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5 PAGE 182, vers 25.

Sanguinei lugubre rubent, etc.

Les couleurs brillantes que le poète donne au héros et à son armure aux yeux de ses compagnons ne sont pour les soldats de Turnus qu'une comète effrayante qui leur apporte la mort. Cette comparaison a quelque chose de sinistre, et prépare bien l'esprit des lecteurs aux scènes de carnage dont ils vont être les témoins. 6 PAGE 192, VERS I.

Concurrunt; haeret pede pes, densusque viro vir.

Ce vers seul présente le tableau complet d'une mêlée. L'idée en est tirée du troisième livre de l'Iliade; mais la concision et la force de Virgile sont peut-être préférables à la manière d'Homère, qui décrit les javelots soutenant les javelots, les boucliers touchant les boucliers, les casques sur les casques, etc.

7 PAGE 192, VERS 9.

Quo fugitis, socii? per vos et fortia facta,

Per ducis Evandri nomen, devictaque bella, etc.

Ce discours du jeune Pallas est plein de chaleur et de vivacité, et il est très propre à intéresser les lecteurs en faveur de ce jeune prince, qui va leur faire répandre tant de larmes.

PAGE 194, VERS II.

Laride Thymberque, simillima proles,
Indiscreta suis, gratusque parentibus error:
At nunc dura dedit vobis discrimina Pallas.

La mort de ces deux frères jumeaux chéris de leurs parens, et tellement ressemblans que la différence de leurs blessures seule a pu les distinguer, est un des plus beaux exemples de l'art avec lequel Virgile sait entremêler ses récits de batailles de la peinture des vertus de la paix et des mœurs domestiques.

9 PAGE 204, VERS IO.

Quo nunc Turnus ovat spolio gaudetque potitus:
Nescia mens hominum fati sortisque futuræ,

Et servare modum, rebus sublata secundis, etc.

Addison observe que ces sortes de digressions de la part de l'auteur ralentiraient la narration si elles étaient trop longues et trop multipliées, mais en même temps ce judicieux critique a remarqué

avec une secrète admiration que celle-ci est la plus longue que Virgile se soit permise dans tout son poème, parce que ce petit incident, peu important en apparence, sert à annoncer le plus grand évènement de l'Enéide. C'est la vanité de Turnus à se parer des dépouilles de son ennemi qui prépare sa perte.

10 PAGE 206, VERS 6.

Pallas, Evander, in ipsis

Omnia sunt oculis; mensæ, quas advena primas

Tunc adiit, dextræque datæ.

Il est essentiel d'observer ici que les actions les plus impor tantes d'Énée sont toujours déterminées par des sentimens de justice et de vertu. Il se rappelle qu'il est fils en voyant égorger Priam, et il vole au secours de son père; il se rappelle qu'il est père lorsqu'un jeune homme implore sa clémence, et il lui pardonne en faveur d'Ascagne : ici, il a devant les yeux le meurtre du jeune Pallas et la douleur d'Évandre, à la table duquel il s'est assis, ce qui était chez les anciens le témoignage de l'amitié la plus inviolable; il voit les bienfaits et les larmes de ce bɔn roi, et c'est pour venger son fils qu'il veut immoler huit jeunes guerriers; qu'il égorge le lâche Magus, qu'il poursuit impitoyablement un prêtre d'Apollo», et refuse la sépulture à ses victimes.

11 PAGE 212, VERS 19.

Quem pius AEneas dictis affatur amaris...

C'est ici surtout qu'on a fait à Virgile le reproche d'avoir employé l'épithète de pius, si souvent répétéc, lors même qu’Énée se montre si implacable. On n'a pas fait attention que pius ne veut pas dire seulement pieux, et que son acception est beaucoup plus étendue en latin qu'en français; que Virgile surtout l'emploie pour exprimer le respect envers les dieux, la piété filiale, l'humanité, le courage même, et la reconnaissance; et que c'est dans cette occasion surtout qu'il a pris soin de ne montrer son héros cruel et implacable que parce qu'il est sensible, reconnaissant, et fidèle observateur des traités.

12 PAGE 214, VERS 16.

Non vivida bello

Dextra viris, animusque ferox, patiensque pericli.

Cette ironie, que quelques commentateurs ont prise au sérieux,

et que Desfontaines appelle néanmoins un bon mot de Jupiter, montre clairement la prédilection du maître des dieux pour la nation troyenne.

13 PAGE 216, VERS 9.

Tolle fuga Turnum, atque instantibus eripe fatis...

