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nière sensible les idées et adopté les institutions qui semblent plus particulièrement appartenir aux sociétés policées. Leur gouvernement et leurs mœurs seront l'objet de quelques observations, lorsque nous parlerons de la découverte et de la conquête des empires du Mexique et du Pérou, et cette époque nous offrira l'occasion de considérer les Américains dans le plus haut degré de civilisation où ils soient jamais parvenus.

SECOND, TROISIÈME ET QUATRIÈME VOYAGES DE CHRISTOPHE COLOMB.

Ferdinand et Isabelle avaient donné à Christophe Colomb les marques les plus éclatantes de la reconnaissance et de l'admiration que leur inspiraient son courage et ses travaux; mais ce qui satisfit, plus que toutes ces faveurs, cet esprit actif et entreprenant, toujours occupé de grands objets, ce fut l'ordre d'équiper promptement une flotte, avec laquelle il pût, non-seulement s'assurer la possession des pays qu'il avait déjà découverts, mais aller encore à la recherche de ces contrées plus riches qu'il se flattait toujours de découvrir.

Tandis que ces préparatifs se faisaient, le bruit de l'expédition et des découvertes de Colomb se

répandait et attirait l'attention de toute l'Europe, frappée d'étonnement en entendant dire qu'on avait découvert un nouveau monde : la multitude ne pouvait croire une chose si fort au-delà de la sphère des idées communes. Les hommes instruits, capables de concevoir toute l'importance de ce grand événement et d'en prévoir les suites, l'apprirent avec des transports d'admiration et de joie. Ils en parlaient avec ravissement, ils se félicitaient les uns les autres d'avoir vécu dans un siècle où cette grande découverte reculait les bornes des connaissances, ouvrait au genre humain une moisson nouvelle de recherches et d'observations, et fournissait désormais à l'homme un moyen de connaître parfaitement la structure et les productions du globe qu'il habite.

Toutefois les opinions se partagèrent, et l'on forma différentes conjectures sur les pays nouvellement découverts; on demandait à quelle division de la terre ils appartenaient. Colomb soutenait toujours sa première idée et voulait qu'on les regardât comme une portion de ces vastes régions de l'Asie, comprises alors sous le nom général d'Inde. Ce sentiment d'ailleurs était confirmé par ses observations sur les productions de ces contrées. L'or abondait dans l'Inde, et il avait rapporté des îles qu'il avait visitées

une assez grande quantité de ce métal, pour croire qu'on y en trouverait des mines. Le coton, autre production des Indes orientales, était commun dans ces îles. Le piment lui paraissait être une espèce de poivre d'Inde. Les oiseaux qu'il avait apportés étaient ornés de plumages de couleurs aussi riches que ceux de l'Asie, et il voyait dans l'alligator le même animal que le crocodile.

Ces diverses circonstances déterminèrent nonseulement les Espagnols, mais encore les autres nations de l'Europe à adopter les opinions de Colomb. Les pays qu'il avait découverts furent considérés comme faisant partie de l'Inde; et Ferdinand et Isabelle leur donnèrent le nom d'Indes, dans la ratification du traité de Santa-Fé, accordé à Colomb à son retour: lorsque ensuite l'erreur fut découverte, et la vraie situation du Nouveau-Monde mieux déterminée, il conserva son premier nom; on l'appelle encore Indes occidentales et les habitans Indiens.

Un nom si séduisant, les échantillons appor tés par Colomb de la richesse et de la fertilité de ces pays nouveaux, l'exagération que ses compagnons mettent dans leurs récits, font concevoir de si belles espérances, que le goût des découvertes et des entreprises s'anime tout-à-coup parmi les

Espagnols à un point étonnant, et quoique peu accoutumés aux grands voyages de mer, ils montrèrent la plus grande impatience pour une seconde expédition. Ferdinand partage l'enthousiasme de ses sujets; dix-sept vaisseaux sont équipés, quinze cents hommes les montent, et parmi eux se trouvent un grand nombre de gentilshommes déjà connus pour avoir occupé les premières places du royaume.

Un pape (*) confirme les droits de l'Espagne sur le Nouveau - Monde; et Isabelle et Ferdinand, possesseurs d'un titre qui leur paraît incontestable à la souveraineté de tous les pays qu'ils pourront découvrir sur une si grande partie du globe, donnent à la flotte l'ordre du départ. Elle met aussitôt à la voile, et cingle vers l'hémisphère occidental. Chaque bord est chargé de tout ce qui peut être nécessaire pour se défendre et pour former un établissement, et l'on a eu soin d'embarquer toutes les espèces d'animaux domestiques de l'Europe, et toutes les plantes qu'on croyait pouvoir réussir sous le climat des Indes occidentales.

(*) Alexandre vi. Voir, pour ce pape, qu'on a comparé à Néron, Guichardin, Voltaire, Alexandre Gordon et J. Burchard.

Cependant Colomb était trop impatient de revoir la colonie qu'il avait laissée à Hispaniola (*) pour s'arrêter dans aucune des îles qu'il rencontra sur sa route; c'étaient la Désirade, la Dominique, la Guadeloupe, Antigoa et Porto-Rico, dont les habitans se nourrissaient des corps de leurs ennemis pris à la guerre.

Arrivé à la Nativité, où il avait laissé trentehuit hommes, sa surprise fut extrême de ne voir personne se montrer et accourir au-devant de la flotte avec des transports de joie; inquiet du sort de ses compatriotes et soupçonnant ce qui leur était arrivé, il prit terre. Tous les naturels du pays qui eussent pu lui donner quelques nouvelles de sa colonie s'enfuirent à son approche.

(*) On sait peu de choses sur la religion des premiers habitans d'Haïti; ils adoraient une foule de divinités malfaisantes. Plusieurs rendaient un culte au soleil et aux astres. Les Espagnols, qui, peut-être, ont calomnié leurs victimes, ajoutent qu'on offrait à ces dieux des sacrifices humains. Cependant, de leur aveu, ces peuples étaient doux, timides, sans malignité, presque sans passions. On trouva l'île divisée en cinq nations principales, toutes fort nombreuses. Elles avaient des rois, nommés Caciques, d'autant plus absolus qu'ils étaient fort aimés : c'étaient ordinairement des vieillards dont le courage et la sagesse justifiaient le choix de leurs concitoyens.

RAYNAL.

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