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au pouvoir'exécutif. Sa perte était résolue; on passa à l'ordre du jour. A huit heures, le département se rendit au château; le procureur-syndic, voyant que la garde intérieure était prête à se réunir aux assaillans, entra dans le cabinet du roi, et demanda à lui parler en particulier. Le roi le reçut dans sa chambre; la reine l'accompagna. Là, M. Roederer leur dit que le roi, toute sa famille et les gens qui les environnaient, allaient infailliblement périr, à moins que Sa Majesté ne prît sur-le-champ le parti de se rendre à l'Assemblée nationale. La reine s'opposa d'abord à ce conseil; mais le procureur-syndic lui dit qu'elle se rendait responsable de la mort du roi, de ses enfans et de tout ce qui était dans le palais; elle ne fit plus d'objection. Le roi consentit à se rendre à l'Assemblée. En partant, il dit aux ministres et aux personnes qui l'entouraient: Allons, messieurs, il n'y a plus rien à faire ici1. La reine en sortant du cabinet du roi, me dit : « Attendez » dans mon appartement, je viendrai vous rejoindre,

Le narrateur cité par Montjoie rend compte en ces mots des efforts que fit M. Roederer auprès du peuple, auprès de la garde nationale, et de l'entretien qu'il eut ensuite avec le roi dans son cabinet. Cette relation du 10 août contient aussi beaucoup d'autres détails importans; mais nous les plaçons dans les éclaircissemens sous la lettre (J), pour ne point interrompre le récit de madame Campan.

« M. Roederer, il faut le dire à sa louange, épuisa tous les moyens. Enfin, ne pouvant triompher de la colère du peuple, il la calma pendant quelques instans; on lui accorda une demi

» ou je vous enverrai chercher pour aller je je ne sais » où. » Elle n'emmena avec elle que madame la princesse de Lamballe et madame de Tourzel. La

heure, et les dépositaires de la loi rentrèrent à l'instant dans la cour du château.

» Ici se trouvèrent des obstacles d'un autre genre: la garde nationale faisait la meilleure contenance; elle paraissait parfaitement disposée.

» M. Roederer lui représenta tout le danger; il l'engagea à rester ferme à son poste; il l'exhorta à ne pas attaquer ses concitoyens, ses frères, tant qu'ils resteraient dans l'inaction, mais il pressentit le moment où le château serait attaqué. Il leur rappela les principes d'une défense légitime, et leur fit la réquisition prescrite par la loi du mois de mai 1791, relative à la force publique. La garde nationale resta muette, et les canonniers déchargèrent leurs canons.

>> Que pouvait alors le département? I se joignit aux ministres du roi, et, d'un commun accord, tous le conjurèrent de se sauver avec sa famille et de se réfugier dans le sein de l'Assemblée nationale. « Ce n'est que là, sire, dit M. Rode» rer, au milieu des représentans du peuple, que Votre Ma>> jesté, que la reine, que la famille royale, peuvent être en » sûreté. Venez; fuyons: encore un quart d'heure, et la re» traite ne dépendra peut-être plus de nous. »>

› » Le roi hésitait, la reine témoignait le plus vif mécontente>>ment. « Quoi! disait-elle, nous sommes seuls; personne ne » peut agir........ — Oui, madame, seuls; l'action est inutile..., » la résistance impossible. » L'un des membres du département, M. Gerdrot, veut élever la voix; il insiste sur l'exécution prompte du parti proposé. « Taisez-vous, monsieur, lui >> dit la reine, taisez-vous : vous êtes le seul qui ne devez » point parler ici : quand on a fait le mal, on ne doit pas avoir » l'air de vouloir le réparer. » (Note de l'édit.)

princesse de Tarente et madame de la Roche-Aymon se désolaient d'être laissées aux Tuileries. Elles descendirent ainsi que toute la chambre dans l'appartement de la reine.

Nous vîmes défiler la famille royale entre deux haies formées par les grenadiers suisses et ceux des bataillons des Petits-Pères et des Filles-Saint-Thomas. Ils étaient si pressés par la foule, que, pendant ce court trajet, la reine fut volée de sa montre et de sa bourse. Un homme d'une stature épouvantable et d'une figure atroce, tel qu'on en voyait à la tête de toutes les insurrections, s'approche du dauphin, que la reine tenait par la main, l'enlève et le prend dans ses bras. La reine fit un cri d'effroi et fut près de s'évanouir. Cet homme lui dit : « N'ayez » pas peur, je ne veux pas lui faire de mal; » et il le lui rendit à l'entrée de la salle.

