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Etats de l'empire, dès l'ouverture de la guerre dé- | clarée à la France. La victoire d'Austerlitz, moins de deux mois après les premières hostilités, décida la question en faveur de Napoléon, et la paix de Presbourg consomma la ruine de l'empire germanique. A dater de ce moment, les esprits des hommes d'Etat habiles dùrent changer de direction. Jusque-là on ne s'était nourri que d'une seule idée, l'espoir de frapper de mort l'ascendant français; Marengo et Austerlitz étaient de terribles leçons; on ne songea plus qu'à le régulariser et à le faire tourner au profit des nouvelles combinaisons politiques. Un rôle tout différent du premier était maintenant tracé à l'électeur archi-chancelier. Joseph Il avait blàmé avec lui les hommes d'État à courte vue qui sacrifièrent trop souvent à l'anglomanie, à la gallomanie, à la prussomanie, et à l'austromanie. Il mit de côté toutes ces prédispositions d'esprit, et considéra mûrement ce qui, dans les circonstances présentes, convenait véritablement à l'Allemagne. Déjà, avant la révolution française, l'agrandissement démesuré de la maison de Brandebourg avait rompu le sceptre impérial dans les mains de l'Autriche ; qu'allait devenir la puissance impériale quand l'Autriche, dépossédée des Etats de Venise, de la Dalmatie et de l'Albanie, voyait les nouveaux rois de Bavière et de Wurtemberg, et le nouveau grand-duc de Bade, devenus souverains indépendants, s'agrandir des vastes territoires qu'elle était forcée de leur céder? D'autres temps demandaient d'autres combinaisons; et la confédération rhénane fut une de ces combinaisons que réclamait plus encore peut-être la sécurité de l'Allemagne, que l'ascendant dominateur de la France. Dans les premiers moments qui suivirent la victoire d'Austerlitz on aurait pu penser que Napoléon avait conservé quelque rancune contre l'électeur archichancelier pour la vivacité de sa proclamation. C'eût été mal le connaître; il comprenait les devoirs tracés par les positions diverses, et il ne fit que l'en plaisanter avec amitié. «Quant à moi, sire, « lui dit l'électeur, je n'ai rien à perdre, car vous « m'avez déjà mis à la diète et à l'eau, » voulant parler de la présidence de la diète qui lui avait été dévolue, avec un complément de revenus sur l'octroi du Rhin. Il continua, sous le titre de princeprimat et de prince souverain de Ratisbonne, Aschaffenbourg, Francfort et Wetzlar, à présider les deux colléges créés par l'acte fédéral, et particulièrement le premier collége, dit des rois, comme il avait présidé la diète de Ratisbonne en qualité d'archi-chancelier de l'empire. L'empire avait désormais disparu, l'empereur d'Allemagne avait abdiqué pour prendre le titre d'empereur d'Autriche, et Napoléon venait d'être investi de toutes les prérogatives du protectorat. A ce titre incertain et vague de protecteur le prince-primat désirait en substituer un autre dans l'intérêt de l'unité allemande, et il voulait, ainsi que beaucoup de princes allemands, que Napoléon se déclarât empereur d'Occident; mais Napoléon refusa un titre électif ancien

