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redoutable de faire des lois ; il est resté chargé des négociations avec les puissances étrangères, du soin de défendre le royaume, et d'en repousser les ennemis; mais la nation française n'en aura plus désormais au-dehors que ses agresseurs: elle n'a plus d'ennemis intérieurs que ceux qui, se nourrissant encore de folles espérances, croiraient que la volonté de 24 millions d'hommes rentrés dans leurs droits naturels, après avoir organisé le royaume de manière qu'il n'existe plus que des souvenirs des anciennes formes et des anciens abus, n'est pas une immuable, une irrévocable constitution.

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› Les plus dangereux de ces ennemis sont ceux qui ont affecté de répandre des doutes sur les intentions du monarque ; ces hommes sont bien coupables ou bien aveuglés ; ils se croient les amis du roi, ce sont les seuls ennemis de la royauté; ils auraient privé le monarque de l'amour et de la confiance d'une grande nation, si ses principes et sa probité eussent été moins connus. Eh! que n'a pas fait le roi pour montrer qu'il comptait aussi la révolution et la constitution française parmi ses titres à la gloire? Après avoir accepté et sanctionné toutes les lois, il n'a négligé aucun moyen de les faire exécuter; dès le mois de février de l'année dernière, il avait, dans le sein de l'assemblée nationale, promis de les maintenir; il en a fait le serment au milieu de la fédération universelle du royaume : honoré du titre de restaurateur de la liberté française, il transmettra plus qu'une couronne à son fils, il lui transmettra une royauté constitutionnelle.

› Les ennemis de la constitution ne cessent de répéter que le roi n'est pas heureux, comme s'il pouvait exister pour un roi d'autre bonheur que celui du peuple; ils disent que son autorité est avilie, comme si l'autorité fondée sur la force n'était pas moins puissante et plus incertaine que l'autorité de la loi ; enfin, que le roi n'est pas libre: calomnie atroce, si l'on suppose que sa volonté a pu être forcée; absurde, si l'on prend pour défaut de liberté le consentement que sa majesté a exprimé plusieurs fois de rester au milieu des citoyens de Paris: consentément qu'elle devait ac

corder à leur patriotisme, même à leurs craintes, et surtout à leur amour.

Ces calomnies cependant ont pénétré jusque dans les cours étrangères; elles y ont été répétées par des Français, qui se sont volontairement exilés de leur patrie, au lieu d'en partager la gloire, et qui, s'ils n'en sont pas les ennemis, ont au moins abandonné leur poste de citoyen. Le roi vous charge, Monsieur, de déjouer leurs intrigues et leurs projets. Ces mêmes calomnies, en répandant les idées les plus fausses sur la révolution française, ont fait suspecter chez plusieurs nations voisines les intentions des voyageurs français ; et le roi vous recommande expressément de les protéger et de les défendre. Donnez, Monsieur, de la constitution française, l'idée que le roi s'en forme lui-même; ne laissez aucun doute sur l'intention de sa majesté de la maintenir de tout son pouvoir. En assurant la liberté et l'égalité des citoyens, cette constitution fonde la prospérité nationale sur les bases les plus inébranlables; elle affermit l'autorité royale par les lois ; elle prévient, par une révolution glorieuse, la révolution que les abus de l'ancien gouvernement auraient bientôt fait éclater, en causant peut-être la dissolution de l'empire; enfin, elle fera le bonheur du roi. Le soin de la justifier, de la défendre et de la prendre pour règle de votre conduite, doit être votre premier devoir.

Je vous ai déjà manifesté plusieurs fois les sentimens de sa majesté à cet égard; mais d'après ce qui lui est revenu de l'opi nion qu'on cherchait à établir dans les pays étrangers sur ce qui se passe en France, elle m'a ordonné de vous charger de notifier le contenu de cette lettre à la cour où vous êtes; et pour lui donner plus de publicité, sa majesté vient d'en ordonner l'impression.

23 avril 1791.

Signé, MONTMORIN.

La lecture de cette lettre excite le plus vif enthousiasme dans la partie gauche de la salle et dans toutes les tribunes. Elle est interrompue à chaque phrase par des applaudissemens et des cris cent fois répétés de vive le roi !]

T. IX.

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La brochure ne renferme aucun autre détail intéressant. Il fut décidé que les bataillons s'assembleraient, et prêteraient de nouveau serment d'obéissance, après quoi ils manifesteraient leurs vœux par des pétitions spéciales.

Le serment prêté par les bataillons fut dénoncé au club des Cordeliers, qui prit un arrêté à ce sujet. La discussion sur le caractère de l'obéissance que devait la force publique fut reprise avec une vigueur nouvelle. Marat se distingua dans cette polémique. Il faut voir ses interpellations sur la doctrine de l'obéissance passivé à Rabaud, ce perfide et hypocrite huguenot.

Tous les arrêtés du club des Cordeliers furent dénoncés par l'accusateur public, et le bataillon de cette section, indigné de la conduite des factieux, demanda à changer son nom en celui de bataillon de l'Observance; ce qui lui fut accordé.

Le Moniteur du 26 avril ferme ainsi ces collisions.

