A la Belle qui fait le bonheur de sa vie,
Le Politique me confie Ses impénétrables refforts,
Et le Poëte, plein du beau feu qui Pinspire, M'abandonne le soin de publier ses Vers. Malgré cela, Lecteur, oserai-je le dire ? On me noircit, on me déchire Et je reçois mille outrages divers; Mais si tu veux que je t'aprennes, En t'épargnant de grandes peines, Les mots renfermés dans mon nom;
En veici clairement l'énumération. Une pomme, à laquelle
Un tendre Amant
Compare ordinairement La couleur vive & naturelle
Du visage de celle
Qui l'a rendu sensible à ses charmes vainqueurss Une babillarde éternelle,
Image de ces sots parleurs,
Qui fatiguent leurs Auditeurs Par d'inutiles verbiages; Quelque chose d'assés léger;
Cependant pour s'en décharger,
Un Roy de l'Orient prend du monde à ses gages.
En faveur des humains
Ce qu'une fertile Déesse
Tous les Etes répand à pleines mains, Et qui nous remplit d'allegresse. Adieu, Lecteur, j'en ai déja trop dit, Je dois, en me taifant, ménager ton esprit.
De Haulleterre, de Dreux.
d'Eloquence, présentées à l'Aca
démie des Jeux Floraux l'anné M. DCC. LXII. avec les Difcours prononcés dans les Affemblées publiques de l'Académie, 1. vol. in-8°. de 230. pages, A Toulouse, chés ClaudeGilles le Camus, feul Imprimeur du Roy & de l'Académie des Jeux Floraux.
A la tête de ce Recueil est l'Ode qui a remporté le Prix par le jugement de l'Académie, en la présente année 1742. Elle est de M. le Chevalier DE. LAURE'S, fils de M. le Doyen de la Cour des Aides de Montpellier. On fera, sans doute, bien aise de la trouver ici.
LES AVANTAGES DE LA VIEILLESSE, ODE.
El qu'un Cigne aux bords du Méandre. Quand la mort va fermer ses yeux, Des derniers Chants qu'il fait entendre Charme les Hommes & les Dieux; Tel prêt à quitter la lumière, Dieu du Pinde, dans ta carriére, Je vais étonner mes Rivaux : A tes fons j'accorde ma Lyre, Et nouveau (a) Sophocle, j'aspire A tes triomphes les plus beaux.
O Mortel, dont le cœur avide
Vole après un bien qui te fuit, Ma voix de l'erreur qui te guide Vient diffiper l'épaisse nuit. Abandonne un espoir frivole, Et contre le tems qui s'envole, Ingrat, rougis de murmurer : Libre du joug de la Jeunesse, C'est dans les bras de la VIEILLESS Que tu vas bien-tôt respirer.
(a) Sophocle remporta le Prix de la Tragédie dans un age très-avancé.
Tu disparois, obscur nuage, Fantôme, qui m'as trop séduit: Le calme fuccede à l'orage; Le jour le plus ferein me luit. Ma vie à cet instant commence; La raison & l'expérience Eclairent, rassurent mes pas : Je cueille, même après l'Automne, Des Fruits mûrs, que la Vertu donne, Et que le tems ne détruit pas.
Lance tes traits, Amour perfide Fais briller tes charmes trompeurs: LA VIEILLESSE me sert d'Egide; Je ris de tes vaines fureurs; Jadis aux Bacchantes fidéle, Sur leurs traces, fils (6) de Séméle, J'honorois ta Divinité : Mon culte est enfin raisonnable, Et ton Nectar coule à ma table Des mains de la sobrieté.
Le Regne passager de Flore N'offre que de vaines couleurs : Telle est, ô Beautés, votre Aurore;
Ceffez d'idolatrer ses fleurs : Si les rides font fuir les Graces, (b) Bachus.
Le Tems améne sur ses traces
Des biens plus vrais & plus conftans: ISAURE (c) à son dixiéme lustre Brilloit déja d'un plus beau luftre
Qu'aux premiers jours de son Printems.
Arrête, témeraire Icare ; Sui ton Pere au milieu des Airs : Mais que vois-je ? hélas il s'égare; Dédale seul franchit les Mers. Ainsi périra la Jeunesse, Qui fur la voix de la VIEILLESSE Ne reglera point son essor. Jamais le jeune Télemaque 'auroit revů les Murs d'Iraque, S'il n'eût eu pour guide Mentor.
Dieux! sous mes pas la Terre s'ouvre; Quels objets ! quel abîme affreux ! Mon œil effrayé vous découvre, Noir Tartare, terribles feux : Que de Paris, que de Narcisses, En proye aux plus cruels suplices, Gémissent sur ces tristes bords! Mais dans les Champs de l'Elisée,
(c) Il conste par l'Epitaphe de Clémence Ifaure, que Papyre-Maslon envoya aux Capitouls de Toulouse, qu'elle a vécu cinquante ans.
« PrécédentContinuer » |