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de choquer. C'est l'art réduit en pratique d'embellir les passions pour les faire triompher avec moins de peine, des résistances de la vertu. Le vice ne s'insinue guère en révoltant l'honnêteté, mais en prenant son image. Et les mots grossiers sont bien plus contraires à la politesse qu'aux bonnes mœurs, parce qu'ils font mépriser celui qui en fait usage. Non, disoit un homme qui, plus d'une fois, avoit travaillé pour le théâtre (Fontenelle) je n'ai jamais compris qu'on pút guérir les passions par les passions méme. Nous ne nous proposons d'ordinaire (ce sont les propres expressions d'un autre poète dramatique La Motte) d'éclairer l'esprit sur le vice et la vertu qu'en les peignant de leurs vraies couleurs; nous ne songeons qu'à émouvoir les passions par le mélange de l'un et de l'autre. Nous mettons souvent les préjugés à la place des vertus. Dans les personnages intéressans nous faisons presqu'aimer les foiblesses par l'éclat des vertus que nous y joi gnons dans les personnages odieux nous affoiblissons l'horreur du crime par les grands motifs qui les relèvent, ou des grands malheurs qui les excusent. Tout cela ne va que bien indirectement à l'instruction, (ou plutôt, pour ajouter à la pensée de l'auteur, tout cela tend bien directement à confondre les idées, à excuser le mal en excusant celui qui l'a fait : et c'est ce qu'a si bien dit une dame illustre, madame la marquise de Lambert, dans les avis qu'elle donne à sa fille, qu'on reçoit au théâtre de grandes leçons de vertu et qu'on en remporte l'impression du vice).... Il est vrai, continue le même dramatiste (La Motte) que quand nous faisons triompher le crime nous laissons les coupables dans un état de trouble et de remords qui tient lieu de supplice... Mais à parler de bonne foi, ce n'est pas assez; cet hommage passager que nous rendons à la raison, ne détruit pas les idées des passions que nous avons flattées dans tout le cours de la tragédie; nous instruisons un moment, mais nous avons long-temps séduit. Le remède est trop foible, et il vient trop tard.... C'est ainsi que s'expriment les auteurs dramatiques qui ont le bonheur d'admettre une morale. Leur témoignage, fondé sur l'expérience, doit, ce semble, être d'un grand poids. Ainsi quel est celui qui pourra répondre

à une mère qui conduit sa fille aux spectacles, que dans un lieu où tout respire la séduction, et flatte les sens, l'esprit et l'imagination d'une jeune personne conserveront sans trouble et sans nuage, ce calme et cette sérénité si propres à nous faire aimer la vertu, et nous inspirer une joie douce et modérée ?

L'éditeur de cet ouvrage l'a peut-être trop grossi par toutes sortes d'additions, utiles à la vérité, mais quelquefois très-prolixes et prises dans des ouvrages fort répandus. Des théologiens d'une critique un peu sévère et inquiète croiront voir çà et là quelques allures un peu alarmantes, mais ils se rassureront par l'ensemble, qui à ce que je pense, ne peut produire dans son dernier résultat que des fruits de piété et de vertu.

L'on a imprimé en même-temps les lettres philosophiques, fragmens et réflexions du même chancelier (1). Recueil précieux où des matières de métaphysique, de physique, de morale, de théologie sont examinées avec autant de profondeur que de clarté.

Le troisième volume contient des Réflexions sur JésusChrist, qui forment dans leur ensemble une véritable démonstration de la divinité de l'Evangile. Je n'ai rien vu de plus ressemblant à l'excellent traité de Mr. Jenyns sur l'Evidence intrinsèque du Christianisme. Plusieurs pensées sont les mêmes et d'autres sont parfaitement analogues. L'ouvrage françois est plus étendu, plus raisonné; l'anglois plus laconique, plus saillant, plus hardi, d'une impression plus vive et plus profonde ( 2 ).

Parmi les notes qui se trouvent dans ce volume, il y en a une sur le tremblement de terre et la scission des rochers arrivés à la mort de Jésus-Christ, qui présente une particularité remarquable. « Ce tremblement de terre est encore attesté par l'état où se trouve le rocher du

(1) Yverdun 1785, 3 vol. in-12.

(2) Je parle toujours de la véritable édition, point de la prétendue traduction donnée par Mr. le Tourneur. C'est cependant cette dernière qui est plutôt l'ouvrage de l'écrivain françois que du milord, que le traducteur allemand de Vienne a préféré. Il s'en est fait aussi une version allemande à Gottingue, j'ignore si elle a le même défaut.

Calvaire. Des voyageurs et des historiens très-instruits Millar, Fleming. Maundrel, Shaw et d'autres attestent que ce rocher n'est point fendu naturellement selon les veines de la pierre, mais d'une manière évidemment surnaturelle. Si je voulois nier, dit St. Cyrille de Jérusalem, que Jésus ait été crucifié, cette montagne de Golgotha, sur laquelle nous sommes présentement assembles l'apprendroit.

