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que la juftification ne renferme pas feu lement la rémiffion des péchés mais encore la fan&tification & la rénovation intérieure de l'homme, qui d'injufte devient jufte, & d'ennemi de Dieu en devient ami. Par la juftification, dit le concile, nous ne fommes pas feulement réputés juftes, mais on peut dire avec vérité que nous le fommes en effet, recevant en nous la juftice, chacun fuivant la mesure qu'il plaît à l'Esprit-faint de communiquer, fuivant la difpofition de chacun & fa coopération à la grace (a).

LE PROTESTANT.

Je ne conçois pas comment on pourroit fe former l'idée d'un homme jufte en qui cependant il n'y auroit point réellement de justice.

LE DOCTEUR.

Remarquez encore que fi la juftice de l'homme étoit celle de Jéfus-Christ, il s'enfuivroit que ceux qui font juftes le font également. Auffi Calvin a-t-il dit que la justice eft égale dans tous les juftes. Mais à qui perfuadera-t-il que dès qu'un homme eft en état de grace, il eft auffi faint que la fainte Vierge, S. Jean

(a) Seff. 6, chap. 7.

Baptifte, les patriarches, tous les prophetes, les apôtres, &c. ?

LE PROTESTANT.

Il faudroit être infenfé pour le croire. Mais je m'apperçois qu'aujourd'hui notre conférence vous prend beaucoup de temps. Cependant vous avez encore quelque chofe à me dire fur le mérite des bonnes œuvres.

LE DOCTEUR.

Cet article ne fouffrira pas beaucoup de difficultés.

Luther & Calvin ont nié le mérite des bonnes œuvres, parce qu'ils avoient nié la liberté de l'homme, fans laquelle il ne mérite ni louange ni blâme, ni récompense ni punition. Mais les proteftans ont abandonné fur ce point la doctrine de leurs fondateurs; maintenant ils reconnoiffent que l'homme eft libre, & qu'il peut faire des actions méritoires, même pour le ciel.

Dans l'apologie de la confeffion d'Ausbourg, il eft dit expreffément que les bonnes œuvres méritent des récompenfes corporelles & Spirituelles en cette vie & en L'autre, puifque S. Paul dit que chacun recevra fa récompenfe fuivant fon travail (a).

(a) Apol. A. 3, de dilectione & impletione legis, pag. 96.

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Les proteftans reconnoiffent donc, au moins à préfent, le mérite des bonnes œuvres; ainfi nous n'avons plus avec eux de difpute férieuse fur ce mérite. Ils nous accufent feulement de donner trop au mérite du juste, & trop peu à la grace, de compter beaucoup fur nos mérites, & peu fur ceux de Jéfus-Christ.

Mais un fimple expofé de la doctrine de l'églife catholique, fuffit pour détruire cette injufte accufation.

Nous croyons qu'il faut que nous opérions notre falut par le mouvement libre de nos volontés avec le fecours de la grace, & cela est très-vrai; les préceptes, les exhortations, les menaces, les promeffes dont la fainte Ecriture eft remplie, en font la preuve. Mais en même tems nous croyons que nous ne pouvons rien faire qui conduite au ciel, qu'autant que nous y fommes excités par le Saint-Efprit & aidés par fa grace.

Nous croyons que les mérites des juftes font d'un grand prix & très-agréables à Dieu; mais nous croyons que ces mérites tirent leur valeur de ceux de JéfusChrift, parce que les œuvres furnaturelles des juftes proviennent de la grace, qui leur eft accordée en vertu des mérites du Sauveur, ce qui fait que les œuvres furnaturelles des juftes font leurs mérites, &

en même tems, font des dons de Dieu. Nous croyons que les œuvres furnaturelles des juftes méritent la vie éternelle, & que les juftes y ont droit. En effet, dans l'écriture la vie éternelle eft appellée une couronne de juftice qui rendra le Seigneur juste juge (a). Elle eft comparée à un prix que remporte un jeune athlete dans un glorieux combat. Jéfus-Chrift l'appelle une grande récompenfe, copiofa merces (b). Or une récompenfe fuppofe le mérite, & c'eft en cela qu'elle differe du don purement gratuit.

Mais auffi nous croyons avec l'apôtre S. Paul, que la vie éternelle eft un don de la grace de Dieu, (c) par Jéfus-Christ notre Seigneur; 1o. parce que fi les juftes ont droit à la vie éternelle, comme à une récompenfe qui leur eft promife, Dieu la leur a promife par un effet de fa miféricorde; 2o. parce que la bonté des œuvres méri toires des juftes vient de la grace qui en eft le principe: c'eft pourquoi le concile de Trente (d) reconnoît que la vie éternelle eft une grace, & en même tems une récompenfe; & il enfeigne expreffément que tout le prix des oeuvres des

a

2. Timoth. c. 4, v. 6.

(b) Math. 5, v. 12.

(c) Rom. c. 6, v. 23.

juftes vient de la grace fanctifiante qui nous eft donnée gratuitement au nom de Jéfus-Chrift, & qui eft un effet de l'influence de ce divin chef fur fes membres (a). Il ajoute enfuite, & je vais vous citer fes propres termes : Quoique fuivant la fainte écri ture les bonnes œuvres foient d'un fi grand prix que Jéfus-Chrift nous promet qu'un verre d'eau froide donné à un pauvre, aura fa récompenfe, & que l'apôtre S. Paul affure qu'un moment de peine foufferte dans ce monde produira un poids éternel de gloire ; à Dieu ne plaife que le chrétien fe fie & fe glorifie en lui-même & non en notre Seigneur, dont la bonté eft fi grande envers les hommes, qu'il veut que les dons qu'il leur accorde, foient leurs mérites.

Voilà, Monfieur, la doctrine de l'église catholique fur le mérite des bonnes œuvres: elle fuffit, fans doute, pour apprendre aux chrétiens qu'ils doivent rapporter à Dieu tout le mérite & la gloire de leurs bonnes œuvres.

LE PROTESTAN T.

Tout ce que vous venez de m'expofer fur le mérite des bonnes œuvrés me

(a) Conc. Trid. Seff. 6, chap. 16.

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