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Premierę

réelle.

nous combattons, & aura donné lieu de pen-
fer, que quand la Confeffion eft faite, tout
ce qui eft néceffaire au Sacrement, de la part
du pécheur, eft rempli, & que là, rémiffion
des péchés, qui eft le fruit du Sacrement, eft
affurée, lorfque l'abfolution du Prêtre a fuivi
la Confeffion. Non, la Confeffion n'eft pas
tout le Sacrement: il faut autre chose; &
l'effentiel eft la converfion. Dieu n'a
pas dit:
en quelque jour que le pécheur confeffe fes
iniquités, je les lui remettrai; mais il a dit :
En quelque jour que le pécheur fe conver
tiffe. Jefus-Chrift n'a pas dit : confeffez-vous,
car le Royaume des Cieux eft proche; mais
il a dit: faites pénitence. Les Apôtres ne di-
foient pas aux pécheurs, accufez-vous de vos
fautes, faites une bonne Confeffion, une
Confeffion fincère & exacte; mais ils difoient:
convertiffez-vous, convertimini.

I I.

Une autre illufion dont il faut fe défendre, qualité de la c'eft de s'imaginer que c'eft affez d'avoir un Converfion fentiment paffager de douleur, quelques bons mouvemens, un commencement de bon propos. On s'excite à la contrition; on fait quelques efforts d'imagination, & on croit l'ouvrage fort avancé. On fe trompe. Souvent ce ne font que des penfées de l'efprit, qui n'effleurent pas même le cœur : ce n'eft qu'une imagination frappée. Quand on en viendroit jufqu'à verfer quelques larmes, cela ne feroit point encore décifif. On fçait que chez les Payens il y avoit des femmes qui faifoient profeffion de pleurer aux obféques des morts, & qui étoient payées de

leurs larmes. Dira-t-on que les larmes de ces pleureufes étoient chez elles une marque de douleur. Ce que ces fortes de perfonnes faifoient par artifice, beaucoup de pécheurs peuvent le faire par une impreffion faite fur le cerveau. Et quand il y auroit quelque chofe de plus, & que l'émotion iroit jufqu'au cœur, ne peut-il pas arriver qu'elle n'ait point pour principe la haine du péché, mais une crainte purement fervile des peines que le péché mérite? ce qui ne fuffit pas. Jamais on ne vit une répentance plus édifiante & plus belle en apparence que celle d'Antiochus. Je reviens fouvent à cet exemple parce qu'il eft frappant. Larmes abondantes aveu public de fes crimes, proteftation pour l'avenir, amende honorable : rien n'y manque, ce femble. Repentance néanmoins fauffe & déclarée telle par l'Ecriture !.... Pourquoi cela? C'est qu'il eft vifible que ce qui le faifoit parler, n'étoit pas la détestation du mal qu'il avoit commis, mais la crainte de la mort & le fentiment des cruelles douleurs qu'il éprouvoit. Ecoutons Saint Augustin fur ces converfions apparentes, produites par la feule crainte: » Celui, dit-il, qui fent qu'il » ne s'abstient du péché que par la crainte du » fupplice, & non par l'amour de la justice, » n'eft pas pour cela détaché du péché & » dépouillé de la volonté de le commettre. "Il eft coupable par fa volonté, en ce qu'il » fouhaiteroit, s'il étoit poffible, qu'il n'y » eût rien à craindre pour lui en péchant, » afin de commettre en toute liberté le mal qu'il aime intérieurement. »

Si le pécheur ne doit point compter ni fur une Confeffion fincére qu'il aura faite,

Су

De Nat. & Gr. n. 67.

