Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

produire ces inclinaifons égales. Suppofé qu'un des modeles foit trois fois plus large que l'autre, il ne fuffira pas de le charger fur le côté d'un poids trois fois plus grand, pour produire une inclinaifon d'un même nombre de degrés, il faudra que le poids foit 27 fois plus fort. S'il eft appliqué à la même distance du milieu, ou fuppofé qu'on fe ferve du même poids, il faudra le mettre à une distance 27 fois plus grande: ainsi la stabilité du modele trois fois plus large, fera 27 fois plus grande, & en général, lorfque toutes les autres circonstances font les mêmes, la stabilité eft comme les cubes des largeurs, ou comme les largeurs multipliées deux fois par elles-mêmes, trois fois trois 9, trois fois 9, 27.

L'expérience a prouvé aux conftructeurs ce que la théorie a démontré à M. Bouguer; c'eft, fans doute, ce qui les a engagé à élargir leurs vaiffeaux auprès de la flottaifon à cet endroit qu'ils nomment le fort. On ne pourroit pas fans inconvénient beaucoup augmenter la largeur des vaisseaux au milieu, mais en l'augmentant un peu vers l'avant & vers l'arriere, on gagneroit de la Itabilité. Pour le faire appercevoir fenfiblement par des comparaisons extrêmes, il fuffit de fçavoir que M. Bouguer a prouvé que la stabilité d'une carêne, dont la ligne d'eau en charge formeroit un parallelogramme rectangle, feroit à celle d'une carêne dont la ligne d'eau en charge formeroit un lozange, dont les deux angles aigus feroient, l'un vers la poupe, & l'autre vers la proue: M. Bouguer a prouvé, dis-je, que la premiere carêne aura quatre fois plus de ftabilité que l'autre. Quand une petite augmentation de largeur devroit empêcher de former des lignes d'eau auffi propres à divifer le fluide, il ne s'en fuivroit pas que la marche du vaiffeau en feroit diminuée; elle pourroit même être plus avantageuse, fi, en portant mieux la voile, il étoit en état d'augmenter confidérablement fa voilure, & de mieux tendre fes voiles. Jufqu'ici il ne s'agit que de carênes-homogênes, & la stabilité fera beaucoup augmentée, fi l'on a l'attention

d'abaiffer le centre de gravité en disposant l'arrimage, comme il convient.

Si en confervant une même longueur & une même largeur, on n'augmente que le creux, on gagnera fort peu de stabilité dans la fuppofition d'une carêne homogêne: on pourra gagner beaucoup par un bon arrimage. Nous en allons parler.

Les Marins fçavent très-bien que pour qu'un vaiffeau porte bien la voile, il faut qu'il entre affez dans l'eau pour que fa partie la plus renflée, ou en terme de marine, fon fort, parvienne à être effleuré par la fuperficie du fluide; tel par exemple, que la ligne ef, (fig. 63.) ou un peu au deffus de cd (fig. 62.): ils n'ignorent pas qu'il faut remplacer par des poids inutiles à d'autres égards, tels que le left, le poids des marchandises d'un vaisseau qu'on vient de décharger ; ils fçavent qu'un vaiffeau trop léger, tel que celui (fig. 62.), s'inclineroit jufqu'à ce que fa partie renflée, ou fon fort g, fût parvenu à repofer fur le fluide; les Marins expriment cette inclinaison en difant que le vaiffeau va chercher fon fort trop haut. Il fuit delà qu'un vaiffeau qui feroit bien conftruit pour porter la voile s'inclineroit beaucoup, qu'il plieroit trop fous le vent. Si par un défaut d'arrimage, faute de lui avoir donné affez de left, il étoit trop léger, néanmoins quand tout le défaut d'un arrimage fe réduit à être un peu léger, & que cette diminution de poids eft peu confidérable, le malheur n'eft pas grand; car quand une fois ce vaiffeau a attrapé fon fort, il navige fûrement dans cette fituation un peu inclinée, & le vent ne peut pas lui faire prendre une plus grande inclinaison. Il pourroit être plus dangereux de furcharger un vaiffeau de left; car outre qu'on perdroit l'élévation de sa batterie, qui eft un article important, & outre qu'il éprouveroit beaucoup de réfiftance de la part du fluide, on apperçoit que s'il étoit callé jusqu'à la ligne oi, (fig. 63.) il ne déplaceroit pas plus d'eau en s'inclinant du côté de O, & ainfi la preffion de l'eau ne pourroit pas contribuer avec le

centre

centre de gravité pour le remettre dans fon affiette. C'est ce défaut que les Marins veulent défigner quand ils difent que le fort eft noyé. Pour traiter cet article exactement, & fans qu'il puiffe fouffrir d'exceptions, il faudroit entrer dans des détails que je dois éviter: il fuffit d'appercevoir en gros qu'il faut qu'un vaiffeau cale jufqu'à fon fort; mais il n'eft pas indifférent de quel left on fe ferve pour cela; la qualité du left peut augmenter ou diminuer la ftabilité des vaiffeaux. Il eft évident que, comme il est important de fe ménager une belle batterie, & de ne point noyer le fort, il faut éviter d'augmenter le poids du left au-delà du néceffaire. Ainfi fuppofant que 400 tonneaux de left, joints aux autres effets de l'armement, fuffifent pour faire caller le vaisseau jufqu'à fon fort, il n'en faudra pas mettre davantage : mais il pourra être avantageux d'employer du left plus pefant; car comme il occupera moins de place, fon centre de gravité fera plus bas : ainfi le centre de gravité de la carene defcendra proportionnellement à la plus grande pefanteur fpécifique du left. C'est delà que découle ce principe fi généralement adopté dans l'arrimage des vaiffeaux, qu'on augmente leur ftabilité en mettant les effets trèspefans le plus bas qu'il eft poffible au deffous de la ligne de flottaifon, & en rendant les hauts très-légers.