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qui lui semblait soumis à des limites ou à des chances que ne lui paraissait pas avoir le titre d'empereur français. Le but du prince-primat était de conserver par là à l'Allemagne un lien d'existence nationale auquel pourraient constamment rester attachés tous les États de race allemande. Dans ce système on n'eût fait que substituer le protectorat français au protectorat autrichien, et l'Allemagne fût restée organisée en corps de nation. Napoléon de son côté préférait, dans l'intérêt à venir de la France, l'existence de trois États divisés, comme l'étaient la Prusse, la Confédération rhénane et l'Autriche, à un corps unique, aussi redoutable que pouvait l'être, sous ses successeurs, l'Allemagne réorganisée sous le titre d'empire d'Occident, avec toutes les forces qu'allaient lui donner les réformes administratives et sociales du système français. Quoi qu'il en soit de la diversité de ces points de vue, il faut dire, à l'honneur du prince-primat, qu'en adhérant à la confédération du Rhin sans l'avoir provoquée, et en conservant du moins ce simulacre d'unité germanique au milieu de la dissolution de toutes les autres nationalités, il se soumit à une nécessité évidente, et qu'il obtint réellement pour lui et pour le corps germanique tout ce qu'il était possible d'obtenir. Autant il avait montré d'ardeur à encourager à fortifier les trois premières coalitions, autant, après la dissolution de l'empire, il désapprouva toute séparation, tonte hostilité contre la France. Dans l'impossibilité où il se vit de faire adopter à Napoléon ses plans de conservation de la grande unité allemande, il comprit qu'il ne restait plus aux princes allemands qu'un noble rôle à jouer ; c'était de bien gouverner leurs peuples, d'introduire partout de sages réformes, et de préparer aux gouvernements des forces dans l'avenir, en se réconciliant dans le présent avec les peuples et en étendant leur prospérité. A peine en possession de la ville de Francfort, il lui donna de son plein gré, dès le 10 octobre 1806, une constitution qui pût servir de garantie contre lui-même. Prince de l'Eglise catholique, il mit sur le pied de la plus parfaite égalité les trois cultes chrétiens, le catholique, le luthérien et l'évangélique, et leur enseigna à tous une tolérance inconnue, en prenant les juifs sous sa protection. Il organisa les tribunaux de justice sur un meilleur mode; il investit le sénat de Francfort d'un pouvoir très-étendu; il fonda la caisse d'amortissement pour l'extinction des dettes contractées avant lui; il évita de fixer lui-même sa résidence dans cette ville pour ne pas blesser l'esprit d'indépendance de ses habitants, et consacra toujours à l'embellissement de Francfort toute la part d'impôts qui lui revenait en sa qualité de souverain. Aussi la ville prit-elle bientôt un grand accroissement. Ses remparts, si malpropres et si inutiles, devinrent des promenades délicieuses; le quartier des juifs cessa d'être fermé par des chaînes; les juifs, affranchis d'un honteux tribut, purent habiter indistinctement tous les quartiers, et assainir, en l'élargissant, celui qu'ils habitaient auparavant. Une

nouvelle diète à constituer, et elle eût appuyé, en

cinquième coalition continentale vint troubler le prince-primat au milieu de ses occupations pacifi-même temps que la Russie, la conservation du sou

