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les honnêtes gens. On le priva de ses appointements de conseiller-d'état; et on lui refusa même le remboursement de 40 mille francs d'arrérages. Il obtint une audience de Buonapar te; et l'explication étant devenue fort vive, Moreau lui dit avec gravité: « Je ne vous demande point » de récompenser ma probite; je >> demande seulement qu'elle soit » tolérée ne craignez rien; cette >> maladie n'est pas contagieuse. La saillie ne déplut point : mais le sort de Moreau ne fut pas amélioré; et bientôt, réduit aux plus dures né cessités, il se vit contraint de vendre son argenterie, sa montre, ses livres les plus précieux, et même une partie de son linge. Pendant six années, il languit dans cette indigence, et ne subsista que par les bienfaits de Mme. Buonaparte, sa parente. En 1812, cependant, on lui accorda une faible pension, qui suffisait à peine aux besoins de sa maison, et qu'il conserva jusqu'à sa mort. Il se consolait de ses adversités dans son cabinet d'étude, où il travaillait, pendant dix heures chaque jour, à la rédaction des ouvrages qu'il a laissés en manuscrit, particulièrement aux Mémoires de sa vie; travail d'un grand intérêt, parce que, dans ce cadre, il a fait entrer l'histoire politique et littéraire de l'époque où il a véen, des détails intéressants sur un grand nombre de personnages contemporains, et enfin la relation de faits curieux, observés pendant ses voyages. Il ne quittait son cabinet que pour se rendre très-exactement aux séances des sociétés savantes et littéraires dont il était membre, et où il était sûr de rencontrer d'anciens amis. Il avait contracté des dettes, pendant sa longue disgrace; et l'impossibilité de les acquitter

troublait son repos. Le roi, dont Moreau avait eu l'honneur d'être connu, avant la révolution, et qui lui savait gré du zèle avec lequel il avait servi Louis XVI en 1789, fut informé de sa mauvaise fortune: il daigna le faire appeler, en 1817; et, après l'avoir comblé de bontés, lui fit remettre quinze mille francs. Cette somme suffit pour apaiser ses créanciers, et pour répandre quelque aisance dans sa famille. Tant d'adversites avaient affaibli sa santé. Il mourut le 28 janvier 1819, âgé de soixante-neuf ans. Son Éloge fut prononcé sur sa tombe, par l'auteur de cet article. Il a été imprimé par l'ordre de la société d'agriculture, dont Moreau était membre. M. Silvestre, secrétaire perpétuel de cette compagnie, y lut, dans la même année, un Eloge historique de Moreau. Voici la liste de ses principaux ouvrages: I. Lois et constitutions des colonies françaises de l'Amérique-sous-leVent, de 1550 à 1785, 6 vol. in-42., Paris, 1784-1790. Louis XVI ordonna qu'un exemplaire de cet ouvrage serait déposé dans chaque bureau d'administration et dans chaque greffe des colonies américaines : il est devenu très-rare. II. Description de la partie espagnole de Saint-Domingue, 2 vol. in-8°., Philadelphie, 1796. III. Idée générale ou abrégée des sciences et des arts, à l'usage de la jeunesse, in-12, ibid., 1795. Ce livre élémentaire, imité de celui que Formey avait publié en 1754, est infiniment supérieur à son modele; il a été traduit en anglais, et adopté, comme classique, dans les colleges des États-Unis. IV. Relation de l'ambassade de la compagnie des Indes-Orientales hollandaises, à la Chine, rédigée par Van-Braam, traduite en français,

vol. in-4°., ibidem, 1796-1797. a traduction de Moreau a été traluite en anglais et publiée à Lonires. Le même ouvrage a ensuite été reimprimé à Paris, en français. V. Description de la partie française le la colonie de Saint-Domingue, 2 vol. in-4°., Philadelphie, 1797 798. Cet ouvrage, ainsi que celui qui renferme la description de la partie espagnole, contient des notions étendues et importantes sur l'agriculture des Antilles, sur l'industrie et le commerce, sur l'histoire physique et naturelle, sur les usages anciens et modernes des peuples de ces contrées. VI. De la danse, in-12, ibid., 1797, et Parme, Bodoni, 1801, in-16. L'auteur, dans ce morceau écrit avec beaucoup de grâce et de feu, montre l'analogie qui existe entre les danses coloniales et celles des Maures, des Africains, et surtout celles des Grecs. VII. Discours sur l'utilité du Musée de Paris, prononcé le jour de l'inauguration de cette société, en 1784, in4°., Parme, 1805. VIII. Discours sur les assemblées publiques littéraires, prononcé au Museum de Paris, en 1785, in-4°., Parme, 1805. Les principaux manuscrits qu'a laissés Moreau de Saint-Méry, sont: 1o. Histoire générale des Antilles françaises. Ce manuscrit, susceptible de former plusieurs volnmes, était son ouvrage de prédilection; il a travaillé à le perfectionner jusqu'à ses derniers moments. Il est rempli de faits curieux et ignorés, tant historiques que biographiques, et particuliers aux mœurs et à l'origine des premiers naturels. - 2o. Répertoire de notions coloniales. Celui-ci doit former aussi plusieurs volumes; il est entièrement destiné à recueillir des anecdotes et des faits

