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teurs, MM. Étienne de La Rivière et André de La Prède seraient à la tête. Peut-être une faible garde, quatre cavaliers, avec lesquels on aurait pu faire la route presque incognito, aurait été préférable; mais on craignit que le prisonnier ne fût enlevé par le peuple; on voulut lui donner une garde suffisante pour le protéger efficacement, et cette garde nombreuse servit encore à appeler les curieux et à grossir les attroupemens. Mais quelque parti qu'on eût pris, la suite a prouvé que sa perte était résolue.

L'assemblée en même temps a arrêté de faire mettre le scellé sur les papiers de M. Berthier; et elle a chargé son président d'en donner l'ordre. Voilà comment on ignorait alors l'administration. Son président c'était moi; celui qui devait faire exécuter les ordres de l'assemblée, considérée comme municipalité, c'était le chef de cette municipalité, c'était moi, le seul magistrat alors, vraiment légal, puisqu'on recevait successivement toutes les délibérations des districts qui confirmaient ma nomination. Mais l'esprit de toutes les assemblées est toujours l'indépendance. Quand elle agissait par son président, elle croyait exercer bien plus le pouvoir que lorsque je donnais les ordres, même les siens. En cela, l'assemblée ne croyait rien faire dont je pusse me plaindre; elle m'a toujours marqué estime et affection, et moi, sans aucun égard de la légalité des pouvoirs, j'en ai toujours aimé et respecté tous les

membres comme mes bons et chers collègues, et j'ai toujours déféré à l'assemblée, et comme à mon aînée dans les fonctions publiques, et comme au corps à jamais vénérable qui avait sauvé la ville de Paris.

Les députés qui avaient été à Pontoise sont revenus, et nous ont rendu compte qu'ils y avaient trouvé une grande agitation. Le régiment de SalisSamade, qui y avait couché la veille, et qui en était parti dès le matin, y avait été subitement rappelé; tout ce mouvement était occasioné par les subsistances. La circonstance n'était pas favorable pour en aller demander à Pontoise. Cependant, ayant fait assembler la commune, et ayant bien expressément déclaré Paris ne sollicitait que le superflu de Pontoise, on a proposé dans l'assemblée, et accepté, que tous les particuliers déclarassent ce qu'ils avaient de grain chez eux, ce qui leur était nécessaire, et qu'ils envoyassent le surplus à Paris; ce qui a été exécuté avec empressement et générosité par les habitans de Pontoise. Ce n'était pas un grand secours; et ce qui nous affligea, c'est que les députés nous dirent que les magasins du gouvernement étaient très-peu garnis.

que

M. de Bonneville, qui avait été envoyé à Vernon, Mantes et Meulan, étant revenu, on le renvoya à Rouen, pour veiller au départ et assurer les convois des grains du gouvernement, montant à cinquante-cinq mille neuf cents sacs qui y étaient en dépôt. On lui expédia une commission en forme.

Mais, avec beaucoup de zèle, il avait la tête vive, et il courut, par son imprudence, de grands dangers dans ce voyage.

Mardi 21 juillet.—J'avais été président de l'Assemblée nationale pendant un mois; j'étais maire depuis huit jours, et je n'avais pas encore eu un secrétaire pour expédier mes lettres et mes courriers. J'eus un secrétaire particulier, nommé M. Butay, le lendemain. Mais ma place exigeait un secrétaire en chef et en titre. Il y avait un secrétaire de la prévôté des marchands, qui ne l'était que depuis quelques mois. On me dit que communément il changeait avec le prévôt des marchands, et que j'étais parfaitement libre d'en prendre un autre; cependant on me dit beaucoup de bien de ce secrétaire, M. Petit. Il m'aurait été sans doute agréable de donner cette place, qui valait douze à quinze mille francs, à un ami. Mais je sentis qu'il fallait ôter à un homme son état et ses espérances légitimes; il était homme de mérite et homme de bien; il me l'a prouvé depuis dans plus d'une occasion; je ne voulus pas lui causer ce malheur, et je me déterminai à le confirmer dans sa place. Il vint me voir, et je consentis même à m'en priver encore pendant huit jours, parce que sa santé exigeait qu'il allât prendre l'air à la campagne.

Nous eûmes ce jour une très-grande affaire à l'assemblée. Les députés de Paris avaient fait une somme de 45,000 livres pour les ouvriers du fau

bourg Saint-Antoine, mais cette somme ne nous avait pas encore été remise. Ces ouvriers, impatiens de toucher l'argent qui devait leur revenir, commencèrent à murmurer, et montraient toutes les dispositions à une insurrection prochaine. Sur le compte qui en fut rendu, on proposa d'emprunter la somme nécessaire. Plusieurs notaires présens offrirent pour leur compagnie d'avancer les 45,000 livres, et l'offre fut sur-le-champ acceptée et réalisée. On a arrêté une proclamation pour calmer les esprits et instruire de la prochaine distribution. On a nommé un comité pour faire cette distribution, et on a en même temps invité tous les citoyens à augmenter les fonds de ces secours de bienfaisance, et dans ce moment si nécessaires. Une autre grande affaire du même jour fut celle de la diminution du prix du pain. M. Legrand de St.Réné, membre du comité des subsistances, vint la proposer à l'assemblée. Il exposa que le peuple, malheureux par l'interruption du travail, la demandait avec instance. Il annonça des mouvemens des faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marceau. II observa que les grains du gouvernement venaient de l'étranger, qu'on en avait à peu près pour deux mois. Il observa que cette diminution ne pouvait influer sur le prix des marchés, puisqu'on n'y portait pas. Ce qu'il dit de plus raisonnable pour autoriser cette diminution, c'est que partie de ces grains et farines avaient été avariés; le pain qui en résultait était très-médiocrement bon; le peuple

de Paris, qui avait reconquis la liberté avec tant de courage, devait souffrir impatiemment qu'on lui vendit fort cher du pain plus que médiocre, et le souffrir d'autant plus impatiemment lorsqu'il songeait que le gouvernement seul, et non les marchands, approvisionnait la Halle.

J'ai vu avec peine, et je garderais le silence à cet égard si le fait n'était pas mentionné au procèsverbal, qu'il mettait en question si ces achats de blés étaient dus à une sage prévoyance, ou s'ils n'étaient pas l'effet d'une combinaison odieuse, pour asservir de plus en plus la métropole au despotisme ministériel. D'abord la farine revenait le

plus souvent,au gouvernement, à 90 livres le sac,
ce qui donne le pain à 16 sols 4 deniers les quatre
livres; en le donnant à 14 sols et demi, le gouver-
nement perdait donc deux sols pour quatre livres,
ce qui fait, relativement à la consommation de
Paris, environ 18,000 livres de perte par jour.
Ensuite on ne devait pas ignorer le compte que
M. Necker avait rendu à l'Assemblée nationale, des
soins
que le roi et le ministre avaient pris pour faire
venir, à grands frais, des grains et des farines de
l'étranger. M. Legrand de Saint-Réné ne se serait
pas permis d'offrir cette incertitude et cette option,
s'il avait été instruit. Mais tous les esprits, mécon-
tens avec raison de l'ancien gouvernement, étaient
portés à l'accuser sur tout. D'ailleurs les mots de
despotisme et d'ancien régime ornaient alors un
discours, et par-là on était sûr de plaire au peuple

ett

On

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