ques. L'Autriche avait appris le désastre de Baylen et l'espérance lui avait fait prendre les armes. Ratisbonne, la principale ville des États du princeprimat, fut successivement prise et reprise; mais la bataille de Wagram fixa encore une fois la fortune dans le camp français, et la paix fut signée à Vienne. La Bavière, maltraitée par l'Autriche, reçut un agrandissement propre à faciliter désormais sa résistance. Outre le pays de Salzbourg et une meilleure frontière sur l'Inn, ajoutés au Tyrol, qu'elle possédait déjà depuis la paix de Presbourg, elle reçut la ville de Ratisbonne. Le prince-primat fut indemnisé par le grand-duché de Francfort, qui outre cette ville et son territoire, se trouva composé de la principauté d'Aschaffenbourg, du comté de Wetzlar, des principautés de Fulde, de Hanau et de plusieurs seigneuries contenant en tout 300,000 habitants. La souveraineté du grand-duché de Francfort fut déclarée temporelle, et le choix fait par le prince-primat, en 1806, du cardinal Fesch pour son successeur, fut annulé, et le prince Eugène Beauharnais déclaré successeur du grand-duc actuel, par décret impérial du 1er mars 1810. La reconnaissance que Charles Dalberg conserva à Napoléon pour cette bienveillance continue envers lui et envers les deux branches de sa famille, dotées, l'une d'une souveraineté représentée à la diète (le prince de la Leyen), l'autre d'un duché et de 200,000 livres de rente annexées à la cession de Ratisbonne à la Bavière, influa plus tard sur son propre avenir. Ce fut en effet ce sentiment de reconnaissance envers Napoléon, auquel, seul des souverains ecclésiastiques, il avait dû sa conservation, qui, malgré l'exemple de tant de défections, guida constamment sa politique, non-seulement après les désastres de Moscou, mais même après la bataille de Leipzig. I n'apprit pas plus tôt la triple alliance, qu'il prévit la réaction qui allait s'opérer. Entrevoyant la destruction de l'ordre de choses établi en Allemagne à la suite de l'acte de la confédération rhénane, il ne voulut pas contribuer à sanctionner par sa présence ce que sa raison n'eût pu que désapprouver. Mais les peuples allemands, longtemps opprimés, ne songeaient qu'à reconquérir leur nationalité. Trois semaines avant la bataille de Leipzig, le grand-duc de Francfort quitta sa résidence d'Aschaffenbourg et se rendit à Zurich, Constance et Lucerne, afin de ne pas se trouver, lui homme de paix, au milieu du tumulte des armes. En vain le comte de Nesselrode, qu'il avait fait élever chez lui, lui fit-il savoir de la part de l'empereur Alexandre qu'il ne devait pas quitter ses États, et que, s'il y rentrait, il serait certainement conservé dans sa souveraineté ; l'exemple du roi de Saxe, retenu prisonnier, était pour lui une leçon toujours présente. Il paraît toutefois certain que, s'il eût dès lors adhéré aux propositions des alliés, il aurait conservé ses États ou un équivalent sur la rive droite du Rhin. La Prusse craignait de voir l'Autriche prendre la présidence de la

verain qui, comme électeur archi-chancelier et comme prince-primat président du college des rois, avait mérité l'estime des gouvernants et des gouvernés. La présidence entre les mains d'un souverain peu puissant n'eût effrayé la jalousie d'aucun autre, et l'Autriche elle-même n'eût pu s'y refuser sans mettre trop à découvert ses projets d'ambition; mais le grand-duc de Francfort ne voulut pas sacrifier les austères devoirs de la morale à des vues d'intérêt personnel. Il voulut prouver à un ami malheureux qu'il lui conservait les mêmes sentiments qu'aux plus beaux jours de ses victoires; et, au moment où chacun cherchait à renier les affections et les démonstrations passées, il abdiqua, par une lettre, écrite le 30 octobre 1813 au roi de Bavière, seul des souverains qui eût adhéré aux alliés, le grand-duché de Francfort, en faveur de son successeur désigné, le prince Eugène Beauharnais, gendre de ce roi qui, mieux qu'un autre, pouvait en ce moment le soutenir, et il déclara se contenter des revenus de son archevêché de Ratisbonne. Il profitait sur ce dernier point d'un de ses propres actes de justice. En effet, au moment de la séparation, en 1810, de ses deux autorités, temporelle de Francfort et spirituelle de Ratisbonne, il avait exigé que l'archevêché de Ratisbonne restàt investi d'une dotation convenable, et c'était cette dotation, préparée dans les intérêts de l'église de Ratisbonne, qui allait devenir le seul revenu qu'il conservât dans sa retraite. L'Autriche, la Russie et la Prusse, ayant occupé Francfort, s'étaient hâtées d'y nommer un gouvernement provisoire, sans tenir compte de l'approbation donnée d'avance par elles-mêmes au choix du prince Eugène, comme successeur. Le grand-duc Charles n'en persista pas moins dans son abdication; il quitta la Suisse pour aller prendre possession de son archevêché de Ratisbonne, où il arriva le 5 janvier 1814. Le congrès de Vienne s'ouvrit pour la distribution des territoires reconquis sur l'empire français. Le prince-primat mit la plus vive insistance dans les réclamations qu'il lui adressa en faveur des fonctionnaires et pensionnaires de son grand-duché. Satisfaction lui fut enfin donnée, et les pensions méritées au service de l'État furent garantics. Retiré dans son archevêché de Ratisbonne, il ne s'occupa plus que de soins religieux et littéraires. Il écrivit en langue française des mémoires sur les points les plus curieux de sa vie et en fit don à un ami; enfin il refondit sur un plan nouveau, et aussi en langue française, son ouvrage sur l'Univers. Il eut le bonheur de trouver dans son grand vicaire, le baron de Wessemberg, un homme d'une âme supérieure, qui sut toujours le soutenir et le seconder dans ses travaux comme dans ses bienfaits. Tous deux, catholiques éclairés, se distinguèrent constamment par leur philosophie, leur tolérance, leur juste appréciation de ce qui était du à la raison humaine, sans cesser d'adhérer ferme ment au lien catholique. Le pape Pie VII avait ête

