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tant de vertus privées, l'avaient formé aux vertus publiques qui ont servi à votre régénération; vous saurez comment dans cette nouvelle carrière, il resta fidèle à ses principes et à son caractère, comment il s'y montra libre de toute passion, exempt de toute intrigue, étranger à tout parti, inaccessible à tout motif d'intérêt personnel, propre, en un mot, à occuper le premier rang parmi des rivaux, dont plusieurs néanmoins avaient de justes titres pour prétendre à la même gloire; vous saurez enfin comment, et par quels moyens, il mérita de devenir votre guide, votre libérateur, le chef de vos législateurs; vous le saurez, nos très-chers frères, et montrant à vos enfans les traits de ce grand homme, que le burin vous a conservés, et où sa belle âme semble respirer tout entière, vous leur direz, en fondant en larmes : voilà, voilà par quelles main s fut faite cette révolution qui nous était si chère. Pour nous, nos très-chers frères, faible interprète de la douleur publique, nous ne nous flattons pas d'avoir érigé à Mirabeau un monument qui soit digne de lui, et qui puisse satisfaire votre patriotisme. Mais nous avons épanché notre âme ingénue dans des cœurs affectés des mêmes sentimens qui nous animent, et nous aurons du moins la gloire d'avoir consacré les premiers accens de notre voix pastorale en l'honneur du vertueux législateur qui fut le plus bel ornement de notre église naissante.

A ces causes, nos fidèles coopérateurs assemblés, et le serment civique renouvelé, nous ordonnons que le présent mandement sera envoyé à chaque département, chaque district, chaque section, chaque canton, chaque municipalité, chaque tribunal, chaque juge de paix, chaque corps-de-garde national, et chaque prêtre assermenté de notre diocèse ; que l'original, signé de nous, sera déposé dans les archives de notre métropole, et qu'en tête de l'ouvrage, ces mots seront inscrits en gros caractères :

A MIRABEAU, PÈRE DE NOTRE ÉGLISE.

GOBET, RECONNAISSANT.

Et plus bas :

Signé, J.-B.-J. Gobet.

COURTE-QUEUE, secrétaire.

Journée du 18 avril. - Le 6 et le 7, des désordres avaient déjà eu lieu à l'occasion des prêtres réfractaires. Voici ce que nous lisons dans les Annales patriotiques, à la date du 9 avril. — Des moines honteux, encore relégués dans leurs cloîtres, et quelques béguines, en qualité de femmes dociles, imitatrices de leurs amans tonsurés et porte-frocs, se sont avisés hier et avant hier de donner de petites scènes de rébellion dans leurs églises. La foule s'y est transportée : les femmes étaient armées de verges; elles ont fustigé hors du temple quelques calotins et calotines possédés du démon de la con re-révolution, et les hommes ont beaucoup ri des grimaces de ces lutins flagellés. Cependant la garde nationale est accourue, et a fait rabattre lès cotillons retroussés. La municipalité, craignant que les fustigations publiques et trop répétées n'occasionnassent quelque scène plus fâcheuse, a mis fin par une proclamation à ces corrections populaires; elle a ordonné que les églises des nonnains seraient fermées au public, et redeviendraient, suivant leur destination primitive, les oratoires privés des religieuses cloîtrées.

Nous trouvons dans le Moniteur du 14 avril un article de Peuchet, dont voici l'extrait :

Les citoyens paisibles et honnêtes, ceux qui aiment la révolution pour les lois, et la liberté pour tout le monde, ont qualité pour demander qu'on réprime les harangueurs publics, dont le nombre s'accroît chaque jour à Paris. Placés sur les ponts, au coin des rues, ils attendent les ouvriers, les hommes simples pour les endoctriner; ils les égarent par des récits menteurs et des systèmes de superstition et d'intolérance politiques; ils corrompent le sens des décrets par des interprétations fanatiques et insensées; ils exaspèrent les sentimens de la multitude par des calomnies contre les personnes. Ce sont eux qui répandent et font germer dans l'esprit du peuple toutes ces semences de désordre dont les effets sont si funestes et dont on ignore si souvent le principal ferment.

› Ces sermons politiques sont aussi dangereux que ridicules; ils versent dans l'âme de ceux qui les écoutent un poison lent

qui y éteint la raison et le respect des lois; on y confond la souveraineté nationale avec la volonté des groupes populaires, la liberté avec le pouvoir de désobéir aux lois de l'Etat, la constitution avec un système incohérent de prétentions fanatiques et de licence journalière. De là ces arrestations des messageries, ces violations de domicile, ces entreprises séditieuses, ou tout au moins l'extrême facilité que l'on trouve dans la multitude pour l'entraîner à ces délits.

› Ce n'est point aller contre la liberté d'écrire que d'interdire sous de rigoureuses peines ces lectures publiques, ces écoles en plein air, où tous les écarts de l'opinion d'un harangueur ignorant deviennent autant de maximes pernicieuses pour le peuple, qu'il est affligeant de voir livré à l'enseignement d'hommes inconnus, et par conséquent suspects.