Je laisse à l'histoire tous les détails de cette journée trop mémorable, me bornant à retracer quelques-unes des scènes affreuses de l'intérieur du palais des Tuileries, après que le roi l'eut quitté.

Les assaillans ignoraient que le roi et sa famille se fussent rendus au sein de l'Assemblée; et ceux qui défendaient le palais du côté des cours l'ignoraient de même : on a présumé que, s'ils en eussent été instruits, le siége n'eût pas eu lieu.

Les Marseillais commencent par chasser de leurs postes plusieurs Suisses qui cèdent sans résistance; quelques-uns des assaillans se mettent à les fusiller; des officiers suisses, outrés de voir ainsi tomber

leurs soldats, et croyant peut-être que le roi était encore aux Tuileries, ordonnent à un bataillon de faire feu. Le désordre se met parmi les agresseurs, le Carrousel est nettoyé en un instant; mais bientôt ils reviennent animés de fureur et de vengeance. Les Suisses n'étaient qu'au nombre de huit cents; ils se replient dans l'intérieur du château; des portes sont enfoncées par le canon, d'autres brisées à coups de hache; le peuple se précipite de toutes parts dans l'intérieur du palais; presque tous les Suisses sont massacrés; des nobles, fuyant par la galerie qui conduit au Louvre, sont poignardés ou tués à coups de pistolet; on jette leurs corps par les fenêtres. MM. Pallas et de Marchais, huissiers de la chambre du roi, sont tués en défendant la porte de la salle du conseil; beaucoup d'autres serviteurs du roi tombent victimes de leur attachement pour leur maître. Je cite ces deux personnes, parce que, le chapeau enfoncé, l'épée à la main, ils criaient en se défendant avec une inutile mais louable valeur : « Nous ne voulons plus vivre, c'est notre poste, >> nous devons y mourir. » M. Diet se conduisit de même à la porte de la chambre à coucher de la reine; il éprouva le même sort. Madame la princesse de Tarente avait heureusement fait ouvrir la porte d'entrée de l'appartement; sans quoi, cette horrible bande, en voyant plusieurs femmes réunies dans le salon de la reine, eût pensé qu'elle y était, et nous eût sur-le-champ massacrées, si sa fureur eût été augmentée par la résistance. Cependant

nous allions toutes périr, quand un homme à longue barbe arriva en criant de la part de Pétion : Faites grâce aux femmes; ne déshonorez pas la nation! Un incident particulier me mit encore plus en danger que les autres. Dans mon trouble, je crus, un moment avant l'entrée des assaillans chez la reine, que ma sœur n'était pas parmi le groupe des femmes qui y étaient réunies ; et je montai dans un entresol où je supposais qu'elle s'était réfugiée, pour l'engager à en descendre, imaginant qu'il importait à notre salut de n'être pas séparées. Je ne la trouvai pas dans cette pièce; je n'y vis que nos deux femmes de chambre et l'un des deux heiduques de la reine, homme d'une très-haute taille et d'une physionomie tout-à-fait martiale. Je le vis påle et assis sur un lit; je lui criai: «< Sauvez-vous, les valets » de pied et nos gens le sont déjà. — Je ne le puis, » me dit cet homme, je suis mort de peur. » Comme il me disait ces mots, j'entends une troupe d'hommes monter précipitamment l'escalier, ils se jettent sur lui, je le vois assassiner. Je cours vers l'escalier, suivie de nos femmes. Les assassins quittent l'heiduque pour venir à moi. Ces femmes se jettent à leurs pieds et saisissent les sabres. Le peu de largeur de l'escalier gênait les assassins; mais j'avais déjà senti une main terrible s'enfoncer dans mon dos, pour me saisir par mes vêtemens, lorsqu'on cria du bas de l'escalier: «Que faites-vous là-haut? » L'horrible Marseillais qui allait me massacrer répondit un heim, dont le son ne sortira jamais de ma mé

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