui susciter des procès, concouraient à le servir dans des opérations dont ils connaissaient toute l'utilité.

Cependant, sous ce beau ciel, il éprouva des brumes qui suspendirent ses travaux; il passa plusieurs nuits exposé à la pluie; mais plus souvent encore il travaillait dans des plaines sablonneuses, où il enfonçait jusqu'aux genoux.

Il établit ses triangles dans une étendue de trente-cinq lieues, depuis Klypfonteyn jusqu'au Cap.

On eut alors plusieurs degrés de différens méridiens, mesurés et sous l'Équateur et au-delà du tropique du capricorne. Tous ces travaux avaient été faits par des académiciens français; tous avaient été achevés en mois de vingt ans.

Ce fut alors qu'on put se flatter de connaître la véritable forme de la terre, et qu'il parut démontré qu'elle était un sphéroïde aplati vers les pôles.

Lacaille fit plus encore : il observa et détermina la position du Cap, si nécessaire à connaître pour les navigateurs, et celle de neuf mille huit cents étoiles australes qu'on ne voit point de notre hémisphère septentrional. Il en forma

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