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par l'explosion, à une hauteur prodigieuse, écrasa entièrement une maison de la place.

La terre en frémit à trois lieues à la ronde; il se fit un bruit si effroyable qu'il ébranla tous les édifices, brisa toutes les vitres, et renversa les toits de plus de trois cents habitations; enfin, malgré l'accident arrivé à cette diabolique invention, ses ravages auraient été incalculables, si le rocher qu'elle toucha ne lui eût donné une inclinaison contraire à celle qu'elle devait avoir, pour que les trois cent cinquante carcasses dont elle avait été chargée tombassent sur la ville.

Ce coup important manqué, mais qui flétrit à jamais la mémoire de Guillaume, la flotte anglaise appareilla, et regagna le port d'où elle était partie.

Quel n'eût pas été l'effet de cette terrible machine, si le Dieu qui protége la France n'avait pas veillé à la conservation de Saint-Malo? Les Anglais honteux n'eurent d'autre récompense de leur expédition, que l'exécration des peuples indignés de tant de barbarie et de tant de forfaits calculés dans le cabinet d'un prince usurpateur du trône de la Grande-Bretagne.

Le non succès de la tentative contre Saint

Malo ne fut pas le seul échec que reçurent les Anglais. Ils éprouvèrent des pertes plus réelles

encore, de la part de Tourville, qui avait cerné, près du cap Saint-Vincent, à la pointe du Portugal. une flotte marchande de quatre cents voiles, qui se rendait dans la Méditerranée, et qu'escortaient vingt-sept vaisseaux de guerre.

L'amiral Rooke, qui la commandait, n'eut pas plus tôt reconnu celle de Tourville, forte de soixante-onze vaisseaux, qu'il prit le parti de la retraite, mais non sans laisser deux de ses bâtimens entre les mains des Français. De la flotte marchande vingt-sept furent pris, quarante-cinq brûlés, et la dispersion des autres les mit à la merci des armateurs.

Tourville ne jugea point à propos de suivre Rooke à Madère : côtoyant l'Espagne, il fit un mal considérable à l'ennemi dans les ports de Cadix, de Gibraltar et de Malaga.

Vers le même temps, Noailles, qui, toujours combattant, s'était avancé pied à pied en Catalogne, avait osé passer le Ter en présence de l'ennemi, l'avait battu à Verges, sur les bords du fleuve, et s'était emparé, à la suite de sa victoire, de Gironne, de Palamos et d'Ostalric. Il marchait sur Barcelone, et l'approche de Tourville, du côté de la mer, lui donnait le plus juste espoir de s'en rendre maître, lorsque l'arrivée de Russel avec quatre-vingt-huit vaisseaux

de ligne, fit évanouir les espérances du général français. Tourville n'avait que soixante vaisseaux à opposer aux forces anglaises, et le cabinet de Versailles, devenu circonspect depuis la catastrophe de la Hogue, avait fait donner à son amiral l'ordre de rentrer à Toulon.

Les Anglais promenaient une autre escadre sur les côtes de France baignées par l'Océan, et essayaient d'y effectuer des descentes. La plus considérable fut celle qu'ils tentèrent à Brest. Mais Vauban, que la cour, instruite de leur dessein, venait d'y envoyer, avait fait de telles dispositions, et les reçut si vigoureusement, qu'ils se rembarquèrent aussitôt.

Leurs bombes et leurs machines infernales n'eurent pas un meilleur succès à Dunkerque et à Calais. Ils firent plus de mal au Havre, et détruisirent presque entièrement Dieppe; mais les armateurs français leur rendirent ces pertes au centuple, et une tempête, dans la Méditerranée, sembla conspirer avec eux. Sept ou huit vaisseaux de l'escorte d'un convoi considérable se brisèrent contre des rochers, et tout le convoi fut dispersé.

Dans le même temps Du Causse, gouverneur de Saint-Domingue, ruinait, à l'aide des flibustiers, les sucreries de la Jamaïque; et Jean-Bart,

près du Texel, avec six frégates et deux flûtes, attaquait huit vaisseaux hollandais qui s'étaient emparés d'un convoi de grains destiné pour la France, en enlevait deux à l'abordage, mettait le reste en fuite, et ramenait glorieusement la flotte dans nos ports.

Tous ces projets de destruction de la part des Anglais tournèrent à leur honte aussi Vauban ne s'était-il point compromis, en écrivant à Louis XIV « que Sa Majesté n'avait rien à craindre; qu'il avait rendu tous les passages qui étaient sous le château, à l'épreuve de la bombe; qu'il avait placé avantageusement quatre-vingtdix mortiers et trois cents pièces de canon; que tous les vaisseaux étaient hors de la portée des bombes ennemies, et toutes les troupes en bon ordre; qu'il y avait dans la place trois cents bombardiers, trois cents gentilshommes, quatre mille hommes de troupes régulières, et un régiment de dragons nouvellement arrivé. »

Les Anglais perdirent dans leur débarquement sur la côte de Brest quatre cents hommes, parmi lesquels se trouvèrent le général Talmarsh et quarante officiers. Un grand nombre de soldats se noya; une bombe tomba sur une galiote remplie de monde, et la fit sauter avec tout ce qu'elle contenait.

Cette entreprise coûta deux mille hommes aux Anglais et aux Hollandais; ils brûlèrent pendant la nuit un de leurs vaisseaux, et un autre, de soixante canons, échoua. Les Français n'eurent que quarante-cinq hommes de tués, grâce aux sages mesures prises par Vauban, et à l'adresse admirable avec laquelle il sut faire marcher ensemble, pour la défense des batteries et des retranchemens, les troupes de terre et celles de la marine, sous les ordres de Langeron.

par

Voilà pour Brest: venons à Dieppe, et commençons le récit abrégé de son bombardement, la lettre de Beuron à Louis xrv, qui prouve combien les rois, qui ne peuvent pas tout voir par eux-mêmes, sont exposés à être trompés par des rapports fallacieux, et toujours intéressés.

« Les ennemis ont continué à jeter une grande quantité de bombes, depuis hier midi jusqu'à aujourd'hui quatre heures du matin, et à tirer le canon sur toutes les troupes qui paraissaient. Cette nuit, à onze heures et demie, ils ont envoyé une machine à dessein de la faire entrer dans le port, que j'ai fait barrer; elle a joué contre le galet, mais sans aucun effet; la ville, dont les maisons sont construites en bois, et fort serrées les unes contre les autres, a souffert un peu dans le quartier où le feu a commencé par une

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