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stamment de sa présence chez ses élèves et de sa justesse. Il cherche partout à développer les jeunes intelligences, d'abord en petit, puis plus en grand par degrés. Peu à peu il cherche à fonder en raison les importantes vérités de la vie qu'il fait connaître à ses élèves. Il arrive jusqu'à leur communiquer les preuves sur lesquelles reposent les plus importantes, celles de la religion. Nous avouons franchement que ceci est du neuf dans les écoles de l'âge tendre; mais il ne faut pas oublier que les temps anciens sont bien loin de nous. Le matérialisme et l'incrédulité ont passé tête levée sur notre Europe et ils y ont laissé des traces profondes, là même où on ne les chercherait pas. Les égarements de l'esprit ont pour eux les vices du cœur humain, et la voix des vices est séduisante. L'éducation a donc de nos jours un devoir nouveau, celui de fonder en raison une foi qui naguère n'avait pas besoin de ce soutien. Elle reposait sur la tradition.

A part l'apparition de l'incrédulité, notre Europe a éprouvé, par les événements politiques et les guerres, une secousse violente qui a mis les têtes en mouvement, jusque dans les ateliers les plus obscurs et les chaumières les plus éloignées des villes. Les formes gouvernementales perpétuent l'ébranlement qui les a produites. Puis les feuilles publiques en tout sens pénètrent partout, parce qu'elles trouvent partout d'avides lecteurs. Partout l'on discute et l'on se croit capable de prononcer. Tel est l'esprit de notre temps, et vous ne le changerez pas. On ne fait pas remonter un torrent vers sa source.

Et voyez un peu quel triste rôle jouent nos écoles de mots, enveloppées qu'elles sont de cet esprit toujours en éveil, qui raisonne et qui déraisonne en toute liberté. Certes elles ne répondent pas aux besoins de notre époque. Il faut donc les remplacer sans délai par des institutions qui continuent, qui développent et perfectionnent ce que l'instinct maternel a commencé, en mettant la parole sur les lèvres de son enfant. Non, il n'y a de salut que là.

Notre Cours pratique trace toute la marche du nouvel enseignement de la langue, et il en fournit le fond avec tant d'abondance que les instituteurs et les institutrices ne seront jamais en peine d'en trouver. Cependant nous ne saurions les mépriser au point de vouloir en faire d'aveugles instruments dans nos mains. Ils ne peuvent remplir la belle tâche qui leur est imposée qu'en pleine connaissance de cause et avec une entière conviction. C'est un travail raisonné que devront faire leurs élèves, puisqu'il s'agit de les rendre raisonnables, pour qu'ils deviennent bons. Un semblable résultat ne peut s'obtenir que par des guides de l'enfance qui sachent ce qui se trouve en elle, et connaissent les moyens de la conduire au terme désiré.

Nous avons réuni dans le présent ouvrage toutes les connaissances qui leur sont plus ou moins nécessaires pour se bien acquitter de leurs graves fonctions. Cet écrit est l'introduction au Cours pratique, et un traité d'éducation rattaché à l'enseignement de la langue maternelle, enseignement qui est le plus important dans la vie, comme il est le premier que nous recevons de la bouche de nos mères. C'est principalement à l'usage des instituteurs et des institutrices que ces feuilles ont été publiées, et nous venons d'en réduire l'étendue pour leur en faciliter l'acquisition.

Au nombre des élèves du Cours de langue, on ne doit admettre que des enfants qui puissent en suivre tous les exercices avec fruit. Il faut donc qu'ils apportent à leur entrée toutes les connaissances et tous les petits talents qu'ils doivent s'approprier à l'école élémentaire ou sous le toit paternel. S'ils en étaient privés, ils ne pourraient pas prendre convenablement part aux exercices, et ils entraveraient le travail de leurs camarades.

Rien ne stimule autant l'application dans les enfants que le sentiment qu'ils acquièrent de leurs progrès. Il faut donc ne jamais les laisser dans l'embarras, mais les aider par quelques légères indications qui les mettent

sur la voie pour trouver le reste, et qui leur en laissent le plaisir. Quelque petit que soit le succès, donnez-lui votre approbation. N'est-ce pas ainsi qu'en usait le divin Maître envers ses disciples? Vous aurez toujours beaucoup de fautes à corriger. Elles ne doivent pas vous surprendre, et encore moins vous irriter. L'humeur ne vous gagnera pas le cœur de vos élèves, elle ne leur ouvrira pas l'esprit, elle ne leur donnera pas plus de courage. Ceci n'est réservé qu'à la bonté du maître et à la reconnaissance de son disciple. Serait-il nécessaire d'ajouter ici qu'en donnant un Cours éducatif de langue l'instituteur et l'institutrice prennent l'engagement de ne pas démentir leurs leçons par leur conduite?

CHAPITRE II.

EMPLOI DU COURS DE LANGUE DANS LES ÉCOLES.

Le Cours éducatif de langue n'est destiné qu'aux écoles primaires supérieures. Leurs élèves appartiennent en général aux classes aisées de la société, ils s'arrêtent plus longtemps à leurs leçons, ils y arrivent avec plus de développement, et par conséquent avec le besoin d'une éducation plus soignée et plus profonde, s'il est permis de s'exprimer ainsi. Pour les écoles primaires inférieures il y aurait dans notre Cours actuel beaucoup trop d'étendue et d'élévation. C'est un extrait qu'il leur faut et un extrait sagement calculé sur la position et les besoins particuliers de leurs élèves.

§ Ier. Temps que le cours de langue exige à l'école.

Le Cours éducatif de langue a la syntaxe pour base, et cette syntaxe se compose, comme on sait, de trois parties progressives qui sont : syntaxe de la proposition, syntaxe de la phrase et syntaxe de la période. Chacune de ces par ties a deux cents et quelques leçons, où à un exercice de vive voix se rattache toujours un exercice correspondant

par écrit. Les leçons de syntaxe forment par conséquent un total de six cent seize. Mais ce n'est pas tout. Entre deux leçons de syntaxe vient se placer alternativement sur les deux premiers degrés de la progression, une leçon de conjugaison ou du vocabulaire. A côté de la période la conjugaison est remplacée par les compositions. Ainsi en réunissant toutes les leçons du cours on arrive au nombre de douze cent trente-deux.

Il y aurait peut-être là de quoi effrayer toutes les idées habituelles sur l'enseignement de la langue dans les écoles, et de quoi leur faire repousser au premier abord ce Cours de langue qui à lui seul demande tant de place et tant de temps.

Nous ne sommes pas fait pour en imposer en faveur de notre œuvre. Nous avons une expérience de maintes années devant nous, et appuyé sur elle, nous dirons hautement que ce Cours, pour être bien fait, veut être l'objet dominant dans une école, et qu'en moyenne il demande cinq à six ans d'exercices. Mais que l'on veuille bien se rappeler que, pour la langue, il fait sous tous les rapports incomparablement plus que les méthodes usuelles, et que la langue n'y est pourtant qu'un simple moyen. C'est le développement progressif de l'esprit qui est ici le but prochain, et celui-ci encore se rapporte comme fin dernière au développement de la conscience et du cœur au profit de la vie. En un mot c'est un Cours éducatif de langue.

Il renferme d'ailleurs une instruction assez étendue sur l'homme, sur la nature, sur les choses divines et humaines. Il lui faut une matière convenable pour se développer, et il l'a prise où elle se trouve, et autant qu'en demandaient ses besoins. L'élève qui se sera approprié toute l'instruction que renferme le Cours de langue ne sera pas un ignorant dans la vie, et il se trouvera sur la voie pour acquérir facilement toutes les connaissances qui lui manqueront au sortir de son école.

§ II. Leçons qui peuvent accompagner le cours de langue.

Nous avons dit que l'enseignement de la langue doit

être l'objet dominant dans les écoles. C'était ne pas en exclure d'autres enseignements qui trouveront place à côté de lui, comme ils en avaient une dans ma chère école de Fribourg. J'ai déjà demandé plus haut des lectures régulières sur les merveilles de la nature, et sur l'Histoire Sainte, principalement du Nouveau-Testament. La géographie ne doit pas être omise, et c'est sur le sol natal que doit se prendre la première leçon. On l'y prenait chez moi, et en voyageant dans la Palestine, on avait soin de se rappeler quelques traits de la vie du Sauveur et quelquesunes de ses paroles. Sur la carte de l'Asie Mineure on suivait les traces de l'apôtre des nations, et le triomphe de l'Église chrétienne sur la synagogue et l'idolâtrie.

Le dessin avait également place à côté du Cours de langue, et, comme il a été dit plus haut, il embrassait une grande partie de l'histoire naturelle, ainsi que les éléments nécessaires aux arts mécaniques. Le calcul n'était pas négligé, puisqu'à la stérile routine j'avais substitué une méthode intéressante qui mettait les élèves au courant des affaires de la vie. (Livre I, chap. II.)

A côté du Cours de langue il y avait des leçons régulières d'allemand. Elles étaient réclamées par la position de notre ville, où viennent se rencontrer les deux idiomes. A son entrée dans la classe élémentaire l'enfant apprenait à nommer les objets environnants en français et en allemand. Ce n'était là qu'un exercice de mémoire et de prononciation. La lecture de livres allemands, la traduction et l'écriture ne commençaient qu'à la seconde classe de l'école1.

1 Les livres de lecture et le matériel nécessaire pour l'écriture et le dessin ne laissent pas d'être coûteux aux parents, lorsqu'ils sont dans le cas de les fournir à des enfants qui très-souvent les gâtent ou les perdent en chemin, outre qu'en venant à l'école ils oublient de les apporter avec eux. Pour remédier à ces inconvénients, l'école même se chargea de procurer tous les livres et tous les objets nécessaires à l'instruction, de les serrer dans les salles et de les distribuer aux moments convenables. En échange elle demanda aux parents aisés une rétribution mensuelle qui était beaucoup au-dessous de la dépense qu'ils faisaient auparavant. Par cette mesure l'école se trouva en état de dispenser les pauvres de toute rétribution.

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