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historiques sur les premiers fondateurs des Colonies, et sur les indigènes, Indiens et Caraïbes: il renferme les lois coloniales inédites, dont la rédaction lui avait été confiée par le gouvernement, d'après ses représentations sur divers abus. 30. Description de la Jamaïque. 4°. Histoire de PortoRico. 5o. Observations sur le climat, l'histoire naturelle, les mœurs et le commerce des Etats Unis d'Amérique. -6o. Matériaux d'un traité général sur les cultures coloniales. - 7o. Histoire des états de Parme, Plaisance et Guastalla; cet ouvrage renferme, sur cette partie de l'Italie, des détails fort intéressants, relativement aux mœurs et à la politique.—8°. La Vie de l'auteur, écrite par lui-même. Moreau de Saint-Méry a traduit, sur le manuscrit espagnol de D. F. Azara, l'Histoire naturelle des quadrupèdes du Paraguay, 2 vol. in-8°., Paris, 1800. Le traducteur y ajouta un grand nombre de notes instructives; et son travail fut approuvé par l'Institut. Cet écrivain a publié un grand nombre d'articles historiques, littéraires et scientifiques, et de Mémoires, soit séparément, soit dans différents recueils. Désessarts a recueilli plusieurs de ses factums dans le Journal des causes célèbres. F-R.

MOREL (EUSTACHE), dit DESCHAMPS, né en Flandre, fut châtelain de Fismes, bailli de Senlis, écuyer-huissier-d'armes de Charles VI, et figure parmi les poètes français qui, dans le quatorzième siècle, obtinrent le plus de célébrité. Plus jeune que Jean Froissart, qui eut autant de réputation pour ses vers que pour sa Chronique, il était plus âgé que Charles d'Orléans et Alain

Chartier, dont les poésies ont conservé jusqu'à ce jour quelque réputation. Morel était aussi contemporain de Sohier et de Guillaume de Machault, poète et musicien. L'auteur du Songe du vieil pélerin (1), après avoir conseillé à Charles VI de s'abstenir des lectures dangereuses ou frivoles, ajoute: « Tu peux bien lire et >> ouir aussi les dictiez vertueux de » ton serviteur et officier Eustache >> Morel. » Il n'est pas facile de juger jusqu'à quel point cet éloge était fondé, les poésies de Morel n'ayant point été imprimées. Le recueil de ses OEuvres est conservé parmi les manuscrits de la bibliothèque royale, sous le n°. 7219. On y trouve des Ballades, des Chants royaux, des Farces, des Moralités, des Chansons balladées, des Lais, des Virelais, des Rondeaux, et des écrits en prose, tels qu'une Complainte en latin, sur le schisme de Pierre de Lune ( datée du 13 avril 1393); il contient aussi plusieurs morceaux intéressants pour l'Histoire de France, depuis 1350 jusqu'en 1420; des Lettres missibles, des Traitiez, Dicts, Supplications, Commissions, etc. Le principal ouvrage de Morel a pour titre : Le Mirouer du mariage. L'auteur peint dans cette pièce, d'une manière plaisante, et qui, dans le quinzième siècle, pouvait paraître ingénieuse, les embarras, périls et traverses du mariage. Les Anglais, maîtres, à cette époque, d'une partie de la France, sont fréquemment, dans les poésies de Morel, l'objet de sa haine et de ses imprécations. II va jusqu'à exprimer dans une ballade, le vœu que l'Angleterre soit détruite, et que les générations futures

(1) L'abbé Lebeuf a donné une Notice curieuse de

eet ouvrage.

apprennent seulement par ses ruines qu'elle avait existé. Mais malgré ces fureurs patriotiques, et nonobstant l'éloge que l'auteur du Songe du vieil pelerin fait des OEuvres d'Eus tache Morel, cet écrivain n'eût probablement point obtenn un article dans la Biographie universelle, s'il n'était pas regardé comme l'inventeur de la Chanson à boire. A ce titre, assez important quoique léger, son nom mérite d'être conserve. V-VE.