› Cette indifférence de la puissance publique est doublement coupable: 1o elle suppose un grand mépris du peuple; 2o un oubli des devoirs que la loi prescrit sur les moyens de conserver l'ordre et la tranquillité publique. La crainte des méchans ne doit jamais retenir les magistrats, dont la première obligation est de les combattre', et de sacrifier, s'il le faut, une existence entièrement consacrée au bonheur des citoyens. >

Nous avons parlé de l'émeute qui avait eu lieu aux abords.de l'église des Théatins, le dimanche 17: ce même jour le club des Cordeliers fit placarder l'arrêté suivant:

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< La société, sur la dénonciation à elle faite, que le premier fonctionnaire public de la nation souffre et permet que des prétres réfractaires se retirent dans sa maison, et y exercent publiquement, au scandale des Français et de la loi, les fonctions publiques qui leur sont interdites par élle; qu'il a même reçu aujourd'hui la communion pascale et entendu la messe d'un des prêtres réfractaires, a arrêté que, la vérité de ce fait bien constatée, elle dénonce aux représentans de la nation ce premier fonctionnaire public, ce premier sujet de la loi, comme réfractaire aux lois constitutionnelles qu'il a juré de maintenir, [et dont les fonctions lui prescrivent d'en assurer l'exécution, et

comme autorisant à la désobéissance et à la révolte; préparant ainsi à la nation française les factions que les ennemis des droits de l'homme voudraient exciter contre la constitution.

>

› Signés, PIERRE, président; VINCENT, greffier. > Nous analyserons maintenant sur la journée du 18 une brochure du temps, intitulée : Récit exact, etc. Cette brochure appartient à l'opinion royaliste-constitutionnelle. L'auteur avertit dans une note qu'il a tout vu, tout suivi, et qu'il écrit d'ailleurs d'après des témoignages dignes de foi, et sur des pièces authentiques. Il commence par une récrimination pleine d'aigreur contre les intrigans et les factieux, contre la Société fraternelle et le club des Cordeliers, superfétation monstrueuse du club des Jacobins; ensuite il dit :

Depuis long-temps des bruits, qui n'étaient malheureusement que trop fondés, se répandaient que le roi donnait asile dans son palais à des prêtres non conformistes. On disait surtout qu'il se proposait de quitter l'assemblée nationale et peut-être la France. La fermentation était générale; les ennemis du peuple et du monarque choisissent ce moment pour conseiller au roi de persister dans le dessein d'aller à Saint-Cloud. Ce qui en soi est fort innocent, même fort constitutionnel, change entièrement selon les circonstances. Les factieux avaient pris soin de répandre cette nouvelle, en prêtant au roi les intentions les plus contraires à sa franchise et à sa loyauté, en débitant que plus de trente mille contre-révolutionnaires étaient répandus aux environs de Saint-Cloud, et se disposaient à enlever le roi pour le conduire au milieu de ces armées imaginaires dont on nous menace depuis si long-temps.

› Dès le vendredi 15, les ordres du directoire et ceux de la municipalité avaient été donnés pour le départ de Louis XVI. Le samedi, ils avaient été mis à l'ordre de la garde nationale; le dimanche, la première division avait formé le détachement qui devait aller à Saint-Cloud; le lundi matin, ce détachement était parti, et personne n'avait imaginé d'apporter le moindre obstacle ni de faire la moindre représentation sur ces mesures,

dont l'assemblée nationale même avait la plus parfaite connaissance. Au moment du départ, le commandant-général répéta ces ordres; sur le refus d'obéir, il alla en rendre compte au directoire du département, au maire et aux officiers municipaux réunis dans la salle de l'assemblée nationale.

M. le maire avait fait de vains efforts pour calmer le peuple et la garde nationale. M. de la Fayette avait aussi parlé au peuple, et converti ceux qui l'entouraient ; mais le tumulte et le nombre de ceux qui remplissaient les Tuileries, et que des gens manifestement séditieux et très-connus animaient sans cesse, ne per mettaient pas que la voix d'un seul homme se portàt bien loin. Les efforts des autres officiers de la garde nationale furent aussi méprisés, même par leurs propres troupes. M. de la Fayette en alla rendre compte au directoire et aux autres officiers municipaux, qui lui ordonnèrent de faire ouvrir le passage au roi, lequel était depuis sept quarts d'heure dans sa voiture. Porteur de cet ordre il le signifia, et fut désobéi.

› Pendant ce temps les aristocrates, par un singulier accord avec le peuple, ne cessaient de prier le roi de remonter; ce qu'ils faisaient par un dessein perfide. Un officier municipal fit au roi les mêmes prières par amour de la paix. Le roi, ainsi que sa famille, depuis long-temps en butte aux propos les plus outrageans, y consentit pour prévenir tout acte de violence entre les citoyens.

› M. de la Fayette alla rendre compte de ces événemens au directoire et au corps municipal, et dit que, persuadé que le sort de la constitution dépendait de l'obéissance à la loi, il croyait qu'ayant été pour la première fois un instrument inefficace de la loi, il devait se briser lui-même: il offrit sa démission, qui fut refusée, et l'on décida de consulter les sections sur la question de savoir si l'on engagerait le roi à partir, ou si on le remercîrait de n'être point parti. Toutes les sections répondirent qu'il n'y avait pas lieu à délibérer; quelques-unes exprimèrent leur étonnement sur ce qu'elles avaient été consultées.

› Ce même jour le département présenta au roi une adresse

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