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uns; les autres trouveront, dans les notes et l'appendice, avec les compléments du texte, les autorités et les preuves qu'ils ont le droit de réclamer.

Nous savons mieux que personne tout ce qui manque à l'histoire qui va suivre, pour captiver l'intérêt, et à l'historien qui la raconte et la discute, pour suppléer à cette insuffisance. Nous n'ignorons pas davantage que notre livre renferme des passages et des conclusions qui peuvent déplaire. Mais, si l'on y reconnaît, malgré tous ses défauts, l'œuvre d'un citoyen heureux d'être libre et d'un critique qui préfère la recherche de la vérité au prestige de la tradition, on lui aura rendu le seul témoignage qu'il ambitionne, celui d'être un livre qui répond bien aux sentiments dont s'est inspiré son auteur.

Genève, le 12 décembre 1867.

LES ORIGINES

DE LA

CONFÉDÉRATION SUISSE

PREMIÈRE PARTIE

LES ORIGINES

DE LA

CONFÉDÉRATION SUISSE

PREMIÈRE PARTIE

L'HISTOIRE

Au pied et vers le centre de la chaîne des Alpes, qui forme entre l'Allemagne et l'Italie comme une muraille naturelle, se trouve, du côté du Nord, un lac profondément encaissé et découpé en plusieurs bassins, sur lesquels débouchent trois vallées, que séparent les unes des autres et des contrées voisines cette nappe d'eau ou de hautes et abruptes montagnes. Arrosées par des rivières torrentielles ou par d'insignifiants ruisseaux, partagées à des hauteurs diverses en vallons plus étroits, enfermées entre des pentes sur lesquelles se succèdent, jusqu'à la région des neiges, les prairies, les forêts et les rochers, ces vallées n'offrent que peu d'espace pour la culture des terres, et elles sont même, à cet égard, inégalement favorisées.

Les troupeaux y font les principales richesses, et l'on y

trouve plus de bergers que d'artisans et de laboureurs. L'élève du bétail, l'industrie du laitage, la chasse, la pêche, sont les ressources naturelles de ces pittoresques et sévères régions. Elles ne peuvent être habitées que par des populations robustes, contentes de peu, aux mœurs simples et rudes, où chacun doit savoir se suffire à lui-même et au besoin ne compter que sur soi.

Incessamment aux prises avec la nature, de laquelle ils ont tout à attendre et tout à craindre, les habitants de ces lieux retirés contractent dans cette lutte une sorte d'amour jaloux pour tous les biens qu'ils ont sans cesse à défendre. Ce qu'ils ont arraché aux inondations, aux avalanches, aux orages, aux abîmes, en risquant audacieusement leur vie, ils n'entendent pas le voir menacé ou amoindri par les empiétements d'un voisin ou par les exigences d'un maître. S'il le faut, ils feront aux hommes la guerre qu'ils livrent aux éléments. Dans ce combat contre la nature, ils sentent que, d'un côté, tout dépend de leurs efforts et de leur persévérance, ce qui les rend confiants en eux-mêmes, et que, de l'autre, tout dépend d'une volonté supérieure et divine, ce qui les rend patients et religieux.

Si la vie à l'air libre dans les alpages et dans les campagnes fortifie leur corps, l'uniformité de leurs habitudes donne à leur caractère une sorte de sérénité morale qui conserve et transmet de génération en génération des sentiments et des goûts dont la durée fait la puissance. La simplicité et le peu de variété de leur genre de vie favorisent chez eux l'esprit d'égalité, comme le petit nombre des idées mises en circulation les préserve, ou les prive, plus longtemps qu'ailleurs de l'amour des innovations.

Longtemps réduits, pour tout moyen de communication

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