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Le Diffipateur eft comme vous le dites; mais les comédiens ont reçu et joué des pièces fort au-deffous. 1736. Ils ont tort de s'être brouillés avec M. Deftouches; ils aiment leur intérêt et ne l'entendent pas.

Le Mentor cavalier devrait être brûlé, s'il pouvait être lu. Comment peut-on fouffrir une auffi calomnieuse, auffi abominable et auffi plate hiftoire que celle de madame la ducheffe de Berri? Je n'ai point encore lu les autres brochures. Eft-ce vous, mon cher ami, qui m'envoyez tout cela? Je fuis bien fâché que vous ne puiffiez pas venir vous-même.

A l'égard de la lettre du fignor Antonio Cocchi, il la faut imprimer; elle eft pleine de chofes inftructives. Il y a autant de courage que de vérité à ofer dire que les fictions, dans les poëmes, font ce qui touche le moins; en effet, le voyage d'Iris et de Mercure, et les affemblées des dieux feraient bien ignorés fans les amours de Didon; et DIEU et le diable ne feraient rien fans les amours d'Eve. Puisque M. Cocchi a l'efprit fi juste et fi hardi, il en faut profiter; c'est toujours une vérité de plus qu'il apprend aux hommes. Il faudra feulement échancrer les louanges dont il m'affuble. Il commence par crier à la première phrase : il n'y a rien de plus beau que la Henriade. Adouciffons ce terme; mettons: il y a peu d'ouvrages plus beaux que, &c. Mais comptez qu'il eft bon d'avoir, en fait de poëme épique, le fuffrage des Italiens.

Le dévot Rousseau a fait imprimer un libelle diffamatoire contre moi, dans la Bibliothèque française, de concert avec ce malheureux Desfontaines, qui a été mon traducteur, et que j'ai tiré de bicêtre. Ai-je tort, après cela, de faire des homélies contre

l'ingratitude? J'ai été obligé de répondre et de me 1736. juftifier (*); car il s'agit de faits dont j'ai la preuve

en main. J'ai envoyé la réponse à M. Saurin le fils, parce que monfieur fon père y eft mêlé; il doit vous la communiquer.

J'ai lu enfin l'épître en vers qu'on m'imputait : il faut être bien fot ou bien méchant pour m'accufer d'être l'auteur d'un ouvrage où l'on me loue. Comment eft-ce que vous n'avez pas battu ces miférables qui répandent de fi plates calomnies? La pièce eft quatre fois trop longue au moins, et d'ailleurs extrêmement inégale. Il ferait aifé d'en faire un bon ouvrage, en fefant trois cents ratures, et en corrigeant deux cents vers; il en resterait une centaine de judicieux et de bien frappés: si je connaissais l'auteur, je lui donnerais ce confeil. Quand vous aurez la réponse au libelle diffamatoire de Desfontaines et de Rousseau, je vous prie de la communiquer à M. l'abbé d'Olivet, rue de la Sourdière. Adieu, mon cher ami; je vous embrafse.

(*) Voyez cette réponse dans les Mélanges littéraires, tome III, page 369.

1736.

LETTRE CCV.

A M. THI RIOT.

15 octobre

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I vous êtes à Saint-Urain, tant mieux pour vous; fi vous êtes à Paris, tant mieux pour vos amis qui vous voient. Ce bonheur n'eft pas fait pour moi; mais on ne faurait tout avoir : au moins ne me privez pas de celui de recevoir de vos nouvelles. Je demande le fecret plus que jamais fur cet anonyme qu'on joue (*): vous connaissez l'Envie, vous favez comme ce vilain monftre eft fait. S'il favait mon nom, il irait déchirer le même ouvrage qu'il approuve. Gardez-moi donc, vous, Pollion et Polymnie, un fecret inviolable. N'êtes-vous pas faits pour avoir toutes les vertus? Je vous le demande avec la dernière inftance.

Je perfifte à trouver les trois épîtres de Rousseau mauvaises en tous fens, et je les jugerais telles fi Rouffeau était mon ami. La plus mauvaise eft fans contredit celle qui regarde la comédie; elle est digne de l'auteur des Aïeux chimériques, et fe reffent tout entière du ridicule qu'il y a, dans un trèsmauvais poëte comique, de donner des règles d'un art qu'il n'entend point. Je crois que la meilleure manière de lui répondre, eft de donner une bonne comédie dans le genre qu'il condamne ce ferait la

(*) L'Enfant prodigue.

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feule manière dont tout artiste devrait répondre à la 1736. critique.

Je vous envoie la lettre du prince de Pruffe : ne la montrez qu'à quelques amis; on m'y donne trop de louanges.

La lettre de M. Cocchi n'eft pas, à la vérité, moins pleine d'éloges; mais elle est instructive: elle a déjà été imprimée dans plufieurs journaux, et il est bon d'opposer le témoignage impartial d'un académicien de la Crufca aux invectives de Rouffeau et de Desfontaines.

J'ai adreffé ma lettre au Prince royal à monfieur votre frère, pour la remettre au miniftre de Pruffe, que je ne connais point. A l'égard de l'épître en vers que j'adreffe à ce prince, je l'ai envoyée à M. Berger pour vous la montrer; mais je ferais au défefpoir qu'elle courût. L'ouvrage n'eft pas fini. J'ai été deux heures à le faire, il faudrait être trois mois à le corriger; mais je n'ai pas de temps à perdre dans le travail miférable de compaffer des mots.

Un temps viendra où j'aurai plus de loifir, et où je corrigerai mes petits ouvrages. Je touche à l'âge où l'on fe corrige et où l'on ceffe d'imaginer.

Mille refpects à votre petit Parnaffe.

LETTRE

C C V I.

1736.

A M. BERGER.

A Cirey, 18 octobre.

OUI, je compte entièrement fur votre amitié et fur

toutes les vertus fans lefquelles l'amitié eft un être de raifon. Je me fie à vous fans réserve.

Premièrement, il faut que le fecret foit toujours gardé sur l'Enfant prodigue. Il n'eft point joué, comme je l'ai compofé; il s'en faut beaucoup. Je vous enverrai l'original: vous le ferez imprimer, vous ferez marché avec Prault dans le temps; mais furtout que l'ouvrage ne paffe point pour être de moi; j'ai mes raisons.

Vous ne fauriez me rendre un plus grand service que de dérouter les foupçons du public. Je veux vous devoir tout le plaifir de l'incognito, et tout le fuccès du théâtre et de l'impreffion.

Embraffez pour moi l'aimable la Bruëre. Peuton ne pas s'intéreffer tendrement aux gens que l'amour et les arts rendent heureux? Si un opéra d'une femme réuffit, j'en fuis enchanté; c'eft une preuve de mon petit fyftême que les femmes font capables de tout ce que nous fefons, et que la feule différence qui eft entre elles et nous, c'eft qu'elles font plus aimables. Comment appelez-vous par nom cette nouvelle mufe (*) qu'on appelle la Légende? Grégoire VII n'a rien fait de mieux qu'un. opéra. Avez-vous vu le Mondain? Je vous l'envertai pour entretenir commerce.

(*) Mademoiselle Duval des chœurs de l'opéra.

fon

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