longtemps en correspondance amicale avec le princeprimat. Tous deux avaient appris mutuellement à s'estimer lorsqu'ils vinrent, en 1804, à Paris pour le couronnement de Napoléon et qu'ils eurent de fréquentes occasions de se voir. « L'empereur Na« poléon, dit alors le pape à l'électeur archi-chana celier, est un homme violent. Chaque jour il demande davantage et ne donne aucun repos. Je avais toujours cédant, toujours reculant, toujours « m'affaiblissant, jusqu'à ce qu'enfin je me trouve « au pied du mur et que je ne puisse plus reculer.

Alors je ne céderai pas d'un pas; et je ne le « pourrai pas, ajoutait-il en se promenant avec lui a d'un air agité dans sa chambre. » Plus tard le prince-primat se ressouvint de ces paroles et lorsqu'en 1810 Napoléon commençait avec Pie VII ces discussions qui aboutirent, en 1812, à l'arrestation du souverain pontife, il eut une explication avec l'empereur. Il lui rappela les mots de Pie VII, et chercha à lui prouver la nécessité de renvoyer à Rome le chef de l'Eglise. Il cherchait aussi à arrèter le schisme, en persuadant au pape que ses débats temporels avec l'empereur ne devaient pas avoir d'influence sur l'institution canonique de ceux des évêques qui Ini paraîtraient mériter son suffrage. Mais des deux côtés la voix de la calme raison avait peine à se faire entendre. Aussitôt que le prince-primat eut été atteint par le vent de la mauvaise fortune, des voix s'élevèrent contre lui. On lui reprocha d'avoir contribué, par son exemple, à placer l'Allemagne sous le joug de Napoléon. Des pamphlets injurieux furent publiés au milieu de l'enivrement des récentes victoires. Il ne répondit à aucun. Voici ce qu'il écrivait à ce sujet à un de ses amis le 20 juillet 1814... « La préface et la note, page 60, dirigées contre moi, sont « écrites par M. Schlegel et probablement franci«sées par madame de Staël, deux talents littérai«res éminents, dont j'ai négligé de faire la connaissance personnelle. Une malle, prise par les «cosaques du général Tschernicheff, fournit le fond de l'ouvrage. M. Schlegel était alors secrétaire du prince royal de Suède. Le tout fut d'abord • publié à Londres, depuis réimprimé à Paris. Les inculpations de la note sont faciles à réfuter: 1° Ce n'est pas moi qui ai quitté la cause de l'empereur d'Autriche. Ce monarque consentit, malgré lui, à sacrifier le clergé d'Allemagne et mon € siége de Mayence, convaincu comme il l'était « qu'il ne pouvait l'empêcher. 2° L'année 1805, je "prouvai, dans l'assemblée de la diète de l'empire, « la nécessité de se réunir en masse, selon l'esprit << national de l'Allemagne ; je ne fus pas écouté. L'acte de la confédération rhénane fut signé à « Paris sans que j'en fusse prévenu : ce n'est donc pas moi qui quittai la vieille constitution; je n'avais que le choix de l'anéantissement de mon existence politique ou de devenir utile à l'Alle"magne comme chef du tribunal de Francfort. Je «pris le parti qui me parut le plus conforme au bien public. Les confédérés, préférant leur in

