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Cette lecture est plusieurs fois interrompue par les plus vifs applaudissemens. L'assemblée ordonne que ce pacte sera inséré dans le procès-verbal, et imprimé pour être envoyé dans toutes les provinces.]

Il faut encore mentionner un incident remarquable, non par son retentissement, inais par son originalité, qui eut lieu au commencement de la séance du 29 : nous en empruntons le récit au Moniteur.

[On remarque, parmi différentes adresses d'adhésion, reconnaissance, etc., celle de la ville de Lagnon, dans laquelle il est dit qu'une mère de famille a rassemblé ses dix enfans, et a juré devant Dieu, avec eux et pour eux, d'être fidèle à la nation, à la

loi et au roi.

M. Goupil de Préfeln. Nous savons tous, Messieurs, combien est grande, noble, auguste, la magistrature des mères de famille. Elles ont sans doute plus de droit à la vénération publique que les femmes qui n'ont point eu le bonheur de la fécondité. Les mères sont les premiers précepteurs des enfans; leurs exemples et leurs conseils peuvent faire des citoyens, ou des hommes qui ne le seront pas. Je demande qu'il soit décrété que toute femme mariée, d'une conduite honnête, sera admise à l'honneur de prêter le serment civique dans les mains des municipalités.

On demande l'ajournement de cette motion.

M. Bouche. L'assemblée ne peut ajourner un décret qu'elle a déjà consacré par le fait Rappelez-vous, Messieurs, cette journée où le roi vint au milieu de vous; rappelez-vous que vous prêtates tous, après l'avoir entendu, le serment civique; n'ou⚫bliez pas aussi que toutes les citoyennes qui se trouvaient alors

dans la salle furent admises à prêter le même serment: le procèsverbal du 4 février fait foi de ce que j'avance. Je demande que la motion de M. Goupil de Préfeln ne soit point ajournée.

L'ajournement est encore demandé; il est mis aux voix et décrété.]

L'ardeur révolutionnaire, d'ailleurs, ne diminuait point dans

les provinces. On lit dans les journaux qu'en Bretagne, on avait encore brûlé quelques chartiers seigneuriaux, insulté des châteaux. Dans le Limousin, dans la Haute-Guyenne, les paysans imitèrent la conduite des provinces voisines; ils se mirent à effacer à leur manière, les traces des servitudes féodales; l'acte décisif de la libération, à leurs yeux, était comme partout ailleurs, la destruction des chartes où étaient écrits les droits de leurs seigneurs. Cela ne pouvait avoir lieu sans qu'il y eût résistance en plus d'un lieu, et violence. La bourgeoisie de quelques villes, vit dans ces mouvemens des campagnes, un désordre qu'elle crut devoir réprimer. Elle fit sortir ses gardes nationales. Les villes de Tulle et de Brives se distinguèrent dans ce dévouement pour l'ordre; il y eut des engagemens assez vifs; il y eut quelques paysans tués, un grand nombre de blessés. Dans un de ces combats, on tua dix de ces malheureux, et on en blessa un plus grand nombre. Dans ces affaires, les habitans des campagnes avaient toujours le dessous ; ils n'étaient guère'armés que de bâions et de fourches, tandis que leurs adversaires avaient des fusils et de la discipline.

Le patriotisme se témoignait par toutes les voies qu'il pouvait ouvrir. Le 7 mars, il y eut à Epinal une fédération de la milice nationale des Vosges. Les députés de diverses communes représentant 80,000 habitans, se prétèrent serment de défendre la constitution. Ce fut une fète qui dura trois jours. En Alsace, en Champagne, comme en Franche-Comté, on imitaît cette conduite; et ces provinces se fédéraient, se promettant entre elles de fournir cent cinquante mille combattans pour la défense de la révolution. Mais, devant ce grand spectacle, dit un journal, que font Metz et Nancy? Pourquoi ce silence? pourquoi cette inaction?.... › (Annales patriotiques). Une réunion semblable eut lieu à Orléans pour les gardes nationaux des environs.

L'organisation des municipalités, les réunions des citoyens électeurs, qui avaient lieu par toute la France, devinrent une nouvelle occasion pour la manifestation de l'esprit public, et après laquelle il ne put rester de doute sur l'opinion nationale.

2. On remarqua que, dans presque toutes les communes, le pouvoir municipal fut remis à des patriotes; ce fait fut même d'autant plus tranché, que le pouvoir local avait été antérieurement plus aristocratique. En outre, la plupart des réunions électorales terminaient leurs opérations par une adresse d'adhésion à l'assemblée nationale. Aussi il en arrivait chaque jour à Paris par centaines.

Dans beaucoup de lieux, on témoigna autant de doutes pour le ministère qu'on montrait de confiance pour les législateurs. Le ministre avait nommé des commissaires pour présider à l'organisation des départemens et des municipalités. On les reçut en général avec défiance, en sorte qu'il fallut que l'assemblée intervînt par un décret commandant de leur obéir, et fixât la nature, les limites et la durée de leurs fonctions.