Cet unique moyen de salut que Jupiter présente à Junon pour son cher Turnus offre une triste alternative; il faut qu'il se déshonore en fuyant, ou qu'il périsse s'il reste sur le champ de bataille. Mais avec quelle adresse le poète sait entretenir l'intérêt et éloigner le dénouement ! et quel ingénieux stratagème il prête à cette déesse, pour sauver à la fois les jours et la gloire de son héros! 14 PAGE 216, VERS 21.

Nube cava tenuem sine viribus umbram

In faciem AEneæ, etc.

La description de ce fantôme est d'une perfection admirable : le poète a le talent de faire voir, de faire sentir une ombre légère qui échappe à tous les sens; ses expressions sont, si l'on peut parler ainsi, aériennes comme le phénomène qu'il décrit.

15 PAGE 218, VERS 3.

Morte obita quales fama est volitare figuras,
Aut quæ sopitos deludunt somnia sensus.

On pourrait s'étonner néanmoins que Turnus prenne l'ombre du héros pour le héros lui-même, et qu'un simple fantôme puisse le tromper à ce point. Mais Turnus est dans la chaleur du combat; il cherche Énée depuis long-temps, et il est tout naturel que son imagination et sa fureur aident à cette ruse.

16 PAGE 230, VERS 18.

Et dulces moriens reminiscitur Argos.

Cette image d'un guerrier mourant loin de sa patrie est aussi touchante qu'elle est bien prise dans la nature. Antor a quitté la Grèce depuis long-temps; et, par un exemple bien frappant des vicissitudes humaines, un Grec meurt en combattant pour les Troyens. C'est vers sa chère Argos qu'il tourne ses derniers regards; ce sont les souvenirs de son enfance qui forment ses dernières pensées.

17 PAGE 236, VERS 3.

AEneæ magni dextra cadis.

On a blâmé Virgile d'avoir mis dans la bouche de son héros ces expressions de jactance.

L'usage et les mœurs de ce temps-là justifient assez le poète, et sous ce rapport il y aurait certainement beaucoup plus à blâmer dans Homère que dans Virgile : au reste, les plus sages moralistes on't pensé qu'il était des circonstances où on pouvait rendre de soimême le témoignage que l'on croit juste. Quintilien accorde ce privilége aux poètes : Oportet poetam bene de se semper sentire. Montaigne dit «< qu'une chose étant vraie peut être dite de soi-même par un grand homme, quand il n'y a pas de sujet de le soupçonner d'affectation. >>

18 PAGE 238, VERS 14.

Hoc decus illi,

Hos solamen erat; bellis hoc victor abibat

Omnibus. Alloquitur mærentem, et talibus infit, etc.

Ce superbe coursier, la gloire et la consolation de Mézence, a cent fois triomphé avec lui dans les combats : ce guerrier a élé chassé de ses états par ses propres sujets; il a perdu son fils; son cheval est le seul ami qui lui reste : il n'est point étonnant qu'il lui adresse un discours au moment où il vole avec lui au combat pour la dernière fois. Virgile avait ici l'autorité d'Homère, qui fait parler Hector à ses chevaux.

NOTES

DU LIVRE XI.

1 PAGE 258, VERS 7.

Qualem virgineo demessum pollice florem,

Seu mollis violæ, seu languentis hyacinthi, etc.

Comme la tendre fleur qui périt dès qu'elle ne reçoit plus le suc nourricier de la terre, Pallas succombe la première fois qu'il a quitté le toit paternel. Cette comparaison est d'un charme inexprimable; c'est une des plus belles de Virgile, par l'exactitude des images et la perfection des vers.

a PAGE 260, VERS 2.

Post bellator equus, positis insignibus, AEthon

It lacrymans, guttisque humectat grandibus ora.

Cette image d'un vieux cheval de bataille pleurant derrière le corps de son maître complète bien le tableau de la douleur générale, et elle est très poétique. Mais on a voulu aussi qu'elle fût vraisemblable; et c'est dans Pline le naturaliste que les défenseurs de Virgile ont trouvé une réponse aux critiques; il parle ainsi des chevaux : Amissos lugent dominos, lacrymasque interdum desiderio fundunt. Le portrait beaucoup plus étendu que Buffon a fait de cet animal vient à l'appui de cette assertion; il a été cité ailleurs. Homère a aussi fait répandre des larmes aux chevaux d'Achille après la mort de Patrocle.

3 PAGE 260, VERS 13.

Jamque oratores aderant ex urbe Latina, etc.

Cette députation solennelle est un hommage éclatant rendu à la valeur d'Énée par ses ennemis eux-mêmes: ils le reconnaissent pour leur vainqueur en lui demandant la permission de rendre les derniers devoirs à leurs morts; et cette circonstance fournit au poète une heureuse occasion de signaler la générosité de son héros, de faire remarquer la justice de sa cause, et de préparer le dénouement du poème.

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