Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

le régiment suisse de Reinach, au service de France, a terminé sa carrière à Berne en 1850, après avoir été officier supérieur de la garde suisse sous Charles X.

Les Souvenirs du lieutenant-colonel Rosselet embrassent donc toute l'histoire militaire des Suisses au service de France pendant plus d'un demi-siècle. Cette histoire, comme on le sait, n'a pas encore été écrite, et souvent les faits d'armes de nos compatriotes sont restés dans l'ombre, par l'effet de l'oubli calculé ou non calculé des écrivains militaires français. On trouvera dans le volume que nous annonçons bien des détails marqués au coin de la loyauté helvétique et de la franchise militaire, qui seront de précieux documents pour l'annaliste futur des régiments suisses sous Louis XVI et pendant les guerres de la révolution et de l'empire.

Nous avons l'intention d'en faire l'objet d'un article spécial, dans lequel nous essaierons d'aborder certaines questions délicates, encore aujourd'hui très-controversées, sur le service des Suisses à l'étranger. Il va sans dire que nous les étudierons au point de vue de l'histoire, bien plus que dans une intention d'actualité ou d'avenir.

On attendait depuis longtemps une suite aux trois volumes de Notices généalogiques sur les familles Genevoises de feu J.-A. Galiffe, ce livre qui, sous une forme un peu originale, renferme une masse de documents précieux pour l'histoire de l'ancienne république de Genève. M. J.-B.-G. Galiffe, docteur en droit, fils de cet investigateur éprouvé de nos archives, vient enfin de reprendre l'œuvre paternelle et de donner la première partie du tome IV des Notices généalogiques. Elle contient des articles fort importants, tant pour les temps anciens que pour les époques relativement modernes, Nous citerons entre autres ceux qui sont consacrés aux familles Alamand, d'Auriol, de Marval (de Genève et de Neuchâtel), Revilliod, Soret et du Villard.

Nous ne saurions trop encourager M. J.-B.-G. Galiffe à persévérer dans cette reprise d'un ouvrage apprécié dès longtemps, et à mettre largement à contribution les précieux documents qu'il possède par héritage, et ceux que ses propres études le mettent en mesure de réunir: les premières planches de l'Armorial genevois du même auteur vont paraître incessamment. Nous en rendrons compte quand le moment sera venu.

• Un demi-volume in-8°. Prix: 2 fr. 50. Chez Julien frères, à Genève.

Bib. Un. T. I. — Janvier 1858.

10

152

BULLETIN LITTERAIRE ET BIBLIOGRAPHIQUE.

.

temps. Nous apprenons en outre que ces légions, formées sous Dioclétien, étaient composées de soldats chrétiens, enrôlés de force et en punition de leur inébranlable attachement à leur croyance. D'autre part, nous savons que celui des chefs qui, dans le partage de l'empire, avait reçu le commandement de l'Occident, Maximien-Hercule, comptait dans son armée l'une de ces légions. Nous savons même que cet empereur se transportait avec des troupes des Gaules en Italie, à l'époque où venait d'être rendu l'édit général de persécution contre les chrétiens, c'est-à-dire dans les premières années du quatrième siècle. Nous savons que l'une des grandes voies de communication entre les Gaules et l'Italie traversait la vallée du bas Rhône et le mont Saint-Bernard. Nous savons que de tous les despotes qui gouvernaient alors le monde romain, Maximien était le plus féroce et le moins avare de sang. Enfin, il n'est pas jusqu'au nom d'un chef de légion appelé Maurice, qui ne soit attesté par le témoignage d'un auteur contemporain. Tous ces faits réunis donnent, à ce qui d'abord paraissait fabuleux, un caractère tout différent : ce qui semblait impossible devient probable; et nous croyons que ceux qui liront, sans parti pris, l'exposé de M. Gelpke, verront dans le martyre de saint Maurice et d'une partie, sinon de la totalité de ses 6000 soldats, un fait avéré et le plus ancien de ceux qui appartiennent à l'histoire de l'Eglise chrétienne dans l'Helvétie.

Ici, comme ailleurs, selon l'expression de Tertullien, le sang des martyrs a été la semence des chrétiens.

TÖPFFER LE PEINTRE.

La vie privée de cet artiste éminent, notre compatriote, dont précédemment j'ai rappelé les œuvres', m'occupera seule dans les pages qui vont suivre. Mais puis-je espérer qu'une aussi paisible et modeste carrière excite encore quelque intérêt? Je ne sais, et bien des gens seront désappointés sans doute. «Grand artiste, grande existence, disent-ils, et toute pleine d'émouvantes péripéties, de brillants désordres. » Que si celui dont on leur parle ne peut remplir ces conditions dramatiques, si sa vie tout entière fut simple, tranquille et bourgeoise comme celle du premier venu: « Réputation usurpée, sont-ils disposés à dire, le vrai talent a bien d'autres allures! »

Maintenant, si l'on ajoute à ce préjugé que je rencontre ici, la réserve sévère qu'exigent un nom contemporain, une existence dont les témoins sont mes lecteurs peut-être, on sentira que ce n'est pas sans une inquiétude légitime que j'entreprends cette biographie. Essayons-le toutefois. L'intérêt littéraire peut se passer, à l'occasion, du romanesque; il subsiste au besoin en dehors des situations palpitantes, et pourquoi ne pas le dire? il s'attache, au contraire, certaines fois aux réalités les plus modestes de la vie habituelle. Puissent seulement les cœurs honnêtes, les esprits sensés auxquels je m'adresse, le reconnaître, ainsi que moi, en suivant ces pages.

