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que pour difcerner, dans ces débats difficiles, le vrai fens des textes allégués de part & d'autre, on a befoin d'une régle bien affurée; & où fera-t-elle s'il faut que chacun s'en rapporte à son opinion? LE PROTESTAN T.

Je fens bien, Monfieur, toute la force de vos raisons, & je ne fais pas ce que nos miniftres pourroient y répondre : c'eft un point dont je ne les ai jamais entendu parler.

LE DOCTEUR.

Preffés par l'évidence, ils font enfin. convenus qu'ici la raifon ne fe fuffifoit point à elle-même, que pour discerner avec certitude le vrai fens des textes difficiles de l'écriture, on avoit befoin de quelque affiftance du faint Efprit: mais cet aveu n'a fait que manifefter leur embarras, fans les en tirer.

Les uns ont prétendu, avec le miniftre. Claude, comme je viens de vous le dire, que cette affiftance confiftoit dans un certain goût, un inftinct infpiré par l'Esprit faint, pour difcerner le véritable sens des textes.

*

Les autres ont eu recours à une infpiration immédiate, accordée par l'Efprit faint, foit à tous ceux qui cherchent fincérement la vérité, foit felon quelques

uns, aux feuls prédestinés: mais on fent bien que ce font là des allégations gratuites & fans fondement.

Pour rendre tout ceci plus fenfible, fuppofons qu'au commencement du quatrieme fiecle, & avant la décifion du concile de Nicée, un arien & un catholique entrent en difpute fur la divinité du verbe. L'arien se fonde fur ce paffage Le pere eft plus grand que moi (a), & il en conclut que le pere & le fils ne font pas un même Dieu.

Le catholique interprete ce texte, feulement de la nature humaine, felon laquelle effectivement le fils eft moindre que le pere; mais l'arien perfiste à vouloir l'entendre du fils, quant à fes deux natures, parce qu'il a dit fans diftinction que le pere étoit plus grand que lui.

Le catholique à fon tour lui allegue cet autre paffage, Mon pere & moi nous ne fommes qu'un (b): mais l'arien l'interprete d'une union non pas de nature mais de confentement, de bon accord dans le même fens que Notre Seigneur. difoit en priant fon pere pour fes difci ples: Faites mon pere, qu'ils foient un entr'e eux , comme nous fommes un vous &

(a) Joan. 14. 28. (b) Ibid. 10. 30.

moi (a), c'est-à-dire qu'ils foient toujours dans une parfaite union.

Ils auroient pu difputer toujours ainfi fans jamais s'accorder, & fans avoir ni l'un ni l'autre de certitude, fi le concile œcuménique de Nicée, tenu en 325, n'avoit pas décidé la question.

Pour nous rapprocher davantage de notre tems, faifons entrer en lice un luthérien qui croit la préfence réelle de Jésus-Chrift au facrement de l'eucharistie, & un facramentaire qui la nie.

Le luthérien la prouve par ces paroles de l'institution de ce facrement, Ceci eft mon corps, ceci eft mon fang.

Le facramentaire lui répond que comme la chofe eft impoffible, il faut entendre ces paroles dans un fens figuré, comme celles de ces autres textes, où Jésus-Chrift dit de lui-même, Je fuis la porte, je fuis le fep de vigne.

Après avoir long-tems difputé fans avoir rien éclairci, ils fe quitteront avec des doutes. « Je crois, » fe dira en luimême le luthérien, « que les termes de » l'inftitution doivent être pris dans le » fens littéral : c'étoit l'opinion de Lu

ther; mais je fais que Zuingle a été » d'avis contraire, & que cet avis domine

(c) Joan, 17. 11.

» aujourd'hui dans les églifes proteftantes; » au fond aucun d'eux n'étoit infaillible; »je ne le fuis pas non-plus; il me refte » fur ce point du doute; je penche pour » cette opinion, mais je n'en fuis pas » fûr. »

Le facramentaire dira de même : « J'en » fuis pour le fens figuré : cependant je » fais que Luther notre fondateur n'a » jamais pû le goûter, que les luthériens » font encore en très-grand nombre, que » les catholiques n'ont jamais varié fur ce »point, & qu'ils prétendent démontrer

qu'il n'y a jamais eu à cet égard d'autre » croyance parmi les chrétiens, depuis » les apôtres, jufqu'aux facramentaires. » Tout cela me frappe, me laiffe du doute; » je refte dans le fentiment qu'on m'a » enfeigné, mais au fond je n'en fais rien. »

Voulez-vous avoir de la certitude? en voici le feul moyen: oppofez au facramentaire un catholique. « Croyez-vous, » lui demande le facramentaire, « que le » corps de Notre Seigneur Jésus-Chrift » foit véritablement préfent au facrement » de l'euchariftie? Oui je le crois, répond le catholique. -« Pourquoi le >> croyez-vous? Parce que je le trouve » dans l'écriture: Ceci eft mon corps. Et » comment favez-vous que ces termes » doivent-être pris dans un fens de réalité,

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» & non dans un fens de figure? - Je » le fais parce que l'églife l'enfeigne, & » qu'elle l'a même expreffément décidé » dans le concile œcuménique de Trente.

» Sur ce point, » reprendra-t-il, « il » ne me reste aucune incertitude, aucune > crainte de me tromper, parce que je

me fonde fur la parole de Dieu inter» prétée par l'églife qu'il a chargée d'en » fixer le fens, & à qui il a promis pour » cela fon affiftance perpétuelle jusqu'à » la fin du monde.

» Je fuis prêt à donner pour cette croyance mon fang & ma vie. Vous » ne les donneriez affurément pas pour >> foutenir votre fyftême du fens figuré, >ni votre confrere le luthérien pour fou» tenir la préfence réelle, & au fond vous » ne devriez pas le faire, parce que de » votre part ce ne font que des opinions » douteufes qui ne peuvent donner une » foi certaine, ni par conféquent la foi » que Dieu a établie pour être le principe » de la juftification & du falut.

» Mais fi fur cet article vous n'avez » pas une foi certaine, vous ne l'avez fur » aucun autre, puifque ne reconnoiffant » plus l'autorité de l'églife pour détermi» ner le vrai fens de l'écriture, vous n'a» vez fur tous les articles de la religion

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