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« Mais le clergé plus pauvre sera au moins plus saint, la Religion sera plus en honneur. Je le désire, et si le bien de la Religion doit s'y trouver, si le salut des ames en dépend, mettez, j'y consens, tous nos évêques, tous nos curés, tous nos abbés à la bésace. Mais je l'ai dit, un Charles Borromée, un véritable évêque n'en sera pas moins saint avec cent mille écus, qu'avec vos douze cents livres de revenu, et il n'en fera que plus de bien; tandis que vos évêques à cinquante septiers de bled pourroient bien se trouver plus méprisés sans être plus vertueux. La noblesse, les fils des grands seigneurs ne courront plus ces bénéfices; mais le petit bourgeois est tout aussi avide de vos douze cents livres, que ces gentilshommes de cinquante ou cent mille. L'objet de l'ambition ou de l'avarice est respectif, mais le vice est le même. Ce n'est donc pas précisément un riche revenu qui nous donne de mauvais évêques. Vous en aurez de pires, vous pouvez en avoir de crapuleux avec douze çents livres. »

« Au même degré de vertu, l'homme considéré par sa naissance, par ses richesses, aura beaucoup plus d'autorité; son exemple fera beaucoup plus d'impression; ses revenus employés, comme ils doivent l'être, à un entretien décent et sur-tout au soulagement des malheureux, aux bonnes œuvres, le rendront plus utile à l'Etat, à la Religion, n'en serviront que mieux à sa sanctification et à celle de son diocèse. »

« On s'imagine qu'il n'y a qu'à ruiner nos prêtres pour en faire des saints, des apôtres, et pour renouveler la primitive Eglise. Mais les apôtres répondoient au boiteux : je n'ai ni or, ni argent; je te donne ce que j'ai; au nom de Jésus-Christ, lève-toi, et marche. Si l'on n'eût vu dans eux que des hommes pauvres, parce qu'ils ne pouvoient pas être riches, l'Eglise primitive n'auroit pas mieux valu que l'Eglise moderne; et voilà précisément ce que vous aurez avec votre prétendue réforme; des évêques, des prêtres gueux par nécessité, souvent par leur naissance; et dès-lors des évêques sans autorité, et les chefs de la Religion sans considération publique. Quel bien pourront

ils faire ? »

« Je le sais, la vertu ne tient pas aux richesses; elle est

même essentiellement liée au mépris et au détachement des richesses. Mais il est un ordre de choses où les richesses peuvent aider la vertu même à s'exercer, la vérité à se manifester, la Religion à se montrer avec tout cet éclat, et tout cet appareil qui annonce le rang qu'elle tient dans l'empire, et celui qu'elle doit tenir dans tous les cœurs. » Malheur à moi, si dans ces réflexions le prêtre ambitieux, avare ou fastueux croyoit me voir plaider sa cause, et justifier l'accumulation des bénéfices, le scandale du luxe! Il ne m'entendroit pas. J'ai dévoilé l'objet de nos prétendus réformateurs dans leurs déclamations contre les biens ecclésiastiques; j'ai voulu leur prouver que leurs principes étoient autant d'erreurs, et leurs moyens autant de crimes, qu'ils n'avoient pas saisi les causes des abus; que leurs remèdes étoient ceux de l'envie et de l'hypocrisie; que leurs dispositions impolitiques ne seroient qu'une violation du droit public; qu'au lieu de ramener les beaux temps de l'Eglise par la sainteté des prêtres et des évêques, comme ils faisoient semblant de le vouloir, ils ne tendoient qu'à nous donner des prêtres qu'ils pussent mépriser plus librement; mais le ciel me préserve d'avoir cherché à faire dépendre les vertus pastorales des richesses et des bonneurs de ce monde ! Je veux que nos prêtres se montrent supérieurs à toutes ces richesses; qu'ils sachent n'en user que pour donner plus d'étendue à la charité, plus de poids à la vérité, plus d'éclat au culte du Seigneur. Je veux venger l'Eglise, qui a su distinguer le conseil du précepte, qui a préconisé l'abnégation parfaite des François, des Bruno et des Thérèse, mais qui n'a point péché contre l'Evangile, en sanctifiant l'or même, les honneurs et les distinctions dans ses ministres. Je ne veux pas que de vils hypocrites aggravent le fardeau du sacerdoce, en imposant au prêtre le vœu qu'ils ont blâmé dans le religieux, Je hais ceux qui pros crivent des propriétés saintes, et qui méditent des usurpations sacrilèges; qui invitent les peuples à dépouiller le prêtre pour abattre l'autel; mais loin de moi le prêtre qui ne voit dans l'autel que ses richesses, et non pas leur destination. Anathème à l'impie qui provoque les peuples contre l'héritage d'Aaron et des Levites; mais que la main de Dieu s'aggrave sur ces enfans d'Eli, qui, riches des

