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MONTMIRAIL (CHARLES-FRANÇOIS-CÉSAR LE TELLIER. marquis DE), né en 1734, laissa, dès sa plus tendre jeunesse, apercevoir un caractère aimable, et des dispositions heureuses, qui lui concilièrent l'estime et la confiance de ses maîtres, comme de ses condisciples. Tacite et Polybe étaient ses auteurs favoris. La physique et l'histoire naturelle eurent des attraits pour lui. Il fit sa première campagne en 1757, en qualité d'aidede-camp du maréchal d'Estrées, son oncle; sa conduite et son intelligence donnèrent de lui une bonne opinion dans l'armée. Il montra des talents et de la prudence dans les négociations secrètes et délicates dont il fut chargé pendant cette campagne. II fit celle de 1761, à la tête de son régiment des carabiniers, lorsque son oncle reprit le commandement des troupes. Le marquis de Montmirail fut nommé brigadier des armées du roi, en 1762, et plus tard colonel des Cent-Suisses sur la démission du marquis de Courtanvaux son père. Admis à l'académie des sciences en 1761, il en devint président en 1763. Il s'était fait distinguer à la cour par sa douceur, par la régularité de ses mœurs, par son respect pour la religion, par son amour du travail. Il mourut en 1764. Son Eloge historique, mis à la tête du dixième volume des Mélanges inté ressants et curieux, par Surgy, a été imprimé séparément, Paris, 1766, in-8°.. avec son portrait. T-D.

tures, des auteurs hardis ont voulu percer la nuit des temps, et faire remonter son existence au temps de la fondation de la monarchie, et même plus haut: les uns leur donnent pour auteur Lisoic, un des plus puissants seigneurs de France, qui reçut le baptême avec Clovis; et les autres, Lisbius ou Lisbieus (1), qui exerça l'hospitalité envers saint Denys, fut converti par l'apôtre au christianisme, et partagea avec lui la palme du martyre. Ces traditions prouvent l'antiquité de la maison de Montmorenci; mais elles ne peuvent être justifiées par aucun titre. Ce n'est que dans le dixième siècle, que les membres des familles adoptèrent un nom commun: jusqu'alors ils n'étaient distingués que par des noms propres ou de baptême. Audelà de cette époque, il n'existe ni chartes, ni diplomes. Mais l'incertitude cesse sur la maison de Montmorenci, vers l'an 950. On voit alors un Bouchard, sire de Montmorenci, se distinguer dans les armées françaises; et depuis cette époque la filiation de ses descendants est authentiquement prouvée sans aucune interruption. La puissance de ce Bouchard, qui se qualifiait, ainsi que le firent ses descendants, du titre de Sire de Montmorenci, par la grace de Dieu, porte à croire qu'elle était pour lui l'héritage d'une longue suite d'aïeux. Voilà ce qui fait, de la maison dont il s'agit, une des plus anciennes de l'Europe. Cette antiquité ne serait pour elle qu'une gloire médiocre, si depuis ces temps reculés elle n'avait été relevée par les alliances les plus

MONTMORENCI (MATTHIEU Ier. DE), n'est pas le premier personnage connu de son illustre famille ; mais c'est le premier sur lequel l'his toire donne quelques détails certains. La grandeur de la maison de Montmorenci a fait rechercher son origine. Appuyés sur de simples conjec- la vérité de la conjecture,

(1) La ressemblance des noms de Lisoie et de Lisbius, dont l'un semble être la traduction de l'autre, altère encore le peu de foi qu'on voudrait ajouter à

brillantes, par l'exercice des charges les plus importantes de l'état, par de grands talents, des vertus éclatantes, et des services éminents rendus aux rois et à la patrie. C'est cette véritable grandeur, attachée pendant tant de siècles à cette famille, qui fit dire à Henri IV, que si la maison de Bourbon venait à périr en France, nulle n'était plus digne de la remplacer que celle de Montmorenci. La charge de connétable, possédée six fois par des Montmorenci, le fut d'abord par Albéric, qui vivait en 1060. Avant lui, cet office répondait à sa dénomination (comes stabuli); ce n'était qu'une charge de la maison du prince, et à peu-près ce qu'est aujourd'hui celle de grand-écuyer: Albéric en fit un office de la couronne, et un office militaire; cette charge fut alors la première de la maison du roi, lors qu'il n'y eut plus de sénéchaux. Thibaut de Montmorenci, neveu d'Albéric, devint connétable vers 1090. Il brillait à la cour de Philippe Ier.: de même que son oncle, il signait tous les actes du gouvernement, et était traité de noble prince, prince du royaume. Tels étaient déjà l'ilJustration et le pouvoir de la maison de Montmorenci, lorsque, vers 1130, Matthieu, petit neveu de Thibaut, reçut la charge de connetable. Cette dignité, l'immense fortune de Matthieu, sa première alliance avec Aline, fille naturelle d'Henri Ier., roi d'Angleterre, et surtout son second mariage avec Alix ou Adelaïde de Savoie, le rendirent le plus puissant seigneur de son temps. Alix était veuve de Louisle-Gros et mère du roi Louis VII, dit le Jeune: ce dernier prince consentit que sa mère épousât le conné table, de l'avis des états-généraux,

