Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

Picardie (1). Il est même très-probable qu'il alla jusqu'en Belgique, et c'est sans doute pendant son séjour dans ce pays qu'il publia à Louvain, en 1701, ses Reflexiones ad nuperrimam declarationem doctoris Hennebel. Peut-être est-ce de ce voyage qu'il s'agit dans sa lettre à D. Huet, du 10 août 1701: A mon retour << d'un voyage de six semaines que j'ai été obligé de « faire par obéissance, etc.... >>

Quelle était la cause de l'animosité dont l'Evêque de Bayeux semblait animé contre le P. Martin? Nous l'ignorons; mais elle ne devait pas être déshonorante pour celui qui en était l'objet, d'après la lettre que lui écrit Huet, le 2 septembre 1709. En tous cas, l'acrimonie de Mgr. de Nesmond fut telle que son adversaire, obligé de céder, fuyait son cher couvent de Caen sans que ses meilleurs amis fussent prévenus de son départ, sans que l'on sût quand il devait revenir. Ce fut en vain que, pour calmer la querelle, Huet essaya de faire intervenir (2) l'Intendant de la généralité de Caen, M. de Foucault, qui estimait fort le P. Martin et se montra très-disposé à lui rendre service. Ce fut en vain qu'il

Lettre de Huet au P. Martin (alors chez les Cordeliers de Vernon ), le 14 février 4710.—Le P. Martin était encore chez les Cordeliers de Vernon au mois de juin 1710. Huet lui dit qu'il regrette de ne pouvoir s'entremettre pour lui près de l'Evêque de Bayeux; au contraire, les préventions que ce prélat a contre lui, les explications fâcheuses qui sont intervenues entr'eux rendaient cette intervention plutôt nuisible qu'utile (Analyse d'une lettre de Huet, 9 juin 1710).

(1) Dans le peu de temps que je passai à Caen, mon révérend Père, j'envoyai chez vous pour apprendre de vos nouvelles. On me rapporta que vous étiez en Picardie, et qu'on ne savait le temps de votre retour..... Huet au P. Martin, 2 juin 1707.

(2) Lettre de Huet au P. Martin; Aunay, le 12 octobre 1702.

essaya d'intervenir lui-même; Mgr. de Nesmond ne se laissa fléchir que vers la fin de 1710 (1).

Malgré ces déplorables vexations, qui attristèrent la vieillesse du vénérable Père, il ne cessa pas de cultiver les Muses latines, pour lesquelles il avait un goût exquis. Il envoyait ses vers à ses amis, qui en faisaient leurs délices et s'étonnaient « qu'un aussi bon

[ocr errors]

théologien et un aussi bon prédicateur pût encore <«< être un fort bon poète (Huet au P. Martin, 18 août 1698).

Un jour, il faisait un distique sur la mort de M. de Segrais (2), que l'on trouva « fort bon, simple, chrétien « et bien tourné » (Huet au P. Martin, 11 avril 1706). Un autre jour, en relevant de maladie, il envoyait à l'évêque d'Avranches une pièce de vers « qui ne sont << pourtant pas d'un fébricitant » (Huet (3), 4 septembre 1704).

Tantôt c'était une épigramme, que Huet lisait avec autant de plaisir que de surprise; car il n'avait pas compté parmi les talents du P. Martin celui d'être aussi bon poète (Lettre de Huet, 19 janvier 1705).

C'était une pièce de vers sur l'affaire de PortRoyal (4), vers pleins de feu et que l'on prendrait pour l'ouvrage d'un jeune homme, si on n'en connaissait l'auteur (Lettre de Huet, 24 août 1707).

(1) Lettre du même au même; Paris, 24 juillet 1710.

(2) Le P. Martin nous a conservé cette pièce dans un de ses recueils. Cette feuille autographe était pliée en forme de lettre pour être envoyée à M. Belin, curé de Blainville.

(3) Il s'agit peut-être ici des vers qui valurent au P. Fr. Martin le prix de poésie au Puy de Caen, en 1704 (Athen. Normann.).

(4) Nous avons ces vers et la lettre du P. Martin à laquelle Hust répond ici. Voir la fin de cette Notice.

C'était une épigramme encore qui attirait au poète les compliments les plus flatteurs (1).

C'étaient des vers sur la mort du Dauphin (Lettre de Huet, 5 mai 1711); une parodie de l'Alleluia (Lettre de Huet, 29 avril 1712); une traduction en vers latins du Credo (Lettre de Huet, 29 décembre 1713).

C'était une de ses pièces les plus importantes, Virorum aliquot Cadomensium doctrina illustrium Syllabus carmine recensitus, qui lui valut, de la part de Huet, la lettre suivante :

A Paris, 11 mai 1715.

« Je m'imaginais, mon révérend Père, que vos em«plois apostoliques et vos prédications de Caresme << étaient l'unique cause de votre silence; mais l'agréable «présent dont vous me régalez m'a bien désabusé. <«< Vous montiez sur le Parnasse alors que je pensais « que vous montiez en chaire, et vous chantiez les « louanges des hommes et les miennes entr'autres (tout indigne que j'en suis), lorsque je vous croyais uni«quement occupé à chanter et publier les louanges de << Dieu..... >>

[ocr errors]

C'était enfin un certain nombre d'autres poésies, dont la plupart nous sont parvenues ainsi que la précé

(1) Sans attendre la nouvelle de votre victoire, mon révérend Père, je dois vous remercier très-humblement du soin que vous avez eu de me communiquer votre épigramme, digne d'un plus grand prix que celui qui vous attend. Il doit paraître assez rare qu'un homme de votre robe, de votre âge et de votre profession, ancien docteur de théologie, ait conservé tout le feu de la première jeunesse. J'espère que vous m'apprendrez bientôt le succès de votre ouvrage, et que j'aurai bientôt sujet de vous féliciter. » Lettre de Huet au P. Martin; Paris, 17 décembre 1707.