offrandes légitimes, les font servir à l'oppression, au luxe, à leurs passions, endurcissent leur cœur sur l'indigent, promènent le scandale, appellent le blasphème. Non, ce n'est point eux que je combats, En défendant les titres de l'Eglise, je sais qu'elle gémit sur des abus; mais pour sanctifier le prêtre, faut-il rendre la nation avare, usurpatrice, sordide, tyrannique et sacrilège. Il est d'autres moyens de bannir les scandales de la maison de Dieu. En laissant à Lévi son héritage, à la nation sa générosité, au culte sa splendeur, il est d'autres moyens de bannir l'ambition, le faste et le désordre du sanctuaire. >>

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(La vie de madame de Maintenon, institutrice de la royale maison de saint Cyr, ornée de son portrait. Seconde édition, corrigée et augmentée de notes intéressantes. A Paris. )

J'ai déjà rendu compte de cette vie intéressante; on en a fait depuis plusieurs réimpressions, dont je viens d'en voir une très-bien exécutée. Les amis de la justice et de la vérité de l'histoire voient avec plaisir se multiplier les exemplaires de cet ouvrage dans un temps où tout ce qui écrit, s'attache à déchirer la réputation de cette femme illustre, devenue odieuse au philosophisme par sa piété, son zèle pour la foi, et pour avoir été l'amie et l'épouse de Louis XIV (1). Nous rapporterons quelques-unes des notes dont on a augmenté la nouvelle édition.

(1) Voyez Louis XIV, Philippe II dans le Dict hist.-Les Bossuet, les Fénelon, les Bourdalone, les Fléchier, les Villeroi, les Montausier, etc., tout ce qu'il y avoit de grand et de sage dans l'Eglise et l'Etat, ont rendu aux vertus de cette femme célèbre un hommage pur. Que sont nos brochuraires modernes, ou quelques satyriques écrivains d'une date plus ancienne (tel qu'un Bussi-Rabutin) en comparaison de tant d'illustres témoins? Le fond de tout cela, est qu'on ne croit plus à la vertu. Les principes et les mœurs sont tellement corrompus, qu'on cœur grand et pur est regardé comme un être de raison. On est allé,

« On peut dire que les cérémonies de l'Eglise Romaine sont vraiment imposantes, et qu'elles élèvent l'ame vers le ciel. Le roi de Prusse, après avoir assisté au service des Catholiques à Breslaw, où le cardinal Zinzendorff chanta la Grand'Messe, dit à cette éminence : les Calvinistes traitent Dieu comme un serviteur, les Luthériens comme leur égal, mais les Catholiques le traitent en Dieu. Il fut singulièrement frappé de la pompe qui accompagne nos cérémonies ce témoignage n'est pas suspect. »

» Il y a des pressentimens et des pronostics qu'on ne peut nier, sans aller contre des faits (1). Le marquis de Boulainvilliers, célèbre par ses prédictions, annonça des événemens qui eurent tout leur accomplissement: fut-ce par inspiration secrète, fut-ce par hasard? Ce qu'il y a de sûr, c'est qu'il tira l'horoscope du comte de Froulay en présence de sa famille, et que tout ce qu'il dit, s'accomplit à la lettre, jusqu'au moment de sa mort, qu'il pronostiqua. Le Dictionnaire Encyclopédique dit à l'article pressentimens, qu'il y a des choses sur cet article qu'on ne pourra jamais expliquer; mais on veut aujourd'hui tout savoir, et quand on ne sait pas, on prend le parti de nier (2). "

dit l'auteur de la vie dont nous parlons, jusqu'à dire que madame de Maintenon étoit modeste et humble par vanite. Pauvre philosophie, à qui la vanité et l'ambition, la cupidité et l'orgueil sont tellement inhérentes, que les qualités contraires sont pour elle des chimères !