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Dans une autre note on lit cette observation remarquable. « A la fin du siècle passé et au commencement de ce siècle, les ennemis de la révélation, isolés et en petit nombre, ne se montroient point au grand jour. Ce n'étoit qu'à la faveur des ténèbres qu'ils osoient répandre le poison de leur doctrine. Doués de cette prudence du siècle qui n'est active que lorsqu'elle attend des succès, ils ne s'avisoient pas d'aller dogmatiser ni de chercher des disciples parmi les écrivains distingués dans les sciences et dans les lettres. Ceux-ci avoient trop de vertu pour ne pas souhaiter la vérité des promesses éternelles. Ils avoient une logique trop saine pour ne pas rejeter avec indignation un système inintelligible qui substitue aux mystères sublimes de la religion, des absurdités plus révoltantes les unes que les autres, et qui détruisant toute certitude, sappe les fondemens de nos connoissances, anéantit les préceptes immuables de la morale, et nous précipite dans l'abîme du scepticisme. Plus jaloux encore de conserver la pureté de leur foi et de maintenir, par leurs exemples, la règle des mœurs, que de perpétuer le bon goût par les productions de leur génie, c'est à juste titre qu'ils seront cités dans tous les siècles comme des modèles de perfection dans tous les genres.... Qu'il étoit consolant, dit un orateur (Préf. des Serm. de l'abbé Cambacerés), d'annoncer les vérités saintes dans un temps où la religion étoit nonseulement aimée et respectée, mais où les beaux exemples étoient à la cour, dans les armées, sur le trône; dans un siècle où Turenne se faisoit instruire de la religion comme un simple catéchumène; où le grand Condé, dans sa noble retraite de Chantilly, déployoit toutes les vertus d'un héros chrétien; où le grand Corneille demandoit pardon de cinquante ans de gloire, et traducteur de l'Imitation

T. III.

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de Jésus-Christ, il humilioit son génie devant le livre le plus simple et le plus touchant; où Racine aussi simple dans ses mœurs qu'il étoit grand par ses talens, alloit avec son livre de prière, tenant sa femme sous son bras et son fils par la main, écouter son pasteur, et assistoit à l'Office avec l'assiduité et la ferveur d'un simple fidèle ; où enfin le roi, ce roi si grand que nous sommes contraints de l'admirer, même en dépit de l'orgueil qui s'efforce de le déprimer, Louis-le-Grand mourant en Chrétien et en roi, déployant à ce dernier moment toute la grandeur de son ame, disoit à ceux qui l'entouroient je vois bien que les rois n'ont, comme les autres hommes, qu'une seule chose à faire, leur salut; mais on y pense trop tard. Quel siècle! C'étoit cependant celui des grands hommes, et ils avoient tous de la religion. Quoi donc ! Nos espritsforts se tromperoient-ils jusques dans leur vanité? Ils croient la religion trop petite pour eux, et ce seroient eux qui seroient trop petits pour elle. »

LA RELIGION SEULE CONSERVATRICE DES BONNES MOEURS.

Juillet 1786, page 339.

(Sur la prostitution et l'infanticide, par Mr. List.)

Ces deux monstres qui ravagent la société, qui en attaquent les sources et l'existence même, font tous les jours les progrès les plus effrayans, et donnent aux gouvernemens attentifs sur l'avenir, les alarmes les plus fondées. L'auteur de cet ouvrage les combat avec les armes du zèle; en recherche les causes productrices et les remèdes. Il accuse l'éducation, les lectures, le luxe et les occasions de débauche; il donne les conseils qu'il croit nécessaires pour réprimer ces abus, et dessine le plan d'un établissement pour délivrer les personnes enceintes, quoiqu'il y ait bien des inconvéniens dans ces sortes d'établissemens et qu'autrefois elles étoient très-rares et inutiles. Mais après avoir lu tout ce qui a été écrit de relatif à cet objet, il reste toujours évident pour quiconque n'est point égaré par les illusions de la vaine et impuissante philosophie, qu'il n'y a que la religion qui puisse porter un remède

efficace tant au désordre des mœurs, qu'aux cruelles conséquences qu'il entraîne. Le mépris où ses lois sont tombées parmi nous, est la seule cause des horreurs dont nous nous plaignons la politique humaine cherche inutilement d'y porter remède; elles s'évanouiront du moment que la religion sera remise en honneur, que ses maximes seront respectées, ses détracteurs punis et réduits au silence; et cela se fera dès que les maîtres des nations le voudront d'une manière bien soutenue, par des moyens qui n'auront rien de violent ni d'odieux.

j'avois espéré depuis long-temps de pouvoir traiter ce sujet avec un certain développement; mais outre que je n'ai pu parvenir à me débarrasser d'occupations plus pressantes et à me pourvoir du loisir nécessaire pour remplir cette intention; il m'a paru que la chose se présentoit d'ellemême aux bons esprits avec un caractère de lumière auquel la plus longue explication n'ajouteroit rien. J'ai été confirmé dans cette persuasion, quand j'ai vu Mr. Necker, après avoir exposé ses idées diverses sur les moyens de prévenir l'infanticide, convenir finalement de leur foiblesse et de leur insuffisance, réclamer la religion et le zèle de ses ministres comme la seule digue qu'on pût opposer à ce mal toujours croissant. « En considérant, dit-il, de l'Admin. des Finances, t. 2, p. 139, tout ce que je viens de développer, sur l'accroissement successif du nombre des enfans exposés, je ne puis m'empêcher d'inviter les curés et tous les ministres de l'Eglise, à redoubler de zèle pour détourner, par leurs instructions, de ces crimes secrets contre lesquels les lois ont si peu de pouvoir; c'est dans ces momens, entre tant d'autres, qu'on sent combien le secours de la religion est nécessaire au maintien de l'ordre public; c'est bien peu connoître l'imperfection de tous les moyens d'administration, que d'être indifférent à ce puissant ressort.... Laissez, laissez aux hommes et le frein le plus salutaire et la plus consolante des pensées.» « Les philosophes les plus habiles (dit un auteur qui vient d'enlever les suffrages du public sensé, études de la nature t. 3, p. 399) n'ont vu nos maux qu'en détail et n'y ont employé que des palliatifs. Les uns ont proscrit le luxe, d'autres, les célibataires, et ont voulu forcer à se charger d'une

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