[M. le maire, instruit des inquiétudes de l'armée parisienne, a fait mettre à l'ordre, le 24, que le corps municipal avait reçu, dans la journée du 23, le vœu de cinquante-quatre bataillons; -qu'il recevrait sans doute le vœu des autres le lendemain, et qu'il s'empresserait de prendre les mesures qui peuvent satisfaire, et l'armée, et la capitale, et le corps municipal.

M. le major-général a été chargé par M. le maire d'inviter MM. les chefs de division et commandans de bataillon à veiller particulièrement à la tranquillité publique pendant les fêtes de Pâques,

Tous les bataillons de la garde nationale parisienne ayant renouvelé le serment d'obéissance à la loi, le résultat de leurs délibérations a été remis à la municipalité, et communiqué à M. la Fayette, qui a repris les fonctions de commandant-général, et a assisté ce matin à la parade de la garde de la réserve de l'Hôtel-de-ville.

Le roi et sa famille ont assisté hier à l'office à Saint-Germainl'Auxerrois.]

Brissot fut presque le seul journaliste révolutionnaire qui, tout en blamant certains actes et certaines démarches, prit ou

vertement le parti de la Fayette. Cette opinion le fit classer par Marat au nombre des ennemis publics. L'un des coups d'autorité qui indisposa le plus les patriotes à la suite de ces affaires, fut le licenciement des grenadiers soldés du bataillon de l'Observatoire. C'était l'élite de ces gardes françaises, qui avaient donné tant de gages à la révolution.

On pense bien que Marat participa largement à ces querelles. Dans son numéro CCCCXXXIX, il inséra une lettre au général démissionnaire, pour lui démontrer que son devoir, si toutefois ce mot avait un sens pour lui, était de disparaître de la scène politique. En désespoir de cause, il publia contre lui le pamphlet dont la teneur suit:

Du mardi 26 avril 1791.

Histoire curieuse, véritable et remarquable des plus beaux traits de la vie de Marie-Paul-Joseph-Roch-Yves-Gilbert Mottié, marquis de la Fayette, maréchal de camp', député de la noblesse de Riom aux états-généraux, fondateur du club des monarchiens et du club des fédérés, instituteur des mouchards de l'état-major, président du comité autrichien, généralissime des contre-révolutionnaires, conspirateur en chef du royaume de France, et général de l'armée parisienne, et grenadier à moustaches du bataillon des Théatins; offerte à l'admiration des Français, amis de la vertu ét de la liberté. - Tout ce qui reluit n'est d'or.

pas

«Il faudrait du loisir et une plume plus exercée que la mienne pour faire la vie de ce vil courtisan, qui naquit parmi nous pour le malheur de la France, de ce fourbe consommé dont la renommée se plut si long-temps à publier les faux exploits, de cet adroit fripon qu'une cabale cachée mit à la tête des légions citoyennes, de ce conspirateur musqué dont la main barbare cherche à entraîner la patrie dans l'abîme, de ce monstre atroce dont l'astuce voudrait enfin forcer les soldats de la liberté à devenir les satellites du despotisme, les oppresseurs de leurs frères, les bourreaux des amis de la révolution. Pressé par les dangers imminens auxquels il vient d'exposer la chose publique, à peine

ai-je le temps d'esquisser le canevas de ses principales aventures; mais les traits de ce héros indigne seront tracés avec l'impartialité du pinceau de l'histoire. Puisse l'horreur qu'ils inspirent, ouvrir les yeux des aveugles Parisiens.

Je ne le prendrai point au berceau, j'observerai seulement qu'il apporta au monde un physique équivoqué, qui laissait indécise sous le vêtement la différence des sexes, et une chevelure de la couleur pour laquelle nous avons une espèce de dégoût, et dont un préjugé vulgaire fait le signe apparent de cette fausseté de caractère qui marqua de son sceau toutes les actions de sa vie.

> Je ne dirai rien des fredaines qui empoisonnèrent les principaux momens de sa lubrique jeunesse, dont presque tout le cours fut ensuite consacré aux essors de la vanité, à l'étude de la dissimulation, à la pratique de l'art d'en imposer aux hommes.Je le prendrai dans cet âge qui sépare la jeunesse de la virilité, dans cet âge heureux où l'âme a tout son élan, sans avoir encore toute son énergie.

› La nature l'avait formé pour la volupté; mais la fortune prit long-temps à tâche de lui en refuser les douces jouissances. Dupe du libertinage, trahi par l'hymen, repoussé par l'amour, il semblait condamné à renoncer à jamais au plaisir.

› Cependant la renommée se plaisait à le dédommager des rigueurs de l'amour. Jalouse de sa célébrité, elle faisait tourner à son avantage ses propres défaites, et tirait sa gloriole de la source même de ses humiliations. Les colonies anglaises venaient de secouer le joug de la métropole; elles combattaient pour leur liberté. Bientôt une foule d'aventuriers français passent les mers, pour offrir leurs services aux Américains. On a fait honneur à leur haine pour la tyrannie, et à leur compassion généreuse pour des opprimés de cette noble ardeur qui animait ces militaires; on les représentait comme des défenseurs des droits de l'humanité qui brûlaient de combattre pour une si belle cause. Pures sornettes; ces prétendus redresseurs de torts étaient eux-mêmes sous le joug d'un maître despotique. Or, ce n'est point à des esclaves à vouloir combattre pour la liberté. Mottié était du nombre

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