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même de discuter celles qui lui étaient prescrites. Il fallut consentir aux renonciations. Le ministère de France y paraissait si opposé que celui d'Angleterre offrit, pour Philippe v, l'alternative ou de garder l'Espagne et les Indes, en renonçant actuellement pour lui et sa postérité au trône de France, ou d'y conserver tous ses droits, en cédant la couronne d'Espagne au duc de Savoie, et recevant en échange les royaumes de Naples et de Sicile, la Savoie, le Piémont, le Montferrat et le duché de Mantoue; et, au cas que lui ou quelqu'un de ses descendans parvînt à la couronne de France, tous ces états échangés y seraient réunis, à l'exception de la Sicile qui passerait à la maison d'Autriche.

Louis xiv n'oublia rien pour engager son petitfils à accepter le dernier parti; mais Philippe avait reçu trop de preuves de l'attachement des Espagnols, pour les abandonner. Il ne balança pas; et, le 5 novembre 1712, il fit, en plein cortès, sa renonciation à la couronne de France. Le jour suivant il en donna avis à son frère le duc de Berri, par une lettre communiquée à la junte, et qu'il accompagna d'un modèle de renonciation à la couronne d'Espagne, pour les ducs de Berri et d'Orléans.

La renonciation faite, au nom de ces deux

princes, dans les cortès d'Espagne, y avait toute la force et l'authenticité possibles. Il n'en était pas ainsi de celle de Philippe en France. Il fallait qu'elle y fût ratifiée avec le même appareil que les deux autres l'avaient été à Madrid. Louis XIV Offrait de faire enregistrer au parlement une déclaration contenant les renonciations respectives; mais les Anglais, et surtout leurs alliés, pour rompre la négociation, et pour continuer la guerre, exigeaient la sanction des états-généraux de France.

Ils savaient combien les renonciations et les sermens avaient déjà été illusoires. Louis XIII les avait faits, lors de son mariage avec Anne d'Autriche; Louis XIV les avait renouvelés à la paix des Pyrénées, én épousant Marie-Thérèse. Cela n'avait pas empêché l'invasion de la Franche-Comté et d'une partie des pays espagnols, après la mort de Philippe IV. Quelle forme plus sacrée pouvait-on donner aux nouvelles renonciations, sans la sanction des états?

Louis, accoutumé à concentrer tout l'état dans sa personne, ne concevait pas qu'on pût réclamer une autorité confirmative de la sienne. Cependant la paix devenait tous les jours plus nécessaire, et il fallait contenter les alliés. Un comité composé de MM. de Beauvilliers, de Chevreuse, de Charost, de Humières, de Saint-Simon et de

Noailles, fut chargé de chercher un moyen de parvenir au but qu'on voulait atteindre, sans l'assemblée des états.

On proposa de convoquer les princes du sang, les ducs et pairs, les ducs vérifiés ou héréditaires non pairs, les officiers de la couronne, les gouverneurs des provinces et les chevaliers de l'ordre qui représenteraient la noblesse. Mais le corps de la noblesse ne pouvait être régulièrement représenté que par des députés nommés par ellemême; le clergé ne se croirait pas représenté par les pairs ecclésiastiques, si la noblesse ne se croyait pas l'être par les ducs et les officiers de la couronne. Le tiers paraîtrait à l'instant, et les parlemens, qui en sont la principale partie, ne seraient pas satisfaits de l'unique personne du chancelier, qui d'ailleurs ne serait regardé que comme officier de la couronne. On en concluait que cette assemblée ne serait qu'une fausse image d'états, qui, sans en avoir le poids. et l'autorité, n'en blesserait pas moins le roi qui n'en voudrait ni la réalité, ni l'apparence.

Les discussions du comité ne décidant pas l'affaire, Bolinbrocke la termina sur la forme avec les alliés, comme il avait déjà fait sur le fond avec le ministre de France. Il leur fit donc approuver le projet de déclaration que le roi

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avait offert au sujet des renonciations. Il leur fit voir que si la France était jamais assez puissante pour revenir contre ses engagemens, rien ne l'arrêterait; mais que l'intérêt des puissances réunies de l'Europe serait la plus sûre des garanties, la force étant toujours entre les princes l'interprète des traités.

La forme des renonciations convenue, les ducs de Berri et d'Orléans se rendirent, le 15 mars 1713, au parlement, où se trouvèrent le duc de Bourbon, le prince de Conti, prince du sang; les deux légitimés, le duc du Maine et le comte de Toulouse; cinq pairs ecclésiastiques, et ce qu'il y avait de pairs laïques en état d'y assister. Le chancelier, n'ayant point eu ordre du roi de s'y rendre, ne fut pas fâché de s'en dispenser, connaissant mieux que personne la valeur de cette cérémonie.

Le duc de Shrewsbury et Prior, plénipotentiaires d'Angleterre; le duc d'Ossone, plénipotentiaire d'Espagne à Utrecht, étaient placés dans une des lanternes ou tribunes, ayant chacun une copie des pièces dont on allait faire le rapport, pour en suivre la lecture.

Les gens du roi ayant exposé le sujet de l'assemblée, le doyen du parlement lut la lettre de cachet et les lettres patentes du mois de décem

bre 1700, qui conservaient à Philippe v et à sa branche, quoique absente et non regnicole, les droits à la couronne de France. On lut tout de suite sa renonciation, qui fut mise en marge des registres, pour annuler les lettres patentes. De là on passa aux renonciations des ducs de Berri et d'Orléans à la couronne d'Espagne pour eux et pour leur postérité mâle et femelle.

Les conclusions du procureur-général et l'arrêt du parlement furent lus et approuvés; les magistrats sortirent pour prendre la robe rouge, revinrent se placer aux hauts siéges, et l'arrêt fut prononcé en pleine audience et portes ouvertes. Le roi d'Espagne ayant pris dans ses qualités celles de roi de Navarre et de duc de Bourgogne, le parlement mit dans l'enregistrement, sans approbation de titres.

Les renonciations ayant été acceptées, la paix ne tarda pas à être conclue entre la France et les alliés, excepté l'empereur. Elle fut signée à Utrecht le 11 avril, et publiée à Paris le 25 mai 1713.

Une chose peu importante, mais assez singulière, c'est que l'abbé de Polignac, un des plénipotentiaires français à Utrecht, obtint le chapeau de cardinal à la nomination de Jacques III, comme roi d'Angleterre, dans le temps que

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