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qui déclarèrent qu'il fallait faire ce mariage, pour procurer au roi mineur l'appui des Montmorenci. Louis-le Jeune avait résolu d'entreprendre une croisade contre les infidèles lorsqu'il quitta la France (1147), il laissa la régence du royaume à Suger, et à Raoul, comte de Vermandois. Matthieu de Montmorenci, depuis qu'il était devenu beau-père du roi, avait toute la confiance de ce prince, toujours tendrement attaché à sa mère. Il est étonnant que, revêtu d'une charge importante et devenue militaire, il n'ait pas suivi le roi dans sa croisade: resté en France, il partagea l'administration avec Suger et le comte de Vermandois. Matthieu mourut comblé d'honneurs et de richesses, en 1160, laissant plusieurs enfants de sa première femme, et une seule fille de la seconde. D-IS. MONTMORENCI (MATTHIEU II DE), surnommé le Grand et le GrandConnétable, était petit fils de Matthieu Ier. Philippe Auguste avait cité devant la cour des pairs de France, Jean-sans-Terre, devenu roi d'Angleterre, pour le meurtre d'Artus, légitime héritier du trône. D'après le refus de Jean, il marcha sur la Normandie, dont il avait fait prononcer la confiscation, ainsi que celle des autres biens du roi d'Angleterre, qui étaient situés en France. Mat thieu suivit Philippe - Auguste, et signala sa valeur, principalement au siége de Château-Gaillard, placeforte près des Andelys. Toute la Normandie fut bientôt conquise, et réunie à la couronne de France (1203), après en avoir été séparée près de trois cents ans. Matthieu prit part à toutes les guerres, jusqu'en 1214, qu'eut lieu la célèbre bataille de Bouvines : la victoire fut

due en grande partie à Montmorenci, qui, dans l'action, enleva de sa main quatre étendards de l'armée imperiale (1). La croisade contre les Albigeois et le comte de Toulouse, commencée en 1206, durait toujours: Matthieu se réunit aux croisés en 1215, et trouva plus d'une occasion de signaler son courage. En 1218, il reçut la charge de connétable; et rehaussant l'éclat de cette dignité de tout celui dont il s'était déjà entouré, il en fit bientôt la première de l'état. Ses talents militaires lui avaient valu plus d'une fois le commandement des armées : il joignit pour toujours ce coinmandement au titre de connétable. Cette dernière charge l'enrichit encore des dépouilles de celle de sénéchal, supprimée en 1191. Matthieu jouit de la plus grande autorité sous le règne de Louis VIII. II seconda ce prince dans le projet qu'il avait de chasser de France les Anglais; il commanda, sous le roi, l'année qui assiégea et prit Niort, Saint-Jean-d'Angeli, et qui s'empara du Limousin, du Périgord, de l'Aunis et de La Rochelle. Louis VIII ayant abandonné cette entreprise pour combattre les Albigeois, Matthieu marcha contre eux, et les combattit jusqu'à l'accommodement qui eut lieu en 1226. Louis VIII n'existait déjà plus à l'approche d'une mort prématurée, ce monarque, plein de confiance dans les talents et la fidélité de Montmorenci, lui avait instamment recommandé son fils encore en Las âge. Matthieu jura de soutenir

(1) Ces étendards étaient ornés de l'aigle de l'empire. Le roi permit à Mathieu d'ajouter ses armories quatre aigles ou alérions, pour conserver le souvenir de cette belle action. Les armes de la maison de Montmorenci portaient dejà douze aigles, à l'oc casion de douze baumières impériales enlevées par uo des ancêtres de Matthien.