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L'esprit insurrectionnel s'était étendu jusque dans nos colonies des Antilles. Saint-Domingue s'était créé une assemblée provinciale composée des membres élus parmi les blancs; l'assemblée s'était saisie de tous les pouvoirs constituant et exécutif; elle avait organisé une milice. Le but de cette insurrection est caractérisé par deux faits: elle fit arrêter et emprisonner un M. Dubois, pour avoir dit que l'esclavage des nègres était contraire aux lois chrétiennes et au droit naturel : elle déclara en outre, dans les discussions qu'elle éut à ce sujet avec l'ex-gouverneur et son conseil, qu'elle ne tenait à la métropole qu'à certaines conditions. Cependant, le gouverneur ordonna que M. Dubois fût remis en liberté sans pouvoir l'obtenir. De part et d'autre on écrivit en France. La nouvelle de ces événemens causa une grande rumeur dans les villes maritimes de France. La Martinique s'était également insurgée, et elle avait ouvert ses ports aux étrangers. Il fallait donc que l'assemblée s'occupât de suite de ces colonies. En effet, rapport lui fut fait sur ces événemens le 2 mars. Par suite, on nomma un comité colonial de douze membres, qui en quelques jours eut rédigé un projet d'instruction pour les colonies, qui était encore en discussion à la fin du mois dont nous faisons l'histoire.

Le caractère de ces événemens donna une nouvelle ferveur aux amis des noirs. Depuis plusieurs mois, il s'était formé un club sous ce nom, dont Brissot faisait partie. Il avait publié plusieurs brochures pour l'abolition de la traite : ils adressèrent, le 4, une pétition à l'assemblée nationale dans ce sens ; mais celle-ci n'avait pas le temps de s'en occuper. Cette société, au reste, avait été établie à l'imitation de ce qui existait à Londres; et, en ce mo ment même, le parlement anglais s'occupait de l'abolition de la traite. Mais examinons ce qui se passait à Paris, ce second élément du mouvement parlementaire de la révolution.

Paris. Les représentans de la commune continuaient à tenir des séances publiques à l'Hôtel-de-ville; mais, elles n'avaient plus cet intérêt dramatique qu'elles présentaient alors que la capitale était livrée à l'insurrection. Elles étaient en général, occupées d'intérêts locaux, de questions réglementaires et financières. Nous avons vu la proposition pour l'achat des biens du clergé. Cette affaire remplit plusieurs séances. Cependant, au milieu de l'aridité de ces occupations, il y eut plus d'un fait à noter. La commune reçut communication d'un assez grand nombre d'adresses de gardes nationales de provinces à la garde nationale de Paris, avec proposition d'affiliation; elle n'en rejeta aucune. Il semblait qu'elle voulût réaliser, sans l'avouer, un projet présenté par l'abbé Fauchet, vers le milieu de février. Il avait proposé d'unir toute la milice par un pacte fédératif, et de donner le commandement de l'union au général la Fayette, commandant de Paris. Cette proposition fut rejetée. En effet, on y vit le danger de substituer au pouvoir royal, un pouvoir exécutif nouveau ; cependant on continua les affiliations. En même temps, l'abbé Fauchet émit un autre projet semblable quant au fond, quoique différent dans la forme. Il n'y avait peut-être aucune des députations qui étaient envoyées d'une province à la constituante, qui ne fût chargée d'une adresse particulière pour la ville de Paris. Si l'on promettait dévoûment à l'assemblée nationale, on jurait assistance et fraternité à la capitale. Prenant texte de cet usage, Fauchet proposa d'établir une fédération entre tous les

municipes de France; fédération dont la tête serait la municipalité parisienne. Cette proposition resta encore une simple tentative.

Le premier de ces deux projets fut repris à l'occasion de la députation de Bretagne que nous avons vue à la barre de l'assemblée le 20 mars, et qui alla encore se présenter à la commune de Paris. M. Broussonnet ouvrit l'avis qu'on invitàt toutes les armées citoyennes de France à envoyer chacunc un homme sur mille à Paris, pour y prêter le serment d'union devant l'assemblée nationale et le roi. Cette motion fut ajournée; mais l'auteur persistant, déclara qu'il la proposerait aux soixante bataillons de la capitale. Au reste, la municipalité ne se faisait faute d'administrer au-delà des limites que nous fixerions à un pouvoir de ce geure. Nous avons sous les yeux les procès-verbaux manuscrits de son 'petit conseil qu'on appelait bureau de la ville; et nous y voyons qu'elle commandait des fabrications de poudres; qu'elle en ordonnait des envois; qu'elle continuait d'exercer la censure sur les pièces de théâtro, etc.

La principale affaire des 300 représentaus était la formation du projet de loi pour la municipalité de Paris, qu'elle devait présenter au comité de constitution de l'assemblée nationale. Sur la réclamation presque unanime des districts, ils avaient été appelés à l'examiner. En conséquence, ils avaient nommé chacun deux députés qui s'étaient réunis en comité, à l'archevêché, et leur préparaient le travail, les consultant ou passant outre, selon qu'il y avait lieu. Danton en faisait partie, et y exerçait la plus grande influence. Dans cet examen, il se présenta une question qui mit en rumeur tous les districts. Il s'agissait de savoir si les districts de Paris resteraient ce qu'ils étaient, ou seraient de simples assemblées électorales, se séparant aussitôt les élections terminées, ainsi que cela avait été décidé pour le reste de la France. La majorité réclama la permanence des districts. Ce fut une grande affaire qui remua tous ceux qui prenaient quelque part aux affaires de la commune. On chercha à opposer l'opinion de la garde nationale à celle des citoyens réunis dans leurs assemblées ; mais ce

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