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blame les fautes, les excès de tous les partis; mais elle repousse, elle condamne ceux qui ont armé des Français contre des Français; et tout lecteur judicieux et sans préventions qui aura suivi la marche des événemens conviendra que dans cette circonstance le parti de la montagne a sauvé la République. Que si cette assertion était contestée, on pourrait d'une part se représenter l'absence de tout gouvernement, ou la création d'une foule d'autorités discordantes, malheureuses imitations d'un pouvoir créé par le besoin d'une unité d'action (1); Paris, Caen, Evreux, Lyon, Bordeaux, Nîmes, Montpellier, Montauban, Marseilles, etc., armant leurs enfans pour la guerre civile, les poussant contre leurs frères, et la France abandonnée sans défenseurs à l'implacable coalition des rois, à l'Anglais perfide, au fanatique Vendéen, à l'ambitieuse aristocratie. De l'autre côté que voit-on? Un centre commun d'où partent des lois énergiques qui frappent les ennemis de l'intérieur, opposent à l'étranger des armées redoutables, déjouent les manoeuvres du cabinet de Londres; on voit tous les citoyens marcher unis sous la même bannière, Doublier les hommes et les réputations, ne combattre, ne respirer que pour la gloire du nom Français.

Qu'une larme soit donnée à ces fondateurs de notre liberté que des erreurs politiques ont successivement conduits sous le glaive de la justice nationale, ou qu'une mort violente a frappés dans la proscription; mais qu'à la voix de la patrie sauvée on garde un sentiment de reconnaissance pour la majorité de la Convention nationale.

En peu de temps l'ordre fut rétabli dans les départemens de l'Eure et du Calvados. On peut rapporter à l'insurrection de ces départemens l'assassinat de Marat. C'est de là qu'une femme, criminellement héroïque, exaspérée par des récits passionnés, s'exagérant l'importance et le pouvoir d'un individu qui n'avait d'autres complices que ses affreux pamphlets, d'autre politique qu'une froide et persévérante cruauté, qui à son insu servait à tous les partis,

(1) Des comités de salut public s'étaient établis dans plusieurs villes.

et que tous les partis repoussaient après l'avoir chargé de leurs iniquités; c'est de Caen que partit Charlotte Corday pour apporter la palme du martyre à cet individu trop fameux, et dont la destinée semble avoir été d'avilir également les hommes aveuglés qui se sont proclamés ou ses partisans ou ses ennemis; tous se sont déshonorés, les uns en lui décernant l'apothéose, les autres en outrageant à ses cendres.

Mais Lyon résistait. Une immense population, laissant à des factieux la direction de son courage et l'emploi de ses richesses, s'exposait à subir un siége dont les horreurs seront éternellement reprochées aux suborneurs de l'opinion dans cette seconde ville de l'empire, à ce prétendu congrès départemental qui par des décrets ridiculement atroces mettait hors de la loi la majorité de la Convention nationale, et vouait à l'exécration les citoyens des tribunes.

Ainsi les girondins dans leur chute avaient ébranlé plusieurs départemens ; d'autres étaient ensanglantés par les factions aristocratique et sacerdotale; l'Anglais soufflait ailleurs le feu de la discorde, et donnait des primes à la trahison ce sont toutes ces circonstances que le rapport suivant embrasse.

RAPPORT fait au nom du comité de salut public sur la situation de la République, et sur les manœuvres du gouvernement anglais; par Barrère. ( Séance du 1er août 1793.)

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Citoyens, les vrais représentans du peuple ont vu depuis longtemps avec un courage imperturbable se former la conjuration impie qui, d'une extrémité de l'Europe à l'autre, a menacé de renverser la liberté et les droits imprescriptibles de la nation française.

» Les époques sont faciles à rappeler : ce sont des pierres déposées par la liberté sur la route escarpée de la révolution, et cette route, sur laquelle les voyageurs politiques ne rétrogradent jamais sans péril, doit être présente à vos yeux plus que jamais dans les circonstances actuelles. 10 août 1792 le canon ouvrit la route.

» Le

» Le 21 septembre la Convention marqua sa naissance et sa destinée par la proclamation de la République.

» Le 21 janvier 1793 la République, proclamée, s'affermit par la mort du tyrau.

» Le 2 juin l'horizon politique, surchargé des vapeurs du fédéralisme et de l'anarchie royale, s'éclaircit; la foudre popu laire frappa quelques têtes orgueilleuses, et paralysa des mains intrigantes.

» Le 23 juin la République fut constituée, et les espérances du peuple s'attachèrent à l'arche sainte de l'alliance des départemens et de la fraternité des Français à la Constitution.

» Enfin le 10 août, qui s'avance, la statue de la liberté républicaine, dont la fusion a été si laborieuse, sera solennellement inaugurée sous les regards du législateur éternel, par les vœux unanimes des assemblées primaires d'un peuple que la guerre, que tous les fléaux, que toutes les trahisons mêmes poussent impérieusement à l'indépendance.