dente. Beaucoup d'entr'elles furent lues par l'auteur à l'Académie des Arts, Sciences et Belles-Lettres de Caen, dont il fut nommé membre surnuméraire à sa réorganisation, en 1704. C'est à lui que nous devons les détails (1)

(1) Lettre du P. Martin à Huet, 22 janvier 1704. « Notre nouvelle Académie tint hier sa première séance réglée. M. l'Intendant en fit l'ouverture par un discours fort étudié. Il dit que la voix publique avait fait choix de quarante, qui, à l'instar de celle de Paris, devaient la composer; que la pureté de la langue devait être son objet principal, afin de bannir les mauvaises expressions du pays; que les pièces qui y seraient lues ne devaient être ni des satires, ni contre les bonnes mœurs et encore moins contre la pureté; qu'il n'y aurait aucune distinction entre les confrères, et que celui qui aurait la parole ne serait point interrompu; que l'on déférerait aux décisions de l'Académie, sans s'opiniâtrer à vouloir soutenir son avis particulier. Il ajouta que les jours de réunion de l'Académie seraient les lundis, depuis cinq heures du soir jusqu'à sept, et que M. de Croisilles donnait pour cet effet sa maison. Il dit enfin qu'il était à propos de nommer un directeur, un secrétaire et un lecteur. M. Hébert, ecclésiastique, doit être le lecteur; M. de Croisilles, directeur; et MM. Le Vigueur et Mesnil-Guillaume, secrétaires, l'un au défaut de l'autre. M. de Chaulieu a lu deux épitaphes en latin et en français: l'une, à l'honneur de feu M. de Segrais, et l'autre de feu M. de Vendœuvre, toutes deux fort belles. Les vers du P. Menestrier, sur la naissance du fils de M. le duc d'Orléans, y furent également lus, ainsi que quelques vers latins en l'honneur de M. l'Intendant. J'y lus aussi des vers français que je prends la liberté de vous envoyer. M. de Colleville a donné lecture des titres seulement d'un grand nombre de dissertations de son grand-père (Samuel Bochart), qui n'ont pas encore été imprimées, et qui furent le sujet d'une révision dans l'Assemblée, particulièrement celle dont le sujet est la différence de la sépulture des Juifs et des Romains. On mit ensuite sur le tapis l'ouvrage de M. de Segrais sur les Géorgiques de Virgile. On lut la première page, dont bien des passages furent critiqués; Virgile était lu d'abord, puis la traduction, qui ne parut pas fort exacte. Comme il serait trop long de retoucher cet ouvrage tout d'une pièce, on en distribua des morceaux à plusieurs personnes qui en feront la critique

de la séance d'ouverture. Ils lui avaient été demandés par Huet, qui doutait fort qu'on pût jamais établir à Caen une Académie sérieuse (1); et qui prisait beau

en particulier, et qui la soumettront au jugement de l'Académie. On a envie de la faire imprimer; mais il faut qu'elle soit bien châtiée. La séance s'étant prolongée jusqu'à huit heures, comme on ne doit pas excéder le temps de deux heures marqué pour chaque séance, il y aura une pendule dans la salle et un buffet pour y serrer les dictionnaires et autres livres de l'Académie. Voici les noms des Quarante, dont M. de Croisilles donna lecture sans avoir égard aux conditions : MM. L'Intendant, protecteur; de Croisilles, de Besnouville, des Yveteaux, de Canchy (père et fils), de Verrières, de Colleville, d'Auval, d'Anisy, le curé de St.-Étienne, le curé de Blainville, de Charsigné, Bence, Galland, le P. Thibaut, prieur de l'abbaye; Hubert, Cally, Hallot, Vaucouleurs, de La Ducquerie (père et fils), Lepetit, Duhamel, le P. de Vitry, jésuite; le P. d'Hoguart, id. ; le Supérieur de l'Oratoire, Le Piron, Baron, préfet des humanités; de Chaulicu, Le Vigueur, Mesnil-Guillaume, Hébert, Le Féron, Gautier, et moy.

« J'en ai pu oublier quelques-uns, mais cela doit m'être pardonné. M. le doyen du Sépulcre n'est pas des Quarante; ce n'est, dit-on, qu'un rimailleur. Cette liste, telle que la donne le P. Martin, est en effet pleine d'erreurs. Voir la liste officielle imprimée qu'il nous a conservée dans un de ses recueils.

Le P. Martin m'a mandé

(1) A Paris, le 17 janvier 1704. tout le détail de l'ouverture de la nouvelle Académie, et m'a envoyé son programme; mais il ne m'a pas appris, ce que j'ai le plus envie de savoir, qui sont les membres de cette assemblée. Le P. de Vitry est de quoy faire un bon académicien; M. Galland sait bien de belles choses, mais ce sont gens passagers. Mais il s'agit des gens de Caen ; car, à commencer par M. de Croisilles, je n'avais jamais ouï dire qu'il aspirât à être homme de lettres; et, entre nous, je n'en connais pas un seul à Caen, si ce n'est des gens de l'Université, qui y sont obligés par leur profession. On pourra dire de cette Académie ce que M. de Montausier disait des fontaines de Versailles: que ce sont les plus belles fontaines du monde, et qu'il n'y manque que de l'eau ; on pourra dire aussi que c'est la plus belle Académie du monde, et qu'il n'y

« ZurückWeiter »