fur des émotions paffagéres d'une imagina tion frappée, ni même fur quelques allarmes que la crainte aura portées dans le cœur, il ne doit pas non plus fe plaindre d'un fage Directeur qui ne voudra pas s'en rapporter aux proteftations qu'il fait de ne plus retomber, & qui exigera de lui quelque chofe de plus, avant que de lui accorder le bienfait de Î'Abfolution. Des paroles font encore moins que des fentimens ; & puifque le pécheur doit tenir ceux-ci pour fufpects, à plus forte raifon le Confeffeur doit tenir pour équivoques des affurances purement verbales. Il ne l'accufera pas pour cela d'être un hypocrite, qui vient lui en impofer & qui fe contrefait; mais il craindra qu'il ne fe trompe lui-même, Jerem. 17. ne fe connoiffant pas affez: « Car le cœur de » l'homme, dit l'Ecriture, eft un fond ca"ché & impénétrable, non-feulement à un autre homme, mais à lui-même. Le Miniftre fidéle à fon devoir, qui demandera des épreuves à fon pénitent, ne lui fera donc point injure, & bien loin de commettre à fon égard aucune injustice, il exercera envers lui une grande charité, en lui épargnant les rifques d'une fauffe converfion & de la profanation des Sacremens, & en le mettant fur les voies pour réuffir plus fûrement dans fa pieufe entreprise. Ce feroit au contraire le pécheur lui-même qu'on pourroit taxer d'injuftice, s'il ne vouloit pas fe rendre à une conduite fi fage & fi raifonnable. Quoi! lui diroit-on, après avoir infulté une Majefté infinie, par le péché; après avoir commis contre votre Roi & votre Maître une rébellion auffi marquée : vous voudriez qu'on vous fit grace fur le champ, pour quelques pro

teftations de bouche que vous aurez faites? C'est ce qui fut dit autrefois à l'infolent Semei, qui avoit eu l'audace d'outrager David fon Roi, lorfqu'il fuyoit devant fon malheureux fils Abfalon. Ce Sujet ingrat vint fe jetter aux pieds de David, après la défaite d'Abfalon & le rétablissement de ce Prince fur fon Trône : « Eft-ce done, dirent fes » Officiers, que ce rebelle en fera quitte pour » deux ou trois mots qu'il aura prononcés : » Numquid pro his verbis non occidetur Semei?

2. Reg. 19.

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Ce qui réfulte de toutes ces réflexions, c'eft que pour fortir de l'état du péché, il faut plus que des paroles, plus que des penfées, plus que des fentimens : il faut de la réalité & des effets. Qui dit converfion, dit changement changement de vie, changement de mœurs, ceflation du péché, renoncement aux œuvres d'iniquité. » Ceffez, dit »le Seigneur, de commettre des actions per» verfes: Purifiez vos mains de vos ancien»nes fouillures. Depouillons-nous, dit Saint » Paul, des œuvres de ténébres, & revêtons- Rom. 13. "nous des armes de lumiere; marchons dans » la bienséance, comme étant dans le jour ; "ne nous laiffons point aller aux débauches, » ni aux yvrogneries; aux impudicités, ni aux »> diffolutions; aux querelles ni aux envies : » Convertiffez-vous au Seigneur, dit le S. Ef- Eccl. 17. »prit, quittez-vos péchés, & offrez-lui vos » prieres, & éloignez-vous de plus en plus de " ce qui vous eft un fujet de chûte. Retournez "au Seigneur; revenez de l'injuftice, & ayez en horreur ce que Dieu déteste : allez prendre part au fiécle faint avec ceux »qui vivent & qui rendent gloire à Dieu. Ne » demeurez point dans l'erreur des méchans

.....

J

" Louez & fervez Dieu avant la mort. » Il eft aifé d'appercevoir & de reconnoître dans tous ces paffages la premiére qualité de la converfion. Elle doit être réelle; changement effectif de conduite, ceffation de péché, converfion de moeurs.

III.

cœur ;

ze Qualité La feconde qualité, c'eft qu'elle foit inténtérieure. rieure, qu'elle foit du c'eft-à-dire qu'il ne fuffit pas de quitter les péchés extérieurs que l'on commettoit ; il faut auffi réformer les péchés & les vices intérieurs, qui font la racine & la fource des autres. On appelle péchés intérieurs, ceux qui ne fe commettent que par le defir & la volonté, & qui ne fe produifent point au dehors foit par des actions, foit par des paroles; ou bien ceux qui font purement fpirituels, & dont l'objet n'eft rien de ce qui touche au corps, ni de ce qui tombe fous les fens. De mauvais defirs, par exemple, des penfées impures & lorfconfenties, font des péchés du cœur, qu'ils ne font pas fuivis d'oeuvres criminelles du même genre. Des inimitiés confervées dans le cœur, des defirs & des projets de vengeance, des penfées de mépris font encore des péchés intérieurs, lorsqu'ils n'ont pas d'exécution au dehors par quelque procédé, ou quelque difcours contraire à la charité. L'orgueil, la recherche de la vaine gloire, la préférence qu'on fait de foi aux autres T'envie, la jaloufie font des péchés fpirituels parce que l'objet n'eft rien de corporel & de fenfible, & que le corps n'y a point de part. Or ce font ces péchés intérieurs & fpirituels,

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