« dépendance absolue, ne remplirent pas leurs en«gagements; ce que je ne pouvais prévoir, parce « que leur salut dépendait de leur intime union. « 3° J'ai constamment agi pour le saint Père avec « zèle et vénération, selon ma conscience. J'espé<«<rais que le chef de l'Eglise pourrait consentir << provisoirement à la confirmation des évêques par « les synodes provinciaux, selon l'ancien usage de « l'Église, plutôt que de compromettre l'existence « de l'épiscopat. Plus tard le pape adopta cette base « d'un nouveau concordat, qui paraissait offrir l'es«poir de la concorde; plusieurs cardinaux s'oppo«sèrent. 4° L'érection du grand-duché de Franc<< fort était un plan dont Napoléon voulait décidé«ment l'exécution. J'avais précédemment réservé « le droit d'élire mon successeur à mon ancien << chapitre métropolitain; mais, selon la loi de 1803, «< ce chapitre s'éteignait successivement parce que « ses fondations étaient sécularisées au profit des << princes territoriaux et que les chanoines de l'an«cienne métropole n'avaient plus que des pensions « viagères. J'insistai fortement, et j'obtins que mes « successeurs dans le grand-duché seraient obligés «de payer annuellement 60,000 florins à mes suc<«cesseurs dans la dignité métropolitaine. J'ai tou« jours pensé que, dans le cas où il s'agirait de <«< choisir entre les moyens de maintenir la dignité << spirituelle de l'épiscopat et la puissance tempo«relle du prince, la première méritait la préfé<«<rence. L'auteur de la note se trompe lorsqu'il « parle de la terreur que j'éprouve, de l'état dé«plorable dans lequel je me trouve. Grâce à Dieu, « la pureté de ma conscience m'a maintenu dans « le calme le plus profond, dans la soumission la « plus sincère à la volonté de Dieu. L'auteur se « trompe quand il me nomme serviteur officieux « de Bonaparte. Je pourrais citer plusieurs person<< nes témoins de mon intrépidité à Munden, à <«< Erfurt, aux Tuileries, à St-Cloud et ailleurs, lors« qu'il s'agissait de lui parler, selon ma conscience, « de justice et de vérité. Je ne puis être ingrat. « Dans les années 1801 et 1802, mes compatriotes « et leurs coopérateurs voulurent détruire mon « existence politique; Napoléon seul la soutint. Je « considère cette énergie de sa part comme un « bienfait pour moi. Depuis cette époque jusqu'à « l'année 1813 s'écoulèrent les plus belles années « de ma vie, heureuse pour moi, par le bien que << produisit mon administration à Ratisbonne, Fulde, « Francfort, Aschaffenbourg. Pour lui prouver ma <«< reconnaissance par l'exposition de vérités utiles, « je lui adressai mon ouvrage sur Périclès, dans « lequel le caractère d'Alcibiade peint les égare<<ments et les dangers d'une ambition sans bornes. « Dois-je réfuter M. Schlegel? J'avoue que ma ré<< pugnance, quand il s'agit de parler publiquement « de moi-même, est invincible, et j'avoue aussi « que je préfère en mon cœur le silence de Socrate « à l'éloquence de Démosthènes... » Ce fut pénétré de tels sentiments que le prince-primat passa ses dernières années dans le calme de son arche

