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du soir au matin, c'est ce qui ne s'est jamais vu. Tonjours les questions constitutionnelles ont été discutées. Ici il s'agit d'un décret qui renferme une foule de questions constitutionnelles du plus grand intérêt, et dont la décision peut, ou affermir, ou renverser la constitution..... Je n'ai pas besoin d'en dire davantage pour réclamer avec succès, au nom de la liberté, au nom de la nation, un ajournement qui donne à tout le monde le temps de la réflexion.

M. Buzot. S'il ne s'agissait dans ce projet de décret que de savoir si les départemens doivent avoir une influence quelconque sur les districts et sur les municipalités, et si le gouvernement lui-même doit avoir sur les corps administratifs une influence, salutaire à mon avis, il n'y aurait pas besoin de discussion : car ces questions sont décidées; mais il s'agit de fixer les limites decetteinfluence, le mode de son exercice; il s'agit de la voûte de l'édifice de l'administration. Un rapport de cette importance, qui n'a été distribué qu'hier au soir, ne peut être discuté ce matin.

M. Chapelier. En général tous les moyens qui peuvent éclaircir une discussion, doivent être adoptés. On ne saurait examiner avec trop d'attention les questions constitutionnelles. Cependant je ne suis point d'avis de l'ajournement. Depuis deux ans que nous discutons ces questions, et depuis que l'expérience nous a éclairés, nous devons avoir les idées assez faites sur cette matière pour nous en occuper. Je ne vois pas d'inconvénient à ouvrir en ce moment la discussion, surtout sur les premiers articles du projet. M. Pétion appuie l'ajournement demandé par M. Robespierre. (Les murmures étouffent en partie sa voix.)

L'assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'ajournement.]

'La seule discussion intéressante sur le rapport de Desmeuniers, eut lieu le lendemain. Elle porta sur la question d'ajournement et sur l'article huitième du projet.

"[M. Pétion. L'article VIII porte que tout corps, administratif qui publiera ou fera circuler des arrêtés ou des lettres, provoquant ou fomentant la résistance à l'exécution des délibérations, qu

ordres émanés des autorités supérieures, sera suspendu de ses fonctions, et en cas de récidive, destitué. Remarquez combien ces expressions sont vagues, et combien elles laissent à l'arbitraire. Il est possible qu'une lettre très-bonne quant au fond, soit regardée, pour une seule expression arbitrairement commentée, comine tendante à fomenter la résistance. Avec de tels décrets, vous paralysez les corps administratifs.Je demande que le comité particularise le delit pour lequel il propose une peine sévère.

M. Desmeuniers. Nous avons déjà vu des exemples de ces lettres circulaires envoyées par des administrations. Les expressions que nous employons, sont adoptées dans toutes les ordonnances. Il est facile de voir si une lettre circulaire contient une provocation contre les lois; et il est aisé de voir que ceux qui favoriseraient la circulation de pareilles lettres, fomenteraient la résistance aux lois : voilà tout ce que nous avons voulu exprimer dans l'article.

M. Robespierre. N'est-il pas évident que chacun pourra interpréter l'article à sa manière, que ce décret n'offre aucune idée précise, qu'il favoriserait la prévention du juge, qu'il ouvrirait la porte à l'arbitraire? et à quel arbitraire! Le voici : il est dit dans un article subséquent que c'est le ministre qui pourra suspendre les administrateurs de leurs fonctions. Combien il lui sera facile de dire qu'une lettre provoque, fomente la résistance aux ordres supérieurs; c'est-à-dire, aux ordres du ministre! Peut-on faire une loi plus arbitraire? et peut-on la faire appliquer plus arbitrairement que par un ministre qui, pour suspendre une administration, n'aura qu'à se plaindre qu'on fomente la résistance contre ses ordres? L'objet de cet article est d'empêcher même un corps administratif, lorsqu'un ministre violera la constitution, d'en avertir les autres corps administratifs, de les consulter, etc. Je demande la question préalable.

M. Chabroud. Je crois que l'administrateur qui commet le crime de provoquer la résistance aux lois, doit étre, non pas arbitrairement suspendu, mais poursuivi et jugé. Il est evident que dans cet article tous les cas ne sont pas prévus. Je ne puis

proposer aucune disposition, parce que je n'ai pas eu le temps de réfléchir. Je demande l'ajournement.

M. Dandré. Il faut que tous les fonctionnaires publics soient retenus par le frein de la subordination, si vous ne voulez pas qu'il finissent par opprimer le peuple quilcs a élus, et par devenir des despotes. Si les administrations peuvent se coaliser, il n'y aura plus que des corps administratifs, et le peuple et le corps-législatif ne seront plus rien. Il faut qu'une sage gradation de pouvoirs donne aux différentes administrations une influence des unes sur les autres, depuis les municipalités jusqu'au corps-'égis'atif; et il ne faut pas, pour effrayer les amis de la lil erté, présenter les inconvéniens d'une dépendance absolue des corps administratifs à l'autorité des ministres. Ce n'est pas le pouvoir exécutif, Cest le corps-législatif qui est le dernier échelon, le timon de l'administration, qui régit tout; puisqu'il fait les lois. Ainsi, on subordonnera les corps administratifs au pouvoir exécutif, le pouvoir exécutif au pouvoir législatif. Quel est le gouvernement qui sulis sterait sans subordination, sans l'obéissance provisoire? Tout corps administratif qui n'obéit pas aux ordres superieurs, est coupable. Conservons au peuple l'influence qu'il doit avoir, et qu'il exerce par la nomination de ses officiers et par le droit de pétition; mais l'obéissance provisoire sera toujours d'une nécessité rigoureuse; et cette obéissance n'existera pas si vous ne prenez des mesures sévères pour prévenir les coalitions. Je finis par rappeler que le ministre n'exercera d'autorité sur les corps administratifs que pour sa responsabilité ; et je propose par amendement que le mot trop vague de fomenter des résistances soit supprimé.

