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178.—* Mémoires sur le prince LEBRUN, duc de Plaisance; par M. MARIE DUMESNIL, membre de plusieurs académies. Paris, 1828; Rapilly, passage des Panoramas, no 43. In-8° de 420 pages; prix, 6 fr.

Le jeu de la fortune qui fit de l'ami du chancelier Meaupou, le conseiller intime de Napoléon, et du partisan zélé de l'ancienne monarchie un des dignitaires du nouvel empire est certainement l'un des plus remarquables que nous ait présentés notre grande révolution. Sous un autre point de vue, la carrière de Lebrun s'offre à l'observateur comme une sorte de phénomène politique qui n'a point d'analogue à ma connaissance du moins: c'est celui d'un tel degré d'élévation coïncidant avec une modestie bien sincère, avec un éloignement formel pour toute espèce d'intrigue, qualités fort estimables sans doute, mais avec lesquelles, il faut en convenir, on ne va généralement ni bien loin ni bien haut dans ce monde. Or, tous les partis s'accordent pour les attribuer à l'honorable caractère de cet homme qui, de simple citoyen, devint prince au milieu de nos troubles. On lui a généralement rendu ce témoignage qu'il fut constamment dévoué à sa patrie, toujours occupé à la servir sous quelque forme de gouvernement qu'elle se trouvât placée. C'est dans le cours des services qu'il lui rendit avec un zèle dépourvu de tout faste, que les honneurs, si ardemment poursuivis par les autres, vinrent le chercher pour le tirer de l'obscurité qu'il aimait. On peut dire que la fortune se montra bien à son égard cette déesse coquette et capricieuse qu'on accuse d'oublier parfois ses adorateurs pour combler de ses dons ceux qui les dédaignent.

L'auteur des Mémoires sur Lebrun suit son personnage dans le cours entier de sa vie, depuis sa naissance jusqu'à sa mort. Sa narration est claire et rapide; ses réflexions sur les divers événemens auxquels le prince prit une part plus ou moins active m'ont paru en général justes et sages. La partie des Mémoires relative à la réforme parlementaire entreprise par le chancelier Meaupou présente quelques détails curieux. L'auteur juge sainement cette époque critique du règne de Louis XV, quand il déclare que c'était là le moment, ou jamais, d'assembler les États généraux; et que, convoqués à cette époque, ils eussent produit beaucoup de bien, sans bouleverser la monarchie. Telle était aussi l'opinion de Lebrun, qui joua un rôle important dans cette grande affaire. L'auteur passe ensuite en revue les divers actes auxquels se rattache le nom de Lebrun, soit à l'assemblée constituante, soit dans les conseils de la république ou de l'empire. On l'y

voit constainment homme de bien, et parfois aussi homme de cœur, par exemple, dans cette circonstance où, appelé à aider la convention de ses conseils, il lui déclare énergiquement qu'elle ne peut plus faire que le mal, et se retire sans autre discours (pag. 212). Mais ne pouvant dans cette simple Notice énumérer tout ce qui signale à l'estime de la postérité la longue existence dont M. Marie Dumesnil nous retrace le tableau, je renvoie à son ouvrage ceux qui voudront mieux connaître l'homme qui, unissant des mérites en apparence contraires, fut à la fois le rédacteur des lois de finances, le fondateur du crédit national, et l'élégant traducteur des antiques. poëmes d'Homère. P. A. D....

179,-*Essai historique sur la révolution du Paraguay et le gou vernement dictatorial du docteur Francia; par MM. RENGGER et LONGCHAMP, docteurs en médecine, membres de la Société helvétique des sciences naturelles. Paris, 1827; Hector Bossange. In-8° de xxxv et 300 pages; prix, 6 fr.