vêché de Ratisbonne. Son intelligence, loin de s'af-
faiblir, semblait chaque jour reprendre de nou-
velles forces, lorsque la mort vint le frapper le
10 février 1817. Le conseiller de légation Kramer,
qui avait été employé près de sa personne, a publié
en 1817 et 1821, sur sa vie politique, deux ouvrages
dont l'un est le développement de l'autre. Un
abrégé de ce mémoire se trouve dans la Biographie
allemande des contemporains. On annonce, comme
devant paraître prochainement en Allemagne, de
nouveaux mémoires plus étendus, suivis d'un choix
de sa correspondance avec divers savants de l'Eu-
rope, et de plusieurs de ses écrits qui survivront
aux circonstances. Le prince-primat a publié un
assez grand nombre d'ouvrages en allemand, entre
autres: 1° Observations sur l'univers, Erfurt, 1777,
in-8°; Manheim, 5e édition, 1805; 2o Écrits acadé
miques, 1778, in-12; 3° Rapports entre la morale et
la politique, Erfurt, 1786, in-4°; 4° Principes de
l'esthétique, de son application et de son développe-
ment futur, avec cette épigraphe: Adde pulchrum
bono, Erfurt, 1791, in-4°; 5° De l'influence des
sciences et des beaux-arts sur le bonheur public,
Erfurt, 1793, in-8°; 6o Des limites de l'action d'un
État sur les membres qui le composent, Leipzig, 1794;
7° Du maintien de la constitution, Erfurt, 1795,
in-4°. En français: 8° Remarques sur le règne de
Charlemagne, Francfort, 1806; 9° Périclès, 1806
et 1812, 1 vol. in-8°; 10° Méditations sur le système
de l'univers; 11° Enfin beaucoup de petits traités
sur différents sujets. Les Mémoires dont nous avons
parlé sont restés manuscrits.
BU-N.

cet état, et il résilia sa prébende en 1787. Avant d'aller se placer sous la discipline de l'égalité universitaire, il se prépara à de sérieuses études, en passant les années 1790 et 1791, avec son gouverneur Ockart, dans la ville de Zurich, renommée alors par le bon choix des professeurs et par la culture de la langue française. Dans l'été de 1791, il entreprit, avec le jeune Escher de Berg, la visite obligée des montagnes des Alpes; mais, sur le col de Balmes, près de Martigny, un accident terrible interrompit son excursion. Echer tomba dans un précipice, et ce ne fut qu'après plusieurs jours de recherches qu'on parvint à retrouver ses restes inanimés. Dalberg vint chercher des consolations dans sa famille qui résidait à Manheim; et sur la fin de l'automne de cette même année, il se rendit à Erfurt pour se former aux travaux administratifs sous le patronage de son oncle le coadjuteur. Là, il suivit les leçons de Lessing et de Buschenmayer, et travailla aux affaires dans le cabinet particulier du coadjuteur. Ce fut à cette époque qu'il prit la croix de Malte. A la rentrée d'automne, ses parents le décidèrent à compléter son éducation par les travaux universitaires, et il se rendit, vers la fin de 1792, à Goettingue pour y suivre les cours de droit civil et de droit public sous les célèbres Putter et Martens. Mais les agitations qui commençaient à ébranler l'Europe se faisaient ressentir jusque dans l'enceinte des universités. L'année 1792 avait été marquée par l'ouverture de la convention nationale, la retraite des Prussiens, l'occupation de Chambéry, de Nice, de Bruxelles, la prise de Nainur, d'Anvers et de Mayence. L'année 1793 s'ouvrait par le procès de Louis XVI et la formation de la première coalition. Toutes les passions fermentaient; tous les gouvernements couraient aux armes. Au milieu de cette activité de toutes les

DALBERG (EMMERICK-JOSEPH FRANK-KEINRICHFÉLIX-DISMAS KAMERER DE WORMS, baron et duc DE), neveu du précédent, naquit le 30 mai 1773, à Mayence, de Wolfgang-Heribert, baron de Dalberg, et d'auguste baronne d'Ullner, tous deux les derniers descendants de cette branche des Dalberg qui pos-imaginations, un esprit aussi impatient que celui sédait en fief immédiat de l'empire la seigneurie de Dalberg ne se prêtait qu'avec peine à la calme d'Herrnsheim avec ses dépendances d'Abenheim, régularité des études classiques. Ainsi que tous les Hessloch et Gabsheim. Si ses revenus et sa puis-jeunes gens, il prit son désir du moment pour une sance étaient peu considérables, l'illustration de son nom était telle que les barons de Dalberg eussent cru déroger en acceptant un titre de comte. La situation de la seigneurie d'Herrnshein, dans le voisinage de l'électorat de Mayence, lui donnait un moyen d'influence dans son chapitre. Aussi depuis longues années avait-il été habituel dans cette famille de conserver plusieurs de ses membres dans les dignités du chapitre. Au moment de la naissance d'Emmerick Dalberg, son oncle Charles-Théodore remplissait les fonctions de vicaire général de l'archevêché de Mayence, de statlhalter d'Erfurt, et plusieurs autres de ses parents faisaient partie de son chapitre noble. Dès l'âge de sept ans, il y reçut lui-même une prébende sous le titre de chanoine domicellaire, sorte de bénéfices réservés aux grandes familles, et auxquels renonçaient plus tard ceux qui, à l'âge canonique, ne voulaient pas embrasser l'état ecclésiastique. Le jeune bénéficier comprit de bonne heure son peu de vocation pour