Après quelques débats l'article est décrété en ces termes :

‹ Art. VII. Tout corps administratif ou municipal qui publiera ou fera parvenir à d'autres administrations ou municipalités, des arrêtés ou lettres, provoquant la résistance à l'exécu tion des délibérations ou ordres émanés des autorités supérieures, pourra être réprimé suivant la forme qui sera déterminée, et même être suspendu de ses fonctions. »]

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SÉANCE DU 7 MARS.

Rapport de Desmeuniers sur l'organisation ministérielle.

[M: Desmeuniers, au nom du comité de constitution. Avant de discuter l'organisation du trésor public,, dont le comité des finances a donné le projet, vous avez voulu connaître les vues du comité de constitution sur l'organisation du ministère:

La personne du roi est inviolable et sacrée. Par une heureuse fiction, on suppose que le roi, agissant en qualité de chef de l'administration générale, veut toujours le bien, et il ne présente ainsi aucune garantie par lui-même. Mais comme il faut asseoir les institutions politiques sur des fondemens assurés, une loi constitutionnelle doit établir que le pouvoir exécutif n’agira, en matière d'administration, que par l'intermède de plusieurs agens, appelés ministres, qui répondront de tous les actes publics du roi. D'après ce principe, comment maintenir d'une part la dignité et la prérogative royales, nécessaires à la liberté et au bonheur d'un peuple nombreux ; et de l'autre, comment concilier l'éner gie et la rapidité d'administration, sans lesquelles une grande nation ne saurait exister, sous le même régime, avec le droit imprescriptible qu'a cette même nation de contenir dans les bornes de la loi tous les actes du gouvernement? Tel est le problème qu'il s'agit de résoudre.

Le nombre des ministres est le premier point à examiner.Une seule difficulté se présente. Y aura-t-il un ministre des colonies? Et, en se décidant pour l'affirmative, doit-on déterminer ses fonctions, avant que la constitution des colonies ait été décrétée par l'assemblée nationale ou le corps-législatif de la métropole?

L'importance des colonies, la multitude d'affaires qu'elles apporteront au gouvernement, les modifications que vous avez promises, et qui sont nécessaires touchant leur régime et leurs lois, demandent un ministre occupé uniquement de cette administration. D'autres considérations relatives à la bonté du service, aux soins éclairés qu'on doit prendre d'une partie si précieuse de l'empire, aux moyens les plus sûrs de lui rendre toujours justice, ne laissent aucun doute sur la question. Enfin, par l'établissement

d'un ministre des colonies, la métropole aura non-seulement plus de moyens de montrer sa constante affection pour les colons français, mais il en résultera des avantages sans nombre en faveur de l'agriculture et du commerce du royaume..

Loin de différer cet utile établissement, des raisons, tirées de la nature même des choses, et ensuite des circonstances actuelles, prescrivent de l'accélérer.

Pour saisir la vérité dans des discussions qui seront épineuses et même obscures, à raison de la distance des objets, vous aurez besoin des renseignemens et des détails dont le gouvernement est dépositaire, et l'on peut assurer que le même ministre, surchargé tout à la fois par le travail relatif à la marine, et par celui qui regarderait les colonies, se trouverait dans l'impuissance de bien remplir des fonctions si multipliées.

Ainsi, nous n'hésitons pas à demander qu'il y ait un ministre des colonies, et qu'on l'établisse sans délai.

Le nombre des ministres une fois convenu, nous nous sommes attachés à indiquer d'une manière précise les bornès des départemens respectifs, à réunir les fonctions analogues, et à préparer à l'avance la bonté du service, en soumettant l'administration centrale à un ordre invariable.

C'est en suivant de bonne heure le grand principe de la division des pouvoirs politiques, que yous avez vaincu tous les obstacles; ce principe qui vous a guidés jusqu'ici, qui vous guidera jusqu'à la fin de votre carrière, n'est pas moins fécond, lorsqu'on l'applique aux opérations du gouvernement. Les pouvoirs ministériels entraînant la responsabilité, il est indispensable de les séparer et de prononcer fortement cette séparation.

Le ministre de l'intérieur a long-temps fixé notre attention. Nous avons senti que le maintien de l'organisation de tout le royaume dépend, en quelque sorte, de l'organisation de cette partie du ministère; qu'il faut y placer les moyens d'assurer la liberté, la tranquillité et la prospérité publiques. Mais la multiplicité de fonctions qu'il paraît nécessaire d'accorder au ministre de l'intérieur, est effrayante. Cette multiplicité de fonctions, et le

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