(1) Cette note se rapporte à la prédiction faite à Mad. de Main tenon, par le maçon Barbe; voyez ci-dessus Octobre 1786, page 69. (2) Puisque des gens aussi peu crédules que les Encyclopedistes, n'ont ose toucher à ce que l'on raconte des pressentimens, j'en dirai un mot sans craindre d'encourir le reproche de superstition. Un jour que j'allais me mettre en voyage pour passer un des défilés qui conduisent de Hongrie en Transylvanie, je racontai en prenant un déjeûner, que j'avois rêvé la nuit que je passois une grande forêt où de vieux arbres tomboient devant moi, arrachés par la violence du vent. C'étoit à Élées, chez un M. Tokodi, le 23 Novembre 1768. Ce monsieur, son épouse, et un père Fribert, se moquèrent de mon rêve; et vu que le temps étoit extrêmement calme, j'en ris avec eux. Cependant entre 9 et 10 heures, après quelques lieues de chemin, il s'éleva un ouragan qui réalisa exactement mon rêve; et comme il falloit à tout moment quitter le chemin pour tourner les arbres qui le traversoient à mesure qu'ils tomboient, arrachés avec toutes leurs racines; j'eus bien du mal d'arriver avant la nuit à Foketé-To, où je trouvai une caravane de marchands

«La dévotion de la plupart des grands est presque toujours fausse ils donnent ordinairement leur confiance à des directeurs qui les flattent, ou qui s'imaginent qu'on peut allier le tourbillon du monde avec la piété; de sorte qu'on voit les gens de la cour aller au spectacle comme à l'Eglise; faire, en affichant la dévotion, tout ce que font les mondains. L'Evangile est faux, disoit Massillon, si l'on se sauve à ce prix.

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« On dit que M. Bossuet, consulté par Louis-le-Grand sur les spectacles, répondit qu'il y avoit de grandes autorités pour et contre. Cette réponse est supposée, ou ce prélat n'eût pas soutenu son caractère. On sait que sans foiblesse, comme sans respect humain, il parla toujours en Père de l'Eglise, quand on le prit pour conseil ( 1 ). »

«Voltaire, qu'une vanité naturelle porta toujours à parler différemment des autres, est charmé de combattre les idées reçues et les traditions les plus accréditées, lorsqu'il peut le faire avec subtilité; mais il est trop superficiel pour en imposer aux personnes qui savent et qui réflé

chissent. »

« Si la France n'avoit pas éprouvé les crises qu'elle essuya sur la fin du règne de Louis-le-Grand, comme on ne l'avoit vu que dans une brillante prospérité, l'on pourroit douter de sa grandeur; mais il se roidit avec tant de courage et de religion contre les revers qui vinrent l'assaillir, qu'il arracha l'admiration du cœur même de ceux dont il étoit haï ce qui prouve qu'il avoit l'ame d'une trempe

qui avoit lutte contre le même accident. Je me souviendrai toute ma vie d'un bon frère laïque, qui la même année avoit la direction de la pharmacie, au collège de Clausenbourg, et qui me présentant du café, me dit que lorsque je reviendrois encore, il seroit in cryptá, ( dans le caveau). Comme il n'étoit pas malade, je contredis cette idée de mon mieux; cependant elle se réalisa peu de jours après. C'étoit un homme foncièrement sage et pieux, qui avoit beaucoup voyagé et beaucoup vu, et dont l'ame, toujours contente et gaie, étoit au-dessus de son emploi et de son état.

(1) L'auteur s'embarrasse ici dans une difficulté qui naît précisément de l'infidélité de sa mémoire. Jamais on n'a dit que Bossuet avoit tenu un tel propos. Voici la réponse de l'illustre prélat, pleine de sel et d'énergie, digne de l'Evangile et de la fermeté de ceux qui le prêchent: Sire, il y a de grands exemples pour, et de grandes autorités contre.

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