Vocation arrêtée, et sollicita de ses parents la per-
mission d'entrer au service militaire, qui ne con-
venait ni à ses goûts, ni à sa faible complexion.
Une réponse pleine de sagesse de son oncle dissipa
cette ivresse temporaire. Cette lettre, du 16 février
1793, mérite d'être conservée : « Mon cher ne-
« veu, je suis persuadé que vous conviendrez
« vous-même que le choix d'un état est l'occupa-
<«<tion la plus importante de la vie, et il n'est
« pas nécessaire que mon amitié vous conjure
« de vous examiner sérieusement sur la pureté de
«vos motifs. Si vous êtes intimement convaincu
« que c'est un devoir sacré pour vous, dans ce mo
«ment-ci, de vous dévouer pour le salut de la
«patrie, en embrassant l'état militaire, suivez
« cette voix de la conscience. Mais si vous scrutez
« les replis de votre cœur, et que vous trouviez
« que le désir d'essayer vos forces, désir si naturel
« à tous les jeunes gens, le désir d'éviter une
« étude fastidiense, une sorte d'inquiétude enfin,

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• influe sur cette inclination, alors examinez, à ■ l'aide de votre bon sens, si souvent judicieux, « s'il est digne d'un honnête homme de choisir, e par goût et par fantaisie, un état qui vous met a dans la nécessité d'étudier et de pratiquer l'art du meurtre et du carnage, art qui ne peut deve« nir légitime et respectable que lorsqu'il est dicté « par l'austère devoir. Votre penchant, que vous « dites irrésistible, n'est pas, en pareil cas, un « motif qui, selon moi, puisse justifier cette dé« marche. Les ames faibles sont dominées par « leur penchant : les âmes fortes en triomphent, « et se conduisent d'après leur conviction; la raia son et le devoir sont les seuls guides qu'elles « écoutent. Tant de triomphes que vous avez remportés sur vous-même m'ont convaincu que • vous avez l'âme forte, et bien plus forte que je « ne l'avais à votre âge. Tels sont mes avis, mon « bon ami, pesez-les vous-même, et décidez-vous d'après votre seule conviction... » Ces sages observations produisirent leur effet, et Dalberg continua ses études à Gættingue pendant les années 1793 et 94. On voit même par la correspondance qu'il eut dans ces deux années avec son ancien précepteur Ockart, qui avait entrepris une histoire de la famille Dalberg, que déjà il avait acquis sur l'histoire moderne des notions précises et claires. A la clôture de ses cours universitaires, il vint passer une année à Manheim dans le sein de sa famille; mais les événements de la guerre l'obligèrent bientôt à en sortir. Les armées françaises y entrèrent le 20 septembre 1795, et ne Févacuèrent qu'au 21 novembre après un bombardement. Le baron Dalberg se rendit à Ratisbonne où siégeait la diète germanique, afin d'y travailler dans la chancellerie de l'empire. Il fut attaché aux bureaux du baron de Hügel, ministre de l'empereur, et ne quitta cette ville que lorsque l'approche de l'armée française, commandée par Jourdan, força la diète et la chancellerie impériale à l'évacuer. Interrompu ainsi, après neuf mois, dans des travaux qui lui avaient mérité l'approbation du baron de Hügel, Dalberg consacra le reste de cette année à visiter quelques parents à Wurzbourg, à Gaisback, à Diesentheil, à Carlsbad ou à Prague; et il passa l'hiver à Vienne. Thugut venait d'être nommé premier ministre ; et il avait, pour conseiller et pour ami, l'ancien secrétaire de Mirabeau, Pellenc, avec lequel il s'était lié, lorsqu'il fut chargé par la reine Marie-Antoinette d'amener à fin, par l'intermédiaire du comte de La Marck, la négociation entamée par la cour avec Mirabeau. Impatient d'activité et voulant sortir de la foule des spectateurs impassibles, Dalberg pria Pellenc de lui rédiger pour Thugut une note dans laquelle il manifestait son désir de se frayer une voie honorable au service de l'empire, en suivant quelqu'une des légations impériales ou même en travaillant dans les bureaux du ministre. « J'ai senti de plus en plus, disait-il dans cette note, a que la monarchie autrichienne ne devait pas X.

