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Luther, pour s'expliquer d'une maniere plus énergique, a fait un livre qu'il a antitulé, non pas du libre arbitre, mais de l'arbitre efclave, de fervo arbitrio (a). Il dit que le libre arbitre eft dans l'homme un titre fans réalité, & que tout ce qui arrive & ce qui fe fait par les créatures, eft l'effet d'une néceffité abfolue.

Calvin a toujours foutenu que les commandemens de Dieu font impoffibles: il le dit expreffément (b): « La loi de » Dieu eft impoffible, & je l'appelle

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impoffible, en ce que l'ordre établi de »Dieu, & fon décret en empêchent l'exé »cution; » & lorfqu'on lui objecta ces paroles de Jéfus-Chrift: « Si vous voulez »entrer dans la vie éternelle, obfervez » les commandemens; » il eut l'audace de répondre que Jéfus-Chrift diffimuloit, & qu'il favoit bien que les commandemens de Dieu étoient impoffibles.

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Luther mit « l'immortalité de l'ame au rang des articles imaginés par les papes, » & tirés du fumier des décrets » mains (c). »

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Calvin prétendoit que les enfans recevoient par le baptême la rémiffion de tous

(a) De ferv. arb. t. II. p. 112.

(c) Lutheri affertiones. t. II. article 7. p. 107.

leurs péchés, même de ceux à venir (4); ce que Beze fon difciple exprime en ces termes: «Quiconque eft arrofé du fang » de Jéfus-Chrift, eft délivré pour jamais de fes péchés paffés & futurs (b).

Or, s'il en étoit ainfi, quel frein refte roit-il aux hommes pour arrêter les crimes?

Luther & Calvin ont tous les deux regardé comme un des principaux points de leur nouvelle doctrine, [& tout le monde le fait ] que l'homme eft juftifié par l'impu tation des mérites de Jéfus-Chrift, fans aucun changement intérieur de l'ame, & par la feule foi, quoi qu'il en foit des mœurs; que pour être fauve il fuffit de croire fermement qu'on le fera, quand même on feroit d'ailleurs couvert de péchés. Calvin ajoute que la juftice une fois reçue eft inamiffible. A la vérité, qui nie une fois la liberté, peut tomber dans toutes ces erreurs, J'aurai occafion de les réfuter dans nos entretiens fuivans. Mais comment les alliera-t-on avec la fainteté ?

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Luther difoit « qu'il favoit bien que le » diable pouvoit prêcher l'évangile, faire les fonctions de miniftre & de pasteur, » & administrer les facrémens (c). »

(a) Calvini inftitut. 1. 4. Ch. 15. 5. & in antid. Conc Trid. p. 299.

(b) Beza in hab. c. X. v. 1.

Lutherii affertiones. T. 7. p. 244

Calvin en paraphrafant le texte de l'a pôtre, folutis doloribus inferni, a ofé avancer que Jétus-Chrift fur la croix s'étoit livré au défefpoir, & avoit éprouvé quelque tems les tourmens des réprouvés. De tels blafphêmes s'accordent-ils avec la fainteté de la doctrine d'un envoyé de Dieu ?

III. Eh quelle réforme Calvin, fondateur de la fociété où vous avez été élevé, a-t-il faite? Il a retranché les œuvres de pénitence, les abftinences, les jeûnes de carême, & tout ce qui aidoit à domter les paffions, & à porter les hommes à la fainteté. Il a aboli la confeffion, c'est-àdire la reffource la plus efficace qu'il y ait pour la réformation des mœurs, par la néceffité où elle met les fideles d'examiner de bonne foi l'état de leur confcience, d'éclaircir leurs doutes, d'accufer leurs péchés fans déguisement, de les détefter, d'en faire pénitence, & de recevoir des avis falutaires pour les éviter à l'avenir. Il a retranché la plupart des facremens, le faint viatique & l'extrêmeonction qui fourniffent aux mourans de fi puiffans fecours, l'ordre, qui procure aux miniftres de l'églife des graces pour remplir dignement leurs auguftes fonctions le facrement du mariage, & en quelque forte celui de l'euchariftie, car ôtez la

préfence réelle, il ne refte dans l'euchariftie qu'un morceau de pain & une pure cérémonie qui ne peut exciter dans l'ame les mêmes affections que la foi excite dans celle d'un catholique qui fait difcerner le corps de Jésus-Chrift d'avec les apparences du pain.

Il ne s'en eft pas tenu là: il a ôté au fervice divin toute fa majefté, toute fa fplendeur; il a détruit, entre les ministres, toute efpece de fubordination. C'est ce que lui reproche le docteur Swift, dans fon ingénieux conte du tonneau.

Ce docteur compare la doctrine pure de Jésus-Chrift à un habit fimple, mais précieux, qu'un pere avoit laiffé à fes enfans. Il prétend [ d'après ces principes anglicans que l'église romaine ayant furajouté à cet habit quelques ornemens fuperflus, l'églife d'Angleterre a tâché fagement de les découdre, & qu'elle l'a fait avec foin fans altérer la fubftance de l'habit; mais il dépeint Calvin comme un forcené, qui dans fa fureur a tout déchiré, tout arraché, & mis enfin l'habit en lambeaux.

Auffi quel changement dans les mœurs a produit la prétendue réforme dont Luther & Calvin ont été les auteurs!

Ecoutons ce qu'en dit Luther lui-même: «Nous voyons, difoit-il, que par la » malice

» malice du diable les hommes font main» tenant plus avares, plus impitoyables, » plus abandonnés aux vices, plus info» lens, & beaucoup pires qu'ils n'étoient » fous la papauté (a). »

Calvin difoit : « Dans le petit nombre » de ceux qui fe font féparés de l'idolâtrie » du pape, la plupart font remplis d'ido» lâtrie & d'artifices; ils font paroître à » l'extérieur un grand zele; mais fi vous » les fondez un peu plus avant, vous les » trouverez remplis de fourberie (b). »

Voilà, Monfieur, la fainteté qu'a opérée la prétendue réforme de Luther & de Calvin. A de tels apôtres il ne faut pas demander des miracles. Mais que dis-je ? ils en ont fait dans le goût de ceux qu'au rapport de Tertullien, firent certains hérétiques de fon temps : « Si les prédicateurs » envoyés par Jésus-Christ, dit ce pere, » reffufcitoient les morts, ceux-ci tuent » les vivans (c). » C'eft en effet ce que fit Calvin. L'auteur de fa vie rapporte que voulant accréditer fa doctrine par un prétendu miracle, il engagea un nommé Brulle à contrefaire le mort, & à fe lever du cercueil auffi-tôt qu'il le lui ordonne

Luther. dom. I. adventûs fol. 5. éd. 1548. (b) Calvin in Daniel, cap. II. v. 34.

(c) Illi enim de mortuis fufcitabant, ifti de vivis mortuos faciunt. Tertul. de Præfcript.

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