l'enfant de son roi, et de verser pour lui, s'il le fallait, jusqu'à la dernière goutte de son sang. Il eut bientôt occasion d'accomplir son serment. Les grands vassaux de la couronne crurent pouvoir profiter de la minorité du roi et de la régence d'une femme. Mais l'intrépide Blanche de Castille, aidée des conseils du légat du pape et surtout de l'épée de Montmorcuci, les réduisit à l'obéissance, et conserva, dans toute son intégrité, le pouvoir de son fils. Matthieu commandait l'armée qui s'empara de Bélesme dans le Perche, sous les yeux du roi, en 1228. L'année suivante, il poursuivit l'armée des rebelles réunis, les battit et les força de se soumettre. Il n'eut pas le temps de voir se consolider son ouvrage : il mourut, justement regretté de son maître, le 24 novembre 1230. Matthieu II, mérita le surnom de Grand par son courage, par son habileté dans les affaires et plus encore par ses vertus. On doit rappeler une preuve eclatante de son désintéressement et de sou humanité. Possesseur de biens

immenses, il affranchit, moyennant une faible redevance, tous ses vassaux, des corvées et autres impositions qu'il avait droit d'exiger d'eux. Le connétable de Montmorenci ne prenait que le titre de baron (1); et par ses alliances et celles de ses ancêtres, il se trouvait grand-oncle, oncle, beau-frère, neveu, petit-fils de deux empereurs, de six rois, et allié de tous les souverains de l'Europe. Cette

(1) Plus tard ses descendants prirent les titres de premier chrétien, premier haron de France. Celui de premier chretien de France, ne peut venir que de la tradition dont il a éte parlé au commencemeul de l'article précédent; I autre a plus de fondement. Ce fut Jacques de Montmorenci, qui le prit, en 139e. et seulement après avoir prouvé au parlement, qu'il était le plus ancien baron du royaume. Ce titre est donné aux Montmorenci dans plusieurs ordonnances de nos ruis.

parenté est l'exemple le plus frappant de l'illustration de la maison de Montmorenci, qui ne le cède qu'aux maisons souveraines, et qui a donné à la France six connétables, onze maréchaux, quatre amiraux, des grands-maîtres, des grands-chambellans, etc. Matthieu II fut marié trois fois, et eut beaucoup d'enfants: de sa troisième femme, héritière de la maison de Laval, il eut les chefs de la branche des Montmorenci-La val, encore existante aujourd'hui: Jeanne, qui était de cette branche et petite-fille de Matthieu, épousa Louis de Bourbon, trisaïeul d'Henri IV; ce qui fait descendre du grand connétable presque tous les souverains de l'Europe.

D-IS. MONTMORENCI ( ANNE DE), connétable de France, naquità Chantilli, en 1493: la reine Anne de Bretagne, femme de Louis XII, fut sa marraine, et lui donna son nom. Plus âgé d'un an seulement que le comte d'Angoulème, il se lia étroitement avec ce prince qui, étant monté sur le trône, fut heureux de trouver un héros dans l'ami de son enfance. Telle fut l'origine de l'immense autorité dont Montmorenci jouit si longtemps sous François fer. ; elle ne pouvait que s'accroître encore par l'éclat de ses services, et par l'ardente ambition qui le caractérisait. Il commença le métier des armes en Italie: il vit, à Ravenne, Gaston de Foix trouver ensemble la victoire et la mort; exemple qu'il devait retracer lui-même soixante ans après. On ne dira rien de ses premières campagnes, sinon qu'il sut faire admirer sa valeur au milieu de tant de personnages dont la bravoure allait jusqu'à l'audace. Il eut l'honneur de seconder notre Bayard dans sa belle defense de Mézières, en 1521; ce