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« être le lien commun de tous les vrais Allemands. « C'est dans ces provinces que ma famille cherche « à placer une partie de sa fortune, et déjà l'un « des serviteurs de Sa Majesté par mes désirs, << j'aurai bientôt le bonheur d'être son sujet par « mon choix. » Thugut lui donna du travail dans ses bureaux, et c'est là qu'il put s'initier en peu de temps aux secrets ressorts et à la persévérance des moyens de la politique autrichienne. Mais un 1797, fut l'expulsion du ministre Thugut. Dalberg des articles des préliminaires de Léoben, en avril resta encore quelques mois à Vienne, et il allait accompagner au congrès de Rastadt le commissaire impérial, Lehrbach, un de ses oncles, lorsqu'une grave maladie le retint à Vienne. Son oncle sés, et aussitôt sa convalescence il l'envoya à le coadjuteur lui rendit les soins les plus empresManheim, dans sa famille. Son père l'appelait vivement près de lui. Le 28 décembre 1797, le receséquestre sur leurs propriétés de famille de ce veur français établi à Worms avait fait mettre le côté du Rhin, par application des lois sur l'émigration, bien qu'en vertu de son emploi de président des appels de la cour palatine, Dalberg résidât depuis vingt-quatre ans à Manheim. Une prede cette ville, le séquestre avait été levé aussitôt mière fois, en 1795, à l'époque de la capitulation que mis; mais l'abandon de la rive gauche du Rhin à la France venait d'être consenti par l'Autriche et la Prusse, et la députation de l'empire le sanctionna le 1er mars 1798. Il importait beaucoup aux intérêts de la famille Dalberg de ne pas se compromettre avec le gouvernement français sous la domination duquel ses terres étaient placées. Dalberg fut donc forcé de renoncer à l'expectative de s'attacher au service impérial, et resta à Manheim près de ses parents, occupé de la culture d'une terre que son père lui remit entre les mains. la France, il voulut du moins prouver la part qu'il Au moment où éclata la seconde coalition contre prenait aux affaires allemandes et écrivit des Considérations sur le projet d'une alliance entre l'Autriche et la Suisse. Il venait de publier la même année à Hambourg une brochure en faveur épigraphe : Res est sacra miser. Ce fut seulement du droit d'asile dû aux émigrés français avec cette sur la fin de cette année (1799), qu'il entra définitivement dans la pratique des affaires publiques. A la mort de Charles-Théodore, le 16 février, le possession des électorats de Bavière et du Palatinat. duc Maximilien de Deux-Ponts avait été mis en Il chercha aussitôt à réparer le désordre introduit les branches du gouvernement, et voulut à la fois par son trop magnifique prédécesseur dans toutes réformer les finances, le clergé, la justice et l'adet Dalberg y entra le 16 mai en qualité de conministration. Un commissariat général fut formé, seiller. Malgré les ménagements dus aux intérêts de sa famille dont la plupart des propriétés situées qu'au 3 février 1802, Dalberg ne négligeait ausur la rive gauche restèrent sous le séquestre jus

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