Mais outre ce principe général, la façon de diftribuer les poids n'est pas une chofe indifférente: pour le faire concevoir, fuppofons qu'un vaiffeau ait à porter des effets très-pefans, tels que du plomb, du fer, des canons, des ancres. Le vaiffeau feroit venu à fa ligne de flottaifon beaucoup avant d'avoir fa cale remplie, & fi l'on mettoit ces gros poids fur la carlingue, comme leur centre de gravité feroit fort bas, on en devroit conclure que le vaiffeau porteroit bien la voile : cette conféquence feroit jufte: néanmoins un vaisseau ainsi arrimé navigueroit mal, furtout fi fon fort étoit un peu élevé au deffus de la furface de l'eau ; il eft d'expérience que ce vaifLeau auroit fes mouvemens très-rudes, & qu'il feroit ex

Kkk

1

pofé à démâter: ce left très-pefant, & placé fort bas, le rappelleroit dans fon affiette, mais avec trop de vivacité, & par des mouvemens de fecouffe qui feroient dange

reux.

Les Marins instruits par leurs expériences de ces inconvéniens, élevent le centre de gravité en arrimant les canons, les ancres, &c. fur des lits de fagots qu'on nomme en terme de marine un fardage: fi l'on ne fait pas ce fardage trop épais, fi l'on n'éleve pas trop le centre de gravité, fi l'on obferve un jufte milieu, on parviendra au but qu'on s'étoit proposé; le vaisseau confervera suffisamment fon affiette, & il aura des mouvemens plus doux. Mais fouvent on n'eft pas maître de disposer à fon gré de ce moyen : fi, par exemple, on avoit à embarquer avec ces corps pefans des marchandises légeres, telles que des balles de coton, dans ce cas on ne pourroit pas occuper une partie de la capacité de la cale par le fardage dont nous venons de parler: les Marins fçavent encore se tirer de cet embarras; car en distribuant les effets très-pefans bas-bord & tribord dans les flancs du vaiffeau, ils élevent peu le centre de gravité, & fans perdre de la stabilité du vaisseau, ils en rendent les mouvemens doux, parce que ces corps pefans décrivant dans les mouvemens du vaiffeau de plus grands arcs, ils employent plus de tems à les parcourir, & au lieu de s'arrêter fubitement, les mouvemens diminuent peu à peu; ce qui ménage beaucoup la mâture.

Ce que nous avions à dire fur la ftabilité des vaiffeaux, nous a infenfiblement conduit à parler des mouvemens de roulis & de tangage. On vient de voir que les mouvemens de roulis peuvent être confidérablement diminués par l'arrimage; les conftructeurs peuvent auffi les rendre moins grands & plus doux par la forme de leur carene: pour le faire comprendre, agitons dans l'eau un vaiffeau qui a les fonds ronds; celui, par exemple, quia la coupe perpendiculaire à la quille, & eft représenté par la figure 59. Il eft clair que comme ces carenes ne

déplacent pas plus d'eau lorfqu'on les incline, que quand ils font dans leur affiette, rien ne s'oppofera à ce qu'ils faffent de grandes ofcillations; mais mettons au deffous de b, une planche qui s'étende fi l'on veut jufqu'en q & qui fe prolonge dans toute la longueur du vaiffeau, il eft évident que quand le vaiffeau (fig. 59.) s'inclinera vers la droite, la planche q aura à déplacer fur la gauche une maffe d'eau qui ralentira la vivacité à fon mouvement; & cet obftacle, qui fera toujours en fens contraire de l'inclinaifon que voudra prendre le vaiffeau, diminuera l'amplitude & le nombre des ofcillations quoiqu'elle ne contribue point, ou infiniment peu à la stabilité du vaiffeau; car en fuppofant le vaiffeau incline comme celui de la figure 59, la planche bq ne contribuera en rien à le remettre dans fon affiette. Mais com

me il eft avantageux de diminuer la fréquence & la dureté de ces fecouffes, qui font toujours incommodes & quelquefois dangereufes, les conftructeurs produifent un effet pareil à celui de la planche bq, par la largeur de la quille, l'acculement des varangues B (fig. 62), & les parties peu épaiffes qui font à l'avant & à l'arriere au deffous des façons.

A l'égard des mouvemens de tangage, pour nous renfermer ici, comme dans le refte, à des confidérations générales, je crois que ce qu'on peut faire de mieux est de proportionner dans toutes les parties les capacités aux poids qu'elles doivent contenir. Il eft bien dangereux de s'écarter de cette regle; nous avons cité pour exemple la Junon de 60 canons, qui manquant de capacités à l'arriere, a toujours mal navigué, quelque foin qu'on ait pris pour remédier par l'arrimage à ce défaut qui étoit porté à l'excès: on a tenté de mettre à fon avant beaucoup de left de fer, qu'on avoit maffonné dans fa cale; on a retranché les canons de fa premiere batterie vers l'arriere; malgré tout cela, quand ce bâtiment étoit agité par la mer, fon arriere entroit dans l'eau jusqu'au deffus de la liffe de hourdi.

« ZurückWeiter »