1 Voyez Biblioth. Univ., numéro de décembre 1857, page 473. Biblioth. Univ. T. I.— Février 1858.

11

Adam Töpffer naquit à Genève en 1766. Son père, un Allemand que l'embarras des richesses ne préoccupa jamais outre mesure, à ce qu'il paraît, « exerçait la profession de tailleur, » comme disent précieusement en pareil cas tous les discours d'académie.

Je ne sais, à ce propos, si mon impression est ici partagée, mais chaque fois que se présente pour moi dans la biographie d'un homme distingué une de ces modestes origines ouvrières, un intérêt de plus s'attache à mes yeux, au nom de celui que ses talents ont fait connaître. Ils sont réellement fils de leurs œuvres ceux pour qui la vie fut un champ de bataille, et qui, depuis le berceau, luttant avec la fortune adverse, conquirent pied à pied leur position honorable. Sans doute ceux qui, favorisés d'une aisance héréditaire, ne laissèrent pas s'éteindre au sein du bien-être ces précieuses facultés intellectuelles qu'ils recurent en entrant dans la vie, ceux-là sont doublement estimables, et le passé de notre patrie a plus qu'un autre, je pense, le droit de constater ces glorieuses individualités. Mais cette réserve une fois établie, j'ai hâte de faire connaître franchement toute ma pensée. Le mérite personnel constituant à mes yeux la seule aristocratie admissible, la seule noblesse devant laquelle je m'incline avec respect et plaisir, j'aime à voir qu'elle se recrute dans tous les rangs que les caprices du sort créèrent en ce monde. Honneur à ces parvenus, dirai-je, et maintenant que mes sympathies sont nettement avouées, je puis en toute liberté rechercher les chétifs débuts de celui dont je rappelle ici la mémoire.

A dix-neuf ou vingt ans, Töpffer, ouvrier graveur de notre fabrique genevoise, quittait la maison paternelle, ainsi que d'autres jeunes gens, aussi légers d'espèces, désireux de ressources, et confiants dans l'avenir comme on l'est à cet âge. Je ne sais ce que devinrent à Paris ces fidèles compagnons des mauvais jours de notre peintre. Pour lui, nous dit l'histoire, il utilisa bien vite dans l'Athènes moderne son intelli

gente nature, ses précieuses qualités d'artiste... à graver des boutons d'habit. On en portait d'énormes à cette époque, et l'importance de ce détail n'était pas mince pour les petitsmaitres. Il parait que c'était alors un irrésistible moyen de séduction auprès d'un sexe plus faible, dont on captivait les regards avec ces petits miroirs d'acier, comme on le fait encore pour les alouettes. La mode passe malheureusement et les boutons restent. Mais bien qu'en France ces changementslà soient très-graves, des événements d'une importance autrement sérieuse allaient influencer tristement sur les modestes ressources de notre jeune graveur. La prise de la Bastille, ce premier coup de tonnerre, inaugurait la sombre épopée dont notre siècle tressaille encore. Comment Töpffer, notre compatriote inoffensif, complétement étranger à ces passions terribles qui de toutes parts se déchaînaient sur la France, se trouva-t-il ce jour-là jeté dans les flots orageux de la foule? Je ne saurais le dire, mais je puis assurer qu'il assista de très-près à cette sanglante journée, « de plus près qu'il n'eût voulu, » devrais-je dire, car ne pouvant absolument se dégager des rangs glorieux du populaire, il vit sous ses yeux la mitraille foudroyer les patriotes qui le pressaient de tous côtés, et marchaient à la mort avec lui pour renverser cet odieux monument de la tyrannie. Gémissant à part lui sur « l'entraînement déplorable de la foule,» il dut faire, j'imagine, de bien pénibles réflexions à travers la fusillade. Heureux quand il put enfin échapper à la gloire, en se précipitant sous une porte cochère. Inutile d'ajouter que Töpffer s'éloignait promptement de Paris après ce premier succès révolutionnnaire. La gravure, on le devine, était alors aussi malade que la royauté, et force lui fut d'attendre, comme tant d'autres, que l'avenir amenât enfin de meilleurs jours.

Mais n'attend pas qui veut l'avenir, et bien des honnêtes gens en faisaient, à cette époque de misère, la cruelle expérience. Il faut, pour y réussir, des ressources matérielles que,

« ZurückWeiter »