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DE MADAME LA BARONNE

DE STAEL-HOLSTEIN.

Tome Premier.

A PARIS,

FIRMIN DIDOT FRÈRES ET CE, LIBRAIRES,

RUE JACOB, No 56;

ET TREUTTEL ET WURTZ, LIBRAIRES,
RUE DE LILLE, N° 17; ET A STRASBOURG.

M DCCC XXXVI.

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LES ÉCRITS ET LE CARACTÈRE

DE J. J. ROUSSEAU

PRÉFACE

A LA PREMIÈRE ÉDITION, EN 1788,

Il n'existe point encore d'éloge de Rousseau: j'ai senti le besoin de voir mon admiration exprimée. J'aurais souhaité sans doute qu'un autre eût peint ce que j'éprouve; mais j'ai goûté quelque plaisir en me retraçant à moiinême le souvenir et l'impression de mon enthousiasme. J'ai pensé que si les hommes de génie ne pouvaient être jugés que par un petit nombre d'esprits supérieurs, ils devaient accepter du moins tous les tributs de reconnaissance. Les ouvrages dont le bonheur du genre humain est le but, placent leurs auteurs au rang de ceux que leurs actions immortalisent; et quand on n'a pas vécu de leur temps, on peut être impatient de s'acquitter envers leur ombre, et de déposer sur leur tombe l'hommage que le sentiment de sa faiblesse même ne doit pas empêcher d'offrir.

Peut-être ceux dont l'indulgence daignera présager quelque talent en moi, me reprocheront-ils de m'être hâtée de traiter un sujet au-dessus même des forces que je pouvais espérer un jour. Mais qui sait si le temps ne nous ôte pas plus qu'il ne nous donne? Qui peut oser prévoir les progrès de son esprit? Comment consentir à s'attendre, et renvoyer à l'époque d'un avenir incertain l'expression d'un sentiment qui nous presse? Le temps, sans doute, détrompe des illusions, mais il porte quelquefois atteinte à lavérité même, et sa main destructrice ne s'arrête pas toujours à l'erreur. D'ailleurs, n'est-ce pas dans la jeunesse qu'on doit à Rousseau le plus de reconnaissance? Celui qui a su faire une passion de la vertu, et qui a voulu persuader par l'enthousiasme, s'est servi des qualités et des défauts mêmes de cet age pour s'en rendre le maître.

SECONDE PRÉFACE,

EN 1814.

Ces lettres sur les écrits et le caractère de J. J. Rousseau ont été composées dans la première année de mon entrée dans le monde; elles furent publiées sans mon aveu, et ce hasard m'entraîna dans la carrière littéraire. Je ne dirai point que j'y ai du regret, car la culture des lettres m'a valu plus de jouissances que de chagrins. Il faut avoir une grande véhémence d'amour-propre pour que les critiques fassent plus de peine que les éloges ne donnent de plaisir; et d'ailleurs il y a dans le développement et le perfectionnement de son esprit une activité continuelle, un espoir toujours renaissant, que ne saurait offrir le cours ordinaire de la vie. Tout marche vers le déclin dans la destinée des femmes, excepté la pensée, dont la nature immortelle est de s'élever toujours.

On n'a presque jamais nié que les goûts et les études littéraires ne fussent un grand avantage pour les hommes, mais on n'est pas d'accord sur l'influence que ces mêmes études peuvent avoir sur la destinée des femmes. S'il s'agissait de leur imposer un esclavage domestique, il faudrait craindre d'accroître leur intelligence, de peur qu'elles ne fussent tentées de se révolter contre un tel sort; mais la société chrétienne n'exigeant rien que de juste dans les relations de famille, plus la raison est éclairée, plus elle porte à se soumettre aux lois de la morale. On aperçoit clairement, en réfléchissant sur ces lois, qu'elles gouvernent le monde tôt ou tard avec non moins d'infaillibilité que les forces physiques.

Des sentiments, il est vrai, peuvent entrainer malgré les lumières, mais ce n'est pas à cause d'elles. Il arrive souvent que les femmes d'un esprit supérieur sont en même temps des personnes d'un caractère très-passionné; toute fois la culture des lettres diminue les dangers de ce caractère, au lieu de les augmenter; les jouissances de l'esprit sont faites pour calmer les orages du cœur.

La société, telle qu'elle est organisée de nos jours, nous menace bien plus des défauts négatifs, la froideur et l'égoïsme, que de l'exaltation en quelque genre que ce puisse être. Les hommes et les femmes du peuple peuvent avoir de très-belles et de très-grandes qualités, sans que leur esprit ait été cultivé; mais dans la classe élégante et oisive, les habitudes qu'on prend dessèchent le cœur, si l'on n'y supplée point par des études vivifiantes; l'usage du monde, quand il n'est pas réuni à une instruction litté raire très-étendue, n'enseigne qu'à répéter facilement des

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