MOREL (JEAN), seigneur de Griguy, né à Embrun en 1511, fut le plus fidèle ami d'Érasme, dont il avait été le disciple, et auquel il ferma les yeux à Bile. Après avoir voyagé en Italie, où il s'était acquis l'affection des gens de lettres, il revint à Paris. Catherine de Médicis lui confia l'éducation de Henri d'Augoulême, fils naturel de Henri 11. It devint maitre d'hôtel ordinaire de la maison du roi, et mourut en 1581, regretté de tous les gens de lettres, qui s'empressèrent de répandre des fleurs sur son tombeau. Mar quis, principal du college Bertrand, recueillit, en 1583, les vers grecs, latins et français dont ils honorèrent sa mémoire; ils forment un volume sous le titre de Royal mausolée. Joachim Dubellay, son ami, fit imprimer ses ouvrages. L'amour des lettres, qui avait formé leur liaison, fut héréditaire même pour les filles dans la famille des Morel. Antoinette de Loynes, femme de Jean Morel, et leurs trois filles, Camille, Lucrèce et Diane, faisaient des vers grecs et latins. Camille surtout fut un prodige d'érudition outre les langues anciennes qu'elle savait très-bien, clie parlait facilement l'espagnol et l'italien. Elle composa plusieurs poèmes, et fit, sur la mort de son père, de

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venu aveugle sur la fin de sa vie, une epigramme grecque, admirée par les hellénistes du temps. T-D.

MOREL (JOSEPH), surnommé le Prince, né à Arbois, dans le seizième siècle, s'était fait la réputation d'un bon officier, dans les guerres qui désolèrent à cette époque le comté de Bourgogne. Henri IV, occupé à combattre les Espagnols, refusa de reconnaître la neutralité du comté, et donna l'ordre à Biron de pénétrer dans cette province. A l'approche des Français, le capitaine Morel se retira dans Arbois, et en fit fermer les portes. La ville, n'étant revêtue que d'une simple muraille, sans aucune fortification extérieure, ne pouvait opposer une longue résistance à une armée victorieuse; mais Morel avait l'espoir d'obtenir des conditions favo rables pour ses concitoyens. Cependant l'armée de Biron, forte de 25,000 hommes, était arrêtée de puis trois jours devant les murs d'Arbois. Le quatrième jour, le canon des assiégeants ayant renversé une partie des murailles, Morel fut pris sur la brèche, qu'il défendait vaillamment, et conduit à Biron: l'inflexible général lui reprocha, dans les termes les plus durs, d'avoir contrevenu aux lois de la guerre en se défendant dans une place non tenable, et le fit pendre, le 7 août 1595, a un tilleul, qu'on voit encore à l'entrée de la promenade d'Arbois, et qui est devenu un objet de vénération pour les habitants. Henri IV sauva cette malheureuse ville, que Biron voulait brûler pour la punir de sa réistance. Après le départ des Franpais, les restes de Morel furent inaumés dans la chapelle Saint-Roch, sous une tombe, décorée d'une épi taphe latine que composa Jean Vuilemin, poète dont on a quelques

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MOREL (GUILLAUME ), savant imprimeur, était né, en 1505, au Tilleul, bourg du comté de Mortain, dans la Normandie, de parents pauvres; il trouva cependant le moyen d'étudier, et fit de rapides progrès dans les langues anciennes. Étant venu à Paris, il y donna des leçons de grec à quelques jeunes gens, et entra ensuite, comme correcteur, dans l'imprimerie de Jean Loys, connu sous le nom de Tiletan. Il publia, en 1544, un commentaire sur le traité de Cicéron, de Finibus, qu'il dédia à Jean Spifame, chancelier de l'université, et qui fut fort bien reçu du public. En 1548, il s'adjoignit à Jacq. Bogard, pour une édit. des Institutions oratoires de Quintilien, à laquelle il ajouta des notes. L'année suivante, il fut admis dans la corporation des imprimeurs de Paris, établit, près du college de Reims, un atelier, d'où sont sorties plusieurs éditions d'ouvrages grecs, estimées pour leur correction. Le célèbre Adr. Turnebe, imprimeur du roi pour la langue grecque, s'associa Morel, en 1552, et le désigna pour lui succéder dans la direction de l'imprimerie royale (V. TURNÈBE) : le brevet en fut expédié à Morel, en 1555; et il publia, depuis cette époque, plusieurs bonnes éditions, enrichies de notes