fut là qu'on le vit renouveler un trait de l'ancienne chevalerie. Un des premiers officiers de l'armée imperiale, le comte d'Egmont, avait envoyé un défi au plus brave de la garnison; c'était appeler Bayard ou Montmorenci : celui-ci se présente, la lance au poing, attaque son ennemi, et rentre vainqueur dans lá place. Nommé maréchal de France, en 1522, peu de temps après avoir rempli une mission politique auprès du roid'Angleterre, Montmorenci dut cette haute dignité à l'action la plus courageuse. Les Suisses qui servaient sous Lautrec, en Italie, mécontents de ne point recevoir leur paye, déclarèrent qu'ils allaient se retirer, à moins qu'on ne les menât contre l'ennemi, qui était retranché dans l'imprenable château de la Bicoque, près de Milan. Montmorenci, étant leur colonel-général, ne négligea rien pour vaincre leur opiniâtreté. Contraint de leur céder, il voulut, du moins, se mettre à leur tête, attaqua le château; et, après des prodiges de valeur, il tomba couvert de blessures parmi la multitude des mourants. Retenu à Lyon, par le besoin de se remettre des suites de ce combat, il y apprend que le connetable de Bourbon, précipité dans la rebellion, vient d'entrer en Provence, et même d'assiéger Marseille: il marche à l'instant contre lui, le force de lever le siége, et bientôt d'évacuer toute la province. En 1523, Montmorenci avait fortement combattu, dans le conseil du roi, le projet d'une nouvelle expédition sur le Milanez; mais l'amiral Bonivet, favori de François Ier., fit décider cette guerre qui devait être si funeste: les malheurs de cette entreprise justifièrent l'avis du maréchal. Á la journée de Pavie ( 25

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février 1525), une commission l'avait éloigné du conseil; la bataille était déjà perdue, lorsqu'il accourut dans l'espoir de faire changer la fortune ses efforts furent infructueux, et il partagea la captivité du roi avec le sire de la Rochepot, son frère, et Gui de Montmorenci-Laval, seigneur de Lezay, son proche parent. François Ier. voulut d'abord l'avoir auprès de lui pour compagnon de prison: mais il sut persuader à ce prince qu'il le servirait plus utilement en France; et ayant traité de sa rançon, il revint plein d'impatience de voir tomber aussi les fers de son roi. On sait tous les obstacles que l'heureux Charles-Quint mit à la liberté de son rival; Montmorenci contribua puissamment à les surmonter le gouvernement du Languedoc, la charge de grand-maître de France, et l'administration des affaires, en furent la récompense. Jaloux d'opposer des ennemis à l'empereur, il conclut ensuite d'importantes négociations avec le roi d'Angleterre et le pape jusqu'en 1536, où il reprit l'épée: alors Charles-Quint, enflé de l'étendue de sa domination et du bonheur inoui de ses armes, ne respirait que la conquête de la France, et tout semblait concourir pour la lui assurer. François Ier. se voyait près d'être enveloppé par trois armées formidables; et ses moyens de défense étaient bien au-dessous de ses dangers: Montmorenci se jette sur la Provence, que l'empereur, en personne, venait ravager à la tête de 60,000 hommes; et par des mancuvres savantes, évitant toujours une bataille dont la perte eût entraîné celle de la monarchie, il force l'en nemi à une retraite tellement malheu reuse, que Charies y perd plus du tiers de son armée, et ses meilleurs

généraux, enlevés par le fer et les maladies (V. LEVE). Montmorenci, dont l'habile temporisation avait excité souvent les murmures d'une bouillante noblesse, en reçut dans cette occasion les plus magnifiques éloges : les noms de sage cunctateur, de Fabius français. lui furent prodigués. Rappelé de la Picardie, qu'il venait de préserver aussi des impériaux, il passe en Piémont avec une activité incroyable, et défait l'ennemi à Suze. Il allait envahir le Milanez, qui avait déjà coûté tant de sang à la France, quand CharlesQuint arrêta ses succès par des négociations. Le 10 février 1538, il fut nommé connétable; c'était la cinquième fois que l'épéede France était confiée à cette famille: une si haute dignité, jointe à celles de grand-maitre et de chef des conseils, fit de cct illustre capitaine comme l'arbitre suprême de toutes les affaires; aussi tous les monarques de la chrétienté lui écrivaient-ils, le consultant et le comblant de présents, à l'égal du roi lui-même. On lit, dans Brantôme, que le grand Soliman et le fameux Barberousse avaient coutume de lui envoyer tout ce que leurs états offraient de plus curieux et de plus rare. Sa puissance était trop haute pour être durable : l'austérité de ses mœurs et la rudesse de ses manières lui avaient suscité autant d'ennemis que l'éclat de ses prospérités. On attribue généralement sa chute au conseil qu'il donna de laisser passer librement Charles-Quint en France, pour aller châtier les Gantois révoltés; mais la générosité chevaleresque de François Ier, est trop connue pour qu'on puisse douter qu'en recevant ainsi son rival et son ennemi, ce prince ne fit autre chose que suivre son propre sentiment. De

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