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déclare que le titre qu'il fe donne, eft fa qualité: qu'il fe le donne lui-même, avec un magnifique mépris d'eux & de fatan. (a)

Il ajoute encore qu'il fe donne ce titre lui-même pour marque du miniftere auquel Dieu l'a appellé & qu'il a reçu non des hommes, ni par l'homme, mais par l'autorité de Dieu & la révélation de Jefus-Chrift.

En vertu de cette prétendue miffion divine & extraordinaire, il faifoit tout à fon gré; il changeoit les cérémonies & les ufages de l'Eglife, il inftituoit, il deftituoit jufqu'au point qu'il ofa, quoiqu'il ne fût que prêtre, ordonner Nicolas Amrfdorf, évêque de Naumbourg, & foutint la validité de cette ordination parce qu'il avoit déja fait ce même Amrfdorf pafteur.

Il avoit conftamment enfeigné, depuis qu'il s'étoit féparé de l'églife romaine, qu'il ne ne falloit pas prendre les armes pour la caufe de l'évangile, parce qu'il comptoit qu'il n'en auroit pas befoin contre le pape, & qu'il avoit plufieurs fois prophétifé, que fous deux ans la papauté feroit détruite. Čependant dès 1521, voyant que l'effet ne répondoit pas à fes prédictions, & qu'une ligue puiffante fe formoit dans l'Allemagne contre lui, il fit répandre de

(a) Luth. opera, tom. 2, fol. 305.

toutes parts un écrit par lequel il déclaroit que, nonobftant ce qu'il avoit pense jufques alors, on pourroit, dans des temps fi fâcheux, fe voir réduit à des extrémités où non feulement le droit civil, mais encore la confcience, obligeroit les fideles à prendre les armes & à fe liguer contre tous ceux qui voudroient leur faire la guerre, même contre l'empereur (a); & perdant enfuite toute il ofa lui-même fouffler le feu de la guerre, & exciter les peuples à laver leurs mains dans le fang du pape & des cardinaux; il fema de tous côtés des lettres furieuses contre le prince Georges de Saxe, quand la guerre fut fur le point de commencer. (b)

retenue,

Ses variations fur la tranffubstantiation furent bien frappantes. Jamais il n'ofa combattre la préfence réelle de JefusChrift dans l'Euchariftie; mais il vouloit conferver la fubftance du pain avec le corps de notre Seigneur en 1520 : il difoit dans fon livre de la captivité de Babylone, je crois avec Wiclef que le pain demeure, & avec les Sophifles (c'est-à-dire les catholiques) que le corps y eft: pour l'expliquer il difoit que le corps de Jefus Christ étoit dans le pain comme le feu dans un fer brûlant, ou comme le vin

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dans un tonneau. (a) Mais du moins it ne blâmoit pas la croyance des catholiques; dans ce même livre il difoit: Je permets l'une & l'autre opinion, j'ôte feulement le fcrupule. Et quand on lui reprocha qu'il laiffoit le pain dans l'Euchariftie, il répondit: Je ne condamne pas l'autre opinion: je dis feulement que ce n'est pas un article de foi. (b)

Mais bientôt après dans fa réponse à Henri VIII, roi d'Angleterre, qui avoit réfuté fon livre de la captivité de Babylone, il dit : J'avois enfeigné qu'il n'impor toit pas que le pain demeurát ou non dans le facrement; mais maintenant je transfubftantie mon opinion; je dis que c'est une impiété & un blafphême de dire que le pain eft tranfubftantié: il eft vrai, dit-il dans fon livre aux Vaudois, qu'on ne peut dire fans erreur que le pain ne demeure pas, encore que cette erreur m'ait paru jufques ici peu importante: mais maintenant puifqu'on nous preffe de recevoir cette erreur fans autorité de l'écriture, je veux, en dépit des papiftes, croire que le pain & le vin demeurent. Cependant quelques années après, Mélancton fe plaignit dans une lettre rapportée par Hofpinien, que Luther avoit

{2) Ibid. fol. 172.
a) Lib. de captivit, Bab, tom, 2, fol. 66.

toléré qu'on foutînt la tranffubftantiation dans quelques églifes d'Italie.

Etrange maniere de penfer fur ce qui concerne la foi chrétienne & ce qu'il y a de plus faint dans la religion! permettre ce qu'on dit être une impiété & un blafphême !

Ses variations fur ce point allerent encore plus loin: il publia en 1527 un ouvrage pour foutenir le fens littéral des textes qui prouvent la préfence réelle. Il y avança « qu'il importoit peu de mettre » ou d'ôter le pain & le vin dans l'Eu» chariftie; mais qu'il convenoit d'appel»ler ce facrement un pain charnel & un » vin fanglant: panem carneum & vinum » Sanguineum. »

A l'impanation il joignit l'ubiquité. Pour expliquer comment le corps de JéfusChrift, réellement préfent dans l'euchariftie, peut fe trouver en même tems dans plufieurs endroits, il dit que le corps de notre Seigneur eft par-tout, comme fa divinité.

Calvin ne varioit guere moins que Luther fur ce qui regarde l'euchariftie. Il changeoit fouvent de maniere de s'exprimer; il fe fervoit quelquefois de termes, qui d'abord préfentoient un fens catholique, mais qui joints à d'autres expreffions,

Car

Il s'affligeoit beaucoup de ce que ceux de fon parti varioient perpétuellement. Voici ce qu'il écrivoit à ce fujet à Mélanthon: Il est très - important qu'il ne paffe aux fiecles à venir aucun foupçon des divifions qui font parmi nous. il eft ridicule, au delà de ce qu'on peut imaginer, qu'après avoir rompu avec tout le monde, nous nous accordions fi peu entre nous dès le commencement de notre réforme. (a)

,

Mélanchon de fon côté écrivoit à Caméron fon ami, que ces variations donnoient à Luther beaucoup d'inquiétude : Luther me caufe, lui dit-il, d'étranges troubles par les longues plaintes qu'il me fait de fes afflictions; dans la pitié que j'ai de lui, je me fens affligé au dernier point du trouble univerfel de l'églife. Le vulgaire incertain fe partage en des fentiments contraires. (b)

Il en étoit des difciples comme du maître. Bucer attaché à Luther, mais devenu favorable aux facramentaires, trompoit Luther. même, par la maniere équivoque & embrouillée dont il s'exprimoit fur l'euchariftie quand Calvin vouloit parler des profeffions de foi obfcures, il difoit: H

(a) Calv. Epift. ad Mélanet. pag. 145. (b) Lib. 4, Epift. 76, ad Camer.

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