et

et de variantes tirées des meilleurs manuscrits. Il fut mal récompensé de son zèle on cessa de lui payer la pension qui lui avait été accordée, sous prétexte que les ressources de l'état étaient absorbées par les guerres civiles; et l'on apprend par une lettre de Turnèbe à Charles IX, imprimée au-devant de l'édit. des OEuvres de saint Cyprien, que Morel avait laissé sa famille dans un dénuement absolu. Ce savant et laborieux imprimeur était mort le 19 février 1564. Une de ses filles avait épousé Etienne Prevosteau, bon imprimeur: sa veuve se remaria avec Bienné (V.J. BIENNE, IV, 475).-Jean MoREL, son frère cadet, mourut, en 1559, à l'âge de vingt ans, dans la prison du Fort-l'Évêque, où il avait été cuferiné pour cause de religion. Jean s'était aussi appliqué à l'étude des langues avec succès: mais il n'a laissé aucun ouvrage (1); et ce n'est qu'à raison de son dévouement au calvinisme que Prosp. Marchand lui a donné dans son Dictionnaire un assez long article, auquel on renvoie pour les détails. Il paraît que Guill. Morel avait eu également du penchant pour les nouvelles opinions; mais qu'il y renonça, ou pour conserver son emploi, ou par la crainte des supplices. C'est à son inconstance que Henri Estienne fait allusion dans l'épitaphe satirique qu'il lui a composée; mais ce qui est réellement inconcevable, c'est qu'un homme comme Estienne ait cherché à insi

(1) C'est à tort qu'on lui attribue un ouvrage intitale: L'Ame toujours impassible dans toutes les positions de la vie, fors en une seule, qui e la grade, Pais, 1558, in-12. Cet ouvrage, sur lequel

AL. Barbier donué une note etendue dans la Table de son Diet onnaire des enonymes, peut bien moins ⚫ncore être de Jean Morel, fils de Federic II, ne le 16 novembre 1594; il faut en hercher l'aut ur parni les trois ou quatre Jean Morel, tous contempoFaius cites par Prosp. Marchand: la solution de cette sai ulte n'est d'ailleurs très-importante. pas

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nuer dans cette pièce que Morel, en abandonnant le parti de la réforme, avait beaucoup perdu de ses talents typographiques. De l'aveu de tous les connaisseurs les éditions grecques de Morel égalent en beauté et en correc tion celles de Robert Estienne, le plus savant et le plus habile imprimeur dont s'honore la France (V. Rob. ESTIENNE). La marque particulière de Morel est le théta entouré de deux serpents, avec un Amour assis au centre. On trouvera sa Vie et le Catalogue de ses éditions dans les Vitæ typogr. Paris., de Maittaire, p. 33-46. Outre les ouvrages déjà cités on a de lui: I. Des Notes sur les OEuvres de saint Denis l'arcopagite, saint Cyprien, Démosthènes, etc., l'Explication des passages les plus difficiles des Partitions oratoires de Cicéron; un Supplément à la Chronique de Carion. II. Des Traductions latines des Sentences des Pères sur le respect dû aux images, des Epitres de saint Ignace, etc. III. De græcorum verborum anomaliis commentarius, Paris, 1549, 1558, 1566; Lyon, 1560, in-8°. IV. Commentarius verborum latinorum cum græcis, gallicisque conjunctorum, ibid., 1558, in-4°. Cet ouvrage curieux et intéressant, parce qu'il contient une foule de citations d'auteurs grecs, tirées de manuscrits encore inédits de la Biblioth. du roi, a ét réimprimé plusieurs fois dans le seizième siècle et même dans le dix-septième, sous le titre de Thesaurus vocum omnium latinarum, ordine alphabetico digestarum, etc. V. Tabula compendiosa de origine, successione, etc. veterum philosophorum, Paris, in-4°.; ib., 1578; Bâle, 1580, in-8°.; inséré avec un supplement de Jér. Wolf, dans le tome x du Thesaur. antiquit. græcar.

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