Le très-petit nombre de personnes qui, depuis la révolution de l'Amérique du sud, ont pu visiter le Paraguay, et en sortir, ne savent presque rien sur cette mystérieuse contrée, et ceux qui n'y ont pas été ne savent rien du tout; la critique manque donc des élémens nécessaires pour juger un ouvrage tel que celui que nous annonçons; il faut attendre qu'un plus grand nombre de témoignages nous permette de comparer et d'apprécier les renseignemens trop rares que nous possédons aujourd'hui, et dont nous devons nous borner à donner ici l'indication au lecteur. Les deux voyageurs arrivés à l'Assomption, le 30 juillet 1819, n'obtinrent la permission de quitter le Paraguay qu'au mois de mai 1825; ainsi, leur relation comprend un séjour de six ans. Mais, s'il est difficile de bien observer et de bien peindre un pays où rien n'est caché, où toutes les lumières s'offrent d'elles-mêmes, on conçoit que cette tâche devient à peu près impossible dans une contrée où c'est un crime non-seulement de raconter ce qu'on a vu, mais même de chercher à connaître. Ainsi, le voyageur nous dit, -au sujet de la population : « Je n'ai aucune donnée positive à c'est égard, l'état où j'ai trouvé ce pays, et le caractère ombrageux du dictateur ne m'ayant point permis de m'en procurer. Néanmoins, quelque incomplets que soient les documens contenus dans cette relation, ils tirent de la difficulté de s'en procurer un prix qui dédommage jusqu'à un certain point de leur insuffisance. L'auteur a divisé son livre en deux parties; il consacre la première au récit des événemens politiques, depuis 1810 jusqu'à l'époque de son départ; la seconde offre le

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tableau des mœurs, des ressources et de l'administration du pays. Le récit des événemens n'est guère qu'une biographie de Francia, devant qui tout disparaît, du moment où il entre au pouvoir. D'abord avocat et secrétaire de l'administration, il en devient bientôt le chef avec le titre de Consul; puis, Dictateur pour trois ans; puis Dictateur à vie. Soupçonneux et cruel, on le voit sacrifier au maintien de son autorité et le sang des hommes qu'il a pour habitude de faire fusiller sous ses yeux, et la prospérité du pays qu'il isole complétement de toutes les contrées voisines, et qu'il foule sous une tyrannie qui n'a en-core produit qu'un seul bienfait, la sécularisation des moines. C'est dans la seconde partie de l'ouvrage surtout que l'on voit se développer les conséquences de cette tyrannie. L'auteur nous montre le despote, faisant à lui seul des lois qu'il ne se doune pas même la peine de publier, et que les habitans ne connaissent qu'accidentellement; il nous le montre jugeant en dernier ressort un grand nombre de causes, et particulièrement celles où l'état et sa propre personne sont intéressés. Non content de l'inviolabilité dont il s'est environné lui-même, il étend ce privilége jusque sur les moindres agens de sa tyrannie. Parmi les mesures caractéristiques de ce gouvernement, il faut citer la suppression des postes aux lettres, qui offraient un moyen trop facile de communication; cette suppression est d'ailleurs combinée avec des précautions qui tendent à faire tomber toutes les correspondances entre les mains du dictateur, pour lequel la violation du secret des lettres est une lâcheté qu'on s'étonnera peu de voir à l'usage d'un tyran, depuis que chez nous un député n'a pas craint d'en faire l'apologie sous un gouvernement constitutionnel. La cruauté de la discipline militaire, la barbarie du régime des prisons, la confiscation appliquée selon le caprice du maître, sont encore des traits principaux de cette administration. Quant aux finances, le voyageur n'en sait pas plus que sur la population; tout ce qui tend à révéler la puissance ou la faiblesse du pays est un secret que le maître se réserve pour lui mème, et qu'il ne connaît sans doute guère mieux que les autres; néanmoins, s'il faut en croire l'auteur, Francia porterait le soin des affaires d'argent jusqu'aux plus minutieux détails, tellement qu'un jour il envoya en prison son tailleur, après lui avoir démontré, en opérant sur une pièce de drap avec les ciseaux et la craie, qu'il lui avait soustrait un morceau d'étoffe. Les droits sur les marchandises, et la faculté que se réserve l'autorité de choisir ce que bon lui semble, et de payer quand il lui plaît ce qu'elle choisit dans toute cargaison qui arrive, ruine le peu de com

merce que peut faire ce malheureux pays. Francia a su profiter habilement du peu de considération dont jouit le clergé, grace au relâchement de mœurs dont les prêtres font parade, pour détruire leur influence et s'emparer d'une partie de la puissance spirituelle. L'auteur nous semble avoir exposé avec sagacité l'influence funeste que le despotisme du dictateur a cue sur le caractère des habitans, aussi bien que plusieurs conséquences moins fâcheuses qui doivent résulter, pour le pays, d'une administration à laquelle, malgré ses vices, on doit reconnaitre une propension marquée pour l'ordre et l'économie. M. A.

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Littérature.

180. Encyclopédie portative: Précis d'éloquence et droit oratoire, pour le barreau, la tribune, la chaire, l'académie et les compositions en prose et en vers, précédé d'une Introduction historique, et suivi d'une Biographie des plus illustres orateurs, d'une Bibliographie et d'un Vocabulaire; par M. V. PARISOT. Paris, 1828; au Bureau, rue du Jardinet, no 8. Grand in-32; prix de souscription, 3 fr.; pour les non-souscripteurs, 3 fr. 50 c.

Manifester et transmettre sa pensée par la parole, voilà le langage; soumettre ce qui nous environne, par l'ascendant de sa pensée ainsi révélée et transmise, voilà l'éloquence que l'auteur définit : « La puissance de l'intelligence s'exprimant par la voix, sur les intelligences et les volontés étrangères.» L'éloquence dans les œuvres oratoires, qui fait l'objet d'une première partie, fournit à l'auteur, après des considérations générales sur les formes oratoires, les divisions suivantes : 1° l'Eloquence incitative, qui renferme l'éloquence du barreau, l'éloquence militaire et celle de la tribune publique ; 2° l'Eloquence spéculative, où l'on rencontre l'éloquence académique, l'éloquence philosophique, celle de la chaire; 3o l'Eloquence narrative, ou des récits, qui comprend les éloges, les panégyriques, les oraisons funèbres, les harangues, etc. L'auteur traite des caractères propres à chacun de ces genres d'éloquence; puis, des qualités physiques, morales, intellectuelles, des études, des connaissances et des exercices de l'orateur; enfin, de la composition des discours.

L'éloquence peut se trouver hors des œuvres oratoires proprement dites, c'est-à-dire dans toutes les compositions littéraires; l'auteur traite ce sujet dans sa deuxième partie, et il trace les caractères de l'éloquence dans les romans, dans l'histoire, dans le poëme épique, dans la tragédie et la comédic.

Le précis d'éloquence est précédé d'une introduction historique dans laquelle l'auteur caractérise en peu de mots l'éloquence de chaque siècle. Nous citerons ce qu'il dit de celle de notre époque : « Avec la restauration et le gouvernement constitutionnel reparurent pour notre patrie les conditions de l'éloquence politique. Une ère nouvelle commence, dans laquelle le génie et le travail, reconnaissant enfin leur force, la font respecter et stipulent des garanties. L'éloquence, tonjours nécessaire dans les débats politiques, aura cependant une physionomie nouvelle. Grave, noble, pure, simple, elle ne s'adressera presque plus aux passions : convaincre est son but; et pour convaincre, elle se borne à poser les faits, à les réunir, à les prouver, à interroger l'histoire, à prendre conseil de la législation, des droits et des devoirs des peuples et des gouvernans, à invoquer le secours de la logique et de la rai

son. >>

M. Parisot, déjà connu avantageusement par le Traité de morale qu'il a fourni à l'Encyclopédie portative, et qui fait dans ce moment un cours à l'Athénée sur la littérature romantique, sait, par une méthode rigoureuse, porter la clarté et la précision dans les matières les plus abstraites. Tel est le genre de mérite, uni à un style élégant et .pur, que l'on remarque dans son Traité d'éloquence.

Nous profitons de cette occasion pour rappeler l'attention de nos lecteurs sur la collection encyclopédique publiée par M. Bailly de Merlieux, et dont il a paru 25 volumes format in-32 et 8 livraisons format in-8°. B***.

181.-* Dictionnaire classique de la langue française, avec des exemples tirés des meilleurs auteurs français, et des notes puisées dans les manuscrits de RIVAROL; ouvrage renfermant 60,000 mots publié et mis en ordre par quatre Professeurs de l'université. Paris, 1828; Brunot-Labbe. In-8° de x et 1008 pages à trois colonnes; prix, 12 fr.

Nous venons de recevoir les deux dernières livraisons de ce dictionnaire: cet important ouvrage est désormais terminé; et, quoique nous y ayons remarqué quelques légers défauts, quelques erreurs dans les définitions, quelques idées grammaticales contraires à la véritable théorie de la grammaire, il n'en reste pas moins l'un des livres les plus utiles dans ce genre. L'avantage de réunir un quart des mots de plus que les autres vocabulaires, le soin qu'ont pris les auteurs de placer auprès de chaque mot important quelques exemples tirés des meilleurs écrivains, donnent à ce lexique une supériorité incontestable sur la plupart des autres; et, sans contredit, c'est, de tous ceux que

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