» Encore dix jours, s'écrient les bons patriotes, et la République sera votée par vingt-sept millions d'hommes! Encore dix jours, et d'une voix unanime, sortie de toutes les parties de la France, et qui se fait entendre même du fond de la Vendée et des départemens égarés ou rebelles, comme du milieu des départemens fidèles et républicains; une voix unanime répond: Liberté, égalité, voilà nos droits! Unité, indivisibilité de la République, voilà nos maximes! Une Constitution et des lois, voilà notre bonheur! La destruction de la Vendée, la punition des traîtres, l'extirpation du royalisme, voilà nos besoins! La réunion franche et prompte de toutes nos forces contre les ennemis communs, voilà nos saints devoirs et le seul gage de nos succès!

» Ce cri de ralliement a été entendu dans les camps ennemis, au dedans et au dehors de la République : aussitôt tous leurs efforts ont été subitement tournés vers les moyens de retarder ou de flétrir cette époque si désirée et si nécessaire du 10 août prochain.

Votre comité de salut public s'est placé en observation, en dirigeant tous ses regards vers ce port fortuné où la liberté nous attend pour célébrer ses triomphes.

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Qu'a vu votre comité dans l'intérieur de la République ?

> Tous les vents semblent porter l'orage pour cette journée ; tous les cœurs pervers ont ourdi des trahisons; tous les gouvernemens ont soudoyé des crimes; les royalistes ont préparé autour de nous et dans le centre commun une famine artificielle; les capitalistes ont amené subitement le surhaussement du prix de tous les premiers besoins de la vie ; les agioteurs ont dégradé les signes de la fortune publique; les villes maritimes et commerçantes ont tenté d'avilir la monnaie de la République; les administrateurs se sont érigés en agitateurs du peuple; quelques fonctionnaires publics, appelés à préparer des lois, ont voulu figurer comme des arbitres de la paix et de la' guerre; le fanatisme religieux multiplie ses imbéciles prédictions; une sainte ampoule est portée dans la croisade ridicule de la Vendée pour oindre Louis le dix-septième; la manie nobiliaire a employé les métaux qu'elle entasse pour frapper une médaille qu'elle appelle, en idiome étranger, gallicæ nobilitatis signum....

>>

Qu'a-t-il vu sur les frontières ou dans la Vendée ?

» Dans les villes assiégées des capitulations proposées par la lâcheté; des trahisons préparées par quelques chefs; une coupable inertie présentée par quelques autres; des désorganisateurs salariés au milieu des troupes les plus belliqueuses, des prédicateurs d'indiscipline et de pillage tolérés au milieu de bataillons républicains; des dilapidations scandaleuses ou des négligences coupables dans les diverses administrations des armées.

» Avec de pareils élémens comment pourrait-on compter sur des victoires?

>> Sans doute la Convention nationale travaille constamment à déjouer tant de manœuvres ; elle ne souffrira pas que, par des vues aussi horribles et des moyens aussi affreux, on l'écarte du vaste plan qu'elle a conçu, la République française et la paix de l'Europe! Vous nous avez associés plus particulièrement à vos travaux : le comité vient, au milieu des événemens les plus sinistres et des complots les plus multipliés, vous déclarer que par des mesures qu'il vous présente, et par une exécution prompte, confiée à toutes les autorités constituées, vos pro

messes faites au peuple français ne seront pas vaines, et que les difficultés, les piéges, les complots, les menaces, les terreurs ne retarderont pas sa marche, et n'affaibliront pas un instant son courage.

que

» Mais il faut prendre à la fois des mesures vastes, promptes, et surtout vigoureuses. Il faut que le même jour vous frappiez l'Angleterre, l'Autriche, la Vendée, le Temple et les Bourbons! Il faut qu'au même instant les accapareurs, les royalistes et les agens des puissances coalisées soient accablés ! Il faut la terrible loi de représailles soit enfin exécutée sur les étrangers qui, abusant de l'hospitalité, la première vertu d'un peuple libre, viennent le corrompre, paralyser ses moyens, ou tramer des perfidies au milieu de nous! Il faut que l'Autriche frémisse! que la royauté soit extirpée dans ses racines! que la Vendée soit comprimée par des moyens violens, et que nos frontières cessent d'être déshonorées par des hordes barbares!

» Où est donc le danger si grand? affecteront de dire les ennemis constans, ces modérés, spectateurs inutiles de la révolution,

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Citoyens, vous avez la confiance du peuple; vous devez avoir la conscience de vos forces : c'est un grand œuvre que la fondation d'une République, et vos âmes doivent être inaccessibles au découragement comme à la crainte.

» Hé bien, apprenez que le danger est pressant, universel, et incalculable! Mayence a capitulé ; Valenciennes vient de subir la même honte, et une conspiration horrible couvre le sol de la ' République, et menace d'en attaquer, d'en dissoudre toutes les parties!

>> Où est le danger! dira-t-on. Le danger est pour les places frontières, où l'étranger gangrène les cœurs, où la perfidie a préparé ses armes, où la lâcheté dicte des capitulations, où la bravoure de Lille n'est pas imitée, où la honte de Longwi n'est pas un effroi!

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Le danger est pour nos ports, nos arsenaux, nos établissemens publics, trop faiblement surveillés, trop facilement ouverts aux complots des malveillans, et aux mèches incendiaires de nos ennemis éternels, les Anglais!

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