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magistrats infidèles viendront m'interdire le port d'armes MÊME POUR MA DÉFENSE PERSONNELLE! Juste ciel! où sommesnous ? Les assassins qu'on nous destine sont-ils déjà aux aguets ?

› Cet horrible placard ne fut pas plutôt affiché, que la garde nationale courtisanne en opéra l'exécution avec cette ineptie cruelle et pitoyable qu'elle met à complaire aux tyrans. Idée affligeante, qui rappelle l'esclave des amphithéâtres, qui mettait sa gloire à s'humilier et à s'avilir pour le plaisir de ses maîtres! Mais au moment de cette proclamation et de cette exécution, tout le peuple, et par-dessus tout, la gardé citoyenne, le grand et formidable corps de la garde nationale, cette milice parisienne presque en entier, firent retentir de leurs rugissemens les lieux publics, leurs foyers et les lieux d'assemblée. Les traîtres en furent bientôt avertis, et l'ordonnance fut ignominieusement révoquée par un placard municipal, le lundi 21 mars 1791.

› Néanmoins, dans deux autres endroits de Paris, il a été commis, en vertu de l'ordre exécrable, des vexations infâmes, dont pas une n'a été exercée en silence. Celui-ci se voyant dépouillé de sa canne, ameutait le peuple et criait à l'infamie; celui-là résistait avec la fierté d'un homme libre, et donnait à la garde nationale honteuse l'attitude de l'ancien guet de Paris; un autre, plutôt que de livrer ses armes, les brisait sur son genou, et les foulait aux pieds, en vomissant des imprécations bien justes, et dont l'effet retombera quelque jour sur la tête des traîtres.

. Mais que dirons-nous du général la Fayette, qui, plus prompt que l'éclair, a communiqué en un instant le poison municipal dans la capitale, et a ordonné, dans le plus petit délai, l'exécution de l'ordonnance infâme? Le général est coupable d'avoir prêté les mains à cette forfaiture; et il n'y a plus de liberté, si l'on ne cite devant la loi les auteurs de l'ordonnance, et celui qui en a opéré l'exécution. ›

-L'histoire des clubs, pendant le mois de mars, ne nous donne

matière à aucun extrait important. Dans celui des Jacobins, l'affaire de Théodore Lameth, contre la société de Lons-leSaulnier, se termina à l'avantage du premier. Camille Desmoulins, qui avait d'abord penché pour lui, adopta l'avis et les conclusions de Brissot, et s'éleva fortement dans son journal contre le club fondé par Théodore Lameth dans le chef-lieu du Jura, et auquel il avait fait transporter l'affiliation injustement ôtée aux Jacobins de cette ville. Il taxe la société nouvelle, d'après des pièces nombreuses, d'être un guêpier aristocratique.-D'ailleurs, le club des Jacobins étendait chaque jour ses correspondances. Dans une seule séance de ce mois, 72 sociétés de province lui demandèrent l'affiliation.

Les séances du Cercle social furent consacrées à des discussions et à des lectures. Nous ne devons noter que la fondation d'un club des Amies de la vérité, ouvert sous les auspices des rédacteurs de la Bouche de fer, par une femme dont il a déjà été question, madame Palm. Au reste, plusieurs sociétés de femmes se formèrent à la même époque dans la capitale et dans les dépar

temens.

Nous terminerons nos analyses sur les événemens de mars par l'article suivant de Desmoulins, relatif aux affaires de Douai. Comme il en parlait après tous les autres, il offre un résumé des objections de la presse patriote contre le décret de l'assemblée nationale.

Desmoulins commence par critiquer la séance du 19. Robespierre est le seul orateur qu'il trouve fidèle aux principes, parmi tous ceux qui ont donné leur avis. Prenant ensuite celle du 20, il dit :

< Le lendemain arrive le procès-verbal de la municipalité de Douai, qui fait foì, suivant elle, qu'elle a employé tous les moyens qui sont en son pouvoir pour prévenir les excès qui ont eu lieu.

› Voidel et Treilhard voulaient qu'on lût le procès-verbal de la municipalité.

› Regnaud de Saint-Jean-d'Angely, Chapelier ont soutenu qu'il serait honteux de réformer son décret.

> Il n'y a de honte qu'à être injuste. Il fallait entendre les municipaux, puisqu'on les avait jugés par défaut, et qu'un homme jugé par défaut a certainement, le lendemain, la voie de l'opposition pour revenir contre le jugement. Et qu'on ne dise pas que l'assemblée n'a pas droit de juger. Elle a rendu cent jugemens, et elle en avait le droit. Elle avait encore plus ici le droit de juger contradictoirement ce qu'elle avait bien jugé par défaut. Elle se serait fait honneur en écoutant les municipaux, en ne les jugeant point, comme l'empereur Claude, ce despote stupide, sans entendre. Elle se serait fait encore plus d'honneur en réformant son jugement, s'il y avait lieu, comme elle a réformé, le 2 août, celui qu'elle avait rendu contre moi le 31 juillet; comme en lisant dans tous les papiers la lettre du maréchal Broglie, en date du 12 mars, elle aurait dû réformer à l'instant le décret qui lui a été surpris par Victor Broglie, sur un faux exposé; comme la municipalité vient tout à l'heure de réformer, le surlendemain, le jugement stupide, atroce, liberticide, qu'elle avait fait afficher parto ut l'avant-veille.

L'innocence des municipaux de Douai, n'est pas à beaucoup près aussi évidente que la violation des principes élémentaires de notre liberté dans le décret de l'assemblée nationale, et cette affaire, jugée si précipitamment, est fort délicate. Ila paru deux numéros de l'utile, très-utile Marat, où, à travers les exagérations, les faits faux, qu'on peut lui reprocher à l'ordinaire, on démêle de grandes vérités, des observations d'une justesse frappante, et qu'on voit bien lui avoir été fournies de bonne part.

› Marat-se trompe grossièrement, pour ne rien dire de plus, quand il dit que M. de Lanoue, commandant de Douai, est le même de Lanoue qui commandait à Nancy; que les municipaux de Douai sont des patriotes éprouvés qu'on veut faire périr; que M. Alquier, rapporteur de l'affaire de Nîmes, est un aristocrate; que les trois comités sont vendus, et que le pain vaut trois sous

et non un sou la livre, à Douai, comme les comités l'ont attesté.

› Mais si la municipalité de Douai est notée d'aristocratie, le directoire du département n'est pas très-bien famé pour son patriotisme ses querelles avec l'excellente société des Amis de la constitution à Lille, ne l'accusent guère moins fortement d'aristocratie que la dénonciation de M. Martin (voyez notre no 20), en a accusé la municipalité de Douai.

› C'est un grand argument contre la municipalité de Douai, que le défaut de cause suffisante d'une semblable émeute. Le pain ne valait qu'un sou la livre. Mais d'un autre côté, observe très-bien Marat, le chargement se faisait pour Dunkerque, sur une rivière qui, avant d'y arriver, passe à Tournai, à Oudenarde, et par divers canaux communique à Ostende, Bruges, Gand, Bruxelles et toutes les places des Pays-Bas autrichiens. Dans la crainte d'une guerre que les démocrates et les artistocrates publient également être très-prochaine, rien d'étonnant que le peuple de Douai ait craint que Delrand et Nicolon, gens très-suspects, ne chargeassent en effet pour approvisionner le camp autrichien. Cette réflexion pourrait expliquer l'insurrection de Douai.

› Puis, il y a un grand argument en faveur de la municipalité, un argument sans réplique pour ceux qui connaissent le peuple. C'est que les trois régimens et le peuple étaient réunis. C'est le peuple et les soldats réunis qui ont pendu Nicolon et Derbaix. Dès-lors, je dis, sans crainte de me tromper, qu'il faut que ces deux hommes eussent légitimé l'insurrection. Qu'on ne m'oppose point le meurtre du boulanger François. Ce fut l'émeute d'une poignée de gens. Un observateur attentif ne peut douter qu'elle ne fut un coup monté par nos Machiavels, pour légitimer la loi martiale. Ce meurtre fut l'affaire d'un moment, on ne vit ni ces mouvemens précurseurs d'une émeute, ni ceux qui la suivent. Ici la fermentation dura quatre jours; et le peuple achève son exécution vingt-quatre heures après qu'il l'a commencée; il a tué Derbaix la veille, et le lendemain il va enfoncer les prisons, et se ressaisir de sa victime qu'on y a traînée mourante. Tant d'acharnement d'un peuple entier à une cause qu'on

nous cache! et on n'en peut douter, quand on compare à luimême ce peuple dans les premiers jours de l'émeute,

› Delrand fait un chargement de grains suspect; il ne fait point de déclaration.

› Le peuple ouvre la loi concernant la circulation des grains, il lit article 3, décret du 27 septembre 1789:

› Ceux qui feront transporter des grains et farines dans l'étendue de trois lieues des frontières du royaume, autres néanmoins que les frontières maritimes, seront tenus d'en faire la déclaration exacte par-devant la municipalité du lieu du départ, et de fournir bonne et suffisante caution, de justifier de leur destination, par un certificat de la municipalité desdits lieux. (Voilà bien la loi de l'espèce.) Art. IV. A faute de ce faire, les grains et farines seront saisis, confisqués et vendus, et les deniers en provenant, appliqués au profit des hôpitaux.

› C'est une chose bien étrange et qui me prêterait ample matière à rire, si j'étais aristocrate, que cet oubli de l'assemblée nationale, de son propre décret, dont il n'y a pas un membre qui se soit souvenu, tandis que ces messieurs citent sans cesse les moindres bills du parlement d'Angleterre, et que Cazalès se rappelle même, si à propos et si obligeamment pour Mirabeau, qu'un jour M. Fox, ayant été retenu par une indisposition, la chambre eut l'honnêteté d'ajourner à sa convalescence une question où Fox n'avait pas demandé la parole.

Mais le peuple de Douai, qui lit des décrets, se souvenait de celui-ci. Il demanda en conséquence la vente des grains, et voyez la modération de ce peuple qu'on peint comme enragé : il pouvait demander la confiscation: il ne s'oppose point à ce que les deniers soient remis au marchand, si le tribunal juge qu'il n'est point en contravention; et il désigne un séquestre.

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› Certes, on ne reconnaît point là une multitude de contrerévolutionnaires, payés par les calotins pour troubler l'élection du nouvel évêque.

› Non content d'avoir la loi de son côté, le peuple de Douai suit les